Fabrice Robert : "Retour sur un parcours politique personnel"

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"Un homme qui se vante de ne jamais changer d'opinion est un homme qui se charge d'aller toujours en ligne droite, un niais qui croit à l'infaillibilité. Il n'y a pas de principes, il n'y a que des événements ; il n'y a pas de lois, il n'y a que des circonstances : l'homme supérieur épouse les événements et les circonstances pour les conduire. S'il y avait des principes et des lois fixes, les peuples n'en changeraient pas comme nous changeons de chemises."

Vautrin à Eugène de Rastignac dans Le Père Goriot, La Comédie humaine, III (1835), Honoré de Balzac, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1976, p. 144

A l’heure où le Bloc identitaire se développe partout en France et cherche à inscrire durablement un nouveau courant de pensée dans le paysage politique français, les attaques se multiplient logiquement pour tenter de freiner notre progression. Parce que je suis en première ligne – par mon statut de président du mouvement –, j’apparais aujourd’hui comme une cible prioritaire. Et je me retrouve dans une situation paradoxale.

D’un côté, certains journalistes fouillent dans mon parcours militant pour trouver des éléments qui, à leurs yeux, pourraient se révéler infamants afin d’imposer l’idée selon laquelle certains choix passés interdisent toute évolution et discréditent a priori mes prises de position actuelles. De l’autre, quelques individus issus de la mouvance nationaliste ne parviennent pas à comprendre certaines de ces prises de position et vont jusqu’à parler de « reniements ». Il faudrait se mettre d’accord.

Chez les « rebelles blancs »

Mes premiers pas dans le militantisme politique remontent à la fin des années 1980. J’avais 16 ans et une profonde envie de m’engager pour mon pays. Attiré immédiatement par le nationalisme révolutionnaire – avec le mouvement Troisième voie –, je rêvais de justice sociale, de nation forte et unie, d’identité assumée, d’Europe indépendante face aux blocs américain et soviétique. A travers le slogan « Ni trusts, ni soviets », nous voulions proposer une troisième voie entre communisme et libéralisme. Il y avait aussi dans cet engagement, non dénué de romantisme, la recherche d’une certaine esthétique de l’action.

Le système dénonçait les militants nationalistes comme des « salauds ». J’ai donc pris allègrement l’habit du « salaud », du proscrit. « Seuls contre tous », nous avions la certitude d’incarner la vérité face à la trahison des élites.

Pour aller encore plus loin dans la radicalité, je me suis alors rapproché de ces bandes de « rebelles blancs » aux cheveux courts qui se développaient, à cette époque, dans la plupart des villes de France. Par notre tenue vestimentaire, nous étions de véritables cibles vivantes. Le risque était quotidien, permanent. Nos idées étaient clairement affichées comme un bras d’honneur à ceux qui tentaient de criminaliser l’idéal nationaliste. A une situation violente, la réponse adéquate ne pouvait être que violente. D’ailleurs, nous savions que l’Histoire s’était construite dans la violence et nous pensions qu’il ne pourrait pas en être autrement. Face aux bandes ethniques qui terrorisaient, déjà, certains quartiers, nous voulions que la peur change de camp et prouver notre détermination à rester maîtres chez nous.

Cette période de ma vie restera à jamais gravée dans mon esprit. C’est dans ces bandes de « rebelles blancs » que j’ai découvert l’esprit de camaraderie, le courage, la détermination. J’y ai perdu de nombreux amis, certains morts sous les coups des bandes adverses, d’autres incarcérés pour de nombreuses années. J’ai moi-même failli perdre la vie à plusieurs reprises ; j’aurais pu également finir en prison. Mon quotidien était à cette époque rythmé par les rixes à répétition, les gardes à vue et les séjours aux urgences dans une multitude d’hôpitaux. Mais nous étions respectés et craints. Très souvent en minorité, à un contre cinq, nous parvenions à avoir le dessus car nous étions déterminés. C’est dans ce genre de situation que l’on découvre sur qui on peut compter, que les liens se renforcent, que l’esprit de communauté se développe.

Bien évidemment, nous n’étions pas toujours victorieux. Et je me suis parfois retrouvé dans des situations vraiment délicates. Comme cette soirée où, seul, poursuivi par une dizaine de caïds maghrébins, je me suis retrouvé au bout d’un ponton en pleine nuit avec une arme de poing sur le front. Ou cette autre fois où, traqué par quatre Noirs bodybuildés et armés de machettes, j’ai cru que mes dernières heures étaient arrivées.

Avec le recul, je crois pouvoir dire que l’expérience que j’ai acquise dans la rue a été déterminante dans la suite de mon engagement.

Questions d’Histoire

En 1991, alors que je commençais à peine mes études d’histoire, je me suis intéressé au révisionnisme. Par rejet de tout dogme, par refus qu’une quelconque vérité historique soit imposée par les tribunaux, j’ai voulu provoquer un débat par différentes actions militantes. Le scandale ayant éclaté et largement dépassé les frontières de Nice – interventions de députés à l’Assemblée nationale, condamnation de Simone Veil, etc. –, je me savais recherché par les autorités judiciaires mais pas seulement… C’est ainsi qu’en pleine action nocturne, je me suis retrouvé plaqué à terre, braqué avec une arme sur la nuque par un individu – qui avait décidé de « faire justice » lui-même ? – qui m’a ensuite livré à la police. Cette « arrestation » n’a jamais fait l’objet d’une enquête approfondie.

La machine judiciaire s’est mise en marche. Face aux juges, j’ai adopté une stratégie de rupture dans une ambiance lourde et délétère, le « pigeonnier » normalement dédié aux procès d’assises ayant été spécialement ouvert afin d’accueillir le maximum de public pour cet événement à vocation pédagogique. J’ai eu le « privilège » d’être le deuxième condamné en France sur le fondement de la loi Gayssot.

Les problèmes ne faisaient que commencer. Mon adresse personnelle fut divulguée par un journaliste de Nice-Matin, des pétitions demandèrent mon exclusion de l’université, je fus l’objet de menaces de mort à répétition (avec notamment le dépôt de balles de gros calibre dans la boîte aux lettres de mon domicile, accompagnées de photos de moi avec une cible sur le visage), des biens matériels m’appartenant furent dégradées – dont une voiture plusieurs fois vitriolée (en guise d’avertissement avant de passer au visage ?). Je dus m’endetter aussi sur cinq ans pour payer les frais d’avocat.

Tout ceci pouvait paraître assez lourd à porter pour un jeune homme de 20 ans. J’ai toutefois tenu bon et cet épisode de ma vie m’a considérablement endurci.

Musique et politique

En 1996, autre affaire : celle des poursuites engagées par l’Etat contre le groupe de rock dans lequel je jouais à l’époque, Fraction.

Considérant que pour prendre le pouvoir, encore faut-il déjà réussir à conquérir les esprits et donc utiliser tous les outils susceptibles de diffuser notre conception du monde, j’ai toujours été impliqué dans le combat culturel. A l’instar de camarades italiens qui suivaient la même stratégie, j’ai participé au développement d’une scène musicale diffusant un message enraciné. D’où mon rôle dans la création du label Bleu blanc rock puis, plus tard, dans le label Alternative-s.

En 1996, ce fut la fameuse polémique autour du groupe NTM suite à certains propos tenus à l’encontre des forces de l’ordre lors d’un concert à la Seyne-sur-Mer. C’est le moment que choisirent certains journalistes et élus qui, pour mieux défendre les rappeurs, mirent en avant l’existence d’une scène musicale tout aussi radicale mais classée à droite.

C’est alors que le groupe Fraction a été pris comme principale cible. Philippe Douste-Blazy, ministre de la Culture, demanda des sanctions exemplaires. Le débat était lancé et le grand public apprit l’existence de groupes de rock patriotes. En pleine tempête médiatique, LCI envisagea même d’organiser un débat opposant les membres de NTM à ceux de Fraction. Le projet fut abandonné à cause des risques de dérapages sur le plateau et en coulisses entre supporters des deux groupes…

Aujourd’hui, si Fraction se produisait encore, quelques titres ne seraient plus interprétés. En effet, certains textes restent liés à une période de ma vie qui correspond à un contexte bien précis. Mais je ne renie rien de cette aventure politique et musicale.

Dissolution et appel à la révolution culturelle

Le 14 juillet 2002, l’acte d’un certain Maxime Brunerie (qui tire avec une carabine en direction de Jacques Chirac sur les Champs-Elysées) apporte à celui-ci la notoriété qu’il recherchait… et me plonge dans une nouvelle tourmente médiatique. Et quelle tourmente ! Il n’est pas fréquent de gérer une crise relative à une tentative d’assassinat sur un chef d’Etat…

Dès le début, la presse va pointer du doigt Unité radicale dont je suis l’un des porte-parole. Pourtant, Maxime Brunerie – qui était peut-être sympathisant mais pas encarté à UR – était adhérent du Mouvement national républicain (MNR) sous les couleurs duquel il avait été candidat. Il avait même été interrogé par un journaliste du Monde au soir du 21 avril 2002 au siège du MNR et ses propos avaient été rapportés par le quotidien daté du 23 avril 2002.

Face à la pression qui monte, nous allons décider – avec Guillaume Luyt – de faire face aux médias. Nous craignons notamment que l’Etat ne profite de l’événement pour mettre ses fichiers à jour grâce à une vague de perquisitions au niveau national. Nous serons choqués à cette occasion par la lâcheté de certaines personnes qui, ayant côtoyé Maxime Brunerie plus que nous ne l’avions fait, vont l’abandonner une fois la machine judiciaire en route.

Adoptant un discours de rupture, notre ligne sera la suivante : comment s’étonner de voir des militants passer à l’acte irréfléchi lorsque, après avoir participé au combat électoral, ils se rendent compte que le système démocratique est complètement verrouillé ? L’acte de Maxime Brunerie faisait suite, en effet, à la quinzaine de folie collective qui s’était emparée de la France durant l’entre-deux-tours de la présidentielle de 2002. Sous le regard médusé de certains journalistes, nous nous paierons le luxe de réclamer un entretien avec Jacques Chirac – demande restée lettre morte bien entendu… – pour lui expliquer les raisons de la « fracture ethnique », lui qui s’était fait élire en 1995 sur la thématique de la « fracture sociale ».

Enfin, nous mettrons en garde nos militants. Nous leur expliquerons que ce qu’avait fait Maxime Brunerie était à la fois inutile, contre-productif ; qu’il fallait rompre avec le « folklore » ; qu’il fallait engager une véritable « révolution culturelle ».

Les conséquences de l’« affaire Brunerie » : la dissolution (administrative et même pas judiciaire) d’Unité radicale et, pour ce qui me concerne personnellement, un licenciement en bonne et due forme…

Aujourd’hui, certains journalistes se plaisent à citer Maxime Brunerie et Unité radicale pour présenter les Identitaires. Or : - Maxime Brunerie n’a jamais été membre d’Unité radicale ; - La justice a reconnu qu’il n’y avait aucun lien entre l’acte de Maxime Brunerie et son engagement politique ; - Le Bloc identitaire n’est pas la continuation d’Unité radicale ; - Ni François Hollande ni Noël Mamère n’ont été politiquement condamnés, ni leurs partis accusés, quand, le 27 mars 2002, un certain Richard Durn, militant du PS et des Verts (et de la Ligue des droits d’homme), a décimé le conseil municipal de Nanterre.

Continuer à faire un lien entre Unité radicale et le Bloc identitaire relève d’une parfaite malhonnêteté (ou paresse) intellectuelle. Le Bloc identitaire est doté d'un programme original et défend une ligne complètement différente de celle de feu Unité radicale.

La « révolution culturelle » a eu lieu.

Et aujourd’hui ?

Ce parcours militant, je l’assume totalement car, sans celui-ci, je n’aurais sûrement pas cette force qui m’anime pour affronter les combats d’aujourd’hui.

J’ai été condamné pour révisionnisme à 20 ans ? Oui. J'ai été nationaliste pendant de nombreuses années ? Oui. Je l’assume, comme je revendique le droit à évoluer.

En revanche, je dénie à quiconque le droit de remettre en cause mon courage, ma probité et ma constance dans l’engagement. Malgré la répression, je suis toujours debout. La critique est facile surtout de la part de ceux qui, assis au chaud, n’ont jamais risqué une seule fois leur vie pour leurs idées.

Alors, oui, si j’ai bien milité dans certains mouvements radicaux, d’autres l’ont fait avant moi : Lionel Jospin chez les lambertistes (comme Jean-Christophe Cambadélis), ou Claude Goasguen, Patrick Devedjian, Gérard Longuet et tant d’autres à Occident, ou… François Mitterrand aux Volontaires nationaux.

Aujourd’hui, je ne suis plus nationaliste mais identitaire.

Au nationalisme, idéologie de la nation, je préfère le patriotisme, attachement charnel à ma terre. Un patriotisme qui possède une triple dimension : régionale (patrie charnelle), française (patrie historique), européenne (patrie civilisationnelle).

Aujourd'hui, je ne suis plus révisionniste. Et je refuse toute logique complotiste, basée sur une vision paranoïaque de la marche du monde et qui conduit de fait à la renonciation – pourquoi agir si nous considérons d'emblée ne pas tenir notre destin entre nos mains ? Qu'il existe des complots, des conspirations, des manipulations à grande échelle, oui. Mais je ne crois pas que la cause de nos maux se trouve dans des « lobbies qui gouverneraient le monde ». Le problème est d'abord en nous.

Finie également la posture de proscrit. Je revendique aujourd’hui le droit de vivre mon identité de manière totalement décomplexée. Je ne veux pas mourir dans un ghetto coupé du reste du monde. Je veux vivre et travailler normalement, comme n'importe quel autre militant politique, auprès de mon peuple, au milieu des miens.

Avec d’autres, j’ai bâti les fondations d’un nouveau courant politique en France : le courant identitaire. En sept ans, nous avons su innover, surprendre, remporter des victoires quand d'autres se contentent toujours de dénoncer sans rien faire, et affronter les défis d’aujourd’hui avec les armes de notre époque.

Cela n’a pas toujours été simple car, contrairement à certains qui rêvent de faire carrière en politique, j’ai toujours refusé de tirer mes ressources personnelles d’un parti. C’est la raison pour laquelle je mène toujours de front activités politiques et professionnelles. Avec cette chance d’avoir une femme solide, qui m'a donné trois enfants, et qui a accepté ces risques et mes nombreuses absences du fait de mes engagements.

Au fond, en 20 ans de combat, j’ai toujours agi pour la défense de mon identité. Mais d’une approche parfois excessive, fantasmée et romantique, je suis passé à une dimension plus charnelle, plus en phase avec la réalité, tout simplement.

La « révolution culturelle » à laquelle nous avons procédé est une des raisons de l'attrait des Identitaires : nous sommes dans le réel. Et c'est en phase avec celui-ci que nous menons ce combat essentiel, celui qui nous engage entièrement, pour rester nous-mêmes face aux dangers qui menacent notre identité pluri-millénaire.

Ce n'est, somme toute, que le parcours d'un militant politique que je viens d'évoquer comme il y en a tant chez les Identitaires. Par rapport à celui des donneurs de leçons, disons qu'il est juste un peu plus singulier, un peu plus rude, un peu plus… constant.

La vie reste pour moi, un combat permanent. Rebelle j'étais, rebelle je suis resté. Plus souple dans la forme ? A l'évidence. Intransigeant sur le fond ? A l'évidence aussi. Et si j'ai évolué, en m'appuyant sur l'expérience acquise tout au long de ces années qui ont fait de moi ce que je suis devenu, j'ai la prétention de penser que c'est en bien.

Fabrice Robert. Paris, le 6 septembre 2010.