Eumeswil

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Eumeswil est un roman d'Ernst Jünger, publié en 1977.

Eumeswil

Il a été traduit en français en 1978, en italien en 1980, en suédois en 1981, en espagnol en 1992, en anglais en 1993.

Texte

Structure

Le texte est divisé en six gros chapitres, auxquels il faut ajouter un épilogue d'une page.

  • Les professeurs (Die Lehrer)
  • Isolement et assurance (Abgrenzung und Sicherheit)
  • Notes prises au bar de nuit (Nachtbar-Notizen)
  • Un jour à la casbah (Ein Tag auf der Kasbah)
  • Un jour en ville (Ein Tag in der Stadt)
  • De la forêt (Vom Walde)

Le texte est également subdivisé en 50 sous-chapitres[1].

Les six chapitres, dont le narrateur est Venator, sont présentés comme des notes laissées par celui-ci. Le narrateurde l'épilogue est Cadmo, le demi-frère de Venator.

Résumé

Personnages

  • Venator, Martin ou Manuel : le narrateur, historien (métier exercé de père en fils depuis des générations dans sa famille), et steward de nuit dans un bar fréquenté uniquement par des proches du Condor.
  • le Condor : le tyran d'Eumesvil, qui a pris le pouvoir en renversant les Tribuns.
  • Vigo : un historien, dont Venator est l'assistant et l'ami.
  • Kessmüller : un enseignant homosexuel, caractérisé par sa personnalité de caméléon, son conformisme et son opportunisme.
  • Domo (pour Mayordomo mayor): le « bras droit » du Condor, en charge de la sécurité, homme aux « pensées glaciales »
  • Attila : le « bras gauche » du Condor, médecin
  • Cadmo : frère de Venator (en fait son demi-frère, puisqu'il est le fils de la première épouse du père du narrateur)
  • Bruno : professeur de philosophie, voit le monde d'un regard de mage
  • Rosner : fauconnier-chef et professeur de zoologie
  • Thofern : professeur de grammaire
  • Scavo : spécialiste des questions financières
  • Ingrid : une étudiante en histoire, amie de Venator
  • Latifah : une fille de joie
  • Zerrwick : directeur de l'hebdomadaire des « tribuns » (l'opposition contrôlée des libéraux), le Zaunkönig[2]
  • Kung : un « steward » chinois
  • Nebek : un collaborateur de Vigo, libanais, spécialisé en histoire orientale, travaille également en tant que « steward » durant ses vacances universitaires
  • Knut Dalin, un « steward » norvégien et anarcho-nihiliste.
  • Sebastian Carnex : un avocat.

Lieux et espace

  • Eumeswil est une ville située à proximité de la mer. Elle possède un port. Son territoire et ses îles séparent les puissants États de Diadoques, gouvernés par les Grands Khans (le Khan bleu et le Khan jaune), et des cités-États. Eumeswil est l'une de ces cités-États.
Au nord du territoire d'Eumesvil se trouve une mer, qui ressemble parfois à la Méditerranée, parfois à l'Atlantique. Au sud s'étend un désert. Au-delà du désert se trouvent des steppes, des prairies, puis des forêts profondes. Ces territoires sont tous riches en gibier. Ensuite s'étend l'océan.
Le nom de la ville fait référence à Eumène de Cardie (362 av. J.-C.– 316), unique Grec non-macédonien parmi les Diadoques, qui prend part à la première guerre des Diadoques. « Eumène est réputé moins infâme que les autres Diadoques, et en cela, il ressemble au tyran d'Eumeswil, le Condor, qui a horreur de la cruauté du despote. »
  • la Casbah : un quartier protégé et situé en dehors de la ville, lieu de vie et de travail de l'élite, où se trouve également l' Institut d'histoire. Les femmes n'y sont pas admises.

Innovations techniques

  • le phonophore: tout comme dans Héliopolis, une partie des personnages est habilitée à disposer d'une sorte de téléphone portable, doté de différentes fonctions.

Ses fonctions varient suivant la place du détenteur dans la hiérarchie. Ainsi, Latifah, la prostituée, ne dispose que d'un phonophore gris, limité aux communications officielles, et qui permet d'entendre, mais non d'émettre soi-même. Venator dispose lui, d'un phonophore rayé. Les phonophores d'or sont réservés au Condor et à ses plus proches collaborateurs.

  • le Luminar : une machine qui contient une immense base de données concernant toute l'histoire mondiale. Elle peut produire des documents écrits ou même reconstituer des événements sous la forme de vidéos. Répondant aux questions qu'on lui pose, elle préfigure singulièrement le fonctionnement des logiciels d'intelligence artificielle. Le luminar est capable d'effectuer des projections, par exemple lorsque Venator lui demande à quoi ressemblerait un monde dans lequel l'utopie de Charles Fourier serait appliquée. Il assiste alors à un véritable spectacle d'une terre devenue une collection de phalanstères.

On apprend ensuite que le luminar peut produire des visions en trois dimensions, auxquelles le visiteur peut participer. Venator visite ainsi l'assemblée de la Convention de la Révolution française, ou les cafés du Berlin de 1848.

Son accès est toutefois limité suivant les responsabilités de ceux qui l'emploient. Il ek existe aussi plusieurs. Ainsi le Grand luminar se trouve dans le bureau de Venator, ce qui constitue une marque de confiance du Condor, tandis qu'Ingrid effectue ses travaux de recherche sur le Petit luminar.

Contexte d'écriture

Quand Jünger rédige Eumeswil, il y a longtemps qu'il n'est plus un écrivain politique. Pourtant, certains commentateurs ont estimé important de le replacer dans son contexte temporel.

Matthias Schöning a ainsi rappelé que le livre sort juste après l'« Automne chaud allemand », la période du paroxysme du terrorisme de la Rote Armee Fraktion (RAF) en Allemagne. L'organisation se réclame du marxisme-léninisme, or elle est alors présentée quotidiennement dans les médias comme « anarchiste ». Schöning fait par ailleurs remarquer que Dalin, le personnage qualifié par le narrateur d'«anarcho-nihiliste », lui dévoile, parmi ses projets, d'incendier un centre commercial. Or aucun centre commercial n'est mentionné ailleurs dans le récit, ce qui laisse penser qu'il y a là une allusion aux incendies de centres commerciaux en avril 1968 à Francfort, qui ont constitué les premières « actions armées » de la RAF. Plus loin, lorsque le narrateur estime que celui qui veut se battre au travers d'une grève de la faim « peut prétendre à être traité selon les lois de la guerre », il est difficile de ne pas y voir de lien avec les grèves de la faim des détenus de la RAF, qui défrayent la chronique en 1973, 1974 et 1977. La nette distinction que Jünger opère dans le roman entre l'anarchiste et l'anarque prend ainsi la valeur d'une « typologie des ennemis de l'État ».[3].

Thèmes

La figure de l'Anarque

Dans la première partie, Jünger définit sur plusieurs pages la Figure de l'Anarque, qui apparaît dans Eumeswil, bien plus tard que celle du Soldat du front, celle du Travailleur et que celle du Rebelle.

Venator, le héros de ce livre « postmoderne » qui se veut une continuation d’Héliopolis, et dont l’action se déroule au IIIe millénaire, n’a plus besoin de recourir à la forêt pour n’être pas touché par le nihilisme ambiant. Il lui suffit d’avoir atteint cette hauteur qui lui permet de tout observer à distance sans même avoir besoin de s’éloigner. Typique à cet égard est son attitude vis-à-vis du pouvoir. Alors que l’anarchiste veut faire disparaître le pouvoir, l’Anarque se contente de rompre tout lien avec lui. L’Anarque n’est pas l’ennemi du pouvoir ou de l’autorité, mais il ne cherche pas à s’en emparer, car il n’en a pas besoin pour devenir ce qu’il est. L’Anarque est souverain par lui-même — ce qui revient à dire qu’à travers lui se marque la distance existant entre la souveraineté, qui n’a pas besoin du pouvoir, et le pouvoir, qui ne confère pas toujours la souveraineté. «L’Anarque, écrit Jünger, n’est pas le partenaire du monarque, mais son antipode, l’homme que le puissant n’arrive pas à saisir, bien que lui aussi soit dangereux. Il n’est pas l’adversaire du monarque, mais son pendant». Véritable caméléon, l’Anarque s’adapte à toutes choses, parce que rien ne l’atteint. Il est au service de l’histoire tout en étant au-delà de l’histoire. Il vit dans tous les temps à la fois, présent, passé et futur. Ayant franchi le mur du temps, il est dans la position de l’étoile polaire, celle qui reste fixe tandis que la voûte étoilée tourne toute entière autour d’elle, axe central ou moyeu, «centre de la roue où s’abolit le temps». Ainsi, il peut veiller sur l’«éclaircie», qui représente l’endroit et le moment de re-manifestation des divins. Par quoi l’on voit, comme l’écrit Claudie Lavaud à propos de Heidegger, que le salut est « dans le demeurer, et non dans le franchissement, dans le méditer et non dans le calculer, dans la piété commémorante qui laisse venir à la pensée le dévoilement et l’oubli, qui sont ensemble l’essence de l’alèthéia »[4].

Ce qui distingue le Rebelle de l’Anarque, c’est donc la qualité de leur mise à l’écart volontaire: retrait horizontal chez le premier, retrait vertical chez le second. Le Rebelle a besoin de se réfugier dans la forêt, parce qu’il est un homme sans pouvoir ni souveraineté, et que c’est seulement ainsi qu’il peut rester titulaire des conditions de sa liberté. L’Anarque lui aussi est sans pouvoir, mais c’est précisément parce qu’il est sans pouvoir qu’il est souverain. Le Rebelle est encore un révolté, tandis que l’Anarque est au-delà de la révolte. La démarche du Rebelle est ordonnée au secret — il se cache dans ce qui dérobe à la vue —, tandis que l’Anarque se tient en pleine lumière. Enfin, alors que le Rebelle a été banni par la société, l’Anarque a banni lui-même la société. Il n’a pas été exclu par elle; il s’en est affranchi[5].

L'Homme et la technique

Métaphysique du sexe

Réception

Dès sa sortie, Armin Mohler, qui avait autrefois pris ses distances avec Jünger, dont il avait été le secrétaire particulier, qualifie Eumeswil de chef d'œuvre, de « roman utopique, qui n'est d'ailleurs pas un roman, mais quelque chose de beaucoup plus complexe ». Selon lui, Jünger rompt ici avec une partie de son œuvre, avec « toute une pénible littérature de "justification" »[6] ou « toute une série de dissertations philosophiques, d'une nébulosité et d'une confusion inhabituelles chez Jünger, le maître de la précision dans l'expression »[7]. Pour lui, il est extraordinaire de constater à quel point, dans Eumeswil, les mots et les pensées, unis dans un même regard comme dans une sorte de vision, obéissent à une véritable discipline. Cette vision, c'est celle d'un avenir postérieur aux grands cataclysmes nucléaires, lorsque, de surcroît, l'« Etat mondial s'est à nouveau effondré ».

Bien sûr, pour Mohler, « toute cette mise en scène n'est là que pour permettre à Ernst Jünger d'édifier, dans un cadre approprié, les monuments de sa parfaite connaissance des choses du monde. Cela se déroule sur deux plans : sur le devant de la scène, se célèbre le jeu de la Puissance; derrière, en coulisses, se dévoilent les « puissances » qui sont derrière la Puissance.[...] dans la coulisse, derrière la politique, l'homme que l'auteur cherche à représenter est celui qui, « en même temps, peut être ici et ailleurs» : la fascination que Jünger éprouva toute sa vie durant pour la pure sensualité et la pure spiritualité éclate encore ici pleinement ».

« L'atmosphère claire et glaciale de cet ouvrage » repose en partie sur tout ce que Jünger laisse de côté, sur tout ce qui ne l'atteint à aucun moment: « la phraséologie humano-progressiste désormais passée dans les mœurs, l'étouffante bouillie de sentiments faite à la fois de frustration et de surestimation de soi, tout cet hypermoralisme sans lien avec les choses, toutes ces représentations morales qui n'engagent jamais à rien ; bref, ce qui manque chez Jünger, c'est ce grand bavardage qui nous empêche de voir dans quelle situation nous sommes »[8].

Pour Tomislav Sunic, «on devrait se rappeler la figure de l’Anarque d’Ernst Jünger dans son roman Eumeswil. Le protagoniste, Martin Venator, vit sa double vie dans une société postmoderne et multiculturelle à coté de la casbah d’Eumeswil. Or l’Anarque n'est ni rebelle, ni dissident, ni anarchiste quoiqu’au moment donné, il puisse revêtir toutes ces trois figures à la fois. D’ailleurs, l’Anarque semble s’être très bien inséré dans le système de la pensée unique et de l’autocensure du Système. Il attend patiemment son moment ; il va frapper seulement quand le moment sera mûr. Ce roman de Jünger peut être considéré comme le Bildungsroman pour la génération actuelle de jeunes Européens dont le rôle didactique peut leur faciliter le choix de la figure du rebelle. »[9]

Éditions

Éditions originales

  • Ernst Jünger, Eumeswil, Klett-Cotta, Stuttgart, 1977.
  • Ernst Jünger, Sämtliche Werke in 18 Bänden, Band 17: Eumeswil, Klett-Cotta, Stuttgart, 1980.

Traduction française

  • Ernst Jünger, Eumeswil, trad. par Henri Plard, Éditions La Table ronde, 1978, 406 p.; rééd. éditions Litos, février 2025, 648 p.

Bibliographie

En allemand

  • Rolf Günter Renner, « Eumeswil (1977) », in: Matthias Schöning (Hrsg.): Ernst Jünger-Handbuch, Metzler, Stuttgart/Weimar 2014, p. 250–257.
  • Peter Uwe Hohendahl, Erfundene Welten. Relektüren zu Form und Zeitstruktur in Ernst Jüngers erzählender Prosa, München 2013, p. 105–133.
  • Bernd A. Laska, „Katechon“ und „Anarch“. Carl Schmitts und Ernst Jüngers Reaktionen auf Max Stirner, LSR-Verlag, Nürnberg 1997.
  • Armin Mohler, Rezension von Jüngers »Eumeswil«, in: Criticón, Nr. 45, Jan./Feb. 1978, S. 2.
  • Maik M. Müller, Postmoderne Topographien. Ernst Jüngers Eumeswil und Christoph Ransmayrs Morbus Kitahara (= Europäische Hochschulschriften, Reihe 1: Deutsche Sprache und Literatur, Band 1978). Peter Lang, Frankfurt am Main 2009.
  • Dietrich Murswiek, « Der Anarch und der Anarchist: Die Freiheit des Einzelnen in Ernst Jüngers Eumeswil », in: Deutsche Studien, Band 17, 1979, p. 282–294.
  • Joachim Schote, « Ernst Jüngers Roman Eumeswil: Die Theorie der Posthistoire und das Scheitern des Anarchen », in: Augias, Band 43, 1992, p. 28–48.
  • Harro Segeberg, Wir irren vorwärts. Zur Funktion des Utopischen im Werk Ernst Jüngers, in: Lutz Hagestedt (Hrsg.): Ernst Jünger. Politik – Mythos – Kunst Walter de Gruyter, Berlin 2004, p. 403–414.
  • Bernd Stiegler, « Technische Innovation und literarische Imagination. Ernst Jüngers narrative Technikvisionen in Heliopolis, Eumeswil und Gläserne Bienen », in : Schöning Matthias et Stöckmann Ingo (dir.), Ernst Jünger und die Bundesrepublik : Ästhetik - Politik - Zeitgeschichte, Berlin, De Gruyter, 2012, p. 295-308.
  • Heike Tschenett, Ernst Jünger und die Antike: Herrschergestalten Römischer Verfallszeiten in den Romanen Heliopolis und Eumeswil, Thesis, Leopold-Franzens-Universität, Innsbruck 1994.
  • Christian Weilmeier, Eumeswil. Ernst Jüngers Philosophie der institutionellen Ordnung, thèse de doctorat, Hochschule für Philosophie München 2005.
  • Rolf Günter Renner, « Modernität und Postmodernität im erzählenden Spätwerk Jüngers », in: Hans-Harald Müller, Harro Segeberg (Hrsg.): Ernst Jünger im 20. Jahrhundert, München 1995, p. 249–268.
  • Alexander Rubel, « Griechische Tyrannis und das Verhältnis des Subalternen zur Macht in Ernst Jüngers Eumeswil », in: Martin Dreher (Hrsg.), Bürgersinn und staatliche Macht in Antike und Gegenwart. Festschrift für Wolfgang Schuller zum 65. Geburtstag, Universitätsverlag Konstanz, Konstanz 2000, S. 263–284.
  • Matthias Schöning, « Der Anarch und die Anarchisten. Ernst Jüngers „Eumeswil“: Eine metapolitische Typologie der Staatsfeinde aus dem Jahr ’77 », in: Normen Ächtler, Carsten Gansel (Hrsg.), Ikonographie des Terrors? Formen ästhetischer Erinnerung an den Terrorismus in der Bundesrepublik 1978–2008, Heidelberg, 2010, p. 21–50.

En français

  • Alain de Benoist, « Types et figures dans l’œuvre d’Ernst Jünger. Le Soldat du front, le Travailleur, le Rebelle et l’Anarque »; lire en ligne : [1].
  • « Max Stirner et Rousseau dans Eumeswil de Ernst Jünger », in : Tanguy L’Aminot et Catherine Labro, Rousseau et l’Allemagne à l ‘époque contemporaine, Reinhard Bach éd., Montmorency, Siam-JJR, 2010.
  • Armin Mohler, « Jünger, le retour de "l’auteur du siècle" », Éléments, no 26, printemps 1978 [trad. de « Rezension von Jüngers Eumeswil », in: Criticón, voir supra].

En italien

  • Alberto Lombardo, « Ecco l’Anarca di Ernst Jünger »; lire en ligne : [2].

Notes et références

  1. Dans la traduction française, ceux-ci ne sont que 48.
  2. Traduit en français par Le Roitelet.
  3. Matthias Schöning, « Der Anarch und die Anarchisten. Ernst Jüngers „Eumeswil“: Eine metapolitische Typologie der Staatsfeinde aus dem Jahr ’77 », art. cit.
  4. Claudie Lavaud, «“Über die Linie”: Penser l’être dans l’ombre du nihilisme», in Les Carnets Ernst Jünger, 1, 1996, p. 49.
  5. Alain de Benoist, art. cit.
  6. Mohler vise ici en particulier La Paix (1945).
  7. Mohler évoque notamment Le Mur du temps (1959).
  8. Armin Mohler, Art. cit.
  9. Tomislav Sunic, « La balkanisation du Système - Ernst Jünger et la fin des temps », mars 2012.; trad. de « Endzeiten: Die Balkanisierung Europas und Jüngers Anarch », in : Hier & Jetzt, no 18, printemps 2012.