Troisième voie
Troisième Voie était une organisation nationaliste-révolutionnaire, dirigée par Jean-Gilles Malliarakis et Christian Bouchet, active de 1985 à 1992.
En 2010, une organisation du même nom, Troisième voie pour une avant-garde solidariste, mais sans lien avec la précédente, a été créée par Serge Ayoub.
Sommaire
Historique
Origines et fondation
Le mouvement est le fruit d'un travail de rapprochement initié depuis 1984 par Jean-Gilles Malliarakis, dirigeant du Mouvement nationaliste révolutionnaire. Il organise plusieurs réunions avec son mouvement, des militants du Parti des forces nouvelles, qui refusent le « retour au Front national » engagé par la direction de leur parti, le Groupe union défense (GUD) et la Jeune Garde (qui est en fait une organisation de jeunesse du M.N.R.). Le 9 novembre 1985 est annoncé à Lyon la tenue d'un « meeting unitaire ». C'est l'occasion d'annoncer publiquement la naissance du « Mouvement d'initiatives sociales européennes pour la Troisième voie ». Le nouveau mouvement annonce vouloir incarner « la colonne vertébrale idéologique que rechercheront les déçus du lepénisme ».
Le bureau politique initial est constitué à parité par trois militants du PFN et trois militants du MNR : Bertrand Aubier (Montpellier, responsable des relations européennes), Jean-Paul Baron (Nancy, responsable de la formation), Philippe Dupouyet (Orléans, porte-parole national de la Jeune Garde), Bruno Gayot (Valenciennes, responsable Nord-Pas-de-Calais), Didier Roche (Lyon, responsable Rhône-Alpes) et Jean-Gilles Malliarakis. De nombreux petits comités émergent dans différentes villes et s'agrègent au nouveau mouvment. On remarque même un petit Groupe Charlotte Corday, constitué exclusivement de militantes.
Jean-Gilles Malliarakis est désigné comme Délégué général du mouvement.
Ligne politique
Troisième Voie prône une ligne anti-américaine, anticommuniste, anticapitaliste et antisioniste : son slogan est « Ni trusts, ni soviets », le titre d'un livre de Malliarakis. Ce mouvement se montre plutôt hostile au Front national et, comme tous les groupes nationalistes-révolutionnaires, prend ouvertement parti pour les régimes et mouvements arabes opposés aux États-Unis, à Israël et au sionisme. Le choix du nom du nouveau mouvement est à mettre en relation avec les nombreux contacts que Jean-Gilles Malliarakis et le MNR ont développés depuis des années avec les nationaux-révolutionnaires italiens, dont notamment les principaux dirigeants de l'organisation Terza Posizione, comme Roberto Fiore et Gabriele Adinolfi, contraints à l'exil par la répression. Même si la thématique de la « troisième voie », dont l'origine se trouve en fait dans le péronisme argentin, est déjà très présente dans la mouvance nationaliste-révolutionnaire française dans les années 1970, l'influence de ces militants italiens sur Jean-Gilles Malliarakis est déterminante[1].
Organisation
Troisième Voie donne clairement priorité aux jeunes équipes militantes : la moyenne d'âge des cadres n'atteint pas 25 ans. Le mouvement est gouverné par un principe d'autogestion militante. Un système un peu bureaucratique qui commence déjà à peser à certains. Chaque année, les « tercéristes » (militants de Troisième Voie) élisent leurs responsables départementaux, qui siègent dans un Conseil national se réunissant tous les deux ans. Dès janvier 1986, ces bases organisatrices simples font l'objet de statuts précis et détaillés, accompagnant une actualisation des 19 points du MNR, publiés et adoptés en 1979.
Le mouvement choisit comme emblème le trident, hérité du solidarisme. La croix celtique n'est pas abandonnée, mais laissée à l'organisation de jeunesse, la Jeune Garde, qui lui ajoute une mouette.
Presse
La presse du mouvement est représentée par le mensuel Jeune Nation Solidariste, qui devient, après le congrès fondateur, le « mensuel de combat » Révolution européenne (premier numéro en mai 1987). La revue théorique du MNR, Etudes solidaristes, est, elle, remplacée par la revue Troisième Voie, qui publiera des numéros thématiques.
Le 1er mars 1986, TV lance le « bulletin téléphonique quotidien de TV ». Jean-Gilles Malliarakis y commente chaque jour l'actualité, en concluant à chaque fois sur le slogan : « La Troisième Voie est en marche, l'Europe sortira du tombeau! »
Les sections
Les sections locales disposent d'une large autonomie. Elles publient souvent leur propre bulletin, comme Le Petit Rat (section de Nîmes), L'Europe de l'Atlantique à l'Oural (Finistère), Libération nationale et La Lutte des jeunes (Lyon), La Lettre NR 49 (Angers), Cœur de lion (Nord-Pas-de-Calais).
La section de Grenoble, de son côté, publiait un mensuel faisant la place belle à l'humour et à la bande dessinée: Noir et rouge. Sous le crayon du dessinateur Sergueï, il reprend notamment le flambeau du personnage du Rat noir, créé par Jack Marchal vingt ans plus tôt.
La Jeune Garde dans les lycées, le GUD dans les facs, les JNR dans la rue !
Troisième Voie réussit à s'imposer comme la structure fédératrice de la jeunsesse nationaliste française. Le mouvement a déjà pu se rallier la Jeune Garde et le Groupe union défense dès son congrès fondateur. La direction prend contact avec Serge Ayoub, qui a créé en novembre 1987 les Jeunesses nationalistes-révolutionnaires, qui sont en réalité un mouvement skinhead. Troisième Voie estime qu'il est possible d'élargir les JNR, et d'en faire une structure qui pourrait attirer et regrouper les jeunes travailleurs. Ayoub se laisse convaincre et, en janvier 1988, les JNR adhèrent en bloc à Troisième Voie.
Le mouvement peut alors se targuer d'une certaine envergure et lancer : « La Jeune Garde dans les lycées, le GUD dans les facs, les JNR dans la rue ! » L'une des actions mémorables de cette période est la manifestation du 4 mars 1988, organisée à Paris sur le thème : « Nous ne serons pas les Palestiniens de l'Europe. » Près de six cents militants quittent Assas en direction du secrétariat d'État aux Droits de l'Homme pour dénoncer le silence de Claude Malhuret sur la répression israélienne dans les territoires occupés de Palestine. La manifestation prend ouvertement pour cible Israël. C'est une première dans l'histoire des mouvements nationalistes français[2].
Cette alliance s'avère pourtant bien fragile. En effet, le 7 mai 1988, le GUD décide de rompre avec TV. Plusieurs facteurs motivent cette décision. Tout d'abord, de nombreux « gudards » estiment que se livrer à une critique systématique du Front national, comme le fait la presse de Troisième voie, est stérile. D'autre part, beaucoup de gudards souhaitent un retour à l'esprit de dérision et de provocation potache de leur mouvement étudiant, et trouvent la littérature et surtout la rhétorique de Troisième Voie trop doctrinaires. A cela s'ajoutent des litiges tenant à certains comportements de gestion interne de Troisième Voie, qui exclut publiquement ses militants accusés de « contacts avec la réaction » (c'est-à-dire le FN) ou « provocation » (c'est-à-dire tout ce qui est jugé « folklorique » par la direction de TV).
En janvier 1988, c'est au tour des JNR de rompre avec TV.
Le Grand bond en avant de Troisième Voie
Le mouvement veut rebondir. Les 6 et 7 février 1988 se tient le deuxième congrès de TV, dans les locaux de la médiathèque universitaire de Nantes, ce qui fait hurler la gauche étudiante. Le congrès prévoit une nouvelle réactualisation des 19 Points. Il prend clairement position en faveur de résistance palestinienne et annonce prôner l'abstention aux élections présidentielles françaises de 1988, qualifiant Jean-Marie Le Pen de « candidat pro-américain, pro-israélien, favorable aux sectes et admirateur de l'ultra-libéralisme à la Reagan ».
La presse du mouvement réalise un bond spectaculaire en juin 1989. En effet, TV organise le 26 mai 1989 un meeting unitaire pour la liberté d'expression, auquel participent des personnalités plutôt éloignées de la mouvance nationaliste-révolutionnaire, mais qui jouissent d'un certain poids dans la droite nationale, comme Éric Delcroix, Christian de La Mazière ou Serge de Beketch[3]. Suite au meeting est publié un manifeste et une pétition en faveur de l'abrogation des lois liberticides. Cette initiative constitue un élargissement de l'audience de Troisième Voie sur tout le camp national, ouvrant de nouvelles perspectives et de nouvelles collaborations. Révolution européenne, adoptant le sous-titre « Mensuel de Troisième Voie pour la Grande Europe », passe du bulletin militant à un format de qualité, avec nombre d'entretiens et de nouveaux contributeurs.
En automne 1991, plusieurs militants de Troisième Voie s'engagent aux côtés des combattants croates contre les tchétniks serbes.
Les « Tercéristes radicaux » ou le développement de deux lignes concurrentes é l'intérieur du mouvement
En 1989, Christian Bouchet, cadre du mouvement à Nantes, lance les éditions ARS, une Revue d'histoire du nationalisme révolutionnaire, ainsi qu'un bulletin mensuel, Alternative tercériste - Feuille de combat des Tercéristes radicaux. Selon Bouchet, il ne s'agit pas de « faire concurrence à la presse tercériste déjà existante » mais de donner « la parole aux nationalistes révolutionnaires les plus résolus »[4]. Pourtant, l'existence d'une maison d'édition autre que celle des éditions du Trident que dirige à Paris Malliarakis, le lancement de cette revue d'histoire, le bulletin Alternative tercériste et les propos qui y sont tenus démontrent que se développent deux lignes concurrentes à l'intérieur de Troisième Voie. Leurs divergences laissent déjà pressentir la scission de 1991.
En effet, en septembre 1990, Christian Bouchet et André-Yves Beck annoncent la création du regroupement des « Tercéristes radicaux » en une fraction au sein de Troisième Voie. Outre un anticapitalisme et un antiaméricanisme très prononcés, les « tercéristes radicaux » sont particulièrement hostiles à tout rapprochement avec le Front national.
Crise : vers la création de « Nouvelle résistance »
En été 1991, Jean-Gilles Malliarakis se rapproche effectivement du Front national, et finit par y adhérer officiellement. Cette initiative, fruit d'un cheminement personnel que n'ont pas suivi les militants, provoque une crise profonde dans le mouvement. Le 13 juillet 1991, lors d'une réunion interne, les partisans de Malliarakis se retrouvent en minorité et quittent la salle. Le 31 août, le Comité Exécutif Provisoire, dominé par Bouchet, se réunit à Lyon. Toutes les fédérations du mouvement y sont représentées. La majorité des militants soutient les positions représentées par la fraction des « tercéristes radicaux », menée par Christian Bouchet, et décide la dissolution de l'organisation pour constituer un nouveau mouvement, Nouvelle Résistance[5].
La minorité restée fidèle à Jean-Gilles Malliarakis tentera de maintenir en vie Troisième Voie, mais périclite rapidement, avant de s'autodissoudre en 1992.
Ramifications européennes

Déjà en 1986, Troisième Voie tente de créer une sorte de front européen en développant les contacts avec les Parti des forces nouvelles belges, la Terza Posizione italienne, une Troisième Voie suisse, le National Front britannique et les Allemands de Nation Europa.
Troisième Voie - Suisse
Le mouvement a eu une antenne en Suisse romande depuis la seconde moitié des années 1980. Elle a compté une trentaine de membres actifs. Elle était membre de la Coordination nationale, lancée par Gaston-Armand Amaudruz, et possédait une maison de diffusion par correspondance, Arès Diffusion. Suite à la scission du mouvement français en 1991, le groupe adopte le nom de Troisième Voie/Nouvelle Résistance. Plus tard, la plupart de ses membres évolueront en adhérant au Parti communautaire national-européen.
Annexes
Documents
TV: un combat pour la révolution européenne
Le texte qui suit a été publié en septembre 1990 dans le bulletin Alternative tercériste. Il est vraisemblablement de la plume de Christian Bouchet. Il a été massivement diffusé sous forme de tract entre 1990 et 1991. Il représente déjà la ligne qui sera celle de Nouvelle Résistance.
Troisième Voie : un combat pour la révolution européenne
Seul mouvement nationaliste-révolutionnaire en France, Troisième Voie lutte pour :
- l'indépendance et l'unité de l'Europe,
- l'instauration en Europe d'une démocratie organique.
Lutter pour l'unité et l'indépendance de l'Europe
- - c'est éliminer par tous les moyens l'impérialisme yankee sous toutes ses formes (impérialisme culturel, économique, militaire, politique, etc.)
- - c'est s'opposer au métissage généralisé de notre peuple par l'immigration,
- - c'est défendre et promouvoir notre patrimoine culturel européen, et nos cultures nationales et locales.
Lutter pour l'instauration en Europe d'une démocratie organique
- - c'est dans le cadre d'une Europe unitaire revendiquer une très large décentralisation en faveur des collectivités inférieures (communes, régions) et la pratique d'une démocratie directe, ou semi-directe, dans le cadre de celles-ci,
- - c'est exiger la nationalisation des multinationales et des grands trusts, l'abolition des privilèges bourgeois, la répression de l'usure et de la spéculation,
- - c'est combattre pour une organisation communautaire des entreprises et pour la participation.
Seul mouvement nationaliste-révolutionnaire en France, Troisième Voie a comme ennemi prioritaire le Système. L'ennemi de toute renaissance européenne c'est le système, incarné par l'impérialisme américano-sioniste et par le capitalisme multinational.
Tous les partis politiques d'Europe, ou presque, se définissent par rapport à lui et non contre lui (En France, par exemple, l'Oeuvre française et la Ligue communiste révolutionnaire ne représentent rien d'autre que l'extrême-droite et l'extrême-gauche du système). Troisième Voie est en France le seul groupe organisé luttant contre le Système.
Seul mouvement nationaliste-révolutionnaire en France, Troisième Voie travaille à la redécouverte des bases doctrinales de ce courant et à la constitution de nouveaux fronts.
Redécouvrir les bases doctrinales du nationalisme révolutionnaire, c'est rompre une fois pour toute avec le folklore et avec la réaction, et affirmer notre filiation avec les socialistes français tels Louis-Auguste Blanqui et Pierre-Joseph Proudhon, avec Georges Valois, avec les NR allemands tels Ernst Niekisch, Ernst Jünger, Karl Otto Paetel et Werner Lass, avec les Espagnols Manuel Hedilla et Ramiro Ledesma Ramos, avec Juan Perón et Gamal Abd el-Nasser.
Constituer de nouveaux fronts, c'est rompre une fois pour toute avec l'extrême droite du système sous ses formes groupusculaires ou parlementaires, c'est oser envisager de nouvelles alliances (révolutionnaires du tiers-monde, neutralistes, écologistes, etc.) et de nouveaux combats liés au peuple et à son quotidien.
Avec Troisième Voie et ses partis frères dans toute l'Europe, il est temps de construire le parti révolutionnaire de l'Europe unitaire.
Thématiques des numéros de la revue théorique Troisième Voie
- no 1 (novembre-décembre 1987) : L'économie indépendante
---à compléter---
Notes et références
- ↑ Philippe Baillet, L'autre tiers-mondisme : des origines à l'islamisme radical : Fascistes, nationaux-socialistes, nationalistes-révolutionnaires entre « défense de la race » et « solidarité anti-impérialiste », Saint-Genis-Laval, Akribeia, 2016, 476 p., p. 31.
- ↑ Jack Marchal, Frédéric Chatillon et Thomas Lagane, Les Rats maudits. Histoire des étudiants nationalistes 1965-1995, Paris, Les Éditions des Monts d'Arrée, 1995, 147 p., p. 116.
- ↑ Des incidents ont lieu au début du meeting, non pas avec des nervis de gauche, mais avec des militants du GUD. En effet, le syndicat étudiant, qui a rompu avec TV l'année précédente, n'a pas été invité et certains de ses adhérents, menés par William Bonnefoy, ont décidé de s'imposer. Voir : Jack Marchal, Frédéric Chatillon et Thomas Lagane, Op. cit, p. 123.
- ↑ « Déclaration d'intention », Alternative tercériste, no 25, septembre 1990.
- ↑ « Les NR écrivent leur histoire », Alternative Tercériste, no 9 (nouvelle série), septembre 1991.