Fascisme (phénomène)
Au-delà de la désignation du mouvement et du régime politique dirigé par Benito Mussolini en Italie, le terme de fascisme peut désigner un phénomène politique, métapolitique et culturel qui a traversé l'Europe dans la première moitié du XXème siècle.
Sommaire
- 1 Questions de définition
- 2 Un phénomène aux interprétations multiples
- 2.1 L'interprétation marxiste du phénomène fasciste
- 2.2 Le fascisme vu par la gauche libérale
- 2.3 Les point de vue historicistes
- 2.4 Le fascisme vu de Droite
- 2.4.1 Le fascisme défini par Bardèche
- 2.4.2 Le fascisme vu de Droite, par Julius Evola
- 2.4.3 Enzo Erra, ou le fascisme comme « intervention dans l'histoire »
- 2.4.4 Armin Mohler et le fascisme comme « style »
- 2.4.5 Giorgio Locchi : une « tendance époquale surhumaniste »
- 2.4.6 Le fascisme vu par Dominique Venner
- 3 Principales valeurs partagées par les mouvements relevant du fascisme en tant que phénomène
- 4 Bibliographie
- 5 Articles connexes
- 6 Notes et références
Questions de définition
Plusieurs analyses du phénomène ont été opérées, dont l'interprétation marxiste, voyant dans le fascisme le « bras armé du Capital », l'interprétation libérale, pour qui le fascisme serait un « accident de l'Histoire », l'interprétation d'Ernst Nolte, qui le limite à son anticommunisme radical, ou l'interprétation de la Droite culturelle, qui replace le fascisme dans un cadre méta-historique.
Le phénomène peut aussi être dénommé sous les noms de Droite révolutionnaire, de « Révolution conservatrice », de « mouvements de rénovation » ou de révolution anti-moderne, même si l'équivalence entre ces concepts est parfois contestée[1]. Les historiens et chercheurs ne s'accordent pas non plus systématiquement sur les mouvements qu'il conviendrait d'inclure ou non dans la définition du fascisme en tant que phénomène, ce qui a amené certains à définir, par exemple, les Croix fléchées hongroises ou la Garde de fer roumaine, comme de « faux fascismes ».
Un phénomène aux interprétations multiples
L'interprétation marxiste du phénomène fasciste
La thèse du marxisme orthodoxe
Selon les théoriciens marxistes classiques, le fascisme serait « la forme prise par le régime bourgeois au stade de la concentration monopoliste, de l’impérialisme et de la défense contre la lutte des classes organisée par le prolétariat ». Il serait la « réponse terroriste de la bourgeoisie devant l'avancée du prolétariat », ou « l'instrument mis au point par la bourgeoisie pour combattre la classe ouvrière et l’expression directe de la bourgeoisie au pouvoir », résumé par la formule de « bras armé du Capital »[2].
Toutefois, même des marxistes orthodoxes comme l'historien anglais Eric Hobsbawm estiment que cette thèse est totalement erronée. Pour Hobsbawm, « le grand capital s'accommode de tout régime qui ne cherche pas à l'exproprier, et que n'importe quel régime s'en accommode » et « le fascisme ne fut pas plus l'"expression des intérêts du capital monopoliste " que ne le furent le New Deal en Amérique , les gouvernements travaillistes en Grande-Bretagne ou la République de Weimar ». Il signale que « au début des années 1930, le grand capital ne souhaitait pas particulièrement Hitler et aurait préféré un conservatisme plus orthodoxe. Il ne lui apporta guère de soutien jusqu'à la Grande Crise, et encore cet appui fut-il alors tardif et inégal »[3].
Les thèses néo-marxistes
École de Francfort
Les théoriciens freudo-marxistes de l’École de Francfort ont élaboré une théorie psychologique du fascisme. Pour Max Horkheimer (1895-1973), le décalage entre infrastructure et superstructure aurait entraîné le développement de tendances irrationnelles, dont l’antisémitisme[4]. Pour Theodor W. Adorno (1903-1969) et Erich Fromm (1900-1980), la déstructuration des sociétés au xxe siècle aurait provoqué chez l’individu un sentiment d’impuissance entraînant la résurgence d'une « personnalité autoritaire », donnant naissance à des pulsions qui correspondraient à la « mentalité fasciste ». Ainsi, dans certaines conditions menaçantes, les « personnages autoritaires » seraient émotionnellement et cognitivement vulnérables à l'attrait des « idéologies fascistes et nationalistes ».
Le « sexo-fascisme »
Selon Wilhelm Reich (The Mass Psychology of Fascism, 1933), l'attrait des politiques « réactionnaires » et « conservatrices » et le « penchant pour le fascisme » seraient dus à la « longue histoire d'un patriarcat rigide et autoritaire qui affecte la famille, la parentalité, l'éducation primaire » et par conséquent la société dans son ensemble. Selon Reich, la « révolution sexuelle » est le préalable indispensable à toute révolution sociale et à toute lutte contre le « fascisme ».
Karl Polanyi
Pour le théoricien marxiste « hétérodoxe » Karl Polanyi (1886-1964), l’essence du fascisme serait une « éternisation du rapport social capitaliste qui n’est pas, par principe, fondé sur des relations entre des personnes ». Selon lui, le fascisme serait la contre-révolution absolue, s'incarnant dans des révolutions politiques qui mettraient fin à toute tentative de révolution ou de transformation sociale, tout en récupérant un désir de négation du monde aliéné. Il se servirait du désir de la révolution authentique pour donner forme à tout autre chose. La révolte spontanée contre le monde aliéné au Capital, contre ce désarroi et ce vide de sens, serait dévoyé par le fascisme, qui correspondrait à une forme d’absolutisation du Capital.
Le fascisme serait une idéologie (sic) tentant de nier l’Histoire en retrouvant une pureté d’avant l’Histoire. La politique, entendue comme espace commun où les hommes peuvent discuter et construire leur destinée, serait niée au nom d’une vie mythique où la conscience même des individus n’aurait plus sa place. Selon lui, dans un Etat de type fasciste, « les êtres humains sont considérés comme producteurs et producteurs seulement (…) La représentation est accordée à la fonction économique ; elle est technique et impersonnelle »[5].
Le fascisme vu par la gauche libérale
Un « accident de l’histoire »
Pour les théoriciens libéraux, le fascisme aurait constitué « accident de l’histoire », une parenthèse temporaire à contre-courant de l’évolution naturelle vers la démocratie libérale, fruit de la confusion mentale et sociale née de la Première Guerre mondiale.
Les mouvements fascistes représenteraient des « pratiques anthropologiques radicalement anti-chrétiennes et anti-civiques, qui sont un rejet total non seulement des valeurs et institutions démocratiques et libérales, mais de la civilisation occidentale elle-même […] Ces monstruosités n’étaient viables que quelques décennies, puisque, quand on entend recréer le type même de lien social qui caractérisait les sociétés tribales ou archaïques, on ne peut que régresser vers le niveau de performance de ces dernières. On se place en mauvaise posture pour rester dans la course au progrès scientifique, technologique et économique, etc. »[6] Cette vision libérale, juste sur le caractère anti-chrétien et anti-occidental du fascisme, sombre dans l’idiotie et l’absence de sens critique : car c’est précisément dans les domaines techniques et économiques que les fascismes furent plus performants et futuristes que les démocraties occidentales.
Certains libéraux tentent aussi d'établir une parenté entre le fascisme et les différentes formes de socialisme. Ceux-ci se rejoindraient sur leur évolution vers le totalitarisme et sur volonté de soumission à l’État de la société et des individus. Ce courant remonte à l’économiste et philosophe libéral austro-britannique Friedrich Hayek (1899-1992), auteur de La Route de la servitude (1943).
La synthèse fasciste de Zeev Sternhell
L'historien israélien Zeev Sternhell conçoit le fascisme comme la forme extrême d’un phénomène idéologique et culturel qui se manifeste par la révolte contre l’héritage de la Révolution française, contre le matérialisme et le rationalisme, contre les principes du libéralisme et contre la conception utilitariste de la société et de l’Etat.
Selon lui, c’est en France que se trouvent les véritables origines idéologiques du fascisme. Il le voit comme le fruit d’une rencontre entre le nationalisme intransigeant et la révision anti-matérialiste du marxisme qui se produit au cours des années 1885-1914. Le fascisme consisterait en une idéologie de rupture qui se dresse contre le libéralisme et le marxisme, une troisième voie qui entend jeter les bases d’une nouvelle civilisation anti-individualiste, seule capable d’assurer la pérennité d’une collectivité humaine où seraient parfaitement intégrées toutes les couches et toutes les classes de la société.
Cette tendance à la révision anti-matérialiste du marxisme est pour lui le filon fondamental de l’émergence de l’idéologie fasciste. Georges Sorel (1847-1922) est d'après lui une figure-clé. Ce socialiste français joue un rôle essentiel dans la poussée de la synthèse fasciste en ce qu’il est le premier à lancer une révision “révolutionnaire” du marxisme. Il préconise une révolution en dehors de la matrice marxiste traditionnelle. Puisque le capitalisme ne s’effondre pas et que les masses ne marchent pas à coups de raisonnements, Sorel remplace le contenu rationaliste et matérialiste du marxisme par le culte de l’énergie, l’intuition et la violence. Il entend donc corriger le marxisme en y introduisant des éléments irrationnels. La destruction du régime de démocratie libérale est aussi un fondement de la révision sorélienne : ce courant révisionniste se dresse autant contre le libéralisme que contre le marxisme, car ce sont des systèmes de pensée matérialistes qui considèrent la société comme un simple agrégat d’individus. Enfin, il ne reste plus aux disciples de Sorel qu’à remplacer par la Nation le prolétariat défaillant dans le combat contre la décadence démocratique et rationaliste. Ainsi s’ouvre progressivement la voie vers le fascisme.
Il explique ainsi le fait que des socialistes démocrates, comme Marcel Déat en France et Henri De Man en Belgique, glissent vers le fascisme. Pour de Man, l’exploitation est conçue comme une catégorie psychologique et non comme un problème économique. Dans ce cas, l’individu est exploité s’il se sent exploité. Mais s’il sent qu’il est au service d’une grande cause, au service de la patrie par exemple, il sentira qu’il fait partie intégrante de la communauté nationale. Lorsqu’on considère, comme de Man, que les problèmes fondamentaux ne sont pas économiques, on peut commencer à glisser vers le fascisme.
Les point de vue historicistes
Renzo De Felice
L'historien italien Renzo De Felice (1929-1996) a proposé une relecture du phénomène fasciste. Dans ses travaux, il insiste particulièrement sur la distinction qu'il opère entre « fascisme-mouvement » et « fascisme-régime ». Pour lui, le fascisme, en particulier en tant que mouvement, est une idéologie révolutionnaire correspondant aux attentes de la classe moyenne, qui s'enracine dans la philosophie des Lumières. Le fascisme ne profite pas de la peur des classes moyennes, mais plutôt d'une tentative de leur part pour monopoliser le pouvoir. Pour De Felice, le fascisme reste une idéologie politique valide, qui ne peut ni ne doit être diabolisée ou réduite comme le fait la vulgate marxiste.
Il refuse aussi les liens éventuels et les possibilités de comparaison entre le fascisme italien et le national-socialisme allemand, qu'il considère comme radicalement différents. Enfin, il affirme que le fascisme représenterait un phénomène définitivement achevé dans l'histoire.
Ernst Nolte
à faire
Le fascisme vu de Droite
Contrairement aux théoriciens et aux historiographes de gauche, les esprits de la Droite intellectuelle notent tout d'abord que le fascisme, militairement vaincu, a toujours été jugé d’un point de vue moral et politiquement peccamineux par ses vainqueurs, mais pratiquement jamais sous un angle historique, philosophique et spirituel, ce qui est pourtant le plus important, sachant que « le “phénomène fasciste” est surtout présent en tant que fantasme de ses adversaires ». Pour Giorgio Locchi, par exemple, le fascisme se dépasse lui-même et signifie bien davantage pour le destin européen que les péripéties de mouvements politiques divers[7].
Le phénomène fasciste, de nature transnationale et transpolitique , se caractérise par un rejet de l'égalitarisme, le rétablissement des valeurs d’ordre, de hiérarchie et d’autorité et la défense d'une conception-du-monde héroïco-virile.
Le fascisme défini par Bardèche
Le fascisme vu de Droite, par Julius Evola
L'analyse du phénomène fasciste de Julius Evola est synthétisée dans son essai, paru en 1964, Le Fascisme vu de Droite. Suivi de : Notes sur le IIIe Reich[8].
Ainsi, le jeune Adriano Romualdi rend compte de l'ouvrage dès sa publication :
« Depuis la fin de la guerre, d'innombrables évocations du Fascisme et de ses hommes ont été publiées par les milieux de Droite. Presque toujours, il s'agit d'ouvrages "chromo" ou sentimentaux exaltant le Fascisme en tant que mythe sans en discuter sérieusement et de façon profonde les idées. La valeur de ce nouveau livre sur la question pourrait quasiment consister dans le fait qu'il est le premier ouvrage écrit par un Italien où, à partir de positions rigoureusement "de Droite", une analyse critique du phénomène fasciste est tentée. Cet essai a d'autant plus de valeur que son auteur est Julius Evola, c'est-à-dire le seul représentant de la Droite italienne qui possède une envergure européenne et dont, entre autres, deux nouvelles traductions, celle de Chevaucher le tigre et de Les Hommes au milieu des ruines viennent récemment de paraître en France.
Le point de vue d'Evola, ce1ui dont l'ensemble de son analyse procède, c'est celui de la Droite. Non pas de la petite droite économique ou sentimentale, celle des intérêts et des nostalgies, mais la pure idée de Droite en tant que principe politique dont les structures autoritaires, hiérarchiques et aristocratiques ont donné vie aux Etats de la civilisation européenne traditionnelle. C'est à l'étalon de cette Droite-là qu'Evola mesure le Fascisme, séparant ce qui est "en ordre" de ce qui ne l'est pas.
Il convient de dire dès maintenant que cette analyse s'avère , dans l'ensemble, positive. L'auteur reconnaît au Fascisme le mérite d'avoir réaffirmé l'idée d'Etat à une époque qui ne croyait que dans la société, le peuple et le nombre; d'avoir opposé le pur principe politique aux instances économico-sociales ; d'avoir exalté le rôle des minorités héroïques au détriment de la brutalité et des vociférations de la masse. Originellement, le Fascisme baignait encore dans la confusion idéologique propre à son époque. L'interventionnisme, dont il tire son origine, véhiculait bien des scories libertaires, jacobines et maçonniques. Mais de !ªintervention naîtra la "génération du front", avec sa redécouverte du culte de la discipline, de l'autorité et de l'honneur guerrier. De même, une autre composante originelle du Fascisme, le nationalisme, avait-elle indubitablement des tares populistes. Mais il fut lui aussi purifié par l'expérience fasciste qui concevait la nation non comme la masse du peuple, non comme pure quantité, mais comme qualité, éthique et organique. A l'issue de cette œuvre de clarification, Mussolini, à juste titre, pouvait écrire : "Ce n'est pas la nation qui crée l'Etat, mais l'Etat qui crée la nation".
Au reste, c'est le nationalisme dans son ensemble qui est dépassé par le mythe impérial du Fascisme. Revendiquant son droit souverain à guider des peuples non seulement non européens (les Abyssins) mais aussi européens (les Albanais, les Croates, ls Monténégrins, les Grecs), il se projetait bien au-delà des vues étriquées du nationalisme démocratique façon XIXe siècle. Le Nouvel Ordre européen conçu par l'Italie et l'Allemagne se posait comme un ordre supranational institué par des nations à vocation impériale. C'est précisément à cette époque qu'Evola écrivait : "Il faut aller au-delà, tant d'un internationalisme destructeur que d'un nationalisme particulariste, parce que la conception de l'Empire, du REICH, dépasse ces deux visions : elle est liée à l'idée d'une race capable de créer et de diriger une unité hiérarchique supérieure en laquelle les unités particulières, techniquement et nationalement définies, ne sont pas amputées de leur caractère spécifique et de leur autonomie relative, mais sont amenées à participer à un plus haut niveau spirituel". Comme symbole de sa vocation impériale, le Fascisme choisit l'image de Rome. C'était, écrit Evola, "vouloir jeter un pont au-dessus d'un hiatus séculaire, afin de reprendre contact avec l'unique héritage vraiment valable de toute l'histoire dont le sol italien fut témoin". Le mythe romain devait être un modèle de force disciplinaire et de combat de vérité. Malheureusement, en raison de certaines inclinations à jouer les histrions de l'âme italienne, il tomba trop souvent au niveau de Ia simple rhétorique.
Revendication de l'Etat comme forme spirituelle qui donne son empreinte à une matière humaine, style militaire, dépassement de l'eudémonisme bourgeois sous le signe de l'amour du danger et du devoir: telles sont les caractéristiques positives du Fascisme. Mais, à côté d'elles, il en est d'autres moins nobles. Comme le "ducisme", en lequel le respect pour le chef dégénéra en servilité adulatrice: on devait le payer cher le 25 juillet 1943, lorsqu'on put voir combien l'absence de toute critique interne et d'une véritable liberté avait miné le Fascisme de l'intérieur ! Etouffé par la personnalité géniale de Mussolini, il ne réussit pas à créer une élite de chefs vraiment libres et responsables, capables de prendre des initiatives et leurs responsabilités lorsque le Duce disparut de la scène politique.
Et même l'exaltation populaire que le Fascisme réussit à soulever autour de la personne de Mussolini doit être regardée avec un œil critique. Elle se focalisait davantage sur un homme que sur une idée, davantage sur un individu que sur une aristocratie politique solide. Disparu l'homme et abattu son mythe, le magnétisme qui unissait en un même faisceau des forces diverses et opposées cessa lui aussi de jouer.
Evola écrit à ce sujet : "Il faut garder à l'esprit que, aussi intense que puisse être le magnétisme ainsi créé, il ne cesse pas pour autant d'avoir un caractère éphémère [...] L'agglomération auquel il donne lieu est comparable à l'adhérence de la limaille de fer sur un aimant: lorsque le courant qui détermine le champ magnétique cesse de passer, toute la limaille s'en détache immédiatement". Au reste, Mussolini lui-même, à l'époque de la République Sociale, n'eut pas de mots assez durs pour fustiger les esclaves et les adulateurs qui avaient créé autour de lui un véritable rideau de fumée, l'empêchant de prendre contact avec la réalité.
Un peu plus loin, Evola examine les rapports qu'entretient le Fascisme avec l'économie. La formule économique de la vraie Droite n'est pas le capitalisme, cette conception anarchique et libérale de la vie économique qui porte la responsabilité de la naissance du socialisme. Dans l'Europe traditionnelle, il existait de solides organisations corporatives animées par un esprit d'honneur professionnel et de fidélité encore médiéval. Le fascisme tenta de faire revivre cet ordre corporatif - mais il demeura quelque chose d'abstrait et de bureaucratique, et ne dépassa pas le stade de l'arbitrage entre l'entrepreneur et le travailleur. A cet égard, on fit mieux en Allemagne où la structure même des entreprises fut réorganisée, instituant des rapports de solidarité et de fidé1ité entre l'entrepreneur (Betriebsführer) et sa "suite" (Gefolgschaft). Cependant, au moins sur le plan des principes, le Fascisme sut faire revivre 1'esprit économique de la vraie Droite, hostile aussi bien à l'anarchie économique de type libéral qu'à l'égalitarisme socialo-communiste .
Evola attire ici l'attention de certains mythomanes du prolétariat égarés par hasard dans les rangs fascistes et qui, dénués devéritable sensibilité idéale, ne semblent pas s1apercevoir que tout Pathos social et populiste est en totale contradiction avec l' Ethos héroïque et autoritaire d'une justice sociale conçue comme le dépassement à la fois de l'arbitraire et de l'anarchie économique, sous le signe positif de l'Etat. Mais tout ceci est incompatible avec le soi-disant "socialisme national", si par ce terme on entend un socialisme chiche et petit-bourgeois. Ecoutons Evola : "Le socialisme est le socialisme et le fait d'ajouter l'épithète "national" est une ruse qui ressemble fort à un cheval de Troie [...] Une fois réalisé le "socialisme national" [...] on passera au socialisme tout court et ainsi de suite, car sur un plan incliné, on ne peut pas s'arrêter à mi-chemin. En son temps, le Fascisme fut un des régimes les plus progressistes et les plus en avance en matière de mesures libérales. Mais le corporatisme du Ventennio, ou ce qu'il avait de valable, doit être essentiellement interprété dans le cadre d'une idée organique antimarxiste, c'est -à-dire étrangère à tout ce qui peut légitime ment se réclamer du socialisme. C'est précisément et uniquement, à cause de cela que le Fascisme aurait pu être une troisième force, une troisième voie pour l'Europe, opposée aussi bien au communisme qu'au capitalisme".
C'est sur cette citation, que certains énergumènes ne reliront jamais assez, que nous clorons cette recension. Si, pour Evola, ce court essai est un ouvrage mineur, par la clarté et l'audace de ses positions, il se situe comme toujours bien au-dessus de tout ce que l'on a pu écrire à Droite sur ce sujet. En publiant ce livre, l'éditeur Giovanni Volpe rend à nouveau un fier service à la cause de la culture de Droite »[9].
Enzo Erra, ou le fascisme comme « intervention dans l'histoire »
Pour Enzo Erra (1926-2011), le principe fondamental du fascisme est l'« intervention » : de la volonté d'intervention lors du Premier conflit mondial, à la volonté d'intervention dans la vie et l'histoire, avec un refus total de se soumettre à des déterminismes, qu'ils soient historiques, matériels ou sociaux[10]. C'est pour cette raison qu'Erra estime que le fascisme relève d'une tendance optimisme, qu'il oppose nettement au pessimisme, notamment racial, du national-socialisme allemand et même du « radicalisme de droite italien ».
En accord avec Renzo De Felice et Emilio Gentile, qu'il critique sur d'autres points, Erra considère que le fascisme ambitionnait d'être l'amorce d'une « nouvelle civilisation ». Ainsi, la guerre d'Espagne et la Deuxième guerre mondiale n'ont pas été des conflits idéologiques, mais des affrontements entre « visions du monde ». Les difficultés interprétatives du phénomène fasciste viennent essentiellement de l'obstination à lui appliquer des critères et des schémas qu'il a rejetés d’emblée : ainsi les cadres de droite et de gauche, de révolution et de contre-révolution, de tradition et de modernité[11].
Armin Mohler et le fascisme comme « style »
L'historien des idées suisse Armin Mohler, lui, a tenté, à travers une description physiognomique de ce qu’il considère être « Le Style » – l’attitude du « fasciste », d’identifier le noyau essentiel de cette expérience historique, politique et sociale. Le contexte dans lequel il rédige l'essai Der faschistische Stil[12], s'inscrit dans un débat de l’époque entre plusieurs intellectuels de la nouvelle droite française, un débat basé sur l’ancien débat médiéval entre nominalisme et universalité.
Pour Mohler, une vision qui recentre l’individualité et sa valeur existentielle (et que l’on pourrait qualifier de nominaliste) est précisément ce qui permet de récupérer le sens le plus authentique et aussi le plus brut de la vie, seul capable d’opérer une rénovation cathartique en dehors de toute conception vide de l’homme, abstraite, universelle et niveleuse. Ce fondement est celui du libéralisme moderne et de ses diverses formes d’internationalisme. Il en découle que l’approche choisie par Mohler pour définir « ce qui est fasciste » sera essentiellement pré-politique, pré-dogmatique. Il suit ainsi la voie tracée par d’autres chercheurs qui se sont penchés sur le phénomène, comme Giorgio Locchi dans L’essence du fascisme.
Mohler écrit : « En résumé, disons que les fascistes n’éprouvent en réalité aucun problème à s’adapter aux incohérences de la théorie, car ils se comprennent entre eux selon une voie plus directe: celle du style. » Et encore, en référence au discours de Gottfried Benn lors de la visite de Marinetti en Allemagne hitlérienne en 1934, Mohler écrit : « Le style dépasse la foi, la forme vient avant l’idée. »
Pour Mohler, donc, le fasciste n’est pas tel parce qu’il adhère à un schéma idéologique, dogmatique ou politique. Il l’est parce qu’il a éprouvé en lui, dans sa plus profonde intimité, la faiblesse mortelle de tout mythe ou valeur dérivée des Lumières, rationaliste et démocratique. Tout cela implose devant les guerres, les révolutions, les crises économiques et sociales. Mais le fasciste y répond en recueillant ce qu’il y a de positif dans chaque crise, et devient porteur d’une volonté créatrice qui réaffirme les valeurs de l’esprit, de l’héroïsme et de la volonté sur la vie.
Mohler cite Jünger : « Notre espoir repose sur les jeunes qui souffrent de fièvre, parce que la purulence verte du dégoût les consume. » Pour l’auteur, cela traduit « la nostalgie d’une autre forme de vie, plus dense, plus réelle. » Une vie plus dense, car plus complète, passant par une tragédie existentielle nue et renouvelante. Mohler parle d’un mélange entre « anarchie » et « style », entre destruction et renouveau. Et c’est justement cette mortification héroïque qui mène à une reconnexion avec la racine originelle et unitaire de la réalité et de la vie de l’individu : dans laquelle l’opposition entre vie et mort est dépassée dans une indifférence intérieure. Le renouveau, que le fasciste ressent en lui, à condition d’avoir pris pour tâche « la nécessité de mourir constamment, jour et nuit, dans la solitude ». Ce n’est qu’à ce moment-là, arrivé au point zéro de toute valeur, puisant dans des forces plus profondes, façonné de manière virtuose par un style « non théâtral, d’une froideur imposante vers laquelle orienter l’Europe », qu’il pourra témoigner de la naissance d’une nouvelle hiérarchie. Un style objectif, froid et impersonnel.
Et c’est précisément cette attitude que Mohler retrouve chez l’homme et dans le « style fasciste », car en lui l’individualité et son expérience sont placées au centre. Alors que ce qui caractérise le plus le national-socialiste, c’est son accent mis davantage sur le « peuple », sur la « Volksgemeinschaft » et sur la rébellion sociale, ce qui le distingue encore plus de ce que Mohler appelle « l’étatiste », c’est son admiration pour ce qui fonctionne, pour ce qui n’est pas arbitraire, pour ce qui est bien intégré dans la structure d’un État parfois asphyxiant, qui ne lui permet pas de vivre tout le « tragique » propre au fasciste. Bien que les trois « types » aient pu se croiser dans l’histoire, Mohler souhaite ici, sur un plan théorique, souligner la caractéristique spécifique de ce qu’il qualifie d’« homme fasciste ».
Il s’agit de la nécessité primordiale d’un besoin d’affirmation existentielle, qui, selon Mohler, explique pourquoi le fascisme « manque d’un système préconçu, qui explique tout dogmatiquement et de façon livresque ». Dans ce caractère immanent, intime, individuel de la révolution que le fasciste accomplit avant tout, et qui l’anime, se manifeste une attitude intérieure, un comportement, ainsi qu’une dignité et une noblesse particulières, que l’on n’atteint qu’à travers une catharsis intérieure.
Si l’interprétation de Mohler peut paraître, à certains points, forcée, elle a le mérite de ne pas réduire l’expérience et le phénomène en question à quelque chose d’accidentel, de contingent ou de relégué à une appartenance partisane, à une doctrine politique ou économique. Au contraire, elle le place à un niveau plus profond et constitutif, c’est-à-dire dans ce qui, chez l’individu, est en communication avec la sphère de l’être[13].
Giorgio Locchi : une « tendance époquale surhumaniste »
Selon des auteurs comme Giorgio Locchi et Philippe Baillet, le phénomène relève d'une « tendance époquale surhumaniste », en rupture avec la « tendance époquale » égalitaire, et prenant racine dans la réaction antirationaliste de la seconde moitié du XIXe siècle.
Ainsi, selon Locchi, « on ne comprend rien au "fascisme" si l'on ne se rend pas compte ou si l'on ne veut pas admettre que le "phénomène fasciste" n'est que la première manifestation politique d'un vaste phénomène spirituel et culturel, nommons-le "surhumanisme", ne serait-ce que pour mettre les choses au clair, dont l'origine remonte à la seconde moitié du XIXe siècle »[14].
Selon Giorgio Locchi, le fascisme est la première expression incarnée du Surhumanisme, dont l’origine remonte principalement à Nietzsche et à Wagner, opposition absolue à l’Égalitarisme des temps modernes, produit déspiritualisé du christianisme et cause principale de la décadence de l’œcoumène européen. Le mouvement fasciste n’a évidemment rien de matérialiste ou de politicien : il vise à instaurer une nouvelle spiritualité (donc communautaire et populaire), une nouvelle forme-de-vie a-chrétienne dans l’avenir, conforme à l’esprit archaïque des anciens cultes grecs, romains ou germaniques ; en opposition radicale, absolue, irréconciliable avec le grand cycle égalitaire commencé avec le christianisme.
Le fascisme est donc une reconstruction métamorphique d’une conception-du-monde et d’une forme de civilisation dont les Européens ont été dépossédés par le virus égalitaire, siècle après siècle, depuis la christianisation de Rome. Sa portée est donc immense et dépasse (bien qu’il l’inclue) le champ des « programmes » politiques. L’objet du fascisme est en effet bel et bien un changement de civilisation et pas seulement de régime. Il envisage le politique comme une véritable forme d’esthétique historique, la fonction souveraine ayant en charge de modeler sur le long terme et pour l’avenir un destin pour le peuple et un projet pour sa civilisation.
Le fascisme vu par Dominique Venner
« Le fascisme est né de la Première Guerre mondiale et de la jeune génération des tranchées qui voulut exercer son droit à commander dans la paix comme elle l’avait fait dans la guerre. (…) Mêlant volontarisme et vitalité, il fut une entreprise autoritaire pour apporter des solutions neuves aux défis que le vieux système libéral ne semblait plus en état de relever. Il fut aussi une tentative pour créer une méritocratie libérée du pouvoir de l’argent, ayant pour ambition de renouer avec les liens communautaires qu’avait défaits la révolution industrielle. Si l’on braque l’attention sur le milieu d’où il a surgi, on découvre qu’il fut la revanche improbable et momentanée d’un type humain, prépondérant dans toute l’Europe avant le XIXe siècle, celui de l’homme d’épée, que le triomphe du bourgeois avait relégué dans une position subalterne, marginale et méprisée. En d’autres termes, son originalité foncière fut d’être un mouvement plébéien animé par une éthique militaire et aristocratique. Ce trait ne définit pas la totalité du fascisme, mais il en cerne l’essence et les limites »[15].
Principales valeurs partagées par les mouvements relevant du fascisme en tant que phénomène
La base commune des mouvements que l'on peut rattacher au fascisme est constituée par :
- * la reconnaissance de l’inégalité de valeur entre les hommes,
- * le différentialisme hiérarchisant entre les peuples,
- * la recherche de l’homogénéité ethnique des nations et le refus des métissages,
- * l’autarcie économique,
- * l’éthique de l’honneur,
- * l’esthétique codée comme fondement de l’art,
- * l’éducation disciplinaire,
- * le principe de sélection aux mérites et aux talents étendu à toute la société,
- * l’interdiction du capitalisme spéculatif et mondialisé,
- * l’éradication des déviances et des pathologies sociales ou sexuelles (non pas au nom d’une métaphysique mais de principes d’hygiène biologique et éthologique)
- * le recours à la volonté de puissance, principe vitaliste de dépassement inégalitaire de la condition humaine.
- * une certaine relativisation des notions de Bien et de Mal.[16]
Bibliographie
Ouvrages
- Philippe Baillet, Le Parti de la vie : clercs et guerriers d'Europe et d'Asie, Saint-Genis-Laval, Akribeia, 2015, 241 p.
- Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ?, Paris, Les Sept Couleurs, 1962, Pythéas, 1996.
- Julius Evola, Le Fascisme vu de droite. Suivi de : Notes sur le IIIe Reich, Cercle Culture et Liberté 1981, 2ème éd. : Pardès, 1993, 214 p.
- Guillaume Faye, Réflexions archéofuturistes inspirées par la pensée de Giorgio Locchi, lire en ligne : [1]
- Thomas Ferrier, Fascismes d'Europe: Origines, idéologie, histoire..., Synthèse nationale, 2019, 128 p.
- Giorgio Locchi, Définitions. Les textes qui ont révolutionné la culture non conforme, éd. La Nouvelle Libraire, Collection Agora de l’Institut Iliade, 2022, 320 p.
- Armin Mohler, Robert Steuckers et Thierry Mudry, Généalogie du fascisme français. Dérives autour des travaux de Zeev Sternhell et Noel O’Sullivan, Idhuna, Genève, 1986 (rééd. Diffusion du Lore, 2017), 99 p.
- Ernst Nolte, Le Fascisme dans son époque, 3 vol.: L'Action française, Le Fascisme italien, Le National-socialisme, Paris, Julliard, 1970.
- Ernst Nolte, Les Mouvements fascistes. L'Europe de 1919 à 1945, Calmann-Lévy, Paris, 1969.
Travaux collectifs
- Le Fascisme [numéro thématique], Nouvelle École, n° 53-54, mars 2003, avec notamment:
- * Marco Tarchi, « Le fascisme à l’aube du 3e millénaire »,
- * Julien Freund, « Prolégomènes à une étude scientifique du fascisme ».
- « Dossier : le fascisme comme phénomène européen », Sparta, vol. IV, 2025; avec notamment:
- * Philippe Baillet, « Optimisme fasciste et pessimisme traditionaliste », p. 15-24.
- * Enzo Erra, « Le sens ultime du fascisme » [trad. par Philippe Baillet de la contribution d'Enzo Erra à l'ouvrage collectif Sei riposte a Renzo De Felice], p. 25-85.
- * Enzo Erra, « Tradition et intervention » [trad. de postface d'Enzo Erra à : Julius Evola, Orientamenti, Edizioni di Ar, Padoue, 2000, p. 73-80], p. 87-100.
Articles
- Christophe Dolbeau, « Les femmes et l'Ordre nouveau », in : Tabou, no 31, 2024, pp. 7-45.
- Roger Griffin, « "Consensus ? Quel consensus ?" — Perspectives pour une meilleure Entente entre spécialistes francophones et anglophones du fascisme », in : Vingtième Siècle. Revue d'histoire, 2010/4, n° 108, p. 53-69.
- Giorgio Locchi, « Adriano Romualdi, l'essence du fascisme et la conception sphérique du temps de l'histoire » , in: Philippe Baillet, Le parti de la vie : clercs et guerriers d'Europe et d'Asia, Éditions Akribeia, 2015, p. 164-179.
- Armin Mohler, « Le "style" fasciste », in : Nouvelle École, n°42, été 1985, pp. 59-86.
Articles connexes
Notes et références
- ↑ Certains historiens, comme Armin Mohler, excluent le national-socialisme de la Révolution conservatrice allemande, contrairement à Giorgio Locchi et Adriano Romualdi qui en font au contraire son centre de gravité.
- ↑ Pierre Milza, Les Fascismes, Point Seuil, 1991.
- ↑ Eric Hobsbawm, L'Âge des extrêmes : le court xxe siècle 1914-1991 (éd. originale : The Age of Extremes, 1994), traduction française, coédition Le Monde diplomatique - Éditions Complexe, 1999, p. 178-179.
- ↑ Max Horkheimer, Autoritärer Staat. Die Juden und Europa - Aufsätze 1939-1941, Amsterdam, de Munter, 1967
- ↑ Karl Polanyi, « L’essence du fascisme », pp. 369-395, dans : M. Cangiani et J. Maucourant éd., Essais de Karl Polanyi, Paris, le Seuil, 2008.
- ↑ Philippe Nemo, Histoire des idées politiques aux Temps modernes et contemporains, Paris, PUF, « Quadrige », 2002, 1428 p.
- ↑ Guillaume Faye, op. cit.
- ↑ Trad. française : Cercle Culture et Liberté 1981, 2ème éd. : Pardès, 1993, 214 p.
- ↑ Adriano Romualdi, « Le fascisme de Julius Evola », in : Totalité, no 21/22, octobre 1985, p. 201--207, trad. française de la recension du livre de Julius Evola parue le 7 novembre 1964 dans le quotidien Il Secolo d'Italia.
- ↑ Philippe Baillet, « Optimisme fasciste et pessimisme traditionaliste », in : Tabou, no 17, 2010, p. 27-35; article revu, augmenté et rééd. in : Sparta, no 4, 2025, p. 15-24.
- ↑ Enzo Erra, « Le sens ultime du fascisme » [trad. par Philippe Baillet de la contribution d'Enzo Erra à l'ouvrage collectif Sei riposte a Renzo De Felice], Tabou, no 17, 2010, p. 36-93; trad. revue et rééd. in : Sparta, no 4, 2025, p. 25-85; et « Tradition et intervention » [trad. de postface d'Enzo Erra à : Julius Evola, Orientamenti, Edizioni di Ar, Padoue, 2000, p. 73-80], Tabou, no 17, 2010, p. 94-106; trad. revue et rééd. in : Sparta, no 4, 2025, p. 87-100.
- ↑ Paru en traduction française dans le no 42 de Nouvelle École, cf. Bibliographie.
- ↑ Matteo Romano, « Armin Mohler e la fedeltà ad uno “stile” differente », Barbadillo, 23.7.2025.
- ↑ Giorgio Locchi, L'Essenza del fascismo, avec une interview de l'auteur par Marco Tarchi, Edizioni del Tridente, , Castelnuovo Magra, 1981, 70 p., p. 8.
- ↑ Dominique Venner, La Nouvelle revue d'histoire, mai-juin 2003, n°6, p.45.
- ↑ Guillaume Faye, op. cit.