Ernst Nolte

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Ernst Nolte, né le 11 janvier 1923 à Witten en Rhénanie-du-Nord-Westphalie et mort le 18 août 2016 à Berlin, est un historien et philosophe allemand, spécialiste des mouvements politiques de l'entre-deux-guerres.

Ernst Nolte

Biographie

La Guerre civile européenne

Ernst Hermann Nolte est né le 12 janvier 1923 à Witten (Ruhr), dans une famille d'enseignants catholiques. Il grandit à Hattingen (Ruhr), où son père est devenu directeur d'école. Ernst Nolte sera membre de la Hitler-Jugend.

Il obtient son baccalauréat en 1941 à Hattingen. Il commence à étudier la littérature allemande, le grec et la philosophie, d'abord à l'Université de Münster, puis à celle de Berlin. Au semestre d'hiver 1943-1944, il se transfère à l'Université Albert-Ludwig de Fribourg en Brisgau. Il y adhère à la Fraternité Friedrich Ludwig Jahn, où il a pour mentor Walter Jens[1]. Il est dispensé du service militaire, car il lui manque trois doigts de naissance à la main gauche. Son frère, en revanche, perdra la vie au combat l'année suivante. Il passe en mars 1945 ses examens dans un bunker antiaérien.

Après-guerre

Après la fin de la guerre, Ernst Nolte enseigne de 1945 à 1964 l'allemand, le latin et le grec ancien aux gymnases de Paderborn, Brühl, Neuss et Bad Godesberg.

La carrière académique

En novembre 1950, il se réinscrit à l'Université de Fribourg en Brisgau. Il y suit notamment les cours de Martin Heidegger, Eugen Fink, Wilhelm Szilasi, Max Müller et de Karl Ulmer. En décembre 1952, il y obtient son doctorat de philosophie en soutenant, sous la direction d'Eugen Fink, une thèse consacrée à la notion de dépersonnalisation et à la dialectique chez les idéalistes allemands et chez Marx. Cette thèse est en fait l'aboutissement d'un projet antérieur, qu'il avait commencé à élaborer peu avant la fin de la guerre, sous la direction de Heidegger, un travail sur la relation entre l'éternité et le temps.

Nolte devient assistant de Theodor Schieder à l'Université de Cologne.

En 1963, il rédige son travail d'habilitation, qui va le rendre célèbre sous le titre Le fascisme dans son époque. L'ouvrage est rapidement traduit en plusieurs langues.

Il enseigne encore brièvement comme Privatdozent à Cologne, avant d'être nommé, en 1963, professeur ordinaire d'histoire contemporaine à l'université de Marbourg. En 1973, il est nommé professeur ordinaire à l'Université libre de Berlin. Il y enseigne jusqu'à son éméritat en 1991.

En 1985, il obtient le prix Hanns Martin Schleyer, ainsi que le prix Konrad-Adenauer-Preis en 2000.

Jusqu'en 1968, Nolte, même s'il n'est pas engagé politiquement, peut être qualifié de libéral de gauche. Cependant, le mouvement de 1968 le fait évoluer vers des positions libérales-conservatrices, puis de plus en plus non-conformistes. Au cours des dernières années de sa vie, il collabore à la Junge Freiheit et à la revue culturelle Sezession.

Thèses

Le fascisme dans son époque (1963)

Le premier ouvrage d'Ernst Nolte est aujourd'hui encore considéré comme un classique. Il avait déjà travaillé sur Le fascisme à son époque alors qu'il enseignait l'allemand, le latin et le grec au lycée à la fin des années 1950 et s'en était servi comme thèse de doctorat. Avec Der Faschismus in seiner Epoche, Nolte adopte une méthode de travail qui marquera toute son œuvre scientifique et qui compte encore aujourd'hui de nombreux adeptes dans et hors du milieu universitaire. Il interprète le phénomène de l'État national-socialiste et celui de l'Etat fasciste à partir d'eux-mêmes, analyse leur compréhension d'eux-mêmes et en déduit les particularités idéologiques. Jusqu'alors, le terme n'était connu que comme une auto-désignation du ou des mouvements politiques et comme un terme de combat de la gauche d'après-guerre. Grâce à Nolte, le « fascisme » est devenu un terme d'analyse scientifique.

Contrairement à l'interprétation qu'en font ses contemporains, Nolte bouscule les schémas de pensée existants. Il affirme que le fascisme a été une réaction à certaines circonstances et crises historiques, et tente de mettre en lumière les similitudes et les différences entre les différents mouvements fascistes. L'idée selon laquelle les différentes formes de fascisme européen étaient des réactions au communisme soviétique russe est centrale. C'est notamment cette thèse qui a valu à l'ouvrage, et donc à Ernst Nolte, d'être sévèrement critiqué par d'autres historiens[2].

Contrairement à Renzo De Felice pour qui le fascisme a été un mouvement spécifique propre à un contexte et à une époque donnée, Ernst Nolte considère qu'il existe un vaste contenant, qui regroupe aussi bien le fascisme italien, le national-socialisme allemand, la Phalange espagnole, les Jeunesses patriotes de Taittinger et même l'Action française.

Nolte ne s'est pas intéressé aux aspects spirituels du phénomène fasciste. Pour lui, le fascisme a été essentiellement un mouvement anti-marxiste, qui se donnait pour but la destruction totale de son adversaire. Selon lui, les origines du fascisme doivent être recherchées chez Charles Maurras et dans l'Action française, qui a constitué la première tentative d'actualiser et de transformer en parti politique l'entièreté du courant contre-révolutionnaire postérieur à 1789.

L'Allemagne et la guerre froide (1974)

Près de trente ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le monde était à nouveau sur le point de connaître une conflagration mondiale. Les puissances du bloc formé par les États-Unis d'Amérique et l'Union soviétique se sont réarmées après les efforts de détente des années 60 et se sont livrées à une course au monde jusqu'alors inédite. Dans son livre L'Allemagne et la guerre froide, Ernst Nolte a analysé comme personne d'autre les relations tendues entre les deux grandes puissances. Selon Nolte, le conflit mondial n'est pas seulement une lutte d'influence, de ressources et d'hégémonie, mais aussi un combat d'idéologies. Pour lui, les « démocraties occidentales » sont en concurrence permanente avec leurs alternatives, qui ont pris la forme du national-socialisme et du communisme au 20ème siècle.

Dans L'Allemagne et la guerre froide, Nolte étudie également les circonstances géopolitiques qui ont conduit à la division de l'Allemagne. En tant qu'historien, il était au cœur de l'actualité, la double décision de l'OTAN ayant donné à de nombreux Allemands de l'Ouest l'impression d'être devenus tout à coup la première tranchée de la guerre froide. Nolte établit également un parallèle avec Israël, une comparaison qui a suscité l'étonnement et parfois l'admiration de nombreux critiques contemporains pour sa méthode de travail[3].

La Guerre civile européenne (1987)

La fascination pour les pensées et les points de vue sous-jacents aux grandes évolutions du monde imprègne également l'œuvre la plus controversée de Nolte. Avec Der europäische Bürgerkrieg 1917-1945. Nationalsozialismus und Bolschewismus (La guerre civile européenne 1917-1945 - National-socialisme et bolchevisme), il s'est propulsé au cœur de la querelle des historiens, exacerbée par le mouvement de 1968, sur la manière dont la recherche traite le national-socialisme. A sa critique centrale, selon laquelle l'historiographie de la RFA n'aurait pas dû adopter sans réflexion la perspective des puissances victorieuses, Ernst Nolte oppose dans ce livre un contraste en confrontant les deux adversaires de la « guerre civile ».

Avec sa thèse selon laquelle les camps de concentration du régime national-socialiste auraient été la réaction à l'archipel du Goulag des communistes, il fait tomber de son piédestal, selon de nombreux collègues, l'une des vaches sacrées de l'Allemagne d'après-guerre. Les recherches universitaires de Nolte sont perçues comme une attaque contre la souveraineté d'interprétation des intellectuels de la République fédérale d'Allemagne et interprétées comme une relativisation de l'Holocauste. Le conflit autour des déclarations de Nolte, souvent interprétées de manière délibérément erronée, continue d'assombrir le livre et son auteur. Il n'en reste pas moins un ouvrage de référence, non seulement pour les historiens spécialisés, mais aussi pour tous ceux qui souhaitent comprendre la pensée historique de Nolte[4].

La pensée historique au XXe siècle (1991)

A propos de l'ouvrage publié au début des années 1990 , Geschichtsdenken im 20. Jahrhundert. De Max Weber à Hans Jonas, il y a peu à dire. Non pas parce que le livre est seulement faible en contenu ou même en qualité, mais parce qu'il semble à première vue être l'étape logique après les débats autour de son dernier grand ouvrage, La guerre civile européenne. Ses contemporains l'ont qualifié de « costume d'Arlequin assez abscons » que l'homme, alors âgé de 68 ans, avait revêtu. Pour Nolte, il s'agissait de trouver des personnes partageant les mêmes idées que lui, qu'il voulait à présent dénicher dans le passé après les avoir vainement recherchées dans le présent.

Le troisième mouvement de résistance radicale : L'islamisme (2009)

Dans son œuvre tardive, Ernst Nolte a également cherché le point sensible. L'examen de l'islamisme, avec en toile de fond les attentats du 11 septembre 2001 et la guerre internationale contre le terrorisme, n'est pas vraiment extravagant. Pour lui, l'islamisme, troisième idéologie après le bolchevisme et le national-socialisme, s'oppose fondamentalement à la démocratie libérale. Nolte reste impassible dans cette évaluation, il considère que le système de valeurs occidental n'est pas moins menaçant pour l'existence des pays marqués par l'islam, comme c'est le cas dans l'autre sens.

Tout au long de sa vie, ses détracteurs ont reproché à Nolte de s'intéresser davantage aux idéologies qu'à la réalité. Mais c'est justement La troisième résistance radicale: l'islamisme qui nous montre que l'idéologie et la réalité ne forment pas un couple antagoniste. Dans ce livre, Ernst Nolte révèle une fois de plus une manière de penser au-delà des perspectives préconçues. Si ses résultats peuvent être contestables, la grande qualité de sa méthode de travail et la force d'innovation de sa pensée ne le sont pas[5].

La « Querelle des historiens »

Le 6 juin 1986, il déclenche involontairement la polémique qui va devenir célèbre sous le nom de Historikerstreit (« Querelle des historiens »), en publiant un article dans le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ). Dans ce texte, Nolte affirme que le Goulag a précédé Auschwitz, aussi bien dans les idées que dans les faits. Il déclare ainsi que le « génocide » des nationaux-socialistes n'a pu se produire qu'en raison de la terreur suscitée précédemment par les « massacres de classes » commis par les bolcheviks. Selon Nolte, la persécution des Juifs, qui n'était déjà pas tenue pour un point central dans ses travaux précédents consacrés au fascisme, n'a été qu'une réaction aux atrocités qui ont suivi la Révolution d'octobre, et ne peut être comprise sans que l'on tienne compte du rapport entre les deux phénomènes.

Il lance ensuite le concept de « guerre civile européenne », pour caractériser la période 1917-1945.

Nolte s'est ensuite opposé au durcissement des lois réprimant le révisionnisme historique et l' « incitation à la haine », les dénonçant comme un danger pour la liberté d'opinion. En 1998, il publie Historische Existenz. Zwischen Anfang und Ende der Geschichte?, qu'il considère comme la synthèse de tous ses travaux, et dans lequel il réaffirme ses positions. Il ajoute que les actions commises par les partisans communistes derrière la ligne du front ont certainement joué un rôle important dans l'intensification de la persécution des Juifs.

Selon Nolte, le fait que Hitler ait considéré les Juifs comme des ennemis et qu'il ait pris certaines mesures est explicable dès 1939. Le boycott général des produits allemands sur les marchés étrangers, l'appel à la « guerre économique et financière » par des organisations juives dès le 24 mars 1933 dans Daily Express, les lettres de Chaim Weizmann au Premier ministre anglais, tout cela ont constitué une forme de « déclaration de guerre juive », qui a justifié un internement préventif des Juifs au début de la guerre.

Toutefois, Ernst Nolte n'a jamais montré la moindre sympathie ni le moindre intérêt pour le révisionnisme historique.

La « Querelle des historiens » a révélé un fossé entre les historiens de tendance conservatrice, qui se sont rangés derrière Nolte, et les historiens libéraux et marxistes, qui se sont unis pour hurler au scandale et abreuver d'injures Nolte.

Mais surtout, cette polémique a mis en évidence l'absurdité du mythe d'une « histoire neutre » en Allemagne. Il est apparu aussi clairement que les historiens comme Udo Walendy qui osaient sortir du cadre restreint de cette polémique s'exposaient à des sanctions pénales ainsi qu'à la mort sociale.

Le principal adversaire de Nolte a été Jürgen Habermas, qui a accusé Nolte, ses défenseurs et même le gouvernement Kohl, de vouloir « laver l'Allemagne de ses péchés ».

Oeuvre

en allemand

  • Der Faschismus in seiner Epoche. Action francaise – Italienischer Faschismus – Nationalsozialismus, Munich, 1963 [nouvelle édition 2000]. ISBN 3-7610-7248-1
  • Die faschistischen Bewegungen, Munich, 1966.
  • Die Krise des liberalen Systems und die faschistischen Bewegungen, Piper Verlag, Munich, 1968.
  • Sinn und Widersinn der Demokratisierung in der Universität, Rombach Verlag, Fribourg, 1968.
  • Was ist bürgerlich? und andere Artikel, Abhandlungen, Auseinandersetzungen, Stuttgart, 1979.
  • (éditeur) Theorien über den Faschismus. 6. Auflage, Munich, 1984. ISBN 3-492-10365-0
  • Marxismus und industrielle Revolution, Stuttgart, 1983.
  • Deutschland und der Kalte Krieg, 2. Aufl. Stuttgart, 1985.
  • Der europäische Bürgerkrieg 1917-1945. Nationalsozialismus und Bolschewismus, 4. Aufl. Frankfurt/M., 1989.
  • Das Vergehen der Vergangenheit. Antwort an meine Kritiker im sogenannten Historikerstreit, Berlin, 1988.
  • Nietzsche und der Nietzscheanismus, Francfort, 1990.
  • Geschichtsdenken im 20. Jahrhundert; von Max Weber bis Hans Jonas, Propyläen, Frankfurt/Main, 1991. ISBN 3-549-05379-7
  • Streitpunkte. Heutige und künftige Kontroversen um den Nationalsozialismus, Propyläen, Berlin Frankfurt/Main, 1993. ISBN 3-549-05234-0
  • Die Deutschen und ihre Vergangenheiten. Erinnerung und Vergessen von der Reichsgründung Bismarcks bis heute, Herbig Verlag, Munich, 1995. ISBN 3-7766-9004-6
  • (avec François Furet) „Feindliche Nähe": Kommunismus und Faschismus im 20. Jahrhundert. Ein Briefwechsel, Herbig Verlag, Munich, 1998. ISBN 3-7766-2029-3
  • Historische Existenz. Zwischen Anfang und Ende der Geschichte?, Herbig Verlag, Munich, 1998.
  • Der kausale Nexus. Über Revisionen und Revisionismen in der Geschichtswissenschaft; Studien, Artikel und Vorträge 1990–2000, Herbig Verlag, Munich, 2002. ISBN 3-7766-2279-2
  • L’eredità del nazionalsocialismo, Di Renzo Editore, Rome, 2003.
  • Siegfried Gerlich im Gespräch mit Ernst Nolte: Einblick in ein Gesamtwerk, Éditions Antaios, Dresde, 2005. ISBN 3-9350-6361-X
  • Die Weimarer Republik. Demokratie zwischen Lenin und Hitler, Herbig Verlag, Munich, 2006. ISBN 3-7766-2491-4
  • Die dritte radikale Widerstandsbewegung: der Islamismus, Landt Verlag, Berlin, 2009. ISBN 978-3-938844-16-8
  • Italienische Schriften. Europa – Geschichtsdenken – Islam und Islamismus. Aufsätze und Interviews aus den Jahren 1997 bis 2008, Landt Verlag, Berlin, 2011. ISBN 978-3-938844-22-9
  • Späte Reflexionen: Über den Weltbürgerkrieg des 20. Jahrhunderts, Karolinger Verlag, Vienne, 2011.

Traductions françaises

  • Les Mouvements fascistes : l'Europe de 1919 à 1945, Paris, Calmann-Lévy, collection « Les grandes vagues révolutionnaires », 1969. Traduit de l'allemand par Rémi Laureillard
  • Le Fascisme dans son époque, 3 vol.: L'Action française, Le Fascisme italien, Le National-socialisme, Paris, Julliard, 1970
  • Le Fascisme, de Mussolini à Hitler, Paris, Librairie Universelle, « Encyclopédie politique », 1973. Préface par Jorge Semprún
  • avec François Furet, Correspondance, Fascisme et communisme, Paris, Plon, 1998
  • La Guerre civile européenne (1917-1945) : national-socialisme et bolchevisme, Paris, Édition des Syrtes, 2000. Traduit de l'allemand par Jean-Marie Argelès ; préface par Stéphane Courtois. Réédition : Paris, Librairie Académique Perrin, collection « Tempus », 2011
  • Nietzsche. Le champ de bataille, Paris, Bartillat, 2000. Traduit de l'allemand par Fanny Husson ; préface par Édouard Husson
  • Les fondements historiques du national-socialisme, Monte-Carlo, Éditions du Rocher, 2002
  • Fascisme & totalitarisme, textes rassemblés par Stéphane Courtois, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2008
  • Entre les lignes de front, Paris, Le Rocher, coll. « Démocratie ou Totalitarisme », 2008

Sources

  • SCHEIL Stefan, « Hundert Jahre Ernst Nolte », in Sezession, n°112, février 2023, Schnellroda, p. 52-53.

Notes et références

  1. Le terme exact est Leibbursch, qui renvoie à une relation typique des fraternités étudiantes germaniques, qui n'a pas d'équivalent en français. Le Leibbursch doit guider un Leibfuchs.
  2. Mike Gutsing, « Der Streitbare – Die fünf besten Bücher von Ernst Nolte », Freilich, 11.1.2024.
  3. Ibidem.
  4. Ibidem.
  5. Ibidem.