Ligue anticommuniste mondiale (WACL)

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La Ligue anticommuniste mondiale, World Anti-Communist League (WACL), est une association non-gouvernementale transnationale rassemblant à l'origine plusieurs associations autonomes qui avaient comme dénominateur commun la lutte contre le communisme à l'échelle mondiale.

Elle a été fondée à Taïwan en 1966, en partie à l'instigation de Tchang Kaï-chek. En 1990, elle prend le nom de Ligue mondiale pour la liberté et la démocratie.

Histoire

Son noyau fondateur est asiatique et conçoit la WACL comme une extension de l’Asian People’s Anticommunist League (APACL) ou Ligue anticommuniste des peuples d’Asie, alliance régionale formée en 1954, par Tchang KaïChek, Park Chung-hee, futur président de la Corée du Sud, Ryiochi Sasakowa, milliardaire japonais emprisonné comme criminel de guerre après la Seconde Guerre mondiale qui se vante d’être « le fasciste le plus riche du monde », Osami Kuboki, représentant japonais de la secte Moon. Ils sont rejoints, à la faveur des conflits indochinois, par les présidents pro-américains du Vietnam du Sud et du Cambodge, Nguyen Van Thieu et Lon Nol.

De Tchang KaïChek à la secte Moon

Dès 1958, Yaroslav Stetsko participe aux conférences annuelles de l’APACL. Dirigeant de l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), le banderiste Stetsko a proclamé l’indépendance de l’Ukraine en juin 1941 et en est devenu l’éphémère Premier ministre. Il préside depuis 1946 l’Anti-Bolshevik Bloc of Nations (ABN) ou Bloc antibolchevique des nations, « centre de coordination des mouvements de libération des nations opprimées par l’impérialisme russe et le communisme ». Constitué de délégations nationales, d’associations d’émigrés et d’adhérents individuels, l’ABN regroupe Arméniens, Baltes, Bulgares, Biélorusses, Cosaques, Croates, Géorgiens, Slovaques, Ukrainiens, etc… La WACL résulte de la fusion de l’APACL et de l’ABN.

La Ière conférence annuelle a lieu à Taipei, le 25 septembre 1967, en présence de Tchang Kaï-Chek, avec la participation de 230 délégués de 64 pays et 12 organisations anticommunistes internationales. La Ligue connaît un premier essor lorsque Nixon et Kissinger siègent à la Maison Blanche. Soutenue financièrement par les gouvernements de Taïwan et de Corée du Sud, elle reçoit aussi des fonds privés d’Arabie saoudite. Des sections nationales, appelées chapitres, sont ouvertes au Japon, en Europe, en Australie, en Amérique.

Le chapitre japonais est entièrement mooniste. La française Suzanne Labin garde un souvenir ému de la IVe conférence de la WACL, organisée à Tokyo en 1970 par Osami Kuboki : « 30 000 personnes aux cérémonies officielles, des banderoles et des affiches partout dans la ville, dénonçant la Chine et l’Union soviétique, des centaines de jeunes distribuant des tracts. La plus imposante manifestation tenue dans un pays ne se disant pas officiellement anticommuniste. » Moon avouera que la conférence lui a coûté un million de dollars. En mai 1974, Asian Outlook, revue de l’APACL, prête à l’organisation japonaise 200 000 membres, 90 000 cellules et une presse périodique diffusant 19 millions d’exemplaires.

Le chapitre américain, l’American Council for World Freedom, est formé en 1970. On y trouve Neil Salonen, président de la secte Moon aux USA. En 1972, une Confederacion Anti-Communista Latinoamericana (CAL) est fondée par Raimundo Guerrero, chef des Tecos – ou Légion du Christ-Roi – et président du puissant chapitre mexicain de la WACL, la FEMACO (Federacion mexicana anticomunista), qui édite la luxueuse revue à grand tirage Replica.

Un aéropage très diversifié

Lors des conférences annuelles se croisent, sous l’œil des Asiatiques et Américains qui restent les véritables maîtres de l’appareil, des chefs d’État sud-américains comme Somoza, l’amiral Massera, le général Banzer, le général Stroessner, mais aussi le président des Philippines Marcos, les anticastristes d’Alpha 66, les néo-fascistes italiens Giorgio Almirante et Stefano Delle Chiaie, le fondateur du CEDADE Jesus Palacio, et même Wilhelm Landig. Parmi les participants français : le général Vanuxem, Georges Albertini, François Duprat, qui y représente la Ligue canadienne pour la libération de l’Ukraine, ou encore Marie-France Garaud qui prend la parole à la XVIe conférence de Luxembourg en 1983.

Extrémistes mexicains et européens tentent d’en prendre la direction. Un Mexicain résumera ainsi le conflit interne : « La direction de l’American Council for World Freedom agit pour le compte du complot sioniste et sert d’agent à l’impérialisme israélien. La direction juive de l’ACWF est appuyée par le FLF et son patron juif Neil Salonen ». En 1975, l’anthropologue d’origine britannique Roger Pearson, fondateur de la Northern league, membre de la rédaction du Mankind Quartely et du Journal of Indo-European Studies, devient le président du nouveau chapitre américain de la WACL, le Council on American Affairs. Pearson est membre du comité de patronage de Nouvelle École, et la revue Éléments rend compte de la IXe conférence, qui se déroule en 1976 à Séoul, en précisant que « la France était notamment représentée à Séoul par l’Association française pour la défense de la culture (AFDC) », dont le secrétaire, Claude Chollet, est un cadre du GRECE[1]. Élu président de la WACL en 1978, Pearson concentre ses efforts sur l’Europe et attire de nombreux éléments radicaux, au point qu’un conservateur britannique décrit l’organisation comme « en grande partie une collection de nazis, de fascistes, d’antisémites ». Il préside la XIe conférence à Washington, dénoncée par la Pravda, mais aussi par le Washington Post qui lui consacre un article virulent intitulé « The Fascist specter behind the World Anti-Red League ».

L'âge d'or des années Reagan

Au début des années 80, la WACL est une grosse machine avec 90 sections nationales, regroupées en cinq ensembles régionaux (Asie-Pacifique, Moyen-Orient, Europe, Amérique latine, Amérique du Nord). Après le départ de Pearson en 1980, le nouveau chapitre américain, l’US Council for World Freedom (USCWF), fondé en 1981 par le général John Singlaub, ancien patron des forces spéciales au Vietnam, devient la branche la plus active. Son arrivée accélère la purge des éléments extrémistes. Pour les anticommunistes américains et les moonistes, la Ligue doit soutenir les guérillas anticommunistes du Tiers monde. Le tournant est pris en 1982, lors de la XVe conférence à Tokyo, dont l’organisateur Osami Koboki, président de la WACL cette année-là, fait adopter une résolution finale enjoignant de se mobiliser derrière les « combattants de la liberté ».

Profitant de ce que la présidence lui échoit deux années consécutives car les USA accueillent en 1984 et 1985 la conférence, Singlaub assigne comme priorité à la Ligue de soutenir les mouvements de résistance armée anticommunistes. À commencer par la Contra nicaraguayenne, dont le chef, Adolfo Calero, est reçu lors de la XVIIe conférence de San Diego, en août 1984 – conférence à laquelle le président américain Reagan adresse un message d’encouragement. Entre 1984 et 1986, la WACL est la principale source de financement des Contras, Taïwanais et Coréens du Sud envoyant, chacun, 50 000 dollars par mois aux rebelles. Elle est aussi active dans le Comité pour un Afghanistan libre (Committee for a Free Afghanistan), qui fournit aux moudjahidines l’aide logistique décidée par le directeur de la CIA William Casey et gérée par un certain Ben Laden.

Éclaboussée par le scandale de l’Irangate – la vente d’armes à l’Iran servant au financement des Contras – la WACL est rebaptisée World League for freedom and Democracy (WLFD) en 1990 lors de sa XXIIe conférence de Bruxelles[2].

Notes et références

  1. Claude Chollet fut l’un des responsables du Cercle Vilfredo Pareto à Sciences-Po Paris.
  2. Edouard Rix, « La WACL, L'internationale de la résistance », Réfléchir & Agir, no 59, été 2018, pp. 44-46.