Nouvel ordre social

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Le Nouvel Ordre Social (NOS), était un mouvement nationaliste-révolutionnaire suisse, actif de 1972 à 1979.

Sticker du NOS

En mai 1979, le NOS se transforme en Forces Nouvelles.

Origines

Pour un Nouvel Ordre Social.png

Le NOS est fondé en 1972 à Genève par de jeunes gens, excédés par le conformisme soixante-huitard et par le terrorisme intellectuel de la gauche. La moyenne d'âge des premiers adhérents oscille autour des seize et dix-sept ans. Ils décident de fonder un mouvement militant, en reprenant l'héritage de Georges Oltramare (1896-1960), écrivain et militant nationaliste suisse des années 1930, fondateur de l'Union Nationale. Parmi les membres fondateurs, on compte Olivier Wyssa et Gaspard Grass.

Le NOS pour la féminité


Renaissance!

Le premier périodique du mouvement est Renaissance!, sous-titré Organe officiel du Nouvel Ordre Social, qui paraît de mai 1973 à mars 1974. Huit numéros paraîtront, avec un tirage moyen de 300 à 400 exemplaires.

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Du point de vue matériel, il s'agit d'un bulletin ronéotypé. Le contenu des premiers numéros est fortement marqué par le style des jeunes activistes , qui utilisent un ton volontiers outrancier. Ainsi, le journal du Parti du Travail, La Voix ouvrière, est régulièrement parodié comme « La Voix ordurière »[1].

Le fonds des articles est consacré presque entièrement à la lutte contre le communisme en général et contre la « subversion marxiste » à l'université et dans les collèges de Genève. Il est d'ailleurs fait état de quelques bagarres lycéennes. La réflexion politique est encore peu élaborée, et l'on est dans ce que l'on pourrait décrire comme un « patriotisme réactionnaire », dans le sens où l'on est en présence de jeunes gens en révolte contre la mode gauchiste dominante, et on rejette donc violemment tout ce qui vient de la gauche, sans clairement expliquer ses motivations.

C'est seulement dans les dernières livraisons qu'on voit se développer une véritable réflexion politique. Il semble que les premiers article de Daniel Cologne, enseignant belge de littérature française installé alors à Genève, plus âgé que les fondateurs du NOS puisqu'il est né en 1946, dans le numéro 7, donnent le signe d'un saut qualitatif dans la revue. On voit désormais Renaissance! se remplir d'articles plus élaborés et de références à Charles Maurras, Robert Brasillach, Jean Anouilh et Julius Evola.

1974-1975 : la refondation

L'évolution annoncée dans les dernières livraisons de Renaissance! se confirme par la suite. Au cours de l'année 1974, on voit le NOS se transformer, dans ses positions, ses références, ses publications et son style. L'anticommunisme quelque peu grossier, le côté « réactionnaire » et le style « potache » laissent peu à peu la place à la réflexion politique et métapolitique. Comme l'annonce un dossier de présentation élaboré fin 1974, « le NOS existait jusque-là, mais il cherchait la voie à suivre ». On assiste à une sorte de refondation. Le programme et les statuts sont alors reformulés. La presse du mouvement est restructurée.

Le Huron

Le Huron, n° 1

Dans la foulée, Georges Néri, un proche du NOS[2], et le Belge Daniel Cologne vont être à l'origine d'une nouvelle initiative.

Ils estiment que le jeune mouvement est prometteur mais qu'il devrait dépasser ses limites et ses insuffisances doctrinales. Ils veulent absolument lui éviter de succomber à la tentation, courante dans les mouvements de jeunes activistes de droite, de faire du « réchauffé » ou du « néo » : néo-Oltramare, néo-Union nationale, néo-fascisme etc. Pour Néri et Cologne, le moment est venu de donner de nouvelles assises philosophiques à la Droite, en se servant notamment de René Guénon et de Julius Evola. C'est ainsi qu'ils décident de lancer un périodique qui ne soit pas un simple « bulletin militant » du mouvement, mais une véritable revue, qui ne soit pas directement liée au NOS. Cela doit lui permettre à la fois de former les jeunes militants et d'attirer un public beaucoup plus large. Ce sera Le Huron, sous-titré « périodique non conformiste ». Son nom est emprunté à une nouvelle de Voltaire[3]. Selon Daniel Cologne, l'idée est de « jeter sur le monde occidental des années 1970 un regard analogue à celui du Huron de Voltaire sur le Paris du XVIIIe siècle ».

Le Huron sort sa première livraison en novembre 1974. Huit numéros paraîtront. Il développe un style satirique et polémique, tout en s'efforçant de construire une réflexion métapolitique.

Le Huron, qui ne sera pas un organe de presse du NOS mais plutôt un « compagnon de route » intellectuel, ouvre ses colonnes à des personnalités qui ne sont pas forcément en lien avec le mouvement. Outre les articles de Néri, de Cologne et d'autres militants du NOS, Le Huron recevra des contributions bénévoles de plumes prestigieuses de la Droite intellectuelle et non conformiste francophone, comme Jean Cau, Pierre Dudan, Saint-Loup, Pierre Hofstetter, Jean Haupt, Pierre Gripari ou Olier Mordrel.

La qualité de ses articles entraînera un fait inattendu: le périodique sera lu autant en France et en Belgique qu'en Suisse romande.

Renaître

Renaître, bulletin militant - 1975

Au mois d'octobre 1975, un bulletin militant du NOS, intitulé Renaître, (une page imprimée recto-verso) est inséré, en tant que supplément, dans le numéro double 6-7 du Huron. Un programme en 22 points y est exposé.

Organisation

Février 1977, place du Molard à Genève: le NOS tient un stand permanent pour faire connaître sa nouvelle publication, Avant-Garde

En 1975, les rangs sont notamment renforcés par l'adhésion des membres du groupe Lutte du peuple, dirigé par Dominique Baettig, qui fusionne avec le NOS. En 1976, le NOS se dotera d'un Manuel du militant, qui expose les principes et les objectifs du mouvement, mais aussi les méthodes de travail et de propagande à employer (et celles à éviter), ainsi que les moyens de résister à la répression.

Le mouvement possède désormais des sections à Genève, Fribourg, Lausanne et Payerne.

Le NOS monte de nombreuses campagnes d'affichage. Il affirme sa présence dans la rue. Il tient plusieurs fois des stands permanents, où il distribue des tracts et vend ses publications, notamment à Genève et à Lausanne.

27 mai 1976: le NOS invité à s'exprimer à la télévision ! De g. à dr. : Dominique Baettig[4], Olivier Wyssa[5], une militante, Pascal Junod et Georges Lapraz[6]. En novembre 1975, la Radio-Télévision Suisse romande lance une nouvelle émission hebdomadaire, « L’antenne est à vous ». Cette émission entend donner à chaque groupement « un quart d’heure d’antenne pour s’exprimer, seul, librement, sur le ou les sujets qui le préoccupent, sur la doctrine et les idées qu’il entend défendre ». En lançant cette émission, la TSR souhaite « donner la parole à des organisations qui, moins intégrées que d’autres au jeu socio-politique de notre pays, qui ont donc moins facilement accès aux mass media ». Le 27 mai 1976, l'émission offre 15 minutes d'antenne au NOS. Les jeunes militants vont alors s'exprimer librement à l'antenne, sous le symbole de leur mouvement accroché à la paroi. Les thèmes abordés sont « Qu'est ce que le NOS ? », « La Suisse et l’Europe », « La trahison marxiste » et « Changer le système »[7].

Le Cercle Culture et Liberté

Daniel Cologne et Georges Gondinet créent aussi le C.C.L. (Cercle Culture et Liberté), qui va organiser des cycles de conférences dans un cadre plus large. D'ailleurs le CCL dépasse le cadre de la Suisse romande : des sections existent à Paris, où il est animé par Georges Gondinet, ainsi qu'à Bruxelles. C'est le CCL qui sera plus tard à l'origine de la fondation de la revue « traditionaliste-révolutionnaire » Totalité et des Editions Pardès.


En 1976, le CCL invite, à Genève, Édouard Labin, pour un exposé sur la problématique du Q.I. (quotient intellectuel). Une autre conférence est animée par le Belge Georges Hupin[8], sur le thème de « Allons-nous vers la troisième guerre mondiale ? ».

Le NOS, ennemi numéro un de la « Police de la Pensée »

Les activités et les conférences du NOS et du CCL sont souvent l'objet de menaces et d'attaques de la part de l'extrême gauche locale. Les gauchistes genevois se font une spécialité de prendre en photo les militants et les sympathisants, pour les désigner à la vindicte publique.

Jean Ziegler, la coqueluche intellectuelle de la gauche suisse d'alors, lancera des appels à empêcher par la force les réunions publiques du NOS et du CCL. Une autre star de la future bien-pensance, Jean Batou, se vantera en 2017 de n'avoir, à l'époque, manqué aucune occasion de dénoncer les membres du NOS[9].

Le 16 décembre 1976, le CCL a prévu une conférence à Genève avec Jean-Gilles Malliarakis, l'un des leaders de la mouvance solidariste française[10], sur le thème « Le nationalisme-révolutionnaire, troisième voie pour les Européens ». Des groupes trotskistes et sionistes tentent d'occuper les lieux et agressent les participants isolés. Il s'ensuit une bataille rangée entre les troupes gauchistes et le service d'ordre du NOS. La conférence aura tout de même lieu, mais après avoir été déplacée en un autre endroit de la ville. Le NOS publiera un communiqué au sujet des événements, qui sera refusé par la presse.

En mars 1977, le CCL organise une conférence avec Yves Bataille, sur le thème « Ni Washington ni Moscou ». Les groupes gauchistes locaux proclament que tout sera fait pour l'empêcher. Mais, au point de rendez-vous, seule une quinzaine de gauchistes répondront présent. Ils renoncent donc rapidement et piteusement à lancer un assaut dont l'issue n'eût certainement pas été à leur avantage.

Toujours avec la même intention de nuire à un mouvement qui dérange ses certitudes, l'extrême gauche genevoise, au printemps 1977, fait courir le bruit, relayé par le journal du Parti du Travail La Voix ouvrière, que le local du NOS recèlerait des stocks d'armes à feu. La police finira par perquisitionner et ne trouvera, bien évidemment, rien de la sorte.

Avant-garde

Avant-garde - No1 - 1977

Le NOS lance en 1977 Avant-garde, qui paraîta, à intervalles irrégulières, jusqu'en 1979. Avant-garde marque un style encore différent des précédentes publications du NOS. Sur le plan graphique et technique, la nouvelle revue montre un certain professionnalisme.

Sur le plan des idées, le NOS s'engage désormais clairement dans le courant nationaliste-révolutionnaire et européen, inspiré de Jean Thiriart, mais aussi de François Duprat, Yves Bataille et Jean-Gilles Malliarakis, dont l’influence sur les mouvements analogues italiens et français est croissante.

Le NOS adopte les positions radicalement antiaméricaines, antisionistes et tiers-mondistes, propres à ce courant partout en Europe.

Ligne politique

Contre tous les impérialismes: pour un nationalisme révolutionnaire

Le NOS ne se définit pas comme un parti, mais comme un mouvement politique jeune-européen indépendant. Sur le plan des idées, il rejette tout dogmatisme, et se réclame d'une « doctrine fille du réel ». Il se réclame du nationalisme révolutionnaire. Ses objectifs sont la création d'une Europe fédérale, puissante et unie, ainsi qu'une Suisse saine et épurée, qui puisse prendre la place qui lui revient dans la grande patrie occidentale. Le NOS dénonce les deux impérialismes qui occupent l'Europe depuis Yalta, l'impérialisme soviétique et l'impérialisme américain.

Nationalisme révolutionnaire et tiers-mondisme

Les tendances de l'époque du nationalisme révolutionnaire entraînent une évolution du NOS vers des positions radicalement tiers-mondistes, comme d'ailleurs la plupart des mouvements nationalistes-révolutionnaires de l'époque, qui tendent à identifier leur combat pour la libération de leur nation ou de l'Europe dans son ensemble avec celui des guérilleros sud-américains, palestiniens ou vietnamiens. Mais cette évolution ne s'est pas faite en un jour, et on peut la retracer à travers les publications du mouvement. Ainsi, le numéro 6 de Renaissance! contient encore des propos très hostiles envers Kadhafi et même envers l'Organisation de libération de la Palestine! En revanche, le numéro 1 d'Avant-garde (janvier-février 1977) ne tarit pas d'éloges sur le colonel libyen et la « troisième voie libyenne ». Désormais, pour le NOS, « l'alliance tactique de l'Europe avec un Tiers-monde indépendant, et particulièrement avec le monde arabe, s'impose comme une nécessité géopolitique. Nous sommes les alliés naturels de tous ceux qui luttent contre le double impérialisme russo-américain »[11].

Un « socialisme européen »

Le NOS rejette aussi bien le capitalisme libéral que le socialisme marxiste, dans lequel il voit un capitalisme d'Etat. Défendant le principe de l'intérêt général précédent l'intérêt particulier, il prône un socialisme européen, qui réaliserait une synthèse harmonieuse entre liberté d'entreprise et devoirs sociaux. Le mouvement donne une place particulière au monde ouvrier, en mettant le doit sur le décalage abyssal qui sépare les théories des groupuscules d'extrême gauche et la réalité du quotidien et des préoccupations des travailleurs. Les publications comportent une page spécifique Monde ouvrier. De même, en 1977, les militants du NOS font campagne contre le projet d’introduction de la TVA, particulièrement impopulaire dans les couches modestes de la population.

Les trois patries

En 1977, Daniel Cologne rédige la brochure Éléments pour un nouveau nationalisme. Le texte dénonce « le mythe de la troisième voie » et essaye de redéfinir la « Droite » en tant que mouvement « traditionaliste révolutionnaire ». Il appelle à un nationalisme de l’avenir, dépassant le cadre étatique national et s’intégrant « dans une Europe organique des nations organiques, où être breton ou français, basque ou espagnol, flamand ou belge, jurassien ou suisse, ne sont que des manières parmi d’autres d’être européen ». Cologne élabore le concept des « trois patries » : patrie charnelle, patrie historique, patrie idéale.

Des positions inattendues

Européen d'abord... et donc NON à Schwarzenbach !

Le 13 mars 1977, les Suisses sont appelés à se prononcer sur la Quatrième initiative populaire « contre l'emprise étrangère », lancée par James Schwarzenbach[12], figure emblématique du nationalisme suisse. Or, contrairement à tous les autres groupes et organisations nationalistes suisses de l'époque, le NOS prend position contre l'initiative et appelle les citoyens à la rejeter, car celle-ci s'en prend essentiellement aux travailleurs saisonniers européens, espagnols et italiens. En effet, pour le NOS, « notre nationalisme est européen d'abord ! »

Les statuts du NOS précisent d'ailleurs que, pour être membre du mouvement, il n'est pas nécessaire d'être Suisse, mais d'être de souche européenne.

La « Question jurassienne »

Certaines prises de position du NOS sont encore plus surprenantes. Ainsi, le numéro 4 d'Avant-garde s'ouvre sur un drapeau du canton du Jura, qui vient alors d'être créé, sous le titre « Les Béliers et nous »[13]. L'article en rapport est une déclaration de soutien au mouvement autonomiste jurassien des Béliers. Alors que ce mouvement s'est souvent signalé par son antimilitarisme et par sa proximité avec l'extrême gauche, le NOS déclare y voir « une véritable révolution contre ce qu'on peut à bon droit appeler l'immobilisme helvétique ». Il célèbre « cette victoire, fruit d'une longue marche, [...] due avant tout à l'action volontaire, militante et exemplaire de l'avant-garde consciente du mouvement jurassien : les Béliers », qui « ont su conquérir de haute lutte le droit à l'existence en tant qu'entité linguistique et culturelle » et un « mouvement qui mobilise une jeunesse comme nulle part ailleurs en Suisse, ce mouvement qui par son style se rapproche beaucoup du nationalisme révolutionnaire ».

Stratégie

La stratégie du NOS consiste à, dans un premier temps, rassembler une petite élite et la former politiquement. Cela ne peut se faire que par une sélection, qui privilégie la qualité des militants sur leur quantité. Le mouvement se montre en revanche relativement souple lors du recrutement, estimant que les opinions particulières sont susceptibles de changer avec le temps et l'expérience.

Dans un deuxième stade, en partie simultané, le mode d'action doit influencer la minorité qui détient le pouvoir (gouvernement, armée, police, information, intelligentsia, instruction publique, etc.), en y faisant peu à peu pénétrer à la fois les idées et les membre de l'organisation. Une fois ce but atteint, les masses devraient pouvoir facilement être gagnée à la cause.

Toutefois, les documents du NOS affirment que l'action ne doit pas se borner à toucher les cercles dirigeants, mais doit s'exercer à la fois par le haut et par le bas. Le NOS donne ainsi une grande importance à la « propagande à la base », pour susciter une prise de conscience politique populaire. Le mouvement veut donc agir et être présent dans tous les milieux et dans tous les domaines.

Relations extérieures

Vers une « Internationale nationaliste-révolutionnaire »

Étant donné ses perspectives européennes, le NOS développe des relations avec les autres mouvements qui « donnent le ton de la lutte de libération nationaliste contre l'occupant russo-américain et sioniste ». Les échanges avec les nationalistes-révolutionnaires italiens, anglais, allemands et français (Yves Bataille, Jean-Gilles Malliarakis) sont fréquents.

En 1976, le NOS adhère officiellement à l'organisation des Groupes nationalistes révolutionnaires de François Duprat, en tant que « section Suisse romande et Haute Savoie ».

Le NOS s'engage activement en faveur des nationaux-révolutionnaires italiens, alors en butte à une répression de grande ampleur : en 1977, plus de 3000 militants italiens sont en prison, le plus souvent pour des délits imaginaires. Fin 1977, les Suisses organisent un comité de solidarité avec Franco Freda, l'éditeur et militant italien, alors emprisonné depuis 5 ans sans preuve pour son implication supposée dans l'explosion de la Banque de l'agriculture à Milan en 1969.

Les contacts du NOS débordent même le cadre de l'Europe. Ainsi, des liens sont établis avec des groupes chiliens et mexicains (Año Cero).

Dans ses publications, le NOS appelle à soutenir la presse NR française, comme Correspondances européennes, les Cahiers du CDPU, Dimension européenne ou Jeune Garde solidariste.

Le NOS et la Nouvelle droite

Au-delà de ses liens avec cette « Internationale nationaliste-révolutionnaire », et surtout à partir de 1977, le NOS montre un intérêt croissant pour les travaux des cercles intellectuels de Nouvelle droite, qu'ils soient français, italiens ou allemands. Le NOS encourage ses militants et sympathisants à lire les revues Éléments et Nouvelle École, ainsi que la revue « traditionaliste-révolutionnaire » Totalité, fondée en 1977.

Citations

Les étudiants gauchistes face aux ouvriers, vus par le NOS. Le syntagme « marxiste-révolutionnaire » fait allusion à la rhétorique du mouvement d'extrême gauche le plus actif en Suisse romande à l'époque, la Ligue marxiste révolutionnaire (LMR) [14].
  • « Le communisme, ce n'est que le capitalisme déguisé en capitalisme d'Etat camouflé. C'est en fait le stade suprême du capitalisme, puisque, dès lors, grâce à une dictature d'Etat ultra-totalitaire, il détient le pouvoir qu'il dirigeait auparavant plus ou moins à distance. Qu'on ne vienne pas dire que ces pays ont trahi l' « idéal » marxiste: en cela, ils lui sont parfaitement fidèles. D'ailleurs, qu'est-ce que l' « idéal marxiste », sinon le même « idéal de fabrication de fer-blanc » et de porcs bien nourris que l'on retrouve de l'autre côté de l'Atlantique? En devenant communistes, nous ne serons libérés d'aucun des fléaux du capitalisme. Nous continuerons d'habiter des villes laides et sales. Notre univers sera tout aussi inhumain, si ce n'est pire. A cette différence près, que nos frontières se garniront de barbelés et de miradors, et que, dans les rues, on enverra des tanks contre les ouvriers. Alors, les rêves de fleurs bleus seront finis pour de bon. Est-ce cela que nous voulons? Non, mille fois non.
  • « Nous, les jeunes, n'avons que faire des doctrines du XIXe siècle. Nous ne voulons ni du capitalisme international ni du communisme, avec leurs habits de crasse et de sang. Nous voulons prendre une troisième voie, la voie de la liberté européenne. Pour nous et nos enfants, nous voulons garantir une vie qui vaille la peine d'être vécue. Pour cela, soyons d'abord maîtres chez nous! » Renaître, 1975
  • « S'il est une fausse opposition que nous refusons, c'est bien celle que l'on prétend trouver entre le libéralisme et le marxisme. Et c'est encore une croyance bien établie chez la plupart des intellectuels occidentaux que le libéralisme est malgré tout la seule solution viable ( voir à ce propos R. Aron et son plaidoyer ( désenchanté ) pour l'Europe décadente ) avec le risque permanent de la voir sombrer un jour sous les coups du marxisme, indifférente et paralysée. Nous pensons quant à nous que non seulement le libéralisme n'a été en définitive que le précurseur du marxisme, qu'ils sont issus tous deux de la même "Philosophie des Lumières" et qu'ils représentent la même subversion contre les valeurs traditionnelles ( égalitarisme, massification et technocratie, mercantilisme, cosmopolitisme) ». Avant-garde, no 4, 1977

Le Rat noir rebondit en Suisse

En janvier 1978, la parution d' Avant-garde est soudainement interrompue. Une année plus tard, en janvier 1979, paraît le premier numéro d'un « bulletin de liaison et d'information NR de Suisse », Le Rat noir. L'éditorial fait état d'une crise interne. Le NOS semble avoir été divisé entre deux tendances: la première considérait que le combat contre « l'impérialisme soviéto-américain » devait être une fin en soi, tandis que la deuxième estimait qu'une redéfinition claire des objectifs, un approfondissement doctrinal et un durcissement de la ligne s'imposaient. Les partisans de la seconde tendance semblent l'avoir emporté. Toutefois, le bulletin promet la reparution prochaine d'Avant-garde.

La ligne se redéfinit. D'emblée, Le Rat noir montre un approfondissement doctrinal. Il appelle à soutenir le Centre d'études doctrinales Julius Evola et la revue Totalité. Les mots d'ordre prennent un tour plus radical: Nationalisme-révolutionnaire - Socialisme européen - Défense de la race!

Le Rat noir pour un Nouvel ordre social

Quoi qu'il en soit, le modeste bulletin, présenté comme un outil à vocation provisoire, va devenir une revue qui donnera une large place à l'humour et à la bande dessinée, conjuguée avec un travail de réflexion métapolitique. Elle paraîtra jusqu'en 1984, publiant 18 numéros. Son audience va largement dépasser le cadre de la Suisse romande. En effet, et comme son nom l'indique, le nouveau périodique s'inspire de l'œuvre satirique du dessinateur Jack Marchal. Celui-ci va d'ailleurs collaborer à chacune des livraisons (également sous son avatar Crunch [15]), comme le feront aussi d'autres dessinateurs, tels le Français Rémi (auteur de La bande à Balder), les Belges Julius et Korbo (parfois sous le pseudonyme de Prik) , l'Italien Maurizio (du « Centre graphique » du FUAN), le Suisse Pedro, et même, de manière surprenante, Reiser[16].

Du Nouvel Ordre Social à Forces Nouvelles

En avril 1979, contre toute attente, Le Rat noir annonce que le Bureau politique du NOS vient de décider la dissolution du mouvement et la création d'une nouvelle organisation, Forces Nouvelles. L'éditorial affirme qu'il ne s'agit pas d'un simple changement de nom, mais d'une volonté réelle de changement, du désir de créer une nouvelle Droite révolutionnaire, et de gagner une audience plus large.

Cette évolution correspond à une nouvelle étape de la mouvance nationaliste révolutionnaire en Suisse romande. Les années 1972-1974 avaient été une période où de jeunes rebelles voulaient s'opposer « par tous les moyens » au monopole gauchiste. Un anticommunisme primaire les amène à prendre le contre-pied de tout ce qui vient de la gauche, sans véritablement proposer une alternative. La période fin 1974-1977 est marquée par l'irruption du débat d'idées, illustré par les dernières parutions de Renaissance! et surtout par ceux du Huron. On attaque les bases du système, on développe une critique des dogmes de l'égalitarisme, on découvre une nouvelle philosophie à opposer au conformisme ambiant. La période 1977-1979 est celle où le NOS calque sa doctrine et sa ligne sur celles des nationalistes-révolutionnaires français et italiens. On reprend les mêmes mots d'ordre, on feint de ressusciter Jeune Europe, et on adopte la logique du « Europe-Tiers-monde même combat ». Mais en 1979, une grande partie des membres s'aperçoit que les slogans ont trop pris l'ascendant sur la formation doctrinale. La « course au plus révolutionnaire » a fait passer à l'arrière-plan l'essentiel, et, pour essayer de se faire accepter par le plus de monde possible, on a fini par faire trop de concessions. La nouvelle période, celle du Rat noir, ramène les fondamentaux, en réintégrant Evola, et en s'intéressant de près aux travaux de la Nouvelle Droite, notamment le « réalisme biologique », que les nationalistes-révolutionnaires avaient nettement mis de côté.

Les Cercles culturels de la Nouvelle Droite en Suisse romande

C'est à cette période qu'éclosent en Suisse plusieurs cercles à vocation culturelle ou métapolitique, qui discutent et diffusent les travaux de la Nouvelle Droite en Suisse romande. Plusieurs d'entre eux existent toujours.

Le Centre national de la pensée européenne

En 1983, Le Rat noir annonce la création d'une structure de diffusion, le Centre national de la pensée européenne, destiné à distribuer et à faire connaître en Suisse les ouvrages de la Nouvelle Droite, du GRECE, les revues Eléments, Nouvelle Ecole et Totalité.

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Le Cercle Thulé

En 1983 est fondé un Cercle Thulé, destiné à diffuser les idées de la Nouvelle Droite. Son principal organisateur et animateur est Pascal Junod, qui a été l'un des principaux dirigeants du NOS.

Il organisera en août 1987 et 1988 une célébration de la Lugnasad (fête du dieu Lug) dans le petit village de Vaulion. Plusieurs centaines de militants, venus de plusieurs pays d'Europe, y participeront. Il organisera en 1998 un colloque consacré à Julius Evola, intitulé « Julius Evola 1898-1998 : Eveil, destin et expériences de terres spirituelles ». Parmi les participants, on dénombrera Claudio Mutti, Christophe Levalois, Jean-Marc Vivenza, David Gattegno et Jean-Paul Lippi.

Le Cercle Proudhon

En 1984 naît à l'Université de Genève une association d'étudiants. Les membres décident de prendre le nom de Cercle Proudhon. Le choix du nom fait évidemment référence au Cercle Proudhon (1911-1914) de Georges Valois, mais il s'agit aussi d'une décision tactique: le nom de Pierre-Joseph Proudhon, dont l'héritage est revendiqué tant par les nationalistes-révolutionnaires et par certains monarchistes que par les syndicalistes-révolutionnaires et les anarchistes, n'éveillera pas de suspicion, du moins dans un premier temps, et sera considéré comme « admissible » au sein d'une université alors totalement dominée par l'extrême gauche. Et en effet, grâce à cette dénomination, le Cercle Proudhon a pu être officialisé parmi les autres associations étudiantes de l'université de Genève, et pourra durant des années bénéficier gratuitement de ses locaux.

Début 1985, le Cercle Proudhon organise à Genève un meeting sur Le Droit à l’identité : les orateurs sont Jean-Gilles Malliarakis, Guillaume Faye, Alain de Benoist, Pierre Vial, Robert Steuckers, l’Italien Marco Tarchi, l’Anglais Michael Walcker, l’Allemand Pierre Krebs. En novembre 1985, il organise une conférence-débat sensationnelle, opposant Alain de Benoist avec la coqueluche suisse du tiers-mondisme international, le sociologue Jean Ziegler.

En juin 1986, le Cercle organise, à l'université de Genève, un colloque international consacré à l'« Afrique du Sud : dernier bastion ? ». Y participent notamment Robert Steuckers et Trystan Mordrel.

Le Cercle Proudhon restera actif : il invitera notamment Pierre Vial et Roger Garaudy en 1993, Dominique Venner en 2001, Gabriele Adinolfi en 2014 et 2016, et Georges Feltin-Tracol en 2019.

Scissions et postérité

À partir de 1979, outre Forces Nouvelles, plusieurs nouveaux autres groupes nationaux-révolutionnaires, dont certains sont des scissions du NOS, se créent en Suisse romande, tels « Jeunesse Viking » et « Occident 2000 ».

Troisième Voie (Suisse)

La branche suisse du mouvement Troisième voie, fondée en 1987, marque aussi une certaine continuité avec le NOS. Elle utilisera d'ailleurs la case postale du Rat noir.

Principales personnalités passées par le NOS

Bibliographie

Documentation et sources primaires

  • Nouvel Ordre Social, Manuel du militant, 1976, 18 p.
  • Renaissance!, 1973-1974
  • Renaître, 1975
  • Le Huron, (8 numéro parus dont un numéro double) novembre 1974-février 1976
  • Avant-garde, 1977-1979
  • Le Rat noir, 1977-1984
  • Daniel Cologne, Éléments pour un nouveau nationalisme, Paris, Cercle Culture et Liberté, 1977, 27 p.
  • Entretien avec Daniel Cologne consacré aux « Non-conformistes des années 70 » : [1] ou [2].

Document vidéo

  • Emission télévisée de la Radio Télévision Suisse romande (RTS) « L'antenne est à vous », 27 mai 1976: [3]

Notes et références

  1. Le 29 novembre 1940, le Parti communiste suisse est interdit par le Conseil fédéral sur l'ensemble du territoire. En mai 1944, ses anciens membres reconstitue le parti sous le nom de Parti du Travail, nom qu'il va garder par la suite (dans certains cantons, il adopte le nom de Parti ouvrier populaire). Dans les faits, il s'agit d'un parti communiste officiel, reconnu par Moscou et aligné sur les positions de l'Union soviétique.
  2. Georges Néri, genevois, né en 1943, va jouer un rôle prépondérant lors de la naissance du jeune mouvement par ses conseils, ses articles et son appui logistique (acquisition de matériel et octroi d'un local). Il sera ensuite, jusqu'en 1976, le maître d'œuvre et la cheville ouvrière des revues Renaissance! et Le Huron. Des obligations familiales et des pressions exercées par ses mandants le contraindront à se retirer de la vie politique.
  3. L'Ingénu (1767).
  4. Dominique Baettig, alors étudiant en médecine, deviendra psychiatre. En 2007, il sera élu au Conseil national sous l'étiquette de l'Union démocratique du centre.
  5. Olivier Wyssa deviendra avocat. Franco-suisse, il s'installera en France où il deviendra cadre du Front national et bras droit de Bruno Gollnisch.
  6. George Lapraz fera carrière dans l'administration pénitentiaire.
  7. Un lien d'accès vers l'émission est disponible dans la section Bibliographie de l'article.
  8. Militant et avocat belge, responsable du GRECE-Belgique, fondateur du périodique Pour une renaissance européenne. Il dirigera plus tard la Bannière Wallonie de Terre et peuple.
  9. Jean Batou, né en 1954, deviendra professeur d’histoire contemporaine à l'université de Genève et dirigeant du parti d'extrême gauche SolidaritéS, fondé en 1992. Il est aujourd'hui connu sous le sobriquet de « Jean Babtou-Fragile ».
  10. Malliarakis dirige alors le Groupe action jeunesse, qu'il va transformer en 1979 en Mouvement nationaliste révolutionnaire
  11. Voir à ce sujet: Philippe Baillet, L'Autre Tiers-mondisme : des origines à l’islamisme radical - Fascistes, nationaux-socialistes, nationalistes-révolutionnaires entre « défense de la race » et « solidarité anti-impérialiste », Akribeia, Saint-Genis-Laval, 2016, 475 p.
  12. James Schwarzenbach (1911-1994), homme politique zurichois, élu de l'Action nationale au Conseil national en 1967, il lance en 1970 une initiative populaire, dite initiative Schwarzenbach, afin de limiter le nombre d'étrangers en Suisse. Elle est rejetée de peu. S'étant brouillé avec l'Action nationale, il fonde un Mouvement républicain qui obtient d'un coup sept sièges au Conseil national (1971), où il reste jusqu'en 1979. Au cours des années 1970, il lance plusieurs autres initiatives populaires, visant toutes à limiter le nombre de travailleurs étrangers. Celles-ci n'atteignent toutefois plus le score de 1970.
  13. La « Question jurassienne » concerne les districts francophones longtemps rattachés au canton de Berne, majoritairement germanophone. Au cours de la première moitié du XXe siècle, un mécontentement croît au sein de cette population francophone, qui s'estime frustrée et laissée pour compte par le gouvernement cantonal. Les tensions montent et en 1949 est fondé un « Mouvement séparatiste jurassien » (MSJ). En 1951, le MSJ se transforme en « Rassemblement jurassien ». Tous les francophones ne sont pas partisans de la voie séparatiste, et les tenants du maintien au sein du canton de Berne créent une association anti-séparatiste, l'« Union des patriotes jurassiens » (UPJ). En 1963 se crée un mouvement activiste, le « Groupe Bélier ». Une fraction plus radicale crée le « Front de libération du Jura » (FLJ), qui tente de mener une mini guerre de guérilla. Le 23 juin 1974, un référendum sur la création d'un nouveau canton recueille une faible majorité des voix. Le 16 mars 1975, le canton de Berne organise un vote, au cours duquel trois districts expriment leur volonté de rester rattachés au canton de Berne. Alors que les autorités fédérales, les autorités bernoises et les représentants élus des districts favorables à la création du nouveau canton préparent la transition, les mouvements radicaux, comme le Groupe Bélier, le Mouvement autonomiste jurassien et le Mouvement indépendantiste jurassien continuent leurs actions en faveur d'une « réunification du peuple jurassien francophone ». Face à ceux que l'on surnomme désormais les « Béliers » militent des partisans du statu quo, qui se font surnommer les « Sangliers ». Le 24 septembre 1978, le canton du Jura est officiellement créé et devient souverain le 1er janvier 1979. Toutefois, les « Béliers » et les « Sangliers » continuent de s'opposer sur la question des trois districts francophones restés dans le canton de Berne.
  14. La Ligue marxiste révolutionnaire, d'obédience trotskiste (elle adhère à la IVe Internationale en 1974), est née en 1969 d'une scission du Parti ouvrier populaire (POP), c'est-à-dire le parti communiste suisse aligné sur Moscou. A l'instar de nombreux groupes de gauche radicale ailleurs en Occident, les militants qui animent la LMR désirent en fait fusionner le marxisme classique et le léninisme avec les thèses mises en avant par la Nouvelle gauche : féminisme, antimilitarisme, « antiracisme », tiers-mondisme, etc. En 1980, l'organisation adopte le nom de Parti socialiste ouvrier, jugé plus adapté aux campagnes électorales. Bien plus tard, en 1992, les cadres du PSO, conscients du côté désuet de la rhétorique « ouvriériste », se dissout pour créer Le parti SolidaritéS.
  15. « Jack Marchal - Crunch », in : Lambiek Comiclopedia; lire en ligne : [4]
  16. Le célèbre dessinateur de gauche collabore effectivement au numéro 14 du Rat noir
  17. Contrairement à ce qu'a prétendu l'activiste de gauche Claude Cantini, dans un ouvrage particulièrement médiocre mais considéré comme une « source sérieuse » par certains universitaires (Les Ultras : extrême droite et droite extrême en Suisse, les mouvements et la presse de 1921 à 1991, Lausanne, Éditions d'en bas, 1992, 176 p., p. 152-153), le dénommé Philippe Barro n'a été membre du NOS que brièvement, à ses débuts, et n'y a joué aucun rôle déterminant.