Völkisch

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Dessin réalisé vers 1900 par Fidus en faveur du mode vie végétarien.
L'adjectif allemand völkisch ne comporte pas d'équivalent exact en français. Il renvoie au mot-racine Volk, qui signifie peuple, mais dans une acception qui n'est pas non plus l'équivalent du terme français.

Le terme renvoie à une conception du peuple en tant que communauté d'identité ethnique, spirituelle, linguistique et raciale.

L'historiographie s'en sert pour dësigner un courant particulier de la Révolution conservatrice allemande.

Le terme sera employé aussi par la NSDAP, mais le courant völkisch ne se confond pas avec le national-socialisme.

Sémantique

L'idée völkisch va bien au-delà du simple concept « populaire » et englobe le peuple dans ce qu'il a de plus transcendant, de plus sacré.

L'anthropologue Hans F.K. Günther en donne la définition suivante : « Völkisch, ce fut pour moi, et ce l'est encore, cette vision aristocratique, à la recherche des moyens propres à provoquer une totale renaissance nationale basée sur l'hérédité et en faveur d'hommes libres. » (Mon témoignage sur Adolf Hitler, Pardès, 1990, p. 9).

Francis Bertin précise, quant à lui, que le terme völkisch « ne doit pas être traduit unilatéralement par “raciste” comme on le fait trop souvent, mais connote à la fois les idées de peuple, de nation et de communauté ; il a donc une signification communautaire et organique très marquée. » (Francis Bertin, « Ésotérisme et vision de la race dans le courant “Volkische” (1900-1945 », Politica Hermetica n°2, Paris, 1988, p. 91).

Ce terme substantivé qualifie aussi un courant politico-culturel, de caractère utopiste, né au « tournant du siècle » en réaction à l'industrialisation et à l'urbanisation (2/3 de la population en 1890) et qui s'échelonne sur le premier tiers du XXe siècle. Il a été décrit dans l’étude pionnière d'Armin Mohler (Die Konservative Revolution in Deutschland, 1950).

On peut encore préciser que le terme de völkisch est employé dans la littérature nationale-socialiste[1] et l'a déjà été par Adolf Hitler lui-même, en 1925, dans son ouvrage Mein Kampf. Or, la traduction française des Nouvelles Éditions latines, visiblement l'œuvre de plusieurs traducteurs, laisse sur ce point à désirer. Dans certains passages, le terme est traduit par « national-populaire », tandis que dans d'autres, il est rendu simplement par l'adjectif « raciste ».

Essai de définition

Selon le spécialiste de la Révolution conservatrice Armin Mohler, il faut entendre par völkisch l'ensemble des groupes animés par une philosophie qui pose l’homme comme essentiellement dépendant de ses origines, que celles-ci proviennent d’une matière informelle, la race, ou du travail de l’histoire (le peuple ou la tribu étant, dans cette optique, forgé par une histoire longue et commune). Proches de l’idéologie völkische sont les doctrines qui posent l’homme comme déterminé par un « paysage spirituel » ou par la langue qu’il parle. Dans les années 1880, le mouvement völkisch se constitue en un front du refus assez catégorique: il est surtout antisémite et remplace l’ancien antisémitisme confessionnel par un antisémitisme « raciste » et déterministe, lequel prétend que le Juif reste juif en dépit de ses options personnelles réelles ou affectées.

Völkisch et Révolution conservatrice

Des trois tendances principales de la « Révolution conservatrice » allemande, le courant völkisch est sans doute le plus ancien puisqu’il émerge dès la fin du XIXe siècle. A la vérité, il vaudrait mieux parler de mouvance car il s'agit d'un phénomène qui se présente bien plus comme une nébuleuse que comme un courant structuré et univoque. De fait, les Völkischen, mus avant tout par un romantisme anticapitaliste, sont beaucoup plus éloignés de la politique que les jeunes-conservateurs ou les nationaux-révolutionnaires.

Au tout début, les centres d’intérêt de cette mouvance reflètent une bonne part des orientations culturelles de cette période : approche « scientifique » des origines guidée par l'esprit positiviste et l’élan romantique du mouvement des nationalités ; effervescence « spiritualiste » née de la crise de l'identité religieuse traditionnelle, en l’occurrence le christianisme. Ces deux voies convergent chez les Völkischen dans la défense du « peuple » conçu non comme masse mais comme identité, à la fois biologique et spirituelle. Le courant völkisch est donc foncièrement tourné vers le passé sans pour autant être réellement réactionnaire puisqu'il ne cherche pas à revenir à une époque révolue mais à se rattacher à ce qu’il considère être la plus lointaine origine.

Un des fondements intellectuels de ce courant est alors Herman Wirth, philologue de la première moitié du XIXe siècle, qui, dans L’aube de l’humanité (1828), entendait reconstruire l’histoire de la religion, du symbolisme et des écrits d’une « race nordico-atlantique » primordiale, dont il faisait remonter les origines au paléolithique. Wirth situait le berceau originel de cette race dans la région correspondant à l’actuelle Arctique et la décrivait comme porteuse d’une culture cosmico-symbolique dont le thème central serait l’année solaire comme expression d’une loi universelle de renouvellement, cycle dans lequel le solstice d’hiver aurait revêtu une importance particulière.

Dans cette recherche des origines, le monde indo-européen (terme qui finit par l’emporter sur « indo-aryen ») est au centre des préoccupations. Découverte par les linguistes à la fin du XIXe siècle, « l'indo-européanité » identifiée comme noyau originel de la civilisation européenne donna un socle scientifique plus solide au courant völkisch. Ce dernier s’intéressa immédiatement au groupe germanique des peuples indo-européens, considéré comme le moins dénaturé et le plus proche des caractéristiques originelles. Reprenant des arguments développés par Arthur de Gobineau, deux philologues vont imposer leurs idées dans le courant völkisch : Hans F.K. Günther et Ludwig Ferdinand Clauss. Si Günther est célèbre, Clauss l’est un peu moins en raison d’une approche ethnique assez éloignée du racisme « suprémaciste » d’essence coloniale fort en vogue à l’époque. Il considérait en effet que chaque homme est porteur d’un « style » caractéristique de l’âme du groupe ethnique auquel il appartient, style fondamentalement distinct des caractères purement individuels : « chaque race possède en elle-même le criterium de ses valeurs les plus hautes et il n’existe pas de mesure commune qui puisse permettre de la comparer à une autre ».

Parallèlement à cette quête « raciale », le courant völkisch développe tout un intérêt pour l’occultisme, en particulier en Allemagne du Sud et en Autriche, terres catholiques s’il en est. La principale conséquence de cet intérêt fut la création de petites sectes occultistes et surtout un intérêt appuyé pour les runes, ancien alphabet nordique dont les vertus divinatoires supposées ne pouvaient que les attirer. De ces catholiques autrichiens apostats est venu également un antisémitisme typiquement lié à leur origine et conjugué sur le mode classique du conspirationnisme. D’autres tendances du mouvement désirèrent cependant simplement refonder une religion purement allemande. Certains optèrent pour la thèse fantaisiste du « Christ aryen » développée par Houston Stewart Chamberlain dans ses Fondements du XIXe siècle publié en 1899. Luther était à leurs yeux l’émancipateur de l’âme allemande, désormais libérée du carcan méditerranéen et despotique de Rome. Ils prétendaient achever la Réforme en purgeant le christianisme de son contenu spirituel sémitique. L’absurdité théorique et l’impossibilité pratique d’un tel projet n’échappèrent cependant pas aux plus lucides qui se tournèrent alors vers le paganisme nordique ou vers une « religiosité indo-européenne » plus large.

Cette quête des racines de « l’âme allemande » (deutsche Volksseele) amène les Völkischen à porter une attention particulière aux traditions populaires (fêtes, folklore, coutumes) où, sous le vernis chrétien, se perpétuent des éléments beaucoup plus anciens, d’origine païenne. Dans le même esprit, ils accordent une grande importance au paysage et leur position est celle d’une écologie intégrale avant même que cette notion ne connaisse la popularité qui est la sienne à partir des années 1960. Défenseurs de « l’art du terroir », ils créent ainsi un mode de vie alternatif relativement hors norme pour l’époque. Enfin, très attachés aux vertus privées du lignage et aux identités locales, les Völkischen ont relativement peu théorisé sur ce qui leur semblerait l'État idéal, la majorité se retrouvant dans la conception de l’empire germanique avec ses libertés locales.

Adolf Hitler considérait les Völkischen comme des irrécupérables. Il les faisait parquer dans des « réserves » où leurs activités passaient plus ou moins inaperçues. Le régime hitlérien visait avant tout à l'efficacité et pour cela préférait mobiliser ingénieurs, industriels et techniciens pour rebâtir économiquement le pays. Quant à la branche bündisch (ligues de jeunesse nées après la Première Guerre mondiale) influencée en partie par ce courant, elle fut soit enrégimentée dans la Hitler Jugend soit matée.

Tendances

Le mouvement völkisch se divise en deux tendances, l’une aristocratique, dirigée par Max Liebermann von Sonnenberg, qui cherche à rapprocher certaines catégories du peuple de l’aristocratie conservatrice; l’autre est radicale, démocratique et issue de la base. C’est en Hesse que cette première radicalité völkisch se hissera au niveau d’un parti de masse, sous l’impulsion d’Otto Böckel, le « roi des paysans hessois », qui renoue avec les souvenirs de la grande guerre des paysans du XVIième siècle et rêve d’un soulèvement généralisé contre les grands capitalistes (dont les Juifs) et les Junker, selon lui alliés objectifs des premiers.

Les principales organisations völkisch

Au sein de la Révolution conservatrice, les organisations les plus connues qui se sont revendiquées explicitement völkisch sont :

  • Alldeutscher Verband (1891-1939)
  • Deutschvölkischer Kolonialverein
  • Deutsche Kolonialgesellschaft (1897-1943)
  • Deutschbund
  • Deutschvölkischer Schutz- und Trutzbund (1919-1933)[2]
  • Tannenbergbund (1925-1933), le mouvement d'Erich et Mathilde Ludendorff

La fable de la NSDAP ennemie du mouvement völkisch

L'idée d'un mouvement national-socialiste qui aurait été hostile au courant völkisch est assez répandue, notamment dans les cercles qui se réclament de l'héritage de la Révolution conservatrice allemande mais qui craignent d'être assimilés au national-socialisme. de même, ces mêmes cercles tiennent à affirmer une discontinuité entre courant völkisch et national-socialisme. L'un des arguments sur lesquels s'appuient cette idée se base sur une lecture décontextualisée de Mein Kampf, où Adolf Hitler critique sévèrement certains groupes et théoriciens völkisch.

Hitler connaissait très bien le mouvement völkisch. Il avait eu pour mentor, entre 1919 et 1923, l'une des principales figures de ce mouvement en la personne de Dietrich Eckart. Certes, Hitler critique souvent, de façon acerbe et avec une ironie cruelle, les Völkische. Mais il ne condamne jamais leurs idées. Hitler s'en prend à leur intellectualisme, à leurs chicaneries, à leurs querelles intestines, à leur excentricité, à leur impuissance en matière d'action, à leur manque de courage, ce qui n'est pas la même chose:

<< Car ceux-là même qui brandissent dans tous les sens des sabres de bois, soigneusement copiés sur d'anciennes armes allemandes et qui recouvrent leur tête barbue d'une peau d'ours naturalisée, surmontée de cornes de taureau, ceux-là n'attaquent, quant au pré­sent, qu'avec les armes de l'esprit, et s'enfuient en toute hâte dès qu'apparaît la moindre matraque communiste[3].>>

De plus, Hitler estime que, durant toute la phase de conquête du pouvoir, il n'est pas question de s'aliéner d'éventuelles sympathies ni de nourrir les divisions internes en prenant des positions tranchées sur les sujets religieux. Mais on est encore et toujours dans le domaine de la tactique, voire de la stra­tégie, non des convictions fondamentales d'Hitler au sujet du christianisme. Ce qui gêne Hitler, dans sa perspective toujours « léni­niste >> d'une ligne révolutionnaire claire, c'est le caractère vague, flou, du terme völkisch, dont il dit qu' << [ ... ] il peut être interprété d'autant de façons, et servir dans la pratique à des usages presque aussi nombreux que le mot "religieux" [4]».

Mais en réalité, il y a bien continuité entre le mouvement völkisch et le national-socialisme, le premier apparaissant vraiment comme le terreau où le second a pu et su prendre racine. Hitler va employer l'adjectif völkisch - que les traducteurs français de Mein Kampf ren­dent par << raciste » - pour définir sa fonction et celle de la NSDAP à la fin du premier chapitre du livre second de Mein Kampf. En 1931, Theodor Fritsch parle d'Hitler comme de << la personnalité la plus éminente de tout le mouvement völkisch » : c'est donc que la chose est pour lui si évidente qu'il n'éprouve même pas le besoin d'en faire la démonstration. Le titre même du quotidien officiel de la NSDAP, le Völkischer Beobachter suffit à démontrer l'évidence d'une continuité entre les deux mouvements[5].

Les mêmes cercles qui nient cette continuité ont aussi répandu la fable d'un État national-socialiste qui aurait persécuté le courant païen. Celle-ci est déjà contredite par le plus grand spécialiste de la Révolution conservatrice allemande, Armin Mohler, qui consacre plusieurs pages très érudites au mouvement Ludendorff, le Tannenbergbund. Contrairement à ce qui a souvent été prétendu, le 22 novembre 1935, il est fait interdiction aux éditions Ludendorff, et non au Tannenbergbund, de tenir des réunions et discours publics. Puis, Hitler se réconcilie avec Ludendorff à la fin mars 1937, ordonnant la suspension des mesures restrictives. Ludendorff, lui, décède le 26 décembre 1937. Heinrich Himmler assista à ses obsèques. Le 19 juin de la même année, le Bund für Gotterkenntnis avait été « [... ] autorisé à entrer au registre des associations >>. Plus tard, pen­dant la guerre, loin d'être persécuté, il « [... ] continua [ ... ] ses activités de type discours et réunions jusqu'à la fin des hostilités[6]>>.

L'une des thèses majeures du courant ludendorffien, c'était la nécessité de combattre toutes les Internationales, et plus précisément trois d'entre elles: le judaïsme, la franc-maçonnerie et l'Église catholique (plus souvent encore: « les Jésuites »). Or, loin d'être en contradiction avec le cœur même du national-socialisme, cette théma­tique était régulièrement développée dans l'organe de la SS, Das Schwarze Korps. Pour conclure, on peut donc dire que si certaines personnalités ou certains groupes du courant païen ont fait l'objet de mesures répressives sous le régime national-socialiste, il est en revanche totalement injustifié de comparer leur sort à celui qui échut aux Églises[7].

Postérité

On retrouve de nos jours nombre des orientations de ce courant dans les choix idéologiques de Terre et peuple : attachement aux coutumes locales et paysannes, spiritualité païenne affirmée et revendiquée, référence permanente à l’enracinement.

En Allemagne, on peut mentionner le Thule Seminar, dirigé par le franco-allemand Pierre Krebs, qui revendique l'héritage du courant völkisch.

Article connexe

Bibliographie

Ouvrages

  • John Yeowell, Odinisme et christianisme sous le IIIème Reich. La croix gammée contre l’Irminsul, Avatar, 2006. [1]
  • G. L. Mosse, Les racines intellectuelles du Troisième Reich, Points-poche, 2008. [2]

Articles

  • Philippe Baillet, « Monte Verità (1900-1920) : une "communauté alternative" entre mouvance völkisch et avant-garde artistique », in : Nouvelle École n°52, 2001, p. 109-135.
  • Thierry Mudry, « La notion de “Volk” dans l’idéologie allemande », in : Orientations n°5, 1984 : [3]

Notes et références

  1. Le prinicpal organe de presse de la NSDAP, qui paraît sous forme hebdomadaire depuis 1920, puis quotidienne dès 1923, se nomme le Völkischer Beobachter.
  2. Cette organisation, qui arbore le swastika comme symbole, sera numériquement la plus importante. En 1922, le nombre de ses membres dépasse les 200'000, et elle compte 600 sections locales.
  3. Adolf Hitler, Mon Combat, Nouvelles Éditions Latines, Paris, 1979 (1934), en un seul volume, p. 359.
  4. ibidem, p. 377.
  5. Philippe Baillet, « Heinrich Himmler, Reinhard Heydrich et l’incarnation de l’idéal national-socialiste », in : Tabou, vol. 20, 2013, p. 7-68.
  6. Armin Mohler, La Révolution conservatrice en Allemagne, Pardès, Puiseaux, 1993, 894 p., p. 503.
  7. Baillet, art. cit.