Heimwehr

De Metapedia
Aller à : navigation, rechercher

La Heimwehr (« Défense du foyer ») était une organisation patriotique autrichienne, active dans l'Entre-deux-guerres.

Heimwehr1.png

Née comme une multitude de groupes d'autodéfense n'ayant pas de lien organique entre eux, elle se politise et se structure, jusqu'à jouer un rôle de premier plan dans la politique du pays. Elle reste toutefois profondément divisée entre une tendance modérée et catholique-conservatrice, et une tendance radicale, völkisch et pangermaniste.


Histoire

Les débuts

Avec l'écroulement des l'Autriche-Hongrie en automne 1918 disparaît l'empire pluriethnique des Habsbourg, donnant naissance à de multiples petits Etats, en vertu du principe wilsonien du « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ». Les Allemands de l'ancien empire se retrouvent partagés entre le pays des Sudètes, le Tirol du Sud, la Hongrie, la Slovénie et une république constituée autour de Vienne, un petit Etat autrichien, souvent qualifié d' « Etat-avorton ». La vie politique de cette nouvelle Autriche, où les sentiments pangermanistes répandus depuis le milieu du XIXe siècle, est dominée par deux grands partis : les socialistes et les chrétiens-sociaux.

Alors que dans les villes se forment des milices armées socialistes et communistes, des groupes d'autodéfense armée commencent à se constituer dans les campagnes à partir de novembre 1918. Ils se donnent pour nom Heimatschutz ou Heimwehr. Leur but premier est d'empêcher les exactions des soldats revenus du front et des anciens prisonniers de guerre. Une autre motivation qui anime ces groupes est une volonté d'opposition à « Vienne la rouge », dont l'autorité est ressentie comme centraliste et parasitaire. Cette impression est renforcée par des réquisitions alimentaires opérées par le gouvernement pour « calmer les masses affamées de la grande ville ». D'autre part, les problèmes frontaliers avec ce qui va devenir la Yougoslavie sont courants au sud-est du pays, notamment en Carinthie. Le gouvernement n'est alors pas mécontent de voir affluer des groupes de volontaires, qu'il peut équiper et mettre sous les ordres d'officiers disponibles. Enfin, ces groupes entrent régulièrement en conflit avec les milices de gauche.

Parmi les premiers dirigeants de ces groupes s'affirment dès les débuts l'avocat Walter Pfrimer et son adjoint le premier lieutenant Hanns Albin Rauter[1]. Leurs unités arborent le svastika et les couleurs noir-blanc-rouge. Pour eux, le combat doit être dirigé contre le marxisme, les élites juives et la démocratie. Leurs objectifs sont l'établissement d'un État autoritaire et le rattachement à l'Allemagne. Les membres des groupes dirigés par Pfrimer ne sont pas autorisés à adhérer à un parti. Dans la région du Tirol, le principal dirigeant est Richard Steidle. Si la majorité des adhérents sont des paysans, on trouve aussi de nombreux étudiants et officiers. Le mouvement n'a alors aucune forme d'unité, et les groupes ne se rencontrent qu'à l'échelle régionale et souffrent des rivalités entre les différents chefs locaux.

Le 5 décembre 1918, l'assemblée provinciale de Carinthie décrète la résistance armée contre les incursions des troupes yougoslaves, dont l'intention est d'occuper des régions autrichiennes où vivent des populations slovènes. Cette décision va provoquer la première grande épreuve pour la Heimwehr. Début janvier, après des échecs continus, les troupes yougoslaves décrètent un cessez-le-feu. Au même moment, l'Etat yougoslave réprime les revendications d'autodéterminations des minorités allemandes en Carniole, en Croatie et en Slavonie, qui correspondent à 180'000 personnes.

Il s'ensuit une radicalisation des Heimwehre, qui doit être mise aussi en lien avec la victoire socialiste aux élections du 16 février, du développement de l'antisémitisme dans tous les partis à des degrés divers et, surtout, des expériences des Républiques des Conseils en Hongrie et en Bavière. Au même moment, alors que les corps-francs allemands marchent sur la République socialiste de Munich, les troupes yougoslaves rompent le cessez-le-feu le 29 avril. Des volontaire affluent d'Allemagne, du Tirol et de Styrie pour se joindre aux rangs des Heimwehre de Carinthie. Pourtant, après plusieurs succès, la supériorité numérique des agresseurs a raison de la résistance et les Heimwehr doivent se replier au-delà de la Drave. Les troupes yougoslaves tentent le 6 juin de prendre d'assaut Klagenfurt, mais une intervention italienne inopinée met fin à l'invasion.

Le 2 septembre 1919, le traité de Saint-Germain confirme la création de la République autrichienne. Le Tirol du sud et le Kanaltal sont donnés à l'Italie, la Südsteiermark, la ville de Marburg et le Miesstal vont à la Yougoslavie, tandis que le Feldsberg et le Böhmzell intègrent la Tchéquie. En revanche, le Burgenland, qui était jusque là hongrois, devient autrichien. Un référendum est prévu pour fixer le sort du bassin de Klagenfurt. Le traité exige que le terme de République allemande d'Autriche, qui avait d'bord été adopté, soit changé. Toute idée d'un rattachement à terme à l'Allemagne est interdite. Le socialiste Karl Renner proteste en vain contre la cession du Pays des Sudètes et contre les clauses du traité, considéré comme une humiliation. En échange de livraisons alimentaires, l'Etat, quasiment désarmé, fournit aux Alliés du bois de construction, du sel, des propriétés urbaines, des parts du domaine public et même ses réserves d'or. Toutefois, le fait que la population de la Zone A de Carinthie se prononce en majorité pour son maintien dans l'Autriche met un terme aux tentatives de partition du territoire.

Entretemps des groupes de Heimwehr se sont mis à se créer dans toute l'Autriche. Compte tenu des restrictions imposées sur l'équipement militaire, le gouvernement ferme les yeux. En raison de leur structure disciplinée, les Heimwehr commencent à prendre une influence politique nettement plus grande que celle des corps-francs allemands. Dans la région du Steiermark, ils reçoivent l'appui du gouverneur Anton Rintelen. Le 1 novembre 1919, différents groupes de droite s'unissent dans un Grossdeutsche Volkspartei (Parti populaire de la Grande Allemagne). Son programme est hostile à toute restauration monarchique. Il reconnaît la République et la propriété privée, tout en condamnant sévèrement les dérives du capitalisme. Il prône aussi une réforme agraire et une solution du « problème juif », considéré d'un point de vue racial. Il faut noter que l'antisémitisme et l'anticommunisme dominent aussi largement dans le Parti social-chrétien. Les deux partis ont ainsi de nombreuses accointances avec les Heimwehr.

Ascension du mouvement et développement de deux tendances

A partir de février 1920, les miliciens commencent à établir des liens avec la mouvance nationaliste en Allemagne. Les milices citoyennes allemandes, comme l'Organisation Escherich, fournissent des armes aux Autrichiens. On crée une Organisation Kanzler, abrégée Orka, pour développer ces contacts. Le major Hörl devient son homme de liaison avec la Reichswehr. L'objectif est la constitution d'un front commun contre « Vienne la rouge », afin de promouvoir le rattachement à l'Allemagne et de stopper les velléités de restauration monarchique. Salzburg, le Vorarlberg et le Tyrol sont les régions qui se solidarisent le plus tôt avec les Allemands. Dans la région du Tyrol, les Heimwehr peuvent s'établir sur la base des sociétés traditionnelles de tir, auxquelles les Alliés n'avaient pas touché. Après le putsch de Kapp en Allemagne, nombre de ses participants se réfugient en Autriche et contribuent à une nette radicalisation des tendances pangermanistes. Parmi eux se distinguent le major Waldemar Pabst (qui avait participé à l'exécution de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg) et le colonel Max Bauer, l'ancien bras droit de Ludendorff. Bientôt, l'homme politique social-chrétien Ignaz Seipel sollicite le régime de Horthy en Hongrie pour soutenir les Heimwehr.

En été 1920, on constate clairement que le mouvement se divise en deux tendances : d'une part une aile radicale et pangermaniste (Pfrimer, Rauter et le commandant militaire de la Carinthie Hülgerth), d'autre part une aile modérée et sociale-chrétienne. Les groupes rivaux hésitent aussi entre les différentes figures dirigeantes des droites allemandes, ce qui rend la situation encore plus compliquée. Les financements proviennent aussi bien de Munich que des propriétaires terriens autrichiens. Toutefois, le mouvement peut se réunir dans l'action, comme dans la participation de plusieurs compagnies de Heimwehr du Tyrol et de la Steiermark à la résistance des Allemands de Haute-Silésie en 1921. Au Tyrol, Steidle s'accorde avec le gouvernement régional social-chrétien pour faire reconnaître ses unités comme une milice d'utilité publique.

En été 1921, les tensions entre les deux ailes du mouvements s'accentuent. Les modérés refusent tout contact avec la Orka et avec la Reichswehr. Dans la Steiermark, Pfrimer a commencé à mettre la main sur les dépôts d'armes qui appartenaient aux sociaux-chrétiens. La Carinthie est de plus en plus acquise aux pangermanistes. Dans les milieux cléricaux, on était opposé au rattachement à l'Allemagne. Les dissensions entre les modérés et les groupes plus activistes se multiplient. Durant l'été 1922, Steidle s'efforce en vain d'établir une ligne commune pour tous les groupes, car il souhaite, comme le chancelier Seipel, établir une coalition durable entre cléricaux et nationalistes pangermanistes. Steidle parvient tout de même à obtenir, grâce à l'intermédiaire de Seipel, un soutien financier de certains industriels. Le chancelier veut alors réunir toutes les milices de droite, afin de pouvoir tenir la gauche en échec en cas de guerre civile. On crée un comité de coalition, que Steidle voit comme le moyen de préparer une prise du pouvoir par un coup de force en vue d'établir un régime autoritaire. Mais les nationalistes pangermanistes refusent toute collaboration avec Seipel, qu'ils considèrent comme un exécutant servile des décisions des vainqueurs[2]. Steidle échoue aussi au mois de novembre à constituer un comité de toutes les provinces qui se serait transformé en direction nationale, notamment à cause de la résistance de Seipel, qui veut absolument tenir la Heimwehr à l'écart du pouvoir.

Après plusieurs affrontements avec la Heimwehr, les socialistes forment le 19 février 1923 une nouvelle milice, le Front de défense républicain (Republikanischer Schutzbund). En avril, Steidle est reconnu comme commandant fédéral par la majorité des unités de la Heimwehr. Il impose une politique de prudence, qui se traduit par une prise de distance avec les tentatives de putsch en Bavière. Au cours de cette période, la confusion augmente dans le mouvement, surtout lorsque s'infiltre de nouveaux groupes qui se réclament d'un national-socialisme ou du fascisme. Ces éléments, tout comme les nationalistes pangermanistes, considèrent Steidle comme un traître.

La tentation du pouvoir

Les conséquences du manque de soutien politique et financier, malgré un gouvernement de coalition entre cléricaux et pangermanistes, se font sentir. Le 9 août 1926, lors de l'inauguration d'un monument aux morts à Brixlegg, Steidle se livre à un discours aux accents nettement plus radicaux que précédemment. Il exprime le mécontentement qui parcourt les rangs de toute la droite. Il critique sévèrement le parlementarisme et décrit la démocratie comme le règne d'une minorité corrompue sur la majorité du peuple. Le même mois, Pfrimer et Rauter rendent visite à Adolf Hitler à Munich et apportent le soutien officiel de la Heimwehr de Styrie à la NSDAP. Le 27 octobre, lors d'une rencontre, à Innsbruck, entre la Heimwehr, des associations d'anciens combattants et d'autres groupes nationalistes, Seidle affirme que la révolution nationale est le seule moyen de barrer la route au socialisme. Ces propos sont directement compris comme une référence au discours des droites radicales allemandes.

En réaction au programme de lutte des classes de la gauche socialiste, le Parti social-chrétien adopte en novembre 1926 un nouveau programme qui prône une forme de corporatisme, ce qui fait espérer la Heimwehr à un changement dans son sens. Pfrimer choisit de devenir autonome et conclut un accord de coopération avec Adolf Hitler le 3 juillet 1927.

Après l'acquittement d'un groupe d'anciens combattants qui, en état de légitime défense, avait ouvert le feu sur une nuée de militants de gauche à Schattendorf, ce qui avait entraîné cinq morts, les tensions politiques, grimpent brutalement. Le 15 juillet 1927 a lieu à Vienne une manifestation de protestation qui tourne à l'émeute, et où le Palais de justice est incendié. Lorsque l'intervention des pompiers est entravée par les émeutiers, le chef de la police Johannes Schober donne l'ordre d'ouvrir le feu. La gauche répond en décrétant une grève des transports, que la Heiwehr réprime méthodiquement, surtout au Tyrol et en Styrie. Lors des incidents, 89 personnes, dont 4 policiers, perdent la vie. On décompte aussi 660 blessés graves et 1000 blessés légers. Une autre conséquence de ces incidents est l'afflux massif de nouveaux adhérents à la Heimwehr, provenant de la petite bourgeoisie et de la paysannerie.

Les événements attirent aussi l'attention des pays voisins. Mussolini et la Hongrie s'accordent, en avril 1928, sur la nécessité d'établir un gouvernement de droite à l'aide de la Heimwehr. Par l'intermédiaire de Budapest, les Italiens, commencent à faire parvenir au mouvement du matériel militaire et des moyens financiers. Steidle assure alors à ses nouveaux alliés qu'une Heimwehr forte de 150.000 hommes serait bientôt en mesure de forcer le gouvernement centriste à adopter une constitution autoritaire.

Le mouvement veut désormais compter en politique et ne plus être considéré comme un chien de garde au service de la réaction.

Avec les nouveaux moyens et l'affluence des nouveaux militants, on établit des processus de sélection et la constitution de sections d'assaut. En contrepartie de son aide, Mussolini demande que la Heimwehr renonce officiellement à toute prétention sur le Tyrol du sud. Steidle établit aussi des contacts avec le Stahlhelm et avec la DNVP de Hugenberg.

Le 15 juillet 1928, Richard Steidle est élu commandant fédéral de la Heimwehr. Waldemar Pabst est nommé chef d'état-major, Walter Pfrimer est désigné comme son adjoint. Les intrigues du gouvernement de Seipel recommencent. Le chancelier social-chrétien veut s'assurer l'aide de la Heimwehr pour lutter contre la gauche, tout en lui refusant toute participation au pouvoir. Le chef de la police Schober, de son côté, prend une position nettement plus radicale : il encourage Steidle à agir concrètement contre les Rouges. La Heimwehr commence alors à se préparer à affronter le Schutzbund, afin qu'un directoire réunissant Schober et un comité fédéral puisse prendre le pouvoir.

Le dirigeant du Heimatschutz autrichien Richard Steidle et Walter Pfrimer à la tribune de la Heimwehr à la Neuklosterwiese lors de la marche de la Heimwehr et du Schutzbund à Wiener Neustadt le 7 octobre 1928.

Pensant que la gauche se prépare à prendre les armes, on organise de grands défilés, comme le 7 octobre à Vienne ou le 12 novembre à Innsbruck, . Encore une fois, Pfrimer se montre le plus radical, et va jusqu'à piller lui-même le dépôt d'armes de la police de Graz. En février 1929, Steidle compare le combat contre le « gouvernement juif » à la résistance contre les Turcs de 1683. L'idée d'une résistance contre les menaces du gouvernement centriste règnent dans les rangs sociaux-chrétiens comme chez les pangermanistes. Pourtant, les combats de rue avec les forces de gauche restent occasionnels, et Mussolini fait part de son impatience depuis Rome.

Comme Steidle ne montre pas assez de détermination, les yeux se tournent vers un nouveau porteur d'espoir. Le 31 juillet 1929, le prince Ernst Rüdiger Starhemberg est élu chef de la Heimwehr de Haute Autriche, ce qui constitue une puissante défaite pour les sociaux-chrétiens. Starhemberg a précédemment combattu en 1921 au Annaberg et dans le Groupe Oberland. Après la tentative de putsch d'Adolf Hitler, il a servi comme volontaire dans la Reichswehr noire. Sous la direction de son nouveau chef énergique, le mouvement prend un nouvel essor. Dans tous les districts sont constitués des formations d'élite désignées comme bataillons de chasseurs. Il s'agit désormais de véritables unités paramilitaires, bien équipées, prêtes à accomplir bien plus que de soutenir l'exécutif. Avec le matériel humain à sa disposition, Starhemberg s'efforce de former une élite de 40 à 50.000 hommes, qui puisse lui permettre d'influencer les forces idéologiques du pays.

Un événement déterminant est un affrontement avec des activistes de gauche le 19 août 1929 à Vienne dans le quartier de Vösendorf. Franz Janisch meurt sous les coups. Il n'est pas seulement un militant de la Heimwehr, c'est aussi un national-socialiste. Il sera le premier martyr du mouvement national-socialiste en Autriche.

L'hésitant Steidle ne joue plus de rôle central. En septembre, Seipel met à son service l'aile sociale-chrétienne de la Heimwehr pour renverser son concurrent dans son propre parti, Streeruwitz, pour former un nouveau gouvernement sous la direction de Schober, toujours resté sans parti. Le ministre de la Défense Carl Vaugoin devient vice-chancelier. Les Heimwehr ont confiance dans le nouveau chancelier et attendent de lui qu'il prenne en main la restructuration de l'Etat et qu'il leur permette de participer au pouvoir. Steidle a pourtant mis en garde ses camarades depuis longtemps contre le « fonctionnaire-modèle » Schober, qui s'est toujours opposé aux tendances fascisantes de la Heimwehr. Au cours du même mois, Pabst réalise un voyage en Italie, où il s'engage à installer le fascisme en Autriche. Pfrimer, en octobre, s'adresse au chancelier d'un langage menaçant, lui rappelant la volonté populaire. En revanche, les Italiens prient Steidle de faire preuve de patience envers Schober.

A la même époque, le mouvement est à nouveau traversé par de graves dissensions. Pfrimer, mécontent des attaques continuelles du théoricien corporatiste Othmar Spann, rompt tous ses contatcs avec le Tyrol. Steidle, dans sa position affaiblie, ne parvient pas à obtenir de garanties de la part de Schober. Le 1er novembre 1929, Pabst présente un programme d'action au commandement de la Heimwehr à Vienne. Une réforme constitutionnelle (Renforcement du pouvoir présidentiel, parlement corporatif, musèlement de l'opposition, suppression de la province de Vienne) doit être le premier pas pour poser de nouvelles bases. L'objectif final est l'établissement d'un Etat corporatif, où le conseil national serait remplacé par une chambre des corporations. Cette Autriche rénovée soutiendrait le Stahlhelm et aiderait l'Allemagne à redevenir une grande puissance, en mesure de résister aux puissances occidentales. Mais la réforme constitutionnelle du 7 décembre, qui ne correspond en aucun point à ce projet, déçoit considérablement les Heimwehr.

Le 6 février 1930, Schober, en habile politicien, signe un traité d'amitié avec l'Italie. Il se présente comme l'artisan d'un front uni de toutes les forces de droite et parvient à mettre Steidle de son côté. En quête de nouveaux alliés, Starhemberg établit des contacts avec les nationaux-socialistes.

Le Serment de Korneuburg

Le Serment de Korneuburg réunit 52.000 personnes.
Le Serment de Korneuburg

Lors du Serment de Korneuburg, prêté par la Heimwehr le 18 mai 1930, le mouvement adopte enfin un programme politique. Celui-ci revendique la constitution d'un « Etat populaire de défense de la patrie », qui doit garantir une réorganisation du pays, des institutions et de l'économie. Cet objectif requiert un certain bouleversement politique. Le programme rejette clairement le « parlementarisme occidental » et le système des partis. Le nouvel ordre social doit se baser sur une autogestion des corporations, sous la direction d'une élite formée par des représentants des corporations et les commandants les plus expérimentés de la Heimwehr. La Heimwehr prononce une « déclaration de guerre à la désintégration de la communauté populaire par la lutte des classes marxiste et par le capitalisme libéral ». L'économie devrait s'autogérer sur la base des compétences professionnelles. Pour dépasser la lutte des classes, le programme propose de promouvoir la dignité et la justice sociales. Une économie restructurée sur le principe du bien commun et sur celui d'une agriculture forte doit assurer le bien-être général. L'Etat, qui doit incarner le peuple tout entier, doit veiller à ce que les corporations servent avant tout la communauté populaire.

Officiellement, Starhemberg garde ses distances avec le Serment. Il se rapproche de Schobert et rend visite à Mussolini. Les pangermanistes refusent de se soumettre à la direction de la Heimwehr. Steidle fait exclure de la Heimwehr tous les cadres qui ne reconnaissent pas le Serment de Korneuburg. La rhétorique violemment antidémocratique crée de nombreux conflits internes. Schober lui-même refuse de se placer de manière unilatérale dans le camp de la Heimwehr. Le Landbund publie même une déclaration d'incompatibilité, mais les sociaux-chrétiens laissent leurs adhérents libres de reconnaître ou non le texte du Serment. Schober reprend la main et fait expulser Pabst vers l'Italue le 15 juin. La section de la Heimwehr de Basse-Autriche, dirigée par Julius Raab et très liée au Parti social-chrétien, rompt avec la direction du mouvement.

Avec l'appui de Schober et des milieux industriels, Starhemberg est élu commandant fédéral le 2 novembre 1930.

Une tentative d'élargir le front aux nationaux-socialistes échoue, en raisons de la revendication d'un partage égal des postes de direction de leur part. Peu après, le triomphe électoral de la NSDAP en Allemagne entraîne un bond en avant chez les nationaux-socialistes autrichiens. Déjà le 25 novembre, Schober s'incline devant les amis de Starhemberg et cède la place à un nouveau gouvernement dirigé par Vaugoin. Starhemberg est nommé ministre de l'Intérieur, son camarade de la Heiwehr Franz Hueber devient ministre de la Justice. Schober reçoit pourtant le poste de minstre des Affaires étrangères et celui de vice-chancelier. Le Conseil national est dissout en vue d'élections anticipées. Mais celles-ci se soldent le 9 novembre par une défaite du Heimatblock, la coalition lancée par Starhemberg, qui ne reçoit que 6,16 % des suffrages.

Ce résultat catastrophique est immédiatement mis à profit par les adversaires du prince à l'intérieur du mouvement. Pabst revient sur le devant de la scène et déclare que des bulletins de vote n'ont jamais relevé un peuple. Selon lui, la Heimwehr devrait se préparer à prendre bientôt le pouvoir. Le major Emil Fey, commandant des sections viennoises de la Heimwehr, était déjà entré en contact avec les nationaux-socialistes avant les élections. D'autre part, la défaite électorale pousse une grande partie des unités du Tyrol et du Vorarlberg dans les bras du Parti social-chrétien in die Arme der Christlichsozialen, pendant que les partisans du national-socialisme prennent de plus en plus d'importance dans le mouvement.

La tentative de coup d'État de Pfrimer

Au printemps, Pfrimer appelle à un coup d'État contre la gabegie parlementaire. Juste après, le gouvernement Vaugoin tombe à cause d'une crise financière.

Le 12 novembre 1931, Pfrimer lance, depuis la Styrie, une tentative de coup d'État contre la république honnie. Starhemberg semble avoir pris part aux préparatifs. Mais les 14.000 hommes sont abandonnés par les autres chefs du mouvement. Le lendemain, Pfrimer laisse tomber. Il prend la précaution de mettre en sécurité les armes et les uniformes avec l'accord de la police, et se réfugie en Yougoslavie. Le mouvement tombe alors dans une crise profonde. Starhemberg s'est retiré dans ses propriétés agricoles, Pabst quitte l'Autriche, Pfrimer se rapproche toujours plus de la NSDAP, tandis que Fey entre en continuelle opposition aux autorités fédérales du mouvement. Il est significatif que le 31 octobre, à Graz, la Heimwehr et la NSDAP organisent un grand meeting commun. Le 18 décembre, Pfrimer, inculpé de haute trahison, est acquitté. Quand la décision est rendue, accusés et jurés se lèvent et effectuent ensemble le salut romain.

Entretemps, l'afflux de militants dans les rangs nationaux-socialistes s'est encore accru. Les 600.000 chômeurs[3] constituent un terreau de choix pour la NSDAP. Peu à peu, le mouvement national-socialiste supplante les sections de la Heimwehr, qui souffrent de leur manque de moyens financiers et dont l'activité baisse constamment.

Après les élections du parlement fédéral du 24 avril 1932, le camp national autrichien va évoluer sous le signe du svastika. Starhemberg venait d'ailleurs de proposer à Adolf Hitler son adhésion à la NSDAP sous certaines conditions. L'appel d'air devient encore plus puissant avec la victoire électorale de Hitler en Allemagne le 31 juillet. En outre, deux des plus importants représentants des tendances légalistes, Schober et Seipel, décèdent à la même période.

Sous le règne de Dollfuss

En septembre, Starhemberg fait face à une révolte contre son autorité, menée par 172 unités de la Heiwehr, dominées par les tendances nationales-socialistes. Il parvient à conserver son autorité grâce à Mussolini, qui lui promet d'enfin renouveler son soutien en moyens financiers et en armement.

Le gouvernement dirigé depuis le mois de mai par le social-chrétien Engelbert Dollfuss nomme le 17 octobre Emil Fey, le grand rival de Starhemberg, au poste de ministre de la Sécurité. Deux jours plus tard, le chancelier se rapproche encore de la Heimwehr, en interdisant au Schutzbund et aux groupes nationaux-socialistes de défiler en uniforme. D'autre part, Pfrimer a déjà obtenu le soutien discret du ministère allemand de l'armée. Starhemberg, lui, s'efforce toujours en vain de se rapprocher de Hitler.

Après la prise du pouvoir par Hitler en Allemagne, le gouvernement de Dolfuss prend un caractère plus autoritaire. Une grève des chemins de fer est réprimée par l'intervention de l'armée. Une décision tombe le 4 mars 1933. Une motion de censure contre Dolfuss entraîne des débats tumultueux qui ne sont pas clos de manière régulière, suite au retrait des trois présidents du Conseil national. Le Président fédéral Miklas se range sans conditions derrière le chancelier qui, en vertu d'une loi votée en 1917 durant la guerre, décrète le gouvernement d'état d'urgence. Il est mis fin aux débats par l'intervention de la police.

Fin mars, le Schutzbund est interdit. Le 13 avril, le nouveau dictateur obtient le soutien de l'Italie pour garantir l'indépendance de l'Autriche. Les rapports avec le Reich et le mouvement national-socialiste se dégradent sérieusement.

Pendant que Pfrimer et ses proches collaborateurs assurent Adolf Hitler de leur fidélité inconditionnelle le 1er mai 1933 au siège de la chancellerie du Reich, Starhemberg organise à Vienne, avec le soutien financier italien, le plus grand rassemblement de la Heimwehr jamais vu. 40.000 commémorent le 250eme anniversaire de la libération de Vienne des Turcs. Dollfuss proclame la création d'un nouvel État, basé sur les valeurs chrétiennes et germaniques. Walter Pfrimer traite le défilé de « honte pour l'Autriche », car, selon lui, nombre de communistes, socialistes, de Hongrois et de Croates y auraient participé.

Le 20 mai 1933 est constitué le Front patriotique en tant que parti unique. Dollfuss, président fédéral, nomme son adjoint et le conseil exécutif. Les sections locales du parti sont placées sous la responsabilité des représentants des entreprises, des paysans et des travailleurs. Mais ce qui manque le plus au régime qui se met en place, c'est une idéologie ou une doctrine. Par ailleurs, Starhemberg considère que le Front patriotique n'est qu'un « obstacle clérical » sur la route qui pourrait mener à une version autrichienne du fascisme. La NSDAP accueille le nouveau régime avec une hostilité ouverte. Le 19 juin, ses activités sont interdites. En septembre, Dolfuss modifie la constitution dans un sens profasciste et nomme Fey au poste de vice-chancelier. Il entend ainsi renforcer le camp de ses partisans tout en affaiblissant l'opposition interne. Le 27 septembre 1933, la Heimwehr intègre totalement le Front patriotique, mais sans dissoudre ses structures. Starhemberg dissout en revanche le Bloc patriotique et est nommé adjoint du commandant fédéral. Steidle, Fey et Starhemberg se rapprochent nettement du régime mais ils se heurtent à la résistance des cléricaux qui n'entendent pas leur abandonner le pouvoir. Afin d'assurer leurs arrières, Fey et d'autres commandants de la Heimwehr renouvellent leur contacts avec les nationaux-socialistes.

En Carinthie, en Styrie, à Salzbourg et au Burgenland, la majorité des membres s'est déjà tournée vers la NSDAP. Le 21 novembre, Starhemberg critique violemment le mouvement national-socialiste qu'il accuse d'être téléguidé depuis Berlin. Il réclame une unification allemande dont le centre serait Vienne. Dolfuss, lui, ne pourrait pas gouverner sans la Heimwehr, avec laquelle il doit constamment négocier, sans quoi elle risquerait de prendre son autonomie. En décembre les quatre commandants principaux de la Heimwehr que sont Fey, le comte Alberti, Starhemberg et Steidle entreprennent des négociations avec les nationaux-socialistes. Mais ils ne parviennent pas à s'entendre, car ils ne peuvent 'unir que sur leur haine commune de Dollfuss. En même temps, la Heimwehr emploie la force en pour empêcher la constitution des « troupes d'assaut de l'Ostmark », une milice qui se veut indépendante du Front patriotique.

Fin janvier 1934, la Heiwehr organise un grand défilé à Innsbruck pour réclamer des réformes constitutionnelles dans un sens autoritaire et corporatif. Elle exige aussi une épuration de l'administration. Elle revendique encore la nomination d'un commandant de la Heimwehr comme adjoint de chaque préfet de district. Elle demande que certaines villes soient administrées par des commissaires extraordinaires. La dissolution de tous les partis politiques devrait être suivie par la constitution d'un comité national permanent, formé de cadres de la Heimwehr et du Landbund. A Salzbourg, l'administration accueille favorablement les revendications de la Heimwehr, tandis que le 4 février Steidle renverse le gouvernement provincial du Tyrol, qu'il remplace par un comité.

Malgré toutes les tensions, la Heimwehr intervient aux côtés du gouvernement quand Dollfuss, le 12 février, doit faire face à un soulèvement socialiste dans les villes de Vienne et de Linz. Ces événements marquent l'écrasement total des organisations socialistes. Dans la seule ville de Vienne, 1500 activistes de gauche et 49 membres des forces de l'ordre perdent la vie. De nombreux socialistes aigris s'engagent dans les rangs de la NSDAP, qui se situe d'une certaine manière nettement plus « à gauche » qu'en Allemagne.

La Heimwehr continue à souffrir de son manque d'initiative et de réflexion. C'est ainsi que malgré son triomphe apparent et ses forces qui atteignent maintenant près de 65.000 hommes, elle est encore tenue à l'écart du pouvoir par Dollfuss. Le 17 mars 1934, l'Italie, l'Autriche et la Hongrie signent les protocoles de Rome qui établissent une coopération économique et politique.

Le 30 avril 1934, 91 parlementaires du Conseil national adoptent la nouvelle constitution. Un Conseil fédéral, formé de 59 membres délégués par différents autres conseils, est habilité à adopter ou refuser les décisions du gouvernement. Il n'a en revanche pas le droit d'en débattre. On institue, au-delà, des conseils chargés de la culture, de l'économie et de l'administration des provinces, ainsi qu'un conseil d'Etat. Tous leurs membres sont nommés et n'ont qu'une fonction consultative. Le président fédéral est désormais élu par les maires. La colonne vertébrale du nouvel Etat doit être constituée par les fédérations corporatives, qui ne sont pas encore formées : industrie, artisanat, commerce et transports, Finances et assurances, professions libérales, agriculture et sylviculture, services publics. Pourtant, jusqu'en 1938, seules les deux dernières seront créées. Chaque sous-groupe corporatif doit rassembler entrepreneurs, employés et ouvriers. La constitution est promulguée le 1er mai et entre en vigueur le 31 octobre.

La tentative de putsch national-socialiste

La réaction la plus marquante à l'instauration de cet « austro-fascisme » va être le soulèvement national-socialiste du 25 juillet 1934.

Suite au massacre subi par une partie de leurs camarades en Allemagne lors de la « Nuit des longs couteaux »[4] du 30 juin 1934, les SA restent d'abord neutres. La tentative menée par les SS à Vienne échoue. Lors d'un affrontement, Dollfuss est mortellement blessé. Son ministre de la Justice, Kurt Edler von Schuschnigg, lui succède à la tête de l'Etat. Avec un peu de retard, les SA et les sections de la Heimwehr dirigées par Pfrimer se soulèvent à leur tour, mais elles se retrouvent rapidement face à l'armée et aux unités commandées par Starhemberg. Les rebelles perdent 394 hommes, les troupes du gouvernement 200. 12 insurgés sont exécutés par la suite, tandis que 60 d'entre eux sont condamnés à la prison à vie.

Les sections du mouvement national-socialiste parviennent pourtant à se réorganiser rapidement. Même Starhemberg prédit, le 20 janvier 1935, qu'un conflit avec Schuschnigg et le catholicisme politique est inévitable. En mars, les Heimwehr de Haute-Autriche et de Salzburg opèrent un tournant radical contre l'influence cléricale au sein du Front patriotique et déclarent que les sociaux-chrétiens doivent être considérés comme des reliquats du parlementarisme à éradiquer. De même en Carinthie et au Tyrol la révolte gronde aussi, malgré le fait que Steidle vient d'être envoyé à Trèves (Trier) comme consul. Les porte-paroles de l'aile révolutionnaire sont en effet Steidle et Fey. En Basse-Autriche, des affrontements massifs ont lieu entre la Heimwehr et des troupes d'assaut cléricales. Les sections locales échappent de plus en plus au contrôle gouvernemental. Afin de calmer cette montée de l'opposition, Vienne se rapproche de la Maison des Habsbourg et lève la mesure d'interdiction du territoire qui la concernait. Le gouvernement joue la carte du monarchisme, considéré par les forces pangermanistes et nationales-socialistes comme une forme de séparatisme. Schuschnigg appelle ensuite tous les nationalistes modérés à adhérer au Front patriotique, qui deviendrait ainsi encore plus hétérogène.

L'impasse

Le 17 octobre 1935, Fey est relevé de ses fonctions de vice-chancelier et remplacé par Starhemberg. La Heimwehr réclame alors un remaniement de tout le cabinet et demande le ministère de la Défense, ce que Kurt Edler von Schuschnigg ne veut à aucun prix. Starhemberg continue à louvoyer. Début 1936, devant l'ambassadeur allemand von Papen, il fait l'éloge d'Adolf Hitler, qu'il qualifie de seul homme d'Etat à avoir véritablement pris la mesure du « danger représenté par la conspiration mondiale bolchéviste et maçonnique ». En janvier, le Front patriotique tient son premier rassemblement fédéral, au cours duquel Starhemberg annonce son prochain programme politique, qui ne verra en fait jamais le jour. Il s'étend abondamment sur la possibilité d'une restauration monarchique, ce qui irrite une grande partie de la Heimwehr. Le prince tente encore de persuader Kurt Edler von Schuschnigg de gagner à sa cause aussi bien les monarchistes que les nationaux-socialistes et les Italiens. Depuis l'automne 1935, suite à l'expédition italienne en Abyssinie et au refus d'Adolf Hitler de participer aux sanction économiques, on assiste à un rapprochement entre l'Allemagne et l'Italie.

Selon Papen, Starhemberg affecte particulièrement le gouvernement le 29 avril 1936, quand il exige que l'Autriche s'allie avec l'Italie et l'Allemagne contre le bolchévisme. En effet, il déclare qu'une telle alliance ne peut être possible qu'au prix d'une séparation avec les démocrates. Lors de la manifestation suivante au mois de mai à Vienne, des heurts ont lieu entre membres de la Heimwehr et adhérents des syndicats gouvernementaux. Le 12 mai, le prince et Kurt Edler von Schuschnigg sont désaccord à propos de l'attitude à adopter face à Berlin. Un nouveau rassemblement culmine à nouveau en affrontements.

Starhemberg creuse pour ainsi dire sa propre tombe quand, le 13 mai, il envoie un télégramme de félicitations à Mussolini pour sa victoire en Abyssinie. Kurt Edler von Schuschnigg profite de cette occasion pour le démettre de ses fonctions de vice-chancelier et de commandant fédéral du Front patriotique. Starhemberg devient président de l'œuvre des aides familiales du Front patriotique et reste commandant fédéral de la Heimwehr. Le ministre de l'Intérieur, Eduard Baar-Baarenfels, que Kurt Edler von Schuschnigg a prévu comme chef d'une milice fédérale encore à créer, propose en vain à la Heimwehr de tenter un coup d'État. Le 15 mai, le chancelier prend lui-même la tête du Front patriotique.

En été, une action Heimwehr échoue en raison des désaccords entre Fey et Starhemberg. En septembre, le conflit se résout quand les sections de Vienne, de Carinthie et du Tyrol, sous l'incitation de Fey et du major Lahr, se rebellent contre l'autorité du commandant fédéral qu'elles accusent d'incompétence. Ces sections décident de se séparer définitivement de Starhemberg et de se rapprocher des nationalistes modérés.

Mais il est trop tard. En effet, le 10 octobre 1936 Kurt Edler von Schuschnigg dissout tous les groupes armés. La Frontmiliz du Front patriotique est la seule exception tolérée aux côtés de la Bundesheer et elle est placée sous la direction de vétéran Hülgerth. Starhemberg exige en vain de ses camarades qu'ils se retirent en bloc du gouvernement. Son souhait d'être placé à la tête de la Frontmiliz est balayé. Le 3 novembre, Kurt Edler von Schuschnigg exclut du cabinet tous les anciens commandants de la Heimwehr et nomme Hülgerth vice-chancelier. Pour la première fois, des personnalités politiques proches du national-socialisme font leur entrée au gouvernement.

Les restes de la Heimwehr se retrouvent dans la vieille structure de la Heimatschutz. Là aussi, les rivalités entre les partisans de Fey et ceux de Starhemberg sont constamment à l'ordre du jour. Nombre de membres de la Heimwehr rejoignent les nationaux-socialistes, même si ceux-ci voient Pfrimer d'un très mauvais œil. Les « austro-fascistes » s'étaient privés des éléments les plus actifs du Front patriotique, ce qui se vérifiera de manière douloureuse en 1938. Le jeu de balançoire mené par Kurt Edler von Schuschnigg entre les monarchistes et les nationalistes modérés le mènera directement dans une annexion à l'Allemagne qu'il aura lui-même provoquée.

Après le rattachement officiel à l'Allemagne (l'Anschluss), l'envie de vengeance des nationaux-socialistes va rattraper de nombreux anciens commandants de la Heimwehr. Le prince Starhemberg part pour l'étranger et se mettra au service de la propagande de guerre britannique. Le major Waldemar Pabst semble avoir encore joué un rôle durant la crise des Sudètes. Emil Fey se suicide, avec toute sa famille, le 16 mars 1938. Robert Hecht, le père de la constitution « austro-fasciste », meurt le 30 mai 1938 à Dachau, tandis que Richard Steidle est fusillé le 30 juillet 1940 à Buchenwald. [5]

Bibliographie

Die Heimwehren und die österreichische Politik 1927–1936.jpg
  • Lothar Höbelt, Die Heimwehren und die österreichische Politik 1927–1936, Ares Verlag, Graz, 2016.

Notes et références

  1. Hanns Albin Rauter fera plus tard carrière dans la SS et sera chef de la police aux Pays-Bas.
  2. La littérature nationaliste allemande parle d' Erfüllungspolitik, littéralement « politique d'exécution ».
  3. Chiffres enregistrés au printemps 1933.
  4. Le terme de « Nuit des longs couteaux » n'a pas cours dans l'historiographie allemande, qui emploie celui de Röhmputsch.
  5. La section Histoire de cette entrée est une traduction de l'article « Rot-Weiß-Rot bis in den Tod - Die Heimwehrbewegung in Österreich », paru sur le site DieKommenden.net, repris lui-même de la revue Europakreuz.