Marcel Déat
Marcel Déat, né à Guérigny (Nièvre) le 7 mars 1894 et mort à Turin (Italie) le 5 janvier 1955, est un militant et un homme politique français.
Journaliste, il milite d'abord dans la SFIO[1], tout en restant méfiant envers la théorie marxiste. Il fait partie des socialistes qui s'intéressent aux thèses du planisme (Henri De Man) et du néo-socialisme. Exclu de la SFIO, il adhère au Parti socialiste de France-Union Jean Jaurès, puis fonde une Union socialiste républicaine.
Pacifiste, en quête d'un socialisme non dogmatique et planiste qui réconcilierait les classes sociales, il se rapproche du fascisme et crée le Rassemblement national populaire, qui devient le rival du PPF de Jacques Doriot.
Sommaire
- 1 Biographie
- 1.1 Un socialiste non communiste
- 1.2 Le militant l'emporte sur l'universitaire en herbe
- 1.3 Un socialiste révisionniste et un théoricien planiste
- 1.4 Un réformisme à caractère révolutionnaire
- 1.5 Ennemi et concurrent du fascisme
- 1.6 Les “néo-socialistes” sont exclus de la SFIO
- 1.7 Le rapprochement avec le fascisme
- 1.8 Collaborationniste convancu
- 1.9 L'attachement persistant au socialisme et le refus de la réaction
- 1.10 L'illusion d'arriver aux portes du pouvoir, puis l'exil
- 2 Publications
- 3 Bibliographie
- 4 Notes et références
Biographie
Marcel Déat voit le jour à Guérigny, petite commune de la Nièvre, le 7 mars 1894, au sein d’une famille modeste : son père, Joseph, originaire de l’Allier, est un commis administratif (employé de bureau) du ministère de la Marine ; sa mère, née Amélie Leroux, née à Brest, appartient à une humble famille, et occupe un petit emploi à l’Arsenal de Guérigny[2]. Marcel Déat recevra de ses parents de très solides convictions républicaines et socialisantes, dont il ne se départira jamais.
L’enfant se révèle vite d’une intelligence très supérieure à la moyenne. Brillant élève à l’école primaire, il obtient sans difficulté la bourse lui permettant d’effectuer des études secondaires[3] au lycée de Nevers. Bachelier, il monte à Paris et devient élève de la khâgne du lycée Henri IV, où, comme tant d’autres personnages illustres, il aura Alain comme professeur de philosophie. Dès cette époque, il s’enflamme pour le socialisme, au point de fonder avec quelques camarades un cercle de réflexion de tendance jaurésienne. Reçu au concours d’entrée à l’École normale supérieure en juillet 1914, il est mobilisé dès septembre de la même année, sans avoir eu le temps d’intégrer la rue d’Ulm. Affecté successivement à Riom, puis à Ressons-sur-Matz (dans l’Oise), il est élève officier, en tant que normalien, et terminera la guerre comme capitaine d’infanterie, après avoir été cité cinq fois Son expérience militaire lui instillera un pacifisme indélébile. Il contracte au front une pleurésie qui lui laissera de sérieux problèmes pulmonaires.
Agrégé de philosophie en 1920, il compte parmi les premiers membres du Centre de Documentation sociale que Célestin Bouglé, sociologue de l’école de Durkheim, vient de fonder à l’ENS[4]. Il semble donc tout destiné à une carrière universitaire.
Un socialiste non communiste
Mais le virus de la politique l’a profondément atteint, et le besoin irrépressible de militer l’emporte, chez lui, sur le goût de l’étude. En 1920, il adhère à la cinquième section parisienne de la SFIO, et en assume le secrétariat pendant un peu plus de deux ans. En décembre 1920, lors de la scission du congrès de Tours, il fait partie de la minorité qui, autour de Paul Faure, Pierre Renaudel, Léon Blum, refuse de suivre la majorité, laquelle fonde la Section française de l’Internationale communiste (SFIC), qui prendra plus tard le nom de parti communiste français (PCF). Ce choix n’a rien d’étonnant. Ses parents, Alain, Bouglé et autres ont fait de lui un républicain convaincu aux idées avancées, mais non un révolutionnaire. Il conçoit le socialisme comme un perfectionnement de la République, non comme sa subversion. En cela, il se situe dans la ligne jaurésienne. Avec cette différence essentielle, d’ailleurs, à savoir que Jaurès se réclamait explicitement du marxisme, tandis que Déat, lui, avait toujours eu des doutes quant à la justesse des postulats philosophiques de ce dernier, et considérait que l’auteur du Capital s’était trompé en prévoyant la concentration inexorable des moyens de production et d’échanges en un nombre toujours plus restreint de personnes, la prolétarisation de catégories toujours plus nombreuses de la population et, par suite, le caractère inévitable d’une révolution devant accoucher d’une société socialiste. Déat n’était d’ailleurs pas le seul, à la SFIO, à penser ainsi ; son point de vue était celui de Paul Faure, Pierre Renaudel, Vincent Auriol et de plus jeunes, tel Jules Moch, tous persuadés de l’obsolescence des prévisions économiques et sociales de Marx.
Quoique officiellement marxiste et ouvriériste, la SFIO s’alignait de fait sur le révisionnisme de Bernstein ou de Kautsky. Déat devient alors un des proches de Pierre Renaudel — ancien com- pagnon de lutte de Jaurès, ancien directeur de L’Humanité — et un des membres actifs de son groupe de La Vie socialiste.
Le militant l'emporte sur l'universitaire en herbe
Maecel Déat, cependant semblait devoir commencer une brillante carrière universitaire. Protégé de Célestin Bouglé, mandarin tout-puissant à l’ENS, membre de son Centre de documentation sociale, il aurait dû, semble-t-il, rester à Paris et enseigner à Normale ou à la Sorbonne ou encore à l’École pratique des Hautes Études. Il n’en fut rien, la politique le distrayant par trop de ses travaux intellectuels. En octobre 1922, il fut nommé professeur de philosophie au lycée de Reims Là, il épousa, en avril 1924, une de ses élèves, de neuf ans et demi sa cadette, fille d’un instituteur[5].
Quoique éloigné de la capitale, il ne perd pas son temps. Il fonde et dirige la section départementale du Syndicat de l’Enseignement secondaire (ancêtre du SNES). Il devient une des plus belles plumes du Travail de la Marne, journal socialiste local. Il s’impose à la section SFIO de la Marne, à tel point qu’il figure sur la liste de candidats socialistes de ce département lors des législatives des 11 et 25 mai 1924, sans, cependant, parvenir à être élu[6]. Il est élu conseiller municipal de Reims au printemps de 1925[7]. En mai-juin 1926, il est élu député à la faveur d’une législative partielle provoquée par le décès subit du député socialiste local Jules Lobet.
Il regagne alors Paris où il vient d’être nommé bibliothécaire adjoint de l’ENS. Membre actif des commissions du Suffrage universel et de l’Enseignement et des Beaux-Arts à la Chambre, collaborateur au journal socialiste Le Populaire, il se présente alors comme l’un des meilleurs éléments de la génération montante au sein de la SFIO. Il est néanmoins battu lors des législatives des 22 et 29 avril 1928, où il se présentait dans la circonscription marnaise d’Épernay[8]. Cependant, en mai 1930, Blum lui confie la charge de secrétaire du groupe parlementaire SFIO. Il dote alors ce groupe d’un centre documentaire. Par ailleurs, il est élu président de la Fédération des Étudiants socialistes. Ses activités professionnelles pâtissent de son activité militante. Cette dernière l’incite à demander sa mise en disponibilité lorsque le ministère le nomme au lycée de Digne. Néanmoins, il est un des intervenants au Cours universitaire de Davos en 1930.
Un socialiste révisionniste et un théoricien planiste
Chez Déat, l’intellectuel devait toujours inspirer et commander l’homme politique. Durant toutes ses années de militantisme, Déat avait beaucoup réfléchi sur l’état présent et l’avenir du Socialisme. Il livre les conclusions de ses réflexions dans un ouvrage publié par les éditions Valois en 1930 et intitulé Perspectives socialistes. Marcel Déat y dresse d’abord le constat de la fausseté des prévisions de Marx sur le caractère inéluctable de la révolution et de l’avènement du socialisme. Le nombre des détenteurs de capitaux ne va pas en diminuant constamment, au contraire ; les effectifs du prolétariat n’augmentent pas indéfiniment, et les classes moyennes, quoique durement frappées par les crises économiques, ne se prolétarisent pas et tendent même à se multiplier sous l’effet de la complexité structurelle croissante de la société moderne. Le capitalisme ne suit pas une évolution linéaire qui mène tout droit au socialisme parce qu’il concentre toutes les richesses, les capitaux et ressources matérielles en un nombre toujours plus limité de personnes, comme le pensait Marx, ou encore, comme le croyaient les réformistes, parce qu’il est amendable et socialisable graduellement, par réformes successives. Cela dit, le capitalisme traverse une crise sérieuse qui lui aliène non seulement le prolétariat, mais les classes moyennes et les petits et moyens entrepreneurs. Et c’est dans cette situation que siège la possibilité d’instaurer le socialisme. Le socialisme ne pouvant naître ni de l’évolution nécessaire du capitalisme vers son renversement, ni d’une politique réformiste continue, il convient de se saisir de la situation pré-révolutionnaire de forte contestation sociale que provoque sa crise pour mettre en œuvre, grâce à une politique résolument dirigiste, voire autoritaire, un ensemble de réformes économiques structurelles. Il faut non pas le détruire par une quelconque révolution ou multiplier les réformes visant à lui adjoindre des mesures humanistes destinées à le rendre supportable, mais lui imposer un cadre d’orientation et de direction économique propre à éviter ses crises possibles et à assurer la coopération harmonieuse du capital et du travail et des petits, moyens et gros entrepreneurs, suivant un projet visant à assurer la prospérité nationale et la justice sociale.
Déat récuse les théories téléologiques et prospectives faisant découler l’avènement de la société socialiste de l’évolution naturelle, qu’il s’agisse de la conception marxiste de l’histoire ou du réformisme tendant à une amélioration continue du système capitaliste. Il leur oppose une politique que l’on pourrait qualifier d’opportuniste, dans le mesure où elle consiste à saisir l’occasion unique qu’offre la crise du capitalisme dans l’entre-deux-guerres (et singulièrement depuis l’éclatement de la crise de 1929 qui, née aux Etats-Unis, a atteint l’Europe et va bientôt s’étendre en France au mo- ment où Déat écrit son ouvrage) pour conquérir le pouvoir (démocratiquement) et imposer la politique dirigiste et hardiment réformiste qu’il préconise. Il croit possible, en 1930, de regrouper tous les mécontents, toutes les victimes de la crise présente du capitalisme (ouvriers, employés et autres salariés, petits et moyens entrepreneurs, cadres moyens de l’industrie et du commerce, etc.) en u n front unique capable de conquérir légalement le pouvoir et d’y porter des hommes résolus à entreprendre une telle politique. Ce rassemblement réconcilierait les sensibilités politiques et sociales les plus diverses. Cela peut sembler une gageure. Mais Déat y croit dur comme fer, et l’évoque avec un enthousiasme entraînant. Et il appelle à rassembler « dans une unité de fait et de doctrine depuis ceux des communistes qui sont revenus du stalinisme, mais dans le cœur de qui les appels de la révolution russe trouveront toujours de l’écho jusqu’à ceux des démocrates qui ont compris l’idée et la nécessité du choix, depuis les jacobins férus de la souveraineté pitique jusqu’aux syndicalistes dédaigneux de l’État, depuis la patience constructive des coopérateurs jusqu’aux impatiences négatives de certains libertaires ».
Marcel Déat renonce donc clairement et définitivement à la théorie marxiste de l’histoire. Et il substitue la coopération de toutes les classes sociales à la lutte des classes censée aboutir au triomphe de la classe ouvrière, devenue unique et donc maîtresse du pouvoir par élimination de toutes les autres.
Un réformisme à caractère révolutionnaire
En cela, il est réformiste. Mais son réformisme se distingue fortement de celui des Paul Brousse, Benoît Malon, Albert Thomas[9] ou même de celui de Jaurès (auquel Déat prétend pourtant rester fidèle). Ceux-ci, en effet, croyaient à la possibilité de socialiser le capitalisme, réforme après réforme, et d’aboutir ainsi à l’édification d’une société pleinement démocratique, juste et égalitaire. Ils renonçaient à la révolution et lui substituaient une évolution lente et paisible dans le cadre d’un capitalisme qui ne connaîtrait pas de crise grave et d’une société qui se transformerait progressivement, sans bouleversement.
Or, depuis la fin de la Grande Guerre, le capitalisme connaît des crises sérieuses et est miné depuis 1929 par une crise majeure provoquant aux États-Unis et en Europe des catastrophes économiques, sociales et humaines. Le socialisme ne peut donc pas découler de mesures législatives ponctuelles, progressives et séparées par des intervalles de temps. Indispensable, urgente, elle doit procéder d’une action politique résolue et consister en une réforme complète du système capitaliste grâce à une planification rigoureuse de l’économie et une organisation corporative du travail. Par son volontarisme, son dirigisme strict, son refus d’attendre et de miser sur une évolution lente et tranquille, et dans la mesure où il prend appui sur le rassemblement hautement revendicatif de toutes les victimes de la crise du capitalisme, le réformisme de Déat conserve un caractère révolutionnaire.
Ennemi et concurrent du fascisme
Dès lors qu’il se montre hostile au marxisme et préconise la coopération des classes, une organisation corporative du travail et une forte planification économique, le réformisme de Déat n’est-il pas peu ou prou fasciste ? En 1930, et jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale, Déat ne se recommande pas du fascisme. Mieux, il le combat. En 1933, il pourfend l’antisémitisme nazi. Il intervient avec force dans certains meetings de la Ligue contre l’antisémitisme (LICA). En novembre 1935, il fustige les lois antisémites de Nuremberg, et souhaite que l’Allemagne redevienne un pays civilisé et humaniste dans la lignée de Goethe, Schiller, Fichte, Schelling et Hegel. Il adhère au mouvement de défense des droits des Juifs d’Europe centrale et orientale et au comité sioniste France-Palestine, récemment créé. Son philosémitisme est alors tel que, dans son numéro du 25 avril 1936, Le Droit de vivre, périodique de la LICA, appellera les électeurs à voter pour lui lors des législatives qui verront la victoire du Front populaire.
Durant toute la décennie 1930, Déat reste un républicain convaincu et un ardent démocrate. S’il souhaite un exécutif fort pour appliquer la politique socialiste qu’il préconise, il n’entend pas remettre la démocratie républicaine en question, à la différence de Marcel Bucard et de son parti franciste, ou de la Solidarité française de Jean Renaud. Par ailleurs, il se démarque du colonel de La Rocque, héritier du catholicisme social des Le Play, La Tour du Pin et Albert de Mun, par l’inspiration on ne peut plus laïque et jacobine de son projet politique, qu’il qualifie de « révolution organisée ». Le fascisme, dont il reconnaît l’originalité, lui paraît une dictature, d’essence antidémocratique. Néanmoins, il admet les similitudes de son projet avec le fascisme mussolinien, et pense que ce dernier a instauré un système économique et social efficace et capable de séduire beaucoup de gens, tant à droite qu’à gauche. Il pense que si cette séduction gagnait les foules et les suffrages, elle pourrait aboutir à l’instauration en France d’un régime analogue à celui de l’Italie, au détriment de la démocratie, qui serait alors abolie. Autrement dit, Déat voit dans le fascisme un concurrent dangereux que seule la réalisation de son propre programme politique, économique et social peut empêcher d’accéder au pouvoir. Aussi parle-t-il de « course de vitesse avec le fascisme ». Il redoute alors tellement le fascisme qu’il adhère au Comité de vigilance des intellectuels antifascistes.
Les “néo-socialistes” sont exclus de la SFIO
Mais il ne parvient pas à entraîner son parti, la SFIO, dans son sillage. La gauche du parti, marxiste, menée par Marceau Pivert, l’attaque vigoureusement. La majorité de la SFIO, autour de Paul Faure, Léon Blum, Vincent Auriol, Roger Salengro et autres, reste attachée à un réformisme jaurésien (théoriquement marxiste, pratiquement modéré et libéral) opéré dans le cadre de la démocratie parlementaire de la IIIe République. Aussi considère-t-elle le projet de Déat comme une dérive fascisante.
Dès lors, Déat va se trouver marginalisé au sein de la SFIO. La faille qui le sépare de la majorité du parti ne va cesser de s’élargir. Minoritaire au sein de la SFIO, Déat n’est pourtant pas isolé. Il a l’appui d’un noyau de militants fervents qui l’admirent et croient en ses idées. Il a su convertir à ses vues Pierre Renaudel, ce vétéran respecté du marxisme, qui compta parmi les proches de Jaurès. Il est entouré d’hommes capables comme Adrien Marquet, forte personnalité, maire de Bordeaux depuis 1925, cacique de la SFIO en Gironde, Barthélémy Montagnon, député de la Seine, ou encore Paul Ramadier, futur président du Conseil de la IVe République. Et le courant réformiste qu’il représente, qualifié à partir de 1933, de “néo-socialiste”, s’affirme, même s’il ne parvient pas à s’imposer. L’initiateur en est le Belge Henri De Man, auteur en 1927 d’un important ouvrage intitulé Zur Psychologie des Marxismus (1926), traduit et publié en France sous le titre Au-delà du Marxisme en 1929. Ce Belge s’y livre à une analyse critique approfondie du marxisme et du socialisme en général, dans leurs assises même. Mettant en évidence les origines éthiques du socialisme (l’exigence de justice sociale), il critique les prétentions scientifiques du marxisme. Il conteste sa conception matérialiste et dialectique de la réalité, son interprétation de l’histoire, sa critique du capitalisme portant censément en lui les germes de sa disparition future, sa vision du socialisme comme le terme inéluctable de l’évolution du monde aboutissant à une société sans classes. À ses yeux, rien de tout cela n’est prouvé, et l’histoire, depuis la mort de Marx, a plutôt tendu à réfuter les thèses et les prévisions de ce dernier. Henri de Man critique particulièrement la conception marxiste de la nature et du rôle révolutionnaires du prolétariat. Il n’a aucune peine à démontrer que les ouvriers, loin de faire profession d’internationalisme socialiste, se sont révélés, en 1914 et pendant la Grande Guerre, profondément patriotes, en France et en Belgique comme en Allemagne, en Italie, en Grande-Bretagne et ailleurs. Chez eux, l’attachement à la nation, à ses traditions, à sa grandeur et à ses traditions, l’a emporté sur l’esprit de lutte des classes et l’idéal socialiste. Et il ne pouvait en aller autrement, puisque, à l’inverse des prévisions de Marx, leur condition, quoique difficile et aggravée par la présente crise du capitalisme, s’est tout de même améliorée depuis la fin du XIXe siècle. D’autre part, les sociétés évoluées du XXe siècle ne se réduisent pas à deux classes (prolétariat et bourgeoisie), mais incluent diverses classes moyennes, qui ont leurs intérêts propres. Henri de Man tire de ses analyses la conclusion de l’inanité du marxisme et de la nécessité de refonder le socialisme sur les bases d’une union des classes moyennes et populaires visant non à détruire le système capitaliste, mais à l’amender par une planification tendant à conjurer les risques des crises, et des réformes destinées à assurer plus de justice sociale. Ce sont les conclusions mêmes de Marcel Déat, influencé par la lecture de l’ouvrage d’Henri de Man[10].
Marcel Déat souhaiterait voir ses idées et son programme politique adoptés par la SFIO. Nous avons vu que ce vœu était loin d’être réalisé. Contre les “fauristes” et les “blumistes” d’une part, les “pivertistes” de l’autre, il est relégué aux marges du parti. En juillet 1933, au congrès de la SFIO de la Mutualité, cette situation ne fera que s’aggraver. Désireux de ne pas heurter, voire d’amadouer les partisans de Faure et Blum, il présente ses thèses sur un ton modéré, et s’efforce de convaincre par l’intelligence de ses vues et de ses démonstrations théoriques. Mais il n’en va pas de même pour Barthélé- my Montagnon, et surtout le tonitruant Adrien Marquet. Celui-ci déclame les idées néo-socialistes sur un ton passionné, emporté même, présente leur adoption comme une obligation impérieuse, et surtout les résume par la devise « Ordre Autorité Nation » dont Blum se déclare “épouvanté”, tout comme d’ailleurs la grande majorité des congressistes, au regard desquels le révisionnisme des “néos” consiste en une dérive fasciste. Et, finalement, le 5 novembre 1933, la direction de la SFIO prononce l’exclusion des “néo”, Déat, Marquet, Montagnon et Renaudel en tête.
Les “néos” purs et durs ne partaient pas seuls. Ils entraînaient avec eux 28 députés, 7 sénateurs, 6 fédérations[11], une partie des militants des XVIIIe et XXe arrondissements de Paris (ceux de, respectivement, Montagnon et Déat), et 30 000 adhérents. Ce n’était pas rien, mais tous ces exclus ou partants volontaires, suivant les cas, n’adhérèrent pas, loin de là, au parti socialiste de France-Union Jean Jaurès (PSdF), aussitôt fondé par Déat, qui en devient le secrétaire général. Beaucoup étaient tentés par d’autres formations. Car si les idées planistes étaient fort à la mode en ces années marquées par une crise majeure du capitalisme, elles étaient disséminées en plusieurs organisations qui ne s’accordaient pas sur tout, dans le domaine des idées comme en matière de projet politique.
Le groupe X-Crise, devenu rapidement Centre polytechniciens d’études économiques, animé par des technocrates tels Jean Coutrot, Gérard Bardet, André Loizillon, Alfred Sauvy, Raymond Abellio, Jules Moch et Charles Spinasse[12], exerçait une forte influence car plu- sieurs de ses membres étaient des hauts fonctionnaires et des conseillers influents de ministres. Par ailleurs, divers courants intellectuels préconisaient eux aussi une organisation de l’économie, comme Ordre nouveau, d’Arnaud Dandieu ou le groupe personnaliste d’Esprit, d’Emmanuel Mounier. Enfin, Gaston Bergery et Georges Izard fondent en 1933, un parti frontiste, lui aussi planiste.
Le PSdF de Déat n’avait donc pas le monopole des idées dont il se réclamait. En fait, seules quelques individualités, appartenant qui à la SFIO, qui au parti radical, qui à la droite modérée, offraient une ouverture à Déat et à ses amis, qui, ainsi, ne peuvent rien faire d’autres que de jouer les utilités dans des combinaisons parlementaires ou ministérielles. Ainsi, Marquet devient ministre du Travail dans le gouvernement d’« union na- tionale » de Doumergue (9 février-8 novembre 1934) ; puis Déat assume les fonctions de ministre de l’Air du cabinet Sarraut[13] ; et tous deux n’exercent aucune influence décisive sur la politique du pays.
L’évolution politique du milieu des années 1930 dessert Déat. Le parti radical, sur l’alliance duquel il comptait, fait le choix, en juillet 1935, de se joindre à la SFIO et au parti communiste (acquis alors à une stratégie d’union de la gauche) dans le cadre du Front populaire. Déat n’a alors d’autre choix que de s’allier à des petits partis du centre gauche, situés entre le parti radical et la SFIO. Aussi, à son initiative, le PSdF fusionne avec le Parti républicain socialiste[14] et le Parti socialiste français (PSF) lors d’un congrès tenu à Pantin du 3 au 5 décembre 1935. Ainsi naît l’Union socialiste républicaine (USR), dont Déat devient le secrétaire général, et qui se déclare antifasciste, opposé à tous les totalitarismes, pacifiste, et résolu à surmonter la crise économique. Aux législatives des 26 avril et 3 mai 1936, Déat perd son siège de député à Paris au profit du PCF. L’USR, qui ne dispose que de 29 sièges, se rallie, à contrecœur, à la majorité, et trois de ses membres intègrent le cabinet Blum, sans y jouer un rôle influent.
Le rapprochement avec le fascisme
Sa volonté de concilier capitalisme et socialisme dans un projet planiste, conduit Déat à une hostilité de plus en plus marquée envers le communisme. Cette hostilité, fondée sur des oppositions doctrinales, se trouve renforcée par la défiance de Déat à l’égard de la politique étrangère soviétique. Il perçoit très bien, en effet, la volonté de Staline de provoquer un conflit entre la France et la Grande-Bretagne d’une part, l’Allemagne de l’autre, dans l’intérêt de l’URSS. Ilva alors tout faire, à son modeste niveau, pour inciter notre gouvernement à une entente avec l’Allemagne et à un éloignement vis-à-vis de l’URSS. Avec diverses personnalités politiques connues, telles Anatole de Monzie, il s’efforce de constituer un groupe influent en faveur du maintien de la paix à tout prix. Il soutient la politique de Georges Bonnet, ministre des Affaires étrangères, conciliatrice avec l’Allemagne, défend les accords de Munich, et plaide en faveur d’une coopération à la fois diplomatique, économique et culturelle avec celle-ci.
Ce pacifisme entraîne un infléchissement doctrinal et politique du projet de Déat. L’antifascisme devient un obstacle. Déat en vient à penser qu’il n’a d’ailleurs pas de raison d’être puisque son projet planiste et corporatiste s’accorde assez bien avec les fascismes italien et allemand. Ainsi, Déat, sans mot dire, évolue vers le fascisme, par son programme politique comme par son aspiration à une entente avec le Reich et son anticommunisme. En 1938-1939, il place son action politique sous le signe de l’antisoviétisme à l’extérieur, de la lutte contre le PCF à l’intérieur. C’est d’ailleurs en tant que candidat d’un « Rassemblement anticommuniste » qu’en 1939 il retrouve un siège de député, à la faveur d’une élection partielle à Angoulême. Et, le 4 mai 1939, il publie dans L’Œuvre un éditorial en lequel on lit ces lignes:
« Combattre aux côtés de nos amis polonais pour la défense commune de nos territoires, de nos biens, de nos libertés, c’est une perspective qu’on peut courageusement envisager, si elle doit contribuer au maintien de la paix. Mais mourir pour Dantzig, non ! ».
Cet article restera fameux sous son titre « Mourir pour Dantzig », où il s’oppose nettement à l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne à propos du corridor polonais. Il critique par ailleurs vertement la Grande-Bretagne qu’il accuse de pousser la France à la guerre contre l’Allemagne pour servir ses intérêts impérialistes. Il refuse de voter les crédits militaires à la Chambre. Quand éclate la guerre, Déat, chef de bataillon de réserve, demande à servir, mais sans succès, car le gouvernement redoute que son pacifisme soit un vecteur de défaitisme.
Collaborationniste convancu
Approuvant l’armistice du 22 juin 1940, votant les pleins pouvoirs au maréchal Pétain (10 juillet), il souhaite une réconciliation avec l’Allemagne et soutient Pierre Laval. Il est persuadé que la seule chance de la France réside dans une collaboration sans réserve avec le Reich. Il cherche à créer un grand parti qui mettrait en œuvre cette politique et instituerait un régime fasciste en France. Car désormais, Déat identifie clairement son projet politique planiste et corporatiste au fascisme, et pense qu’une similitude de régime entre la France et l’Allemagne favorisera la coopération et la réconciliation des deux pays. Dans ce but, son projet, couché sur le papier, ayant été refusé par Pétain, il lance, le 2 février 1941, le Rassemblement national populaire (RNP) qu’il conçoit comme devant devenir cette grande formation fasciste française et le parti unique de la France. Mais, s’il peut compter sur l’appui ponctuel de Laval, d’ailleurs limité, il se heurte à l’opposition de Pétain et de son entourage réactionnaire, de sensibilité catholique et peu ou prou maurrassienne, donc incompatible avec l’idée d’une collaboration totale avec le Reich. Par ailleurs, les Allemands, se défiant de son ambition, lui imposent une fusion contre-nature avec le Mouvement social révolutionnaire (MSR) d’Eugène Deloncle, venu de la droite nationaliste la plus classique, antirépublicaine et antisocialiste. Les sensibilités opposées des deux formations rendront cette fusion impossible. Dès octobre 1941, les deux partis se sépareront dans un climat de violence.
Cependant, le RNP a besoin d’alliés pour concurrencer son grand rival, le Parti populaire français de Jacques Doriot. Le PPF compte 120 000 membres et est dirigé par un chef charismatique, capable d’entraîner les foules et de séduire les jeunes, doué d’un grand sens politique et de dons d’organisateur, tandis que le RNP de Déat, qui ne rassemblera que 30 000 adhérents, est dirigé par un leader trop intellectuel pour séduire les masses (malgré ses dons oratoires) et médiocre organisateur. Conscient de cette faiblesse, Déat constitue à Paris, le 28 février 1943, un Front révolutionnaire national (FNR) formé par l’alliance des mouvements collaborationnistes autres que le PPF, et rivalisant avec lui : le MSR (malgré la rupture de 1941), le Parti franciste, le groupe Collaboration, Les Jeunes de l’Europe nouvelle et le Comité d’action antibolchevique. Mais ce rassemblement hétéroclite, miné par des oppositions internes, quoique soutenu par l’ambassadeur Abetz, ne menacera pas la prépondérance de Doriot et du PPF sur la mouvance collaborationniste.
Marcel Déat se démultiplie en tous sens pour défendre son projet. Il se dépense en conférences et en discours. Il écrit des livres : De la fausse collaboration à la vraie révolution, décembre 1941-janvier 1942 (1942), Le Parti unique (1943), largement constitués des articles qu’il donne régulièrement à L’Œuvre, il soigne ses relations avec Abetz, dont il reçoit des subsides. Il critique la timidité collaboratrice du gouvernement de Vichy et fustige les réactionnaires affichés qui en font partie, mais il ménage Pétain, lequel le hait, mais dont il espère une nomination ministérielle. Il courtise Laval et l’encourage à coopérer sans réticence avec le Reich. Le 27 août 1941, il est blessé dans un attentat, ainsi que Laval, alors que les deux hommes passaient en revue des troupes de la Légion des volontaires français, à Versailles. Il sera victime de deux autres attentats sans gravité : l’un, au théâtre de Tours, le 16 mars 1942, l’autre en sa propriété d’Arbouse, dans la Nièvre, le 11 mars 1943.
L'attachement persistant au socialisme et le refus de la réaction
Homme politique, Déat reste un intellectuel de haut niveau qui tient à ses idées. En particulier, il tient à ses orientations socialistes. Il a conservé également une sensibilité républicaine et démocratique qui l’incite à fustiger les réactionnaires antidémocrates et à se faire l’avocat du suffrage universel et de l’école républicaine. Ainsi, il défend vigoureusement celle-ci contre ses détracteurs et les mesures prises par Vichy en 1940 et 1941 (mesures répressives d’Émile Mireaux, lois anti-laïques de Jacques Chevalier, suppression des écoles normales par Georges Ripert puis Jérôme Carcopino). Il se montre réticent à l’égard de l’antisémitisme, et, à un congrès du RNP, il fait l’éloge de ces deux philosophes juifs que sont Bergson et Brunschvicg. Il n’est pas moins un fasciste et un collaborateur résolu, jusqu’au fanatisme. Il osera, un jour, déclarer souhaiter que la France « se couvre de camps de concentration ».
L'illusion d'arriver aux portes du pouvoir, puis l'exil
Et, comme tous les chefs collaborateurs de l’époque, il s’engage jusqu’au bout, persuadé de la vérité de ses idées et de la victoire finale de l’Allemagne. Les défaites et reculs successifs de la Wehrmacht, le passage de tout l'empire colonial à la France Libre, l’occupation de la zone libre en novembre 1942, ne l’amènent pas à se remettre en question.
Au début de janvier 1944, sous la pression allemande, Déat se voit attribuer le ministère du Travail et de la Solidarité nationale[15]. Mais Pétain, qui le déteste, ne ratifiera sa nomination que le 16 mars 1944. Bien qu’il se croie aux portes du pouvoir, Déat n’aura pas le temps de faire ses preuves. Le gouvernement Laval se réunit pour la dernière fois le 17 août. Peu après, Déat quitte Paris, et, après un court séjour à Nancy, gagne l’Allemagne, où, en compagnie de Darnand, Paul Marion et Doriot, il rencontre Ribbentrop le 25, puis Hitler lui-même le 29. Les Allemands veulent former un nouveau gouvernement français à leur dévotion. Ce sera le gouvernement fantôme et fantoche de Sigmaringen, présidé par de Brinon, désavoué par Pétain, et comprenant Déat, Darnand, Luchaire et Bridoux.
L’avance alliée en Allemagne oblige Déat à fuir, accompagné de son épouse. Après un itinéraire tumultueux en Italie du nord (qui passe par Naturno, Bolzano, Merano et Gênes), il gagne Turin, où il est hébergé dans un pensionnat de jeunes filles tenu par des religieuses, puis dans un couvent, prenant alors le nom patronymique de sa femme. Sous l’influence des religieux turinois, ce laïc inconditionnel retrouve alors la foi catholique, à tel point qu’il éprouve le besoin de faire reconnaître son mariage par l’État. Il écrit ses mémoires[16]. Souffrant d’un œdème pulmonaire, il mourra le 5 janvier 1955, dans sa 61e année. Il sera inhumé dans le cimetière de Turin, mais ses restes seront transférés en celui de Rozin-Saint-Albin, dans l’Aisne, dans la concession de ses beaux-parents. La Haute Cour de Justice française avait condamné Déat à mort par contumace le 19 juin 1945[17].
Publications
- avec Max Bonnafous, Adrien Marquet et Barthélemy Montagnon, Néo-socialisme ? Ordre, autorité, nation, Paris, Grasset, 1933, 140 p. Discours prononcés au Congrès socialiste de juillet 1933.
- Le Plan français : doctrine et plan d'action (préface), Comité du Plan, Paris, Fasquelle, 1936, 199 p.
- De la fausse collaboration à la vraie révolution, décembre 1941-janvier 1942, Paris, Rassemblement national populaire, 1942, 47 p. Recueil d'articles extraits de L'Œuvre (30 décembre 1941 - 13 janvier 1942) et d'un exposé prononcé à Radio-Paris (5 janvier 1942).
- Le Parti unique, Paris, Aux Armes de France, 183 pages, 1943. Articles parus dans L'Œuvre (18 juillet-4 septembre 1942).
- « Il faut les chasser », article dans : Dominique Sordet (éd.), Le Coup du 13 décembre, Paris, impr. de Guillemot et de Lamothe, 1943, 47 p.
- Mémoires politiques, Paris, Denoël, 990 pages, 1989. Introduction et notes de Laurent Theis, épilogue par Hélène Déat.
- Discours, articles et témoignages, Coulommiers, Éd. Déterna, « Documents pour l'histoire », 1999, 149 p.
Bibliographie
- Philippe Burrin, La Dérive fasciste. Doriot, Déat, Bergery, Paris, Le Seuil, 1986
- Paul-André Delorme, « Marcel Déat, socialiste fasciste », Rivarol, no 3547, 4.1.2023, p. 10-11.
- Roland Gaucher et Philippe Randa, Le journal de guerre de Marcel Déat, Editions Dualpha, 2002.
- Roland Gaucher et Philippe Randa, Des Rescapés de l'Épuration : Marcel Déat et Georges Albertini, Editions Dualpha, 2007.
Notes et références
- ↑ Section française de l'Internationale ouvrière, nom officiel du Parti socialiste français de 1905 à 1969.
- ↑ Certains, tel l’historien nationaliste Hubert Bourgin (1974-1955), ont avancé que le véritable père de Déat aurait été un ingénieur japonais alors en stage à Guérigny. Cette hypothèse semble corroborée par le physique de Déat (de petite taille, au teint bistré, et aux yeux légèrement bridés) et par le fait qu’il aurait reçu un mandat du Japon pendant ses études à l’ENS. Mais rien n’en prouve l’exactitude.
- ↑ À l’époque l’enseignement secondaire était payant et onéreux
- ↑ Ce centre, qui devait puissamment contribuer à l’institutionnalisation universitaire de la sociologie, devait compter parmi ses membres les plus célèbres, Raymond Aron, Georges Friedmann, Étienne Mantoux, Robert Marjolin, Pierre Uri, et, plus étonnant, Raymond Polin.
- ↑ Elle devait décéder en 1995, âgée de 92 ans. Le couple n’eut pas d’enfants
- ↑ Ces élections se déroulèrent (comme celles de 1919) selon le mode de scrutin de liste majoritaire.
- ↑ Il fait partie de la majorité municipale de cette ville, dont Paul Marchandeau, radical, devient le maire.
- ↑ Ces élections se déroulèrent suivant le mode de scrutin uninominal à deux tours, dans le cadre des arrondissements.
- ↑ Ces divers meneurs socialistes se distinguaient eux-mêmes les uns des autres ; mais nous ne retenons ici que leur point commun. Pour sa part, cependant, Albert Thomas, ayant lu les Perspectives socialistes, écrira à Marcel Déat : « Votre analyse des tendances capitalistes, votre idée si féconde du rassemblement socialiste, votre distinction fondamentale de la puissance, du profit et de la propriété, doivent être la base de notre action socialiste moderne » (cité par Déat le 24 mai 1931, compte rendu du congrès de Tours, 24-27 mai 1931 — compte rendu sténographié, p. 22).
- ↑ Il convient, toutefois de ne pas surestimer cette influence. Intellectuel brillant entre tous, profondément original, doté d’un esprit d’analyse et de critique hors du commun, Marcel Déat aurait eu les mêmes idées et le même projet politique et social s’il n’avait pas lu Henri de Man.
- ↑ Celles des départements suivants : Aveyron, Charente, Gironde, Haute-Savoie, Var et la circonscription algérienne de Constantine.
- ↑ Les deux derniers cités adhéraient par ailleurs à la SFIO dont ils étaient des députés, et le second fut le ministre de l’Économie du Front populaire, dans le cabinet Blum
- ↑ Gouvernement dont la seule raison d’être est d’assurer la transition entre la démission du cabinet Laval (22 janvier 1936) et la formation du cabinet Blum (4 juin 1936).
- ↑ Fondé en juillet 1911 par les socialistes hostiles à la SFIO (trop marxiste à leurs yeux), ce parti ne compta jamais beaucoup d’adhérents ni d’élus, mais joua le rôle de parti charnière entre la SFIO et le parti radical, sut se rendre indispensable pour former des coalitions parlementaires, et compta dans ses rangs des hommes de tout premier plan, tels Aristide Briand, René Viviani, Paul Painlevé et Joseph Paul-Boncour, qui furent tous présidents du Conseil, et Alexandre Millerand, président de la République de 1920 à 1924.
- ↑ Le 1er janvier, Darnand a été nommé secrétaire d’État à l’Intérieur et au Maintien de l’Ordre ; le 6, Henriot devient secrétaire d’État à l’Information.
- ↑ Publiés en 1989 par Denoël sous le titre de Mémoires politiques.
- ↑ Le contenu de la section Biographie de cette entrée est en grande partie repris de : Jean-Paul Delorme, art. cit. (voir infra)