Nouvelle Résistance
Nouvelle Résistance était un mouvement politique français. Il se définissait comme du nationaliste-révolutionnaire et du national-européen.
Le mouvement se réclamait de l'héritage du mouvement transnational Jeune Europe (1962-1969), de l'hédillisme espagnol, du national-bolchevisme allemand et du socialisme français, notamment Proudhon et Blanqui. Sur le plan organisationnel, le mouvement a succédé directement à Troisième voie (1985-1992), dont il se voulait un dépassement. En effet, ses fondateurs estimaient que le communisme avait disparu, que l'Ennemi principal était désormais l'« impérialisme américano-sioniste » et que l'axe stratégique à adopter était la construction d'un large « Front uni anti-système ».
Fondé en août 1991, il se dissout en 1996.
Sommaire
Origines
Les « tercéristes radicaux » d'une Troisième Voie jugée en voie de « déradicalisation »
Nouvelle Résistance est née suite à une scission du mouvement Troisième Voie de Jean-Gilles Malliarakis. Depuis 1989, Christian Bouchet, cadre du mouvement à Nantes, faisait paraître un bulletin mensuel, Alternative tercériste - Feuille de combat des Tercéristes radicaux. Selon les auteurs, il ne s'agissait pas de « faire concurrence à la presse tercériste déjà existante » (comprendre les publications Révolution européenne et Troisième Voie), mais de donner « la parole aux nationalistes révolutionnaires les plus résolus ». Les tensions internes entre le courant dominé par Malliarakis, partisan d'un rapprochement avec le Front National, et le courant animé par Bouchet, les « nationalistes-révolutionnaires radicaux », hostiles au « lepénisme », violemment anticapitalistes et ouvertement tiers-mondistes, aboutit à une crise, le 13 juillet 1991. Ce jour-là, lors d'une réunion interne, les partisans de Malliarakis se retrouvent en minorité et quittent la salle. Le 31 août, le Comité Exécutif Provisoire, dominé par Bouchet, se réunit à Lyon. Toutes les fédérations du mouvement y sont représentées. Le nom de Troisième Voie est abandonné pour celui de Nouvelle Résistance. La ligne stratégique adoptée est celle du « Front Uni anti-système ».
Pour une « nouvelle résistance »
Le nom de Nouvelle Résistance était inspiré par l'acronyme de « nationalisme révolutionnaire », NR. Le mouvement lance un nouveau mensuel, Lutte du Peuple, dont le premier numéro paraît en novembre 1991. Le nom de la revue est une référence à l' Organisation lutte du peuple (OLP), mouvement nationaliste-révolutionnaire issu d'une scission du mouvement Ordre nouveau, auquel avait appartenu Christian Bouchet dans les années 1970.
« L’ENNEMI C’EST LE SYSTEME OCCIDENTAL. Le système occidental est la résultante d’une homogénéisation idéologique au niveau planétaire. Les valeurs de la démocratie libérale et de l’esprit bourgeois sont devenues la seule référence à la fois politique, éthique et culturelle mondiale. Il n’y a pas un «chef d’orchestre inconnu» ou «une main cachée qui dirige», mais des castes dirigeantes politiques, économiques, religieuses, médiatiques, qui défendent les mêmes concepts idéologiques, bases de leur domination. Ces concepts sont de surcroît acceptés par une partie non négligeable des populations soit de manière consciente, soit du fait de l’influence des mass-media. La grande force de ce système réside dans son infinie capacité à récupérer ses adversaires. Soit ceux-ci se rallient attirés par les prébendes, soit leurs combats sont canalisés dans des ghettos politiques où ils regroupent les révoltés, jouant ainsi un rôle de soupape de sécurité, soit encore l’opposition des «extrêmes» permet d’annihiler les forces de ceux-ci. (…) Lutter contre le système occidental nécessite de refuser les schémas de celui-ci : droite / gauche, immigrés / Français, monde libre / communisme, racisme / anti-racisme, etc. L’unique ennemi étant le système, tout notre combat doit se présenter comme une alternative à celui-ci. En conséquence notre grille d’appréciations amis-ennemis ne doit prendre en compte qu’un seul critère l’appartenance ou non au système. Dans un monde où règne le totalitarisme mou, où les droits de l’homme sont l’unique référence, où toute opinion se dissout dans la mer morte de la tolérance universelle, notre combat contre le système doit reposer sur des valeurs précises, dures, invariables : l’homme comme être en devenir ; la démocratie organique et communautaire ; l’enracinement et l’ethnodifférencialisme ; le nationalisme grand-européen »[1].
La maison d’édition de Christian Bouchet, ARS (puis Ars Magna), devient la maison d'édition officielle du mouvement. Elle fera entre autres paraître une Revue d'histoire du nationalisme révolutionnaire. Animée par Christian Bouchet, Nouvelle Résistance refusait à la fois le capitalisme libéral et le communisme égalitariste, et prônait un socialisme à échelle continentale, un empire européen respectant les différences culturelles et ethniques, débarrassé du capitalisme destructeur des identités.
Une volonté de rupture avec l' « extrême-droite »
Les combats de Nouvelle Résistance étaient divers et se situaient en totale opposition avec ceux menés par la Droite radicale « classique » :
Contrairement à la plupart des courants de la Droite radicale, Nouvelle Résistance ne niait pas l'existence des classes sociales, et soutenait les mouvements ouvriers de lutte. L'organisation possédait en l'occurrence une structure ouvrière du nom de Résistance ouvrière. Dans son combat contre l'impérialisme américain, Nouvelle Résistance impulsa divers comités contre Disneyland et contre les Mc Donalds. Enfin, et la liste n'est pas exhaustive, elle s'investit dans le combat écologiste radical en contrôlant en France la section nationale d'Earth First. Nouvelle Résistance, comme toutes les organisations tercéristes, soutenait les mouvements nationalistes arabes, et rejetait violemment le sionisme. L'organisation militait pour la création d'un front anti-système, regroupant les ennemis radicaux de celui-ci qu'ils soient de droite comme de gauche.
Presse
L'organe officiel du mouvement était Lutte du peuple. Il connaissait deux éditions, une hebdomadaire sur abonnement et une bimestrielle diffusée dans les kiosques par les NMPP.
Certains Groupes de base locaux publiaient aussi leur propre périodique, comme Noir et rouge (Grenoble), La lettre NR (Angers), ou La Peste (Nice). Le mouvement appelait aussi à soutenir la revue Nationalisme et République, à laquelle collaboraient plusieurs de ses membres.
En 1995, le mouvement lance une publication destinée à la jeunesse, Jeune Résistance, dont la responsabilité est confiée à Fabrice Robert. Cette revue poursuivra sa publication au-delà de la dissolution de Nouvelle Résistance en 1996. Elle jouera un rôle essentiel dans la constitution d'Unité radicale et, plus tard encore, dans la création du Bloc identitaire.
Les cadres du mouvement disposaient aussi d'un bulletin interne, L’Europe combattante.
École de cadres
Le mouvement se dote d'une école de cadre, l'Institut Louis-Auguste Blanqui.
L'axe stratégique: le « Front Uni anti-système »
Une nouvelle dynamique
Dans l'optique de créer un large « Front Uni anti-système », le mouvement prend contact avec l'aile « non-lepéniste » du GRECE (c'est-à-dire les proches d'Alain de Benoist, qui multiplie alors les déclarations de soutien aux immigrés, à l'implantation de mosquées, jugées moins nocives que les MacDonald, de rejet du Front national, etc.[3]), avec des communistes dissidents comme Roger Garaudy, avec des Juifs antisionistes, des gaullistes de gauche, des régionalistes, des écologistes, « anti-impérialistes de tous bords », certains secteurs de l'extrême gauche, etc.
Nouvelle Résistance tente même un rapprochement avec le Regroupement communiste de Marseille. Elle affiche sa sympathie pour Frédéric Oriach, militant des NAPAP[4] détenu pour activités de type terroriste[5]. En revanche, le mouvement qualifie l'essentiel de l'extrême gauche française, engagée dans les croisades « antifasciste » et « antiraciste », de « paléo-marxiste », de « fossile idéologique d'une époque révolue », de laquais du système et d'alliés objectifs du gouvernement en place.
La stratégie consiste certes à « envisager de nouvelles alliances », mais aussi à développer de « nouveaux combats liés au peuple et à son quotidien ». Le mouvement crée un Comité de Soutien aux Problèmes de Quartiers, dont la stratégie consiste à rassembler autour des nuisances causées par Mac Donald. La chaîne de restauration rapide, symbole de l'« impérialisme culturel yankee » est une des cibles favorites de Nouvelle Résistance qui organise de nombreux tractages et manifestations sur ce thème, tout comme contre le parc Euro-Disneyland.
Une place particulière est donnée au combat écologiste. Le mouvement décide de mener une sorte d'OPA sur Ecolo-J, une nouvelle formation écologiste, proche d'Antoine Waechter et qui est dépourvue de lien avec l'extrême gauche. La stratégie consiste à créer des sections de ce mouvement de jeunesse là où il n'est pas implanté, et à participer aux activités des sections déjà existantes et d'y prendre des responsabilités jusqu'à en prendre peu à peu le contrôle. Fin 1992, une campagne de presse dénoncera cette « tentative d'infiltration » et Ecolo-J procédera à une purge, excluant tous ses adhérents quelque peu suspects.
Les limites d'une stratégie
Pourtant, malgré le dynamisme qu'elle a pu susciter et les initiatives développées, la stratégie du « Front Uni anti-système » va montrer peu à peu ses limites. D'un côté, malgré toute la rhétorique du mouvement pour s'affranchir de l'« extrême-droite », il sera toujours considéré, par la totalité des groupes de gauche comme un « mouvement d'extrême-droite », tentant tout au plus « une stratégie d'infiltration ». En effet, l'opposition de Nouvelle Résistance à l'immigration extra-européenne, même si elle ne figure pas au premier plan de ses tracts ou documents, est déjà inacceptable face aux dogmes de la gauche de la fin du XXe siècle. Les seules personnalités de gauche qui s'approcheront du mouvement sont, elles, considérées comme des hérétiques et des pestiférés par leur milieu d'origine.
D'un autre côté, Nouvelle Résistance ne s'est pas contentée de se présenter systématiquement en rupture avec l'« extrême-droite ». Elle a montré une franche hostilité, non seulement envers le Front national, mais aussi toutes les autres tendances des Droites nationales ou radicales. Elle s'est ainsi aliéné un potentiel de soutien, dont, par exemple, celui des personnalités qui avaient précédemment apporté leur collaboration à la revue Révolution européenne, comme Éric Delcroix, Serge de Beketch ou Christian de la Mazière.
De plus, le côté anticapitaliste et socialisant du mouvement est tellement mis en avant qu'il laisse place à une certaine confusion.
En outre, la lutte identitaire n'est évoquée que du bout des lèvres dans la presse du mouvement.
Ces particularités n'ont par ailleurs pas seulement des conséquences sur les relations avec d'autres groupes ou organisations, mais aussi sur les contacts et les amitiés personnelles des militants.
Enfin, les résultats des « nouveaux combats liés au peuple et à son quotidien » doivent être relativisés. Les alliances avec des écologistes et des régionalistes qui se sont concrétisées l'ont été avec des associations qui étaient en général déjà proches de la Droite radicale. Les rapprochements avec des associations de gauche ou apolitiques ont toujours échoué. En revanche, il semble que la fédération de Normandie de Nouvelle Résistance ait fini par scission pour rejoindre unanimement l’extrême gauche[6].
De même, l'anti-américanisme et l'antisionisme, prolongé par un soutien à des nationalistes du tiers-monde, dont principalement le nationalisme arabe, n'étaient pas des innovations de Nouvelle Résistance. Ces positions avaient été développées depuis longtemps en France par des personnalités comme Maurice Bardèche, Henry Coston et François Duprat, sans compter, sur le plan européen, de Jean Thiriart. Il est vrai que leur mise au premier plan de leur action par Nouvelle Résistance ont largement contribué à ce qu'elles deviennent hégémoniques dans quasiment toute la Droite nationale oar la suite. Toutefois, elles n'ont pas permis au mouvement de gagner de nouveaux secteurs dans la population.
Autodissolution
Le troisième congrès de Nouvelle Résistance, tenu à Aix-en-Provence à la Toussaint 1996, est le lieu d'une crise profonde. D'une part, le bilan de la stratégie de l'organisation contraint la direction à une grave remise en question.
D'autre part, comme lors des dernières années de Troisième Voie, les relations à tenir avec le Front national reviennent à l'ordre du jour. En effet, alors que pendant longtemps le mouvement montrait une hostilité peu commune face au parti de Jean-Marie Le Pen, l'idée d'un rapprochement, sous la forme du développement d'un courant interne ou en tant que fraction, faisait son chemin chez les dirigeants de Nouvelle Résistance.
Une partie des militants, intransigeants, décide de rallier le Parti communautaire national-européen. D'autres, autour de Fabrice Robert, se constituent en mouvement autonome mais favorable au rapprochement avec le FN, en gardant le nom de l'organisation de jeunesse Jeune Résistance. Un troisième groupe, derrière Christian Bouchet, se structure en une Union des cercles résistance. Elle posera les bases de ce qui deviendra ultérieuremen Unité radicale.
Relations trans-européennes et internationales
Un nouveau FEL
Dès sa création, Nouvelle Résistance pose les bases d'une « Coordination européenne », qui devait être l'« embryon d'un Parti Européen ». Dans cette idée, le mouvement relance le Front européen de libération, reprenant le nom de l'organisation de Francis Parker Yockey. Les coordinateurs de la structure sont Marco Battara, Christian Bouchet et Juan Antonio Llopart.
Le FEL se voulait également l'héritier du mouvement Jeune Europe de Jean Thiriart. Mais, contrairement à celui-ci, le FEL ne sera jamais une véritable organisation transnationale unifiée, et restera une sorte de confédération de mouvements et groupes nationaux indépendants les uns des autres, et parfois aux orientations idéologiques différentes.
Parmi les mouvements qui participent au FEL, on trouvait:
- Tercera Via Solidarista, puis Vanguardia (Espagne)
- Third Way et la revue The Scorpion (Grande Bretagne ),
- Nuova Azione (Italie),
- Przelom Narodowy (Pologne),
- Ideograma, puis Area Terceirista (Portugal),
- Elements (revue russe),
- Troisième Voie, puis Troisième Voie - Nouvelle Résistance (Suisse romande)[7],
- Ulster Nation (Irlande du Nord).
Le FEL survivra à la dissolution de Nouvelle Résistance et accueillera Unité Radicale en 1998. Il cessera ses activités en 2002.
« Aujourd'hui Osijek, demain Paris »
À partir du mois d'août 1991, plusieurs militants de Nouvelle Résistance partent pour la Croatie comme combattants volontaires. Parmi eux, André-Yves Beck, membre fondateur et membre du Conseil exécutif, et le dessinateur Sergueï. Un autres de ces volontaires, un certain « Pierre André B.», ancien militant des sections de Nice et de Grenoble, sera grièvement blessé au combat. Deux militants lyonnais ont également été blessés.
Il faut noter que les militants de Nouvelle Résistance ont tous combattu dans les rangs de Garde nationale croate, et non dans les milices du Parti du Droit, comme cela a parfois été prétendu.
Antisionisme et tiers-mondisme
Nouvelle Résistance désignait l'« impérialisme américano-sioniste » comme l'ennemi principal. Le mouvement se solidarise avec l'Irak, la Libye, Cuba, et même les luttes indigénistes d'Amérique latine[8].
Le mouvement s'est donc clairement positionné en soutien aux nationalismes arabes et tout particulièrement au nationalisme palestinien. Il a régulièrement publié les communiqués du FPLP et du FDLP. Les militants étaient appelés à participer à toutes les manifestations de soutien, sans exception, à la cause palestinienne.
Lors de la première guerre du Golfe, Nouvelle Résistance a apporté un soutien sans faille à Saddam Husseyin. Des liens sont établis avec les Amitiés France-Irak, animées par Gilles Munier[9].
Plus étonnant est le soutien que Nouvelle Résistance s'est mis à apporter à des organisations islamistes, comme au Front islamique du Salut algérien, y compris à ses associations établies en France.
Principaux cadres et personnalités
Notes et références
- ↑ Christian Bouchet, Troisième voie-Année zéro, 1989, s.d. (document interne).
- ↑ L'idée, qui ne se concrétisera jamais, de créer une alliance avec la « nouvelle génération des guérillas ouest-européennes » est formulée explicitement dans un document réédité et diffusé par Nouvelle Résistance, la brochure de José Cuadrado Costa, « De Jeune Europe aux Brigades rouges » (rééd. Ars Magna, Nantes, 79 p.).
- ↑ Les prises de position d'Alain de Benoist de cette époque sont restées célèbres. On peut citer :
- « Entre les skins et les travailleurs immigrés qui sont agressés, je suis du côté des travailleurs immigrés » (L'Europeo, 27.9.1992),
- « Je préfère qu’on construise en France des mosquée plutôt que des fast-food par exemple, parce que c’est l’autre, mais c’est un autre dans le domaine de la spiritualité au lieu d’être le même dans le domaine du matérialisme » (Émission de Michel Pollack « Libre et change » sur M6 sur le thème « La race des seigneurs » en 1988 avec Alain de Benoist, Jean-Luc Domenach et Pierre-André Taguieff),
- « Les thèses du Front national, personnellement, me soulèvent le cœur ... Tout d'abord, concernant l'immigration, parce que la logique du bouc émissaire m'est insupportable» (Les Dossiers de l'histoire, n° 82, juillet 1992, p. 149-150).
- ↑ Noyaux armés pour l'autonomie populaire, groupe maoïste français qui a tenté de lancer une « lutte armée » en France dans les années 1977-1980.
- ↑ Dans son numéro 8 (juillet 1991), le bulletin Alternative tercériste avait déjà consacré 6 pages à Frédéric Oriach, en recommandant la lecture des son périodique Hérésies.
- ↑ Nicolas Lebourg, Le Monde vu de la plus extrême droite. Du fascisme au nationalisme-révolutionnaire, Presses universitaires de Perpignan, Perpignan, 2010, 262 p., p. 76.
- ↑ Les membres de ce groupe évolueront plus tard en adhérant au Parti communautaire national-européen.
- ↑ Nouvelle Résistance apporte son soutien aux campagnes 500 années de résistances indiennes et populaires, ce qui entraîne une intéressante polémique avec Sin Tregua, la revue du groupe Nueva Europa du traditionaliste espagnol Ernesto Milá; voir Lutte du Peuple, no 5, avril 1992.
- ↑ D'ailleurs ancien militant de Jeune Europe, pour laquelle il avait été le correspondant à Alger de La Nation européenne.