Révolution conservatrice

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Mouvance intellectuelle et politique non monolithique, ensemble pluriel parfois contradictoire et composite, la Révolution conservatrice allemande (Konservative Revolution) est un phénomène générationnel (1918-1932) qui porte profondément la marque de la Première Guerre mondiale, de l'expérience de la défaite, de l'agitation révolutionnaire communiste des années 1918-1920 et de l'humiliation du Traité de Versailles.

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Dans ce contexte dramatique, son originalité a été de non pas de se retrancher sur des positions réactionnaires ou restauratrices de l'ancien ordre wilhelminien, mais d'avoir visé une autre modernité cautérisant les stigmates de la modernisation scientifique et technique, en pensant ensemble des thèmes de droite et de gauche, traditionnellement perçus comme contradictoires.

Le terme de Konservative Revolution a été créé et introduit par le poète Hugo von Hofmannsthal et par Edgar Julius Jung, puis est adopté par l'historiographie suite à la publication de la thèse d'Armin Mohler consacrée à cette mouvance en 1949-1950[1].

Aspects et figures de la Révolution conservatrice allemande

Couverture de la revue fondée par Niekisch

Dans le sillage de pères spirituels comme Friedrich Nietzsche, le mouvement révolutionnaire-conservateur s'est développé, en un XXe siècle qui débute véritablement en 1914, comme une opposition radicale aux systèmes idéologiques nés des « Lumières », de la Révolution française et du triomphe progressif des « valeurs » bourgeoises. Son expression allemande en a constitué le point focal et nous est mieux connue depuis le travail monumental de l'historien des idées Armin Mohler : La Révolution conservatrice en Allemagne. Née d'un sentiment de crise face à la civilisation capitaliste moderne, ce courant d'idées complexe s'efforce de dépasser celle-ci à travers un nouveau modèle de société civile et politique. Malgré sa spécificité allemande, la KR rejoint d'autres tentatives en Europe de répondre au constat des dégâts causés par le progrès détruisant valeurs et structures traditionnelles.

Couverture de l'édition italienne de la thèse d'Armin Mohler

Les origines et les « précurseurs » de la Révolution conservatrice

Selon Armin Mohler, les premiers balbutiements de la Révolution Conservatrice ont lieu lors de la Révolution française: « Toute révolution suscite en même temps qu'elle la contre-révolution qui tente de l'annihiler. Avec la Révolution française, advient victorieusement le monde qui, pour la Révolution Conservatrice représente l'adversaire par excellence. Définissons provisoirement ce monde comme celui qui refuse de mettre l'immuable de la nature humaine au centre de tout et croit que l'essence de l'homme peut être chan­gée. La Révolution française annonce ainsi la possibilité d'un progrès graduel et estime que toutes les choses, relations et événements sont explicables rationnellement; de ce fait, elle essaie d'isoler chaque chose de son contexte et de la comprendre ainsi pour soi ».

La Révolution de 1789 a dû faire face, à ses dé­buts, à deux types d'ennemis qui ne sont en au­cune manière des précurseurs de la Révolution Conservatrice. D'abord, il y avait ses adversaires intérieurs, qui estimaient que les résultats de la Révolution française et/ou de son idéologie égali­taire étaient insuffisants. Cette opposition va s'incarner plus tard dans le marxisme et l'anarchisme de gauche.

D'un autre côté, la Révolution française, dès ses débuts, a eu affaire à des groupes qui la combattaient pour maintenir ou récupérer leurs positions so­ciales (matérielles ou non), que les Jacobins me­naçaient de leur ôter ou avaient détruites. Les adeptes de la RC ont toujours eu le souci de faire la différence entre leur propre attitude et cette position; ils ont qualifié l'action qui en découlait de « restauratrice », de « réactionnaire », d'« altkonservativ » («vieille-con­servatrice»), etc. Les précurseurs de la Révolution conservatrice, eux, s'attaquent aux fonde­ments du siècle du progrès sans simplement vouloir une restauration de l'Ancien Régime.

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Les figures emblématiques des précurseurs de la Révolution conservatrice sont d'abord Friedrich Nietzsche (1844-1900), re­connu par les amis et les ennemis comme l'initiateur véritable du phénomène intellectuel et spirituel de la RC, et le penseur fran­çais, moins universellement connu, Georges Sorel (1847-1922).

Parmi les « parrains » allemands de la RC, on peut ensuite compter le compositeur Richard Wagner (1813-1883), les poètes Gerhart Hauptmann (1862-1946) et Stefan George (1868-1933). Enfin, il y a Max Weber (1864-1920), le plus grand sociologue que l'Allemagne ait connu.

Au second rang, une génération plus tard, nous trouvons le « trio » (ainsi que le nomme Mohler): Carl Schmitt (1888-1985), Ernst Jünger (1895-1998) et Martin Heidegger (1889-1976).

Mohler cite aussi une série de penseurs dont l'influence sur la RC est sans doute moins directe mais non moins intense. Les parrains non-alle­mands sont essentiellement des sociologues et des historiens du début du XXe siècle qui, très tôt, avaient annoncé le crise du libéralisme bour­geois: les Italiens Vilfredo Pareto (1848-1923) et Gaëtano Mosca (1858-1941), l'Allemand Robert Michels (1876-1936), installé en Italie, l'Américain d'origine norvégienne Thorstein Veblen (1857-1929). L'Espagne a donné Miguel de Unamuno (1864-1936) puis, une gé­nération plus tard, José Ortega y Gasset (1883-1956). La France, elle, a donné le jour à Maurice Barrès (1862-1923).

Les grandes tendances de la KR

Voulant concilier libération nationale et révolution sociale dans une optique identitaire de « troisième voie », ni droite ni gauche, les représentants de la KR forment la troisième famille d'opposants à la République de Weimar avec les communistes et les nationaux-socialistes. Ils sont souvent hostiles au « jacobinisme brun » de ces derniers, considéré comme plébéien, totalitaire et massificateur.

Nous ne devons pas concevoir la RC comme un ensemble monolithique. Elle a toujours été plu­rielle, contradictoire, partagée en de nombreuses tendances, mouvements et mentalités souvent antagonistes. Mohler distingue cinq groupes au sein de la RC; leurs noms allemands sont: les Völkischen, les Jungkonservativen et les Nationalrevolutionäre, dont les tendances idéo­logiques sont précises et distinctes. Ensuite, il y a les Bündischen et la Landvolkbewegung, que Mohler décrit comme des dissidences historiques concrètes qui n'ont produit des idéologies spéci­fiques que par la suite.

Ces différentes tendances ont en commun de rejeter violemment la République de Weimar qui perpétue sous des oripeaux républicains le style de vie bourgeois (celui du parvenu), ce qui rendra d'ailleurs ses débuts difficiles en raison de soubresauts dus en grande partie à des revenus des tranchées jugeant la situation inacceptable. Cependant toutes trois divergent aussi bien sur le style et la tactique que sur le visage de l'Allemagne « régénérée » à venir. Toutefois on retrouve un même rejet de l'Aufklärung. Notons cependant que la nation ou l'État préoccupent beaucoup moins les Völkische que le peuple ayant à retrouver le sens de la terre, c'est-à-dire de la vie... Les Völkische font appel à un recrutement plus populaire mais, cette « pratique plébéienne » (L. Dupeux) ne signifie pas adhésion au principe démocratique. S'ils sont animés d'une éthique racialiste, on ne peut réduire celle-ci à un racisme biologique ou à un fanatisme pangermaniste.

Les Völkischen

La tendance völkisch est celle le plus tournée vers le passé puisqu’elle veut défendre le « peuple », entendu comme identité ethnique et spirituelle. Sans chercher à revenir à une époque révolue - l'origine indo-européenne - elle veut s’y rattacher. Elle s’est exprimée par des orientations racialistes, un retour à une spiritualité occultiste ou paganisante, un souci de l'écologie et de la conservation des terroirs. C’est sans doute la tendance la moins « politique », au sens politicien.

Le mot völkisch dérive de Volk, dont la traduction la plus simple est « peuple ». Dans la tradition nationale allemande, le Volk devient une sorte d’entité métaphysique éternelle et renvoie à tout un système de valeurs absolues. Cet usage remonte à Johann Gottfried von Herder (1744-1803), qui voit dans « l’âme du Volk » une réalité demeurée inchangée au travers de l’histoire. Reprenant les thèses du publiciste Justus Möser (Histoire allemande, 1773), Herder estime que le peuple allemand doit redevenir conscient de son caractère national d’origine.

Pour les Völkischen, il s’agit avant tout de s’opposer au « processus de désagrégation » qui menace le peuple, et de l’inciter à une plus forte conscience de soi. Les Völkischen mettent l’accent sur la « race », qui est censée fonder la spécificité du Volk. Mais leur conception, voire leur définition de la race est éminemment variable. Les uns la conçoivent d’un point de vue purement biologique, les autres y voient une sorte d’unité exemplaire du « corporel » et du « spirituel ». Il y a en effet une profonde religiosité völkisch, qui cherche généralement à se manifester dans un renouveau religieux antichrétien, soit que l’on proclame un « christianisme germanique » ou une « foi allemande » (Deutschglaube), soit que l’on essaie de ressusciter le culte des divinités anciennes en les replaçant dans une perspective moderne.

Les Jungkonservativen

Le courant jeune-conservateur de fait diffère totalement de ce projet en voulant clairement agir politiquement sur le présent, en s’affirmant de droite. Il se place dans la lignée du conservatisme allemand qu’il veut régénérer selon la formule du théoricien Albrecht Eric Günther : « nous entendons par principe conservateur non la défense de ce qui était hier, mais une vie fondée sur ce qui aura toujours de la valeur ». Violemment hostile au libéralisme, le courant jeune-conservateur adopte une troisième voie économique entre économie de marché et économie collectiviste planifiée, s’appuyant donc largement sur les « corporations » (même si ce terme est impropre). Politiquement, les Jeunes-Conservateurs sont hantés par la mémoire du Saint-Empire germanique et de son fédéralisme impérial qu’ils voudraient étendre à l’Europe.

Il y a eu de nombreux cercles distincts de Jungkonservativen : Cercles de Berlin (Moeller van den Bruck, von Gleichen), de Hambourg (Wilhelm Stapel), de Munich (Edgar Julius Jung), de Vienne (Othmar Spann), auxquels s’ajoutent un certain nombre d’isolés. Le point de départ du « néo-conservatisme » est la révolte contre la signature du Traité de Versailles, en juin 1919 : c’est à cette date que le « Club de Juin » (Juni-Klub) est fondé, à Berlin, par Arthur Moeller van den Bruck et von Gleichen. L’organe du Club est l’hebdomadaire Gewissen (Conscience), auquel succéderont Der Ring et la Konservative Wochenschrift. Les éditions Ring-Verlag, à Berlin, serviront de local au Juni-Klub, puis au Jungkonservative Klub, en sorte que la Ring-Bewegung (Mouvement de l’Anneau) deviendra très vite synonyme de Mouvement néo-conservateur. Il y aura par la suite des développements d’une très grande complexité. En décembre 1924, Heinrich von Gleichen fondera le Herren-Klub (Club des Messieurs).

Les Jungkonservativen se préoccupent avant tout de réaliser la « mission du Volk », qui est à leurs yeux l’édification d’un nouvel Empire (Reich). Leurs chefs spirituels, Edgar Julius Jung (future victime de la « nuit des longs couteaux »[2]), Arthur Moeller van den Bruck, Heinrich von Gleichen, etc. voient en fait dans le Reich « l’organisation de tous les peuples dans un ensemble supra-étatique, dominée par un principe supérieur, sous la responsabilité suprême d’un seul peuple ». Il ne s’agit pourtant pas de nationalisme. Les Jungkonservativen condamnent le nationalisme, considérant qu’il « transfère au niveau de l’État national les doctrines égoïstes de l’individu ».

Edgar Julius Jung (1894-1934), auteur de Die Herrschaft der Minderwertigen et de Sinndeutung der Deutschen Revolution, est considéré comme le principal porte-parole des Jungkonservativen.

Les Nationalrevolutionäre

Le courant national-révolutionnaire, activiste et antibourgeois, il s'identifie au monde urbain et industriel, loin de la mystique völkisch. Si la notion politique centrale du mouvement völkisch est le « peuple » et celle des Jeunes-Conservateurs « l’empire », les nationalistes-révolutionnaires placent la « nation » comme axe d’analyse. C’est du courant national-révolutionnaire que proviendront la plupart des tentatives de déstabilisation de la République de Weimar dans les années 1920 : assassinats politiques (les ministres Erzberger et Rathenau), tentatives de putsch.

Les nationaux-révolutionnaires ont presque tous été formés par l’expérience des orages d’acier et le « camaradisme » des tranchées. Pour eux, la « nation » n’est autre que le Volk rassemblé et « mis en mouvement » par la guerre. Les nationaux-révolutionnaires acceptent le progrès technique, non parce qu’ils cèdent à « la dangereuse tentation de l’admirer », mais parce qu’ils veulent « le dominer, et rien de plus ». Il s’agit pour eux, dit l’un de leurs chefs de file, Franz Schauwecker, d'« en finir avec le temps linéaire ». Vivant dans l’interrègne, ils considèrent que le temps du nihilisme positif est venu. Leur élan révolutionnaire et leur formation prussienne se conjuguent pour soutenir leur volonté de détruire « l’ordre bourgeois » ; leur « nationalisme de soldats » ne fait plus qu’un avec le « socialisme des camarades ». Un sentiment tragique aigu de l’histoire et de la vie constitue la toile de fond, sombre et lumineuse à la fois, de leur aventure révolutionnaire.

Nationalisme soldatique, nationalisme révolutionnaire et national-bolchevisme

Les Nationalrevolutionäre ne forment pas, eux non plus, un bloc monolithique. On doit distinguer plusieurs sous-courants profondément distincts. D'un côté, on a le « nationalisme soldatique » de gens comme Ernst Jünger, Franz Schauwecker ou Werner Beumelburg. On a aussi les activistes issus des éléments des Corps-francs les plus radicaux, comme l'organisation Consul à laquelle participe Ernst von Salomon.

L'une des principales organisations nationales-révolutionnaires de la République de Weimar est le Jungdeutsche Orden («Jungdo»), fondé en 1920 par Artur Mahraun.

Et on a les « nationaux-bolchéviques » (Ernst Niekisch, Karl Otto Paetel, les frères Otto et Gregor Strasser), dont on a dit qu'ils étaient les « gens de gauche de la droite » (Linke Leute von rechts).

On a encore d'autres auteurs et théoriciens qu'Armin Mohler considère comme proches des nationaux-révolutionnaires mais qui n'en font pas totalement partie, comme Friedrich Hielscher.

Le sous-groupe du « national-bolchevisme »

Armin Mohler et à sa suite Robert Steuckers distinguent trois vagues différentes dans l'histoire du phénomène du « national-bolchevisme ».

La première date de 1919/1920. Elle est une réaction directe contre le traité de Versailles et atteint son apogée lors de la guerre russo-polonaise de 1920. A Hambourg, au sein de la section du KPD, Heinrich Laufenberg et Fritz Wolffheim appellent à la guerre populaire et nationale contre l’Occident. Rapidement, des contacts sont pris avec des nationalistes. Lauffenberg et Wolffheim sont excommuniés par le Komintern. Ils fondent le « Parti communiste de Hambourg/Section des IWW » (KPH/IWW), qui fusionne ensuite avec le Parti communiste ouvrier d'Allemagne (Kommunistische Arbeiterpartei Deutschlands-KAPD), au sein duquel ils font partie de la tendance nationale-bolchevique. Ils sont ensuite poussés à quitter le KAPD.

La seconde vague date de 1923. Radek, fonctionnaire du Komintern, rend un vibrant hommage à l'officier et militant nationaliste Albert Leo Schlageter, fusillé par les Français. Moeller van den Bruck répond. Un dialogue entre communistes et nationalistes voit le jour. Mais cette seconde vague nationale-bolchéviste retombe rapidement, suite aux changements de directives de Moscou.

Plus sérieuse sera la troisième vague nationale-bolchéviste, amorcée en 1930. À la crise économique mondiale et à ses effets sociaux, s’ajoute le Plan de réparations de l’Américain Young qui réduit encore les maigres ressources des Allemands. Une fois de plus, les questions nationale et sociale se mêlent étroitement. Gregor Strasser, chef de l’aile gauche de la NSDAP, et Heinz Neumann, tacticien communiste du rapprochement avec les nationaux, parlent abondamment de l’aspiration anticapitaliste du peuple allemand. Des officiers nationalistes, aristocratiques voire nationaux-socialistes, passent à la KPD comme le célèbre Lieutenant Scheringer, Ludwig Renn, le Comte Alexander Stenbock-Fermor, les chefs de la Landvolkbewegung comme Bodo Uhse ou Bruno von Salomon, le Capitaine des Corps Francs Beppo Römer, héros de l’épisode de l’Annaberg. Dans la pratique, la KPD soutient l’initiative du Stahlhelm contre le gouvernement prussien en août 1931 ; communistes et nationaux-socialistes organisent de concert la grève des transports en commun berlinois de novembre 1932. Toutes ces alliances demeurent ponctuelles et strictement tactiques, donc sans lendemain. La tendance anti-russe de la NSDAP munichoise (Hitler et Rosenberg) réduit à néant le tandem KPD/NSDAP, particulièrement bien rodé à Berlin. L’URSS signe des pactes de non-agression avec la Pologne (25.1.1932) et avec la France (29.11.1932). Au sein de la KPD, la tendance Thälmann, internationaliste et antifasciste, l’emporte sur la tendance Neumann, socialiste et nationale.

Les Bündischen (membres de groupe de jeunesse)

C’est par contre bien avant la Première Guerre mondiale que le mouvement du Bund a pris son essor, issu, à l’aube du siècle, d’un vaste mouvement de jeunesse (Jugendbewegung), rattaché lui-même au Wandervogel (oiseaux migrateurs), soudaine explosion, sans couleur politique définie, d’un état d’âme ayant déferlé sur l’Allemagne tout entière. Avec le Bund, la jeunesse de l’interregnum découvre obscurément qu’elle a charge d’avenir, et que lui échoit la tâche immense de produire le « retournement du temps historique ». La Bündische Jugend témoigne avant tout d’une attitude devant la vie, commandée par une sorte d’inconscient collectif. Tout à la fois « mouvement de jeunesse » et « société d’hommes », le Bund entend former une élite, certes destinée, à l’âge adulte, à se disperser dans les directions les plus lointaines, mais qui doit faire connaître partout l’état d’âme et les aspirations de la Konservative Revolution. Dans tous les secteurs politiques, à droite, à gauche comme au centre, on voit ainsi fleurir des organisations de jeunesse, ainsi que des formations paramilitaires.

Le Landvolksbewegung (mouvement paysan)

Armin Mohler voit une cinquième tendance de la KR dans la Landvolkbewegung ou « mouvement de la paysannerie ».

Fin 1928, les paysans d'un village du Schleswig-Holstein empêchent par la force la saisie de bœufs chez deux fermiers surendettés. Ce coup d'éclat marque le début d'un mouvement de protestation qui prend très vite des allures de jacquerie, sous la conduite de Claus Heim, "le roi sans couronne des paysans". Nationaux-révolutionnaires et jeunesse bündisch le rejoignent apportant leur savoir-faire militant. Un journal, le Landvolk, est créé. Des actions de résistance menées : embargo contre la ville de Neumunster, attentats à l'explosif contre les bâtiments officiels. De cette aventure, Ernst von Salomon tirera un livre, La Ville (1932).

La revendication corporative du Landvolk, contrainte par les circonstances à se donner une couleur politique, tomba presque irrésistiblement dans l’orbite de la Konservative Revolution, dont les tenants lui avaient prodigué le soutien le plus sincère et les plus vigoureux. Elle fut ensuite insensiblement absorbée par le national-socialisme, du fait de la poussée de l’évolution historique, et de l’action personnelle de Walther Darré, théoricien du Bauernadel (aristocratie paysanne).

Quelques figures


Robert Steuckers

Parmi les figures les plus connues, nous trouvons Arthur Moeller van den Bruck, Oswald Spengler et Carl Schmitt pour les jeunes conservateurs ; les frères Jünger, Ernst von Salomon et le national-bolchevik Ernst Niekisch pour les nationaux-révolutionnaires ; Herman Wirth, Ludwig Ferdinand Clauss et Hans Günther pour les Völkische.

Pour l'écrivain berlinois Arthur Moeller van den Bruck, le peuple rassemblant ses forces vives est seul à même d'inverser le processus de division inhérent au grand capital. Son Drittes Reich (qui devait s'appeler au départ Le Troisième Parti) publié en 1922 se veut à la fois « révolutionnaire », « socialiste », « prolétaire » - au sens du « droit des peuples jeunes ». Il affirme qu'être conservateur, c'est créer des valeurs qui méritent d'être conservées et prétend que son socialisme national est apte à recréer une communauté détruite par la société moderne. La dialectique entre ces deux termes, recoupant l'antithèse culture/civilisation, a certes un aspect formel (« Nous devons avoir la force de vivre dans les contradictions » dit-il) mais il s'agit avant tout d'en finir avec Weimar au nom de valeurs supérieures. Même si chez lui la nation a pris la place du prolétariat comme sujet-objet de l'histoire (version marxiste), même si elle en est devenue l'ultime raison (version libérale), sa recherche d'ouverture d'un troisième front, entre le libéralisme humaniste (rejoint par une partie du conservatisme modernisé et libéralisé et par une sociale-démocratie révisionniste) et le socialisme marxiste qui combat l'exploitation capitaliste mais reste animé par le même projet d'égalité abstraite, reste néanmoins emblématique d'une idéologie héroïque visant à aristocratiser les masses.

Oswald Spengler, souvent présenté - un peu rapidement - comme un prophète du déclin, reste un autre maître à penser de la KR. Il n'y a pas selon lui de sens général de l'histoire, l'humanité n'étant qu'une entité abstraite, les seules unités historiques réelles sont les culltures qu'une méthode de morphologie historique permet d'identifier et d'étudier. L'histoire universelle ne peut être que la biographie comparée des cultures mues par une nécessité immanente qui est leur « destin ». En contrepoint de sa méthode interprétative, le thème de la culture occidentale à son déclin (le stade du déclin correspond, dans le vocabulaire de Spengler, à la civilisation) apporte une tonalité tragique. Défendant une conception organique des civilisations, pour lui seule l'Allemagne - comme Rome recueillant et relevant l'héritage grec - peut assurer la survie de l'Occident, déclinaison d'un thème fort du romantisme. L'imperium germanicum ne s'imposera que s'il parvient à réconcilier les divers groupes sociaux (Socialisme et prussianisme, 1920) : l'idée de lutte des classes est ainsi rejetée ainsi que celle des partis ne servant que leurs propres intérêts ; ceux qui avivent les antagonismes sont incapables de cette grandeur nécessaire pour rassembler les Allemands.

La constellation KR, ce sont aussi les frères Jünger sans compromis avec les élites et dont Ernst se rend compte que la modernisation technique conduit à un ordre planétaire qui rend d'une certaine façon leur nationalisme obsolète, le juriste catholique conservateur Carl Schmitt, qui met en équation la politique et l'État, donnant à la première la priorité et faisant du second l'image futile d'une action éphémère de l'histoire, une instance appelée à disparaître (en revanche la politique est, par opposition naturelle à toutes les contingences, la substance même, qui se manifeste dans une relation, à la fois naturelle et spécifique, entre les hommes : celle de l'amitié et de l'inimitié. Le principe politique et celui de l'action se manifestent dans cette relation. Les diverses formes de pouvoir ou les luttes sociales et économiques manifestent la violence contenue dans les sociétés) ou l'ancien leader social-démocrate Ernst Niekisch qui retient de la Russie stalinienne une forme particulièrement efficace de socialisme national. L'ampleur de l'activité déployée par ces néo-conservateurs montre bien que ce courant de fonds est protéiforme : plus de 500 périodiques, près de 400 « organisations », allant des formations paramilitaires aux ligues en passant par de multiples cercles culturels.

Spécificité de la KR


Cette volonté de destin qui habite la KR doit surtout son impulsion au choc de la Première guerre mondiale, véritable traumatisme qui marque véritablement le changement de siècle. Alors que la vieille droite monarchiste voit la défaite comme le résultat d’un complot des gauches défaitistes, ceux qu’on va appeler les révolutionnaires conservateurs la considèrent non comme un hasard mais comme une nécessité dont il convient de déchiffrer le sens : « Nous devions perdre la guerre pour gagner la Nation » dira Franz Schauwecker, figure de la mouvance nationale-révolutionnaire ; une victoire de l'Allemagne wilhelminienne, bourgeoise et sclérosée, aurait été une défaire de l' « Allemagne secrète ». Cette épreuve (sorte de Krisis, moment critique où un partage a à se faire entre la vie et la mort) peut et doit donc permettre à l’Allemagne de dépasser le wilhelminisme en repartant sur de nouvelles bases. Ces dernières sont simples, présentant par là même une cohérence idéologique de la KR :

  • Hostilité à l’Europe de l’Ouest et à la « civilisation », entendue comme quintessence de la raison pure, des Lumières, de l’adoucissement des moeurs, de la décomposition des valeurs, de l’esprit bourgeois et de l’art classique. Les révolutionnaires conservateurs vont y opposer la « culture », c’est-à-dire la subjectivité exprimée par les arts et en particulier le romantisme qui exprime le mieux la recherche de l’infini. À la « masse », ils opposent le « peuple ».
  • Intérêt pour l’Est selon un certain esprit prussien et, même plus, analyse que les peuples allemands et russes ont des intérêts communs contre l’Ouest, d’où une certaine bienveillance à l’égard de la Russie bolchevique, poussée à l’extrême par le courant national-bolchevique.
  • Volonté de transformer l’épreuve de la guerre en origine d’un monde nouveau selon une orientation nietzschéenne. De fait nombreux seront ceux à refuser de s’adapter à la vie civile et à la normalisation individuelle bourgeoise.
  • Conception cyclique ou « sphérique » du temps, ce qui explique l’usage du terme « révolutionnaire » dans son sens 1er. Pour ce mouvement politique et intellectuel, il s’agit de fermer un cycle pour en ouvrir un nouveau. Mais plutôt que d’avoir une conception ronde mais linéaire du temps - ce qu’est le cercle - il envisage ce dernier comme une sphère où n’importe quel avenir est possible pour peu que la volonté humaine soit suffisante. Dans tous les cas, il s’oppose de façon virulente à la conception linéaire et bornée du temps chrétien ou marxiste, globalement similaires.

Si la KR incarne la lutte contre l'idéologie dominante de l'époque weimarienne (prônant une démocratie « formelle » défenderesse du libéralisme bourgeois), elle ne peut cependant être réduite à une anticipation du régime hitlérien. D'une part les idées de la KR se retrouvent, sous des formes chaque fois spécifiquement nationales, dans tous les pays d'Europe depuis la seconde moitié du XIXe siècle. D'autre part, ce formidable « laboratoire d'idées » porteur d'un projet de civilisation (une germanité renouvelée) qu'est la KR verra certes en partie des thèmes phagocytés par l'État-parti nazi mais avant tout pour mieux étouffer leur potentiel subversif. Prenant acte du nihilime européen (la déchristianisation à partir du XVIIIe siècle suivie de l'atomisation sociale lors de la Seconde Révolution industrielle sont d'ailleurs plus des symptômes que des causes de cette logique nihiliste), la tension constitutive de la KR comme « modernisme anti-modeniste » ne peut être réduite à un « langage totalitaire ». Visant un État autoritaire qui aurait redonné à l'Allemagne son statut de grande puissance, la KR a dû céder la place à l'État totalitaire qu'elle avait sans doute l'intention d'empêcher. Historiquement, il est d'ailleurs reconnu aujourd'hui que les milieux de l'opposition réelle (ou potentielle) à l'hitlérisme ont porté l'empreinte de la KR, montrant par là une autonomie par rapport au mouvement de massification de l'époque.

Renégat d'un conservatisme jugé trop libéralisé ou d'un socialisme prolétarien jugé trop révisionniste ou matérialiste, la KR adopte néanmoins une attitude volontariste face à l'évolution du monde moderne : elle vise non tant le « grand soir » que le « grand tournant ». Les tenants de la KR sont donc bien, à leur manière, des révolutionnaires mais ils restent conservateurs dans leur souci de sauvegarder ou de retrouver les valeurs essentielles de leur pays. Ils ne veulent pas être de simples réactionnaires s'accrochant à un passé révolu, la révolution doit avoir pour but la restauration de valeurs qui méritent d'être conservées et que le cours du temps met en péril.

Contrairement au conservatisme traditionnel et à ses nostalgies passéistes, elle approuve résolument la modernité instrumentale, tout en rejetant tout aussi résolument les Grands Récits émancipateurs de la modernité substantielle. La KR est éminemment moderne puisqu'elle traduit le désenchantement de la modernité et tend à remplacer les religions sécularisées par des religiosités nouvelles, nationales ou séculières (christianisme national, mysticismes païens, religions politiques) ; elle est éminemment moderniste puisqu'elle approuve ce que Karl Jaspers nomme « l'ordre technique de masse », à savoir la modernité technique et sociale, vecteur d'une mobilisation totale (d'où les diverses moutures de socialisme national). Mais elle reste antimoderniste puisqu'elle rejette sans concession le projet normatif de la modernité issu de l'Aufklärung et poursuivi tant par le libéralisme (malgré sa trahison dans et par le capitalisme) que par le marxisme (malgré la trahison stalinienne). Si la révolution se double ici indissociablement et simultanément de sa contre-révolution, et que traduit bien le syntagme paradoxal de « Révolution conservatrice » avancé par Mohler, c'est bien en ce que changer de modernité ne peut se faire qu'en l'assumant pleinement.

Un amor fati nietzschéen


La particularité de la KR est dans ce qui la porte à approuver, voire à magnifier, le monde tel que la modernisation l'a fait et d'avoir proposé un élan vers une sorte d'hypermodernité débarrassée des discours humanitaires arasant la diversité du réel. Avec le recul, sa volonté de surmonter le nihilisme en insufflant l'énergie originaire puisée dans le peuple allemand constitua non tant une fuite en avant qu'un pari lucide sur l'avenir, pari empreint de gravité mais aussi de force d'âme. La politique, comme on le disait de l'ancienne Nature, a horreur du vide et ceux qui se complurent à ménager leur fatalisme par choix de l'immobilisme étaient mûrs pour troquer la crise contre un pouvoir bureaucratisant la vie professionnelle ou privée pour mieux garder son contrôle. Le dégagement de tout sens de la responsabilité ou d'implication civiles comme sous Bismarck a reparu vite au demeurant dans le bonheur irénique d'une RFA prospère dont le cinéaste anarchisant Fassbinder a montré impitoyablement le terrible de cette sortie de l'histoire.

« Phénomène politique qui embrase toute l'Europe et qui n'est pas encore arrivé en bout de course » (Armin Mohler), la Révolution Conservatrice allemande, qui a eu d'ailleurs un impact certain sur les mouvances nationalistes-révolutionnaires des années 1970, reste un univers encore mal connu aujourd'hui. A l'aube de ce troisième millénaire lourd de dangers et de possibles, elle mérite d'être redécouverte par les nouvelles générations d'Européens qui pourront puiser dans son réalisme héroïque une leçon de courage, loin des lâches replis sur soi ou des discours d'opposition formelle qui laissent au final l'individu démobilisé mais exploité. Goethe rappelait que par nature l'action est commencement. Elle ne s'écrit pas sous la dictée des circonstances : elle leur emprunte sa matière, elle leur insuffle son esprit. Comme la pensée, l'action n'est pas collective : elle associe, unit ou oppose les individus. Si elle les mêle, elle ne les confond pas. Comme à toutes les réalités énigmatiques et fondatrices, des attributs contraires s'attribuent à elle : l'action est à la fois le vide et le plein, le néant et l'accomplissement, l'absence et la réalisation, le fugitif et l'essentiel. De son opacité créatrice, de ses défis intermittents et impérieux, les hommes tirent à son gré leur déchéance ou leur accomplissement.

La Révolution conservatrice hors d'Allemagne

Armin Mohler réfute la thèse qui prétend que la RC serait un phénomène exclusivement allemand.

Selon lui, la RC est un phénomène politique qui embrasse toute l'Europe et qui n'est pas en­core arrivé au bout de sa course. La Révolution conservatrice est un mouvement de rénovation intel­lectuelle qui tente de remettre de l'ordre dans le champs de ruines laissé par le XIXième siècle et cherche à créer un nouvel ordre de la vie. Elle commence déjà au temps de Goethe et elle s'est déployée sans interruption depuis lors et elle poursuit sa trajectoire au­jourd'hui sur des voies très diverses. Elle a touché la plupart des autres pays européens, voire cer­tains pays extra-européens.

Italie

Le conservatisme révolutionnaire de Julius Evola

Julius Evola est sans conteste un révolutionnaire-conservateur[3].

Les rapports entre Julius Evola et la Révolution conservatrice sont complexes et passent par trois phases différentes. Il est d'abord en contact avec les milieux völkisch, et notamment avec deux de ses courants : d'une part le courant « occultisant », incarné par Herman Wirth, et, d'autre part, le courant « nordiciste », incarné par Hans Günther. Evola participe d'ailleurs au Nordisches Thing de 1934, sorte de congrès de tous les courants völkisch. Mais rapidement, des dissensions de fond émergent entre Evola et les Völkischen. En effet, si le paganisme semble être leur dénominateur commun, il ne recèle pas du tout le même sens dans l'un et l'autre cas. Pour les Völkischen, le paganisme renvoie à un culte de la nature, panthéiste et souvent matriarcal. Pour Evola, en revanche, son paganisme « apollinien » renvoie à un idéal de maîtrise de soi ascétique, à la « virilité spirituelle », à une réaffirmation de la supériorité de l'esprit[4].

Evola s'est en même temps rapproché d'autres courants, de la revue du Herrenklub (dans laquelle il écrit entre 1932 et 1934) , de la noblesse allemande et des « Jeunes-conservateurs ». Il se lie notamment avec Edgar Julius Jung (1894-1934), Heinrich von Gleichen-Russwurm, le prince Karl Anton von Rohan (1896-1975) et surtout Othmar Spann.

La troisième phase des contacts développés par Evola avec les intellectuels de la Révolution conservatrice correspond à ses rapports avec le « Cercle de Hambourg », animé par Wilhelm Stapel[5],[6].

Il faut ajouter à ces rapports historiques avec la « Révolution conservatrice  » allemande, Julius Evola estimera, dans les années cinquante, que le terme révolutionnaire-conservateur serait le plus adéquat pour définir une ligne de Droite authentique[7].

L'élitisme de Vilfredo Pareto

Toujours en Italie, on doit rattacher à ce courant l'économiste et sociologue Vilfredo Pareto (1848-1923), célèbre pour sa théorie sur la circulation des élites.

Suisse

L'historien et essayiste fribourgeois Gonzague de Reynold, théoricien de l'helvétisme politique et d'une rénovation de la Suisse dans un sens à la fois autoritaire, corporatiste et fédéraliste, peut être considéré comme un « révolutionnaire-conservateur » suisse. Ses idées auront une grande influence sur le pays et seront partiellement reprises dans le cadre de la politique de « défense spirituelle » mise en œuvre par le Conseil fédéral à partir de décembre 1938.

Grande Bretagne

On peut nommer Thomas Stearns Eliot (1888-1965), Gilbert Keith Chesterton (1874-1936), David Herbert Lawrence (1885-1930) et Thomas Edward Lawrence (1888-1935), le mystérieux « Lawrence d'Arabie » et auteur des Seven Pillars of Wisdom.

Russie

On peut citer ici Fiodor Dostoievski (1821-1881), les frères Konstantin (1917-1860) et Ivan S. Axakov (1823-1886).

Espagne

On peut nommer Miguel de Unamuno (1864-1936) et, évidemment, José Ortega y Gasset (1883-1955).

Pays-Bas

Dans les Bas Pays de l'actuel Bénélux, on ob­serve un contre-mouvement contre les effets de la Révolution française dès le début du XIXième siècle. En Hollande, les conservateurs protestants se donnèrent le nom d'« antirévolutionnaires », ce qui est très significatif. Guillaume Groen van Prinsterer (1801-1876) et Abraham Kuyper (1837-1920) donnèrent au mouvement antirévo­lutionnaire et au parti du même nom (ARP, de­puis 1879) une idéologie corporatiste et orga­nique de facture nettement populiste-conservatrice (volkskonservatief). Conrad Busken Huet (1826-1886), prédicateur, journaliste et romancier, in­fléchit son mouvement, Nationale Vertoogen, contre le libéralisme, héritier de la Révolution française. Son ami Evert-Jan Potgieter (1808-1875) qui, en tant qu'auteur et co-auteur de De Gids, avait beaucoup de lecteurs, évolua, lui aussi, dans sa critique de la société, vers des positions conservatrices-révolutionnaires; il dé­crivait ses idées comme participant d'un « radicalisme conservateur » (konservatief radika­lisme).

Après la première guerre mondiale, aux Pays-Bas, les idéaux conservateurs-révolutionnaires avaient bel et bien pignon sur rue et se distin­guaient nettement du conservatisme confession­nel. Ainsi, le Dr. Emile Verviers, qui enseignait l'économie politique à l'Université de Leiden, adressa une lettre ouverte à la Reine, contenant un programme assez rudimentaire d'inspiration con­servatrice-révolutionnaire. Sur base de ce pro­gramme rudimentaire, une revue vit le jour, Opbouwende Staatkunde (Politologie en marche). Le philosophe et professeur Gerard Bolland (1854-1922) prononça le 28 septembre 1921 un discours inaugural à l'Université de Leiden, tiré de son ouvrage De Tekenen des Tijds (Les signes du temps), qui lança véritablement le mouvement conservateur-révolutionnaire aux Pays-Bas et en Flandre.

Dans les lettres néerlandaises, dans la vie intellec­tuelle des années 20 et 30, les tonalités et in­fluences conservatrices-révolutionnaires étaient partout présentes: citons d'abord la figure très contestée d'Erich Wichman sans oublier Anton van Duinkerken, Gerard Knuvelder, Menno ter Braak, Hendrik Marsman et bien d'autres[8].

Belgique

En Flandre, la tendance conservatrice-révolutionnaire ne se distingue pas facilement du Mouvement Flamand, du nationalisme flamand et du courant Grand-Néerlandais: la composante national(ist)e de la RC domine et refoule facilement les autres. Hugo Verriest et Cyriel Verschaeve, deux prêtres, doivent être mentionnés ici, de même qu'Odiel Spruytte (1891-1940), un autre prêtre peu connu mais qui fut très influent, surtout parce qu'il était un brillant connaisseur de l'œuvre de Nietzsche.

En dehors du mouvement fla­mand, il convient de mentionner le leader socia­liste Henri De Man, le Professeur Léon van der Essen et Robert Poulet, auteur, entre autres, de La Révolution est à droite. Sans oublier le Baron Pierre Nothomb, chef des Jeunesses Nationales et Charles Anciaux de l'Institut de l'Ordre Corporatif[9].

Portugal

On peut mentionne un mouvement intégraliste (sans rapport direct avec l’intégralisme brésilien). Animé par Antonio Sardinha autour du périodique La Nation portugaise, l’intégralisme rejette le conservatisme, le modernisme et le parlementarisme républicain. Bien que fidèle à la dynastie de Bragance, il soutient une monarchie catholique, décentralisée et syndicaliste. Il ne cache pas s’inspirer de Nietzsche, Bergson et Maurras. Héritier du légitimisme migueliste du XIXe siècle, le mouvement intégraliste prône une monarchie ni constitutionnelle, ni absolutiste dans laquelle s’épanouiraient la famille, la commune et le métier. Très hostiles au fascisme et au corporatisme d’État, ces partisans de la cogestion professionnelle appellent en 1916 à l’intervention du Portugal au sein de l’Entente. Certains des responsables de ce mouvement essentiellement intellectuel admiré par Salazar s’opposeront néanmoins à l’État nouveau tandis que d’autres y verront plutôt une réalisation inachevée de leur idéal politique[10].

Et hors d'Europe...

Armin Mohler estime qu'on peut aussi rattacher à la RC Vladimir Jabotinsky (1880-1940), fondateur en 1925 d'un « Parti révisionniste », incarnant une forme de sionisme de droite dans la diaspora juive.

On considère aussi que le mouvement péroniste en Argentine, avec Juan et Evita Perón, constitue, sur ce cha­pitre, un exemple de Révolution conservatrice en Amérique latine.

Le Brésil a connu lui aussi une forme de Révolution conservatrice avec l'Action intégraliste brésilienne. On peut aussi penser au philosophe colombien Nicolás Gómez Dávila.

En Asie, le Dr. Sun Ya-Tsen (1866-1925), fondateur du parti nationaliste-révolutionnaire Kuo-Min-Tang. Dans son ouvrage de base, il désigne comme les « Trois principes du peuple », le nationalisme, la révolution sociale et la voie chinoise vers la démocratie.

Texte à l'appui

Extrait d'un entretien de Robert Steuckers

Q.: Expliquez-nous donc ce que vous entendez par “Révolution conservatrice” et, si possible, donnez-nous les grandes lignes de la pensée de ses principaux idéologues...

Robert Steuckers : Lorsque le terme “Révolution conservatrice” est utilisé en Europe continentale, c'est, le plus généralement, dans le sens que lui a conféré Armin Mohler dans son célèbre ouvrage Die konservative Revolution in Deutschland 1918-1932. Mohler a dressé le long inventaire des auteurs allemands qui rejetaient les pseudo-valeurs de 1789 (rejetées en Grande-Bretagne par Edmund Burke qui les qualifiait de blue prints, équivalent du terme français images d'Épinal), qui mettaient l'accent sur le rôle de la germanité dans l'évolution de la pensée européenne et qui avaient reçu l'influence de Nietzsche. Mohler a un peu évité les « conservateurs » purement religieux, qu'ils soient catholiques ou protestants. Pour Mohler, la principale caractéristiques de la “Révolution conservatrice” est une vision non-linéaire de l'histoire. Mais il ne reprend pas purement et simplement à son compte la vision cyclique du traditionalisme. A la suite de Nietzsche, Mohler croit en une conception sphérique de l'histoire. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que l'histoire n'est ni la simple répétition des mêmes linéaments à intervalles réguliers ni une voie linéaire conduisant au bonheur, à la fin de l'histoire, au Paradis sur la Terre, à la félicité, etc. mais est une sphère qui peut évoluer (ou être poussée) dans n'importe quelle direction selon l'impulsion qu'elle reçoit de fortes personnalités charismatiques.

De telles personnalités charismatiques imposent une courbe à la course de l'histoire et la poussent vers des chemins toujours particuliers, qui n'ont jamais été prévus ou prédits par une providence de quel qu'ordre que ce soit. Mohler dans ce sens ne croit jamais aux recettes ou doctrines politiques universalistes mais toujours aux tendances qui émanent du particulier ou de personnes concrètes. Comme Jünger, il veut combattre tout ce qui est « général » et apporter son soutien à tout ce qui est « particulier ». Ensuite, Mohler exprime sa vision des particularités dynamiques en utilisant une terminologie quelque peu maladroite, en l'occurrence en usant (et en abusant) du terme « nominalisme ». Pour lui, le « nominalisme » était le terme philosophique exprimant au mieux la volonté des fortes personnalités de tailler pour elles-mêmes et pour leurs successeurs une voie originale et jamais empruntée dans la jungle de l'existence.

Les principales figures de cette « Révolution conservatrice » ont été Spengler, Moeller van den Bruck et Ernst Jünger (de même que son frère Friedrich-Georg). Nous pouvons ajouter à ce triumvirat Ludwig Klages et Ernst Niekisch. Carl Schmitt, en tant que juriste et constitutionaliste catholique, représente un autre aspect important de cette “Révolution conservatrice ».

Spengler

  • Spengler demeure l'auteur d'une fresque brillante, reprenant toute les civilisations du monde, qui a inspiré le philosophe britannique de l'histoire, Sir Arnold Toynbee. Spengler parlait de l'Europe comme d'une civilisation faustienne, s'exprimant au mieux dans les cathédrales gothiques, par l'interaction des couleurs et de la lumière dans les vitraux, par les ciels tourmentés, avec nuages blancs et gris, des peintures hollandaises, anglaises et allemandes. Cette civilisation est une aspiration de l'âme humaine à la lumière et à l'implication du soi. Autre idée importante de Spengler : l'idée de « pseudomorphose » : une civilisation ne disparaît jamais complètement après un déclin ou une conquête violente. Ses éléments passent dans la nouvelle civilisation qui prend le relais et l'infléchit vers des voies originales.

Moeller

  • Arthur Moeller van den Bruck a été le 1er traducteur allemand de Dostoïevski. Il a été profondément influencé par le Journal d'un écrivain de Dostoïevski, qui contenait quelques jugements sévères à l'encontre de l'Occident. Dans le contexte de l'Allemagne d'après 1918, Moeller van den Bruck s'est fait l'avocat d'une alliance germano-russe contre l'Ouest, sur base des arguments avancés par Dostoïevski. Comment ce respectable membre du Herrenklub allemand, doté d'une immense culture artistique, a-t-il pu plaidé pour une alliance avec les Bolcheviques ? Il a argumenté de la manière suivante : dans toute la tradition diplomatique du XIXe siècle, la Russie avait été considérée comme le bouclier de la réaction contre toutes les répercussions de la Révolution française et de l'esprit et des engouements révolutionnaires. Dostoïevski, en tant qu'ex-révolutionnaire russe, a admis, plus tard dans sa vie, que les options révolutionnaires étaient fausses et n'étaient que des images d'Epinal ; il considérait aussi que la mission de la Russie dans le monde était de balayer d'Europe toutes les traces des idées de 1789. Pour Moeller, la Révolution d'Octobre 1917 en Russie n'a été qu'un changement de « vêtements » idéologiques. Pour lui, la Russie demeurait, en dépit des discours bolcheviques, l'antidote à l'esprit libéral de l'Occident. Dans une telle optique, l'Allemagne défaite devait s'allier à cette forteresse de l'anti-Révolution pour s'opposer à l'Ouest, qui, aux yeux de Moeller, était l'incarnation du libéralisme. Moeller constatait que le libéralisme était, dans tous les cas de figure, la maladie finale d'un peuple. Après quelques décennies de libéralisme, un peuple entre inéluctablement dans une phase terminale de décadence.

Jünger

  • La voie suivie par Ernst Jünger est suffisamment connue de tous. Il a commencé comme un jeune soldat ardent et courageux lors de la Première Guerre mondiale, qui quittait les tranchées sans arme à feu, simplement en portant une grenade à manche sous le bras, qu'il portait avec élégance comme le stick d'un officier britannique typique. Pour Jünger, la Première Guerre mondiale signifie la fin du monde petit bourgeois du XIXe siècle et de la Belle Epoque, où chacun était appelé à être « comme il faut », c'est-à-dire à se comporter selon les tristes patrons prédécoupés par des professeurs ou des prêtres ennuyeux, exactement comme nous sommes obligés aujourd'hui de nous comporter selon les règles auto-proclamées de la political correctness. Sous les « orages d'acier », le soldat, au moins, pouvait constater son propre néant, sa fragilité biologique, mais un tel constat, aux yeux de Jünger, ne pouvait conduire à un pessimisme inepte, à la peur et au désespoir. Ayant vécu le destin le plus cruel dans les tranchées et sous le pilonnage de milliers de pièces d'artillerie, qui secouaient la terre jusqu'en ses tréfonds, réduisant tout à l'« élémentaire », le fantassin connaissait mieux que personne la cruauté de la destinée humaine, jetée là sur la surface de la terre. Tous les artifices de la vie urbaine civilisée leur apparaissaient comme des leurres. Après la guerre, Ernst Jünger et son frère Friedrich-Georg devinrent les meilleurs écrivains et journalistes du courant et de la presse nationale-révolutionnaires. Ernst devint une sorte d'observateur cynique, doux, ironique et serein des faits humains et vitaux. Pendant un carpet bombing sur un faubourg parisien, où des usines produisaient du matériel de guerre pour l'armée allemande pendant la IIe guerre mondiale, Jünger a été terrifié par la « rectilignité » non naturelle du tracé aérien des forteresses volantes américaines. La linéarité parfaite de la progression de ces avions dans le ciel de Paris symbolisait la négation de toutes les courbes et sinuosités de la vie organique. La guerre moderne impliquait l'écrasement de toutes les organicités sinueuses et serpentantes. Ernst Jünger avait commencé sa carrière d'écrivain comme un apologiste de la guerre. Après avoir observé les lignes irrésistibles tracées par la progression des B-17 américains, il a été totalement dégoûté de l'absence complète d'esprit chevaleresque dans la manière purement technique de mener la guerre. Après la seconde guerre mondiale, son frère Friedrich-Georg a écrit le premier ouvrage théorique qui a ouvert la voie à la nouvelle pensée critique et écologique allemande. Cet ouvrage était intitulé Die Perfektion der Technik (La perfection de la technique). L'idée centrale de ce livre, à mes yeux, est la critique de la « connexion ». Le monde moderne révèle un processus qui tente, sans cesse, de connecter les communautés humaines et les individus à de grandes structures. Ce processus de connexion ruine le principe de liberté. Dans cette optique, vous serez un pauvre prolétaire enchaîné si vous êtes « connecté » à une grosse structure, même si vous gagnez trois mille livres sterling ou plus par mois. Mais vous serez un homme libre si vous êtes complètement déconnecté de tout « talon d'acier ». D'une certaine façon, on peut dire que Friedrich-Georg Jünger a écrit la théorie que Kerouac a mis en pratique au-delà de toute théorie, en choisissant de ne plus participer au système et de voyager, de devenir un « tramp », chantant et sifflotant le long des routes.

Klages

  • Ludwig Klages est un autre philosophe de la vie organique opposée à la pensée abstraite. Pour lui, la dichotomie majeure, dans notre civilisation, oppose la Vie à l'Esprit (Leben et Geist). La Vie est oblitérée par l'esprit d'abstraction. Né en Allemagne du Nord, Klages émigre à Munich pour aller y étudier. Dans la capitale bavaroise, il passe la majeure partie de son temps libre dans les tavernes de Schwabing, le faubourg où les artistes et les poètes se rencontraient (et se rencontrent encore). Il devint l'ami du poète Stefan George et un disciple de la figure la plus originale de Schwabing à l'époque, le philosophe Alfred Schuler, qui croyait être la réincarnation d'un colon romain de Rhénanie. Schuler avait un sens inné du théâtre. Il se déguisait en se revêtant d'une toge d'empereur romain, admirait Néron et montait des pièces de théâtre qui rappelaient aux spectateurs le monde de la Grèce et de la Rome antiques. Mais au-delà de cette fantaisie truculente, Schuler va introduire une idée très importante dans la philosophie allemande de son époque, celle de l'Entlichtung (la perte de lumière, la déperdition de la lumière, l'assombrissement), c'est-à-dire la disparition graduelle de la Lumière depuis l'époque des cités-Etats grecques de l'antiquité et de l'Italie romaine. Il n'y a pas de progrès dans l'histoire ; au contraire, la Lumière disparaît en même temps que la liberté du citoyen, libre de façonner sa propre destinée. Hannah Arendt et Walter Benjamin, dans le camp de la gauche ou dans celui de libéralisme conservateur, ont été tous 2 inspirés par cette idée et l'ont adaptée pour un public différent. Le monde moderne est un monde d'obscurité complète, avec peu d'espoir de retrouver encore des périodes de pleine lumière, sauf si des personnalités charismatiques, comme Néron, vouée à l'art et au style de vie dionysiaque, créent une nouvelle époque de splendeur, qui ne dureront que le temps béni d'un printemps. Klages a développé les idées de Schuler, qui, lui, n'a jamais écrit un livre complet, avant sa mort en 1923, à cause d'une opération chirurgicale mal préparée. Peu avant la Première Guerre mondiale, Klages avant prononcé un célèbre discours sur la montagne du Hoher Meissner dans le centre de l'Allemagne, devant l'assemblée des mouvements de jeunesse (Wandervogel). Ce discours était intitulé Mensch und Erde (L'homme et la terre) et peut être considéré rétrospectivement comme le 1er manifeste de l'écologie, dont le fond philosophique s'exprime dans un langage clair et compréhensible, sans perdre en aucune façon sa solidité.

Schmitt

  • Carl Schmitt a commencé sa carrière de professeur de droit en 1912 et a vécu jusqu'à l'âge très respectable de 97 ans. Il a écrit son dernier essai à 91 ans. Dans le cadre restreint de cet entretien, je ne peux pas énumérer tous les aspects importants de l'œuvre de Schmitt. Je vais résumer en disant que Schmitt a surtout développé deux idées essentielles : l'idée de décision dans la vie politique et l'idée de « Grand espace ». L'art de façonner la politique ou de pratiquer une bonne politique se situe dans l'esprit de décision, et non pas dans la discussion. Le chef politique doit pouvoir décider afin de pouvoir diriger, protéger et assurer le développement de la communauté politique dont il a la charge. La décision n'est pas la dictature comme tentent de la faire accroire bon nombre de théoriciens du libéralisme aujourd'hui, à notre époque de « correction politique ». Au contraire : une personnalisation du pouvoir est finalement plus démocratique, dans le sens où le roi, l'empereur ou le leader charismatique est toujours une personne mortelle. Le système qu'il imposera, le cas échéant, n'est pas éternel, car il est condamné à mourir comme n'importe quel être humain. Un système nomocratique, au contraire, vise à demeurer pour l'éternité, même si les évènements et les innovations de la vie courante viennent à entrer en contradiction avec les normes ou les principes qu'un tel système énonce et impose. Passons maintenant au deuxième grand thème de l'œuvre de Carl Schmitt : l'idée d'un « grand espace » européen (Großraum). Les puissances étrangères à cet espace européen ne devraient pas avoir le droit ni l'occasion d'intervenir dans ce « grand espace ». Schmitt voulait appliquer en Europe le même principe qui avait animé le Président américain Monroe, c'est-à-dire « L'Amérique aux Américains ». D'accord, disait Schmitt, mais à la condition que nous, Européens, nous puissions appliquer le principe « L'Europe aux Européens ». On peut comparer Schmitt aux continentalistes nord-américains, qui critiquaient les interventions de Roosevelt en Europe et en Asie. Les Latino-Américains ont développé des idées continentalistes similaires, de même que certains « impérialistes » japonais. Schmitt est celui qui a donné à l'idée de « Grand Espace », les bases juridiques les plus solides.

Niekisch

  • Ernst Niekisch est une figure fascinante dans le sens où il a commencé sa carrière comme chef communiste dans la « République des Conseils » de Bavière en 1918-19, laquelle sera balayée par les célèbres Corps Francs de von Epp, von Lettow-Vorbeck, etc. A l'évidence, Niekisch a été déçu par l'absence de vision historique du trio bolchevique de la Munich révolutionnaire (Lewin, Leviné, Axelrod). Plus tard, Niekisch a développé un vision eurasienne, basée sur l'alliance entre l'Union Soviétique, l'Allemagne, l'Inde et la Chine. La figure idéale, censée être le moteur de cette gigantesque alliance, était le paysan, contraire du bourgeois occidental. A ce niveau, un certain parallèle avec Mao-Tse-Toung saute aux yeux. Dans les revues éditées par Niekisch, nous découvrons toutes les tentatives allemandes de soutenir les mouvements anti-britanniques ou anti-français dans les empires coloniaux ou en Europe (l'Irlande contre l'Angleterre, la Flandre contre une Belgique francisée, les nationalistes indiens contre l'Empire britannique, etc.).

J'espère avoir expliqué de manière concise les principaux linéaments de la « Révolution conservatrice » allemande entre 1918 et 1933. Que ceux qui connaissent bien ce mouvement d'idée, à strates multiples, me pardonnent mon exposé schématique...

Bibliographie

L'édition française de la La Révolution conservatrice en Allemagne d'Armin Mohler, publiée par Pardès en 1993.

Généralités

  • Anatomie de la Révolution conservatrice, Stefan Breuer
  • Armin Mohler, La Révolution conservatrice en Allemagne (1918-1932), Pardès, Puiseaux, 1993 (Première édition 1950) 894 p.
  • Dominique Venner, Histoire d’un fascisme allemand, les corps-francs du Baltikum et la Révolution Conservatrice, Pygmalion/Gerard Watelet,Paris, 1996.
  • Louis DUPEUX, Aspects du fondamentalisme national en Allemagne de 1890 à 1945 et essais complémentaires, Presses Universitaires de Strasbourg, 2001.
  • Louis DUPEUX (sous la direction de), La « Révolution Conservatrice » dans l’Allemagne de Weimar, Editions Kime, Paris, 1992.
  • Barbara KOEHN (sous la direction de), La Révolution conservatrice et ses élites intellectuelles, Presse Universitaires de Rennes, 2003.
  • Paul LACOSTE, La Révolution Conservatrice allemande (1918-1932), Imperium, Epinay sur Orge, 1997.
  • Edmond VERMEIL, Doctrinaires de la Révolution allemande 1918-1938, Nouvelles Editions Latines, Paris, 1948.
  • Robert Steuckers (éditeur), in : Vouloir n°8 nouvelle série, Révolution Conservatrice, automne 1996.
  • Robert Steuckers, La « Révolution Conservatrice » en Allemagne, 1918-1932 in Vouloir ancienne série n°59/60, novembre-décembre 1989, p. 11-16.
  • Luc Pauwels, Armin Mohler et la « Révolution Conservatrice » in Vouloir ancienne série n°63/64, Printemps 1990, p. 13-19.
  • Alain de Benoist (entretien avec) : in Eléments n°70, printemps 1991, p. 24-37.
  • Erwin BUCHEL, Armin Mohler, l’historien de la « Révolution Conservatrice » in Nouvelle Revue d’histoire n°8, septembre-octobre 2003, p 22-23.
  • Robert Steuckers, La Révolution conservatrice allemande. Biographies de ses principaux acteurs et textes choisis, éditions du Lore, 2014, 346 p.
  • Robert Steuckers, La révolution conservatrice allemande, tome deuxième, sa philosophie, sa géopolitique et autres fragments, éditions du Lore, 2018, 334 p.
  • Collectif, Conservative revolution. Responses to liberalism and modernity, Black front press, s.l., 10 volumes.

Les Jeunes Conservateurs

  • Oswald Spengler : Le déclin de l’Occident, 2 volumes, Gallimard, Paris, 1948.
  • Oswald Spengler: Prussianisme et socialisme, Actes Sud/ Hubert Nyssen, Arles, 1986.
  • Oswald Spengler : L’homme et la technique, Idées, Gallimard, Paris, 1969.
  • Oswald Spengler : Années décisives, Copernic, Paris, 1980.
  • Oswald Spengler : Écrits et pensées, Copernic, Paris, 1980.
  • Robert Steuckers (éditeur) : Dossier Spengler in Orientations n°1, janvier 1982, p : 14-25.
  • Thomas Mann : Considérations d’un apolitique, Grasset, Paris, 1975 (réédition 2002).
  • Denis MAGNE : Thomas Mann ou la domination des contraires in Nouvelle Ecole n°41, Automne 1984, p : 11-44.
  • Laurent Schang : La jeunesse « apolitique » de Thomas Mann in Nouvelles de Synergies Européennes n°33, mars-avril 1998, p : 21-22.
  • Carl Schmitt : La notion de politique/ théorie du partisan, Champs/Flammarion, Paris, 1992.
  • Carl Schmitt : Terre et mer. Un point de vue sur l’histoire mondiale, Labyrinthe, Paris, 1985.
  • Carl Schmitt : Du politique, « légalité et légitimité » et autres essais, Pardès, Puiseaux, 1990.
  • Carl Schmitt : Machiavel-Clausewitz, droit et politique face aux défis de l’histoire, Krisis, Paris, 2007.
  • Carl Schmitt : La dictature, Seuil, Paris, 2000.
  • Carl Schmitt : Théologie politique, Gallimard, Paris, 1988.
  • Alain de Benoist : Carl Schmitt actuel-« Guerre juste, terrorisme, état de guerre, Nomos de la terre », Krisis, Paris, 2007.
  • Arthur Moeller van den Bruck : Le troisième Reich, Fernand Sorlot, Paris, 1981.
  • Arthur Moeller van den Bruck : La révolution des peuples jeunes, Pardès, Puiseaux, 1993.
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  • Giselher WIRSING : L’âge d’Icare, de la loi et des frontières de notre temps, PanEuropa, Paris, 2003 (édition originale 1944).

Les Nationaux-révolutionnaires et les néo-nationalistes

  • Ernst Jünger : Le travailleur, Christian Bourgois, Paris, 1989.
  • Ernst Jünger : Sur les falaises de marbre, Gallimard, Paris, 1979.
  • Philippe Baillet, L'Autre Tiers-mondisme : des origines à l’islamisme radical - Fascistes, nationaux-socialistes, nationalistes-révolutionnaires entre « défense de la race » et « solidarité anti-impérialiste », Akribeia, Saint-Genis-Laval, 2016, 475 p.
  • Alain de Benoist : La figure du travailleur entre dieux et titans in Nouvelle Ecole, n°40, automne 1983, p :11-61.
  • Alain de Benoist (Editeur) : in Nouvelle Ecole, n°48, année 1996, Ernst JUNGER.
  • Robert Steuckers (Editeur) : in Vouloir n°4 nouvelle série, printemps 1995, Ernst JUNGER 100 ans.
  • Robert Steuckers (Editeur) : in Nouvelles de Synergies Européennes, Hommage à Ernst JUNGER, n°33, mars-avril 1998, p : 2-10
  • Isabelle GRAZIOLI-ROZET : JUNGER, Qui suis-je ?, Pardès, Grez-Sur-Loing, 2007.
  • Philippe BARTHELET (Sous la direction de) : Ernst JUNGER, Les Dossiers H, L’Âge d’Homme, Paris/ Lausanne, 2000.
  • Ernst von Salomon : Histoire proche, essai sur l’esprit corps-franc, Porte Glaive, Paris, 1987.
  • Ernst von Salomon : Le questionnaire, Gallimard, Paris, 1982.
  • Ernst Niekisch : « Hitler, une fatalité allemande » et autres écrits nationaux-bolcheviks, Pardès, Puiseaux, 1991.
  • Thierry Mudry : L’itinéraire d’Ernst NIEKISCH in Orientations n°7, septembre-octobre 1986, p : 34-37.
  • Paul BAHN : L’itinéraire de Friedrich HIELSCHER, 1902-1990 in Nouvelle Ecole n°53-54 (Le Fascisme), année 2003, p : 170-182.
  • Robert Steuckers : Friedrich-Georg JUNGER (1898-1977), la perfection de la technique, Synergies Européennes, Bruxelles, 1996.
  • Robert Steuckers : L’itinéraire philosophique et poétique de Friedrich-Georg JUNGER in Vouloir n° 45/46 ancienne série, janvier-mars 1988, p : 10-12.
  • Karl Otto Paetel, Versuchung oder Chance?: Zur Geschichte des deutschen Nationalbolschewismus, Musterschmidt, Göttingen, 1965; rééd. sous le titre Nationalbolschewismus und nationalrevolutionäre Bewegung in Deutschland. Geschichte - Ideologie - Personen, Verlag Siegfried Bublies, Schnellbach, 1997.
  • Otto-Ernst Schüddekopf, Linke Leute von Rechts. Die nationalrevolutionären Minderheiten und der Kommunismus in der Weimarer Republik. Stuttgart, 1960; nouvelle édition: Nationalbolschewismus in Deutschland 1918–1933, Frankfurt am Main, 1973.

Les Völkischen (Folcistes)

  • Ludwig Ferdinand Clauss, L’âme des races, L’homme Libre, Paris, 2001.
  • Ludwig Ferdinand Clauss, David et Goliath in Etudes et Recherches nouvelle série, n°2, quatrième trimestre 1983, p :17-23.
  • Hans Günther : Platon, eugéniste et vitaliste, Pardès, Puiseaux, 1987.
  • Hans Günther : Religiosité indo-européenne, Pardès, Puiseaux, 1987.
  • Hans Günther : Mon témoignage sur Adolf Hitler, Pardès, Puiseaux, 1990.
  • Hans Günther : Les peuples de l’Europe, Editions du Lore, 2006.
  • Hans Günther : La race nordique chez les Indo-Européens d’Asie, L’Homme Libre, Paris, 2006.
  • Otto Rahn : La cour de Lucifer, Pardès, Puiseaux, 1994.
  • Robert Steuckers : L’œuvre de Hermann Wirth (1885-1981) in Vouloir n°101/102/103/104 ancienne série, avril-juin 1993, p : 53-55.
  • Nicholas GOODRICK-CLARKE : Les racines occultistes du nazisme. Les Aryosophistes en Autriche et en Allemagne, 1890-1935, Pardès, Puiseaux, 1989.

Les Bündischen

  • Karl HOFFKES, Wandervogel révolte contre l’esprit bourgeois, trad. Robert Steuckers, ACE, Saint-Etienne, 2001 (nouvelle édition augmentée).
  • Alain Thième, La jeunesse « Bündisch » en Allemagne au travers de Die Kommenden (janvier 1930-juillet 1931), ACE, Saint-Etienne, 2003; rééd. 2022, 152 p.
  • Walter Flex, Le pèlerin entre deux mondes, Porte Glaive, Paris, 1996.
  • Hans Blüher, Wandervogel, histoire d’un mouvement de jeunesse, tome 1, Les Dioscures, Paris, 1994.
  • Luc Saint-Étienne, La sexologie politique de Hans BLUHER, GRECE, Paris, 1994.

Le Landvolksbewegung (le Mouvement paysan)

  • Ernst von Salomon, La ville, Gallimard, Paris, 1986.
  • Michelle Le Bars, Le mouvement paysan dans le Schleswig Holstein 1928-1932, Peter Lang, Berne, 1986.

Divers

  • Robert Steuckers, « Conception de l’homme et Révolution Conservatrice, Heidegger et son temps », in Nouvelle École, n°37, Printemps 1982, p : 55-75.
  • Robert Steuckers, « Le mouvement métapolitique d’Engelbert Pernerstorfer à Vienne à la fin du XIXème siècle, précurseur de la « Révolution Conservatrice » in Nouvelles de Synergies Européennes, n°55/56, avril-juillet 2002, p : 21-35.
  • Stefan George, Dichtungen/Poèmes, édition bilingue, Aubier/Flammarion, Paris, 1969.
  • Stefan George : L’étoile de l’alliance, Editions de la Différence, Paris, 2005.
  • Jean-François THULL : Claus SCHENK Graf von Stauffenberg, un aristocrate dans la tourmente in Le Baucent, n° 19, mai-juin 2000, p : 25-30.
  • Henri COURIVAUD : L’Allemagne secrète de Claus von Stauffenberg in Revue Catholica n°97, Automne 2007, p : 111-126.
  • Hans Thomas Hakl (sous le pseudonyme de H.T. Hansen), Julius Evola et la « révolution conservatrice » allemande, Montreuil-sous-Bois, Les Deux Étendards, 2002, 96 p.
  • Werner Sombart, Le bourgeois, Petite Bibliothèque Payot, Paris, 1966.
  • Werner Sombart : Le socialisme allemand, Pardès, Puiseaux, 1990.
  • Alain de Benoist : Le paradigme de la culture humaine in Les idées à l’endroit, Editions Libres/Hallier, Paris, 1979, p : 215-249.
  • Ferdinand TÖNNIES : Communauté et société, Retz, Paris, 1977.
  • Armin Mohler, « Le « style » fasciste », in Nouvelle École, n° 42, Eté 1985, p : 59-86.
  • Martin KIESSIG : Ludwig KLAGES et son temps in Vouloir ancienne série n°59/60, novembre-décembre 1989, p : 17-19.
  • Thierry Mudry : Le « socialisme allemand », analyse du télescopage entre nationalisme et socialisme de 1900 à 1933 en Allemagne in Orientations n°7, septembre-octobre 1986, p : 21-30.
  • Thierry Mudry : La figure du partisan, approche historique in Le Partisan Européen, n°7-8, Vendémiaire-Brumaire 1986, p :10-22.
  • Thierry Mudry, « Le « socialisme allemand » de Werner Sombart » in Orientations n°12, été 1990-hiver 1990-91, p. 22-27.
  • Julien Freund, La décadence, Sirey, Paris, 1984.


Liens externes




Notes et références

  1. Daniel Friberg, Le retour de la vraie Droite - Un manuel pour la véritable opposition, Arktos, 2017, 120 p., p. 100.
  2. Le terme de « Nuit des longs couteaux » n'a pas cours dans l'historiographie allemande, qui emploie le nom de Röhmputsch.
  3. Julien Freund, « Julius Evola et le conservatisme révolutionnaire », in : La décadence. Histoire sociologique et philosophique d’une catégorie de l’expérience humaine, Sirey, 1984; rééd. Éditions du Cerf, Préf. de Jéronimo Molina Cano, 2023, 588 p., p. 250-256.
  4. Philippe Baillet, « Julius Evola face à l'Allemagne et à l'Autriche (1928-1945) : volontarisme, esthétisme et anti-historicisme  », in : H. T. Hansen, Julius Evola et la Révolution conservatrice allemande, Les Deux Étendards, Montreuil-sous-Bois, 2002, 96 p., p. 9-19.
  5. Christophe Boutin, Politique et tradition : Julius Evola dans le siècle, Paris, Éd. Kimé, 1992, 513 p.
  6. H.T. Hansen, Julius Evola et la Révolution conservatrice allemande, Montreuil-sous-Bois, Les Deux Etendards, 2002, 95 p.
  7. Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines, trad. Gérard Boulanger, Guy Trédaniel et Pardès, 1984 (rééd. 1996, 2005), 281 p., p. 20 et ss.
  8. Luc Pauwels, Armin Mohler et la « Révolution Conservatrice », texte paru dans la revue anversoise Teksten, Kommentaren en Studies, nr. 55, 2de Trimester 1989
  9. ibidem
  10. Klaas Malan, « Salazar et l'Estado Novo », in Réfléchir et agir, HS no 3, 2018, pp. 25-30.