Guido De Giorgio

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Guido Lupo Maria De Giorgio, dit Guido De Giorgio, connu parfois sous le pseudonyme de Havismat, né à San Lupo le 3 octobre 1890 et décédé le 27 décembre 1957, est un auteur, un philosophe et un ésotériste italien.

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Il a notamment été un spécialiste de la Tradition romaine.

Biographie

Né à San Lupo (province de Bénévent) en 1890, Guido de Giorgio fait des études de philosophie et présente un mémoire d’inspiration “orientaliste” à l’université de Naples. Très jeune encore, il part enseigner l’italien en Tunisie juste avant la Première Guerre mondiale. Sa rencontre avec des représentants de l’ésotérisme islamique, et notamment avec le soufi Kheireddine, sera décisive pour la suite de son itinéraire intellectuel et spirituel. Quelques années après la fin de la Grande Guerre, De Giorgio fait la connaissance de René Guénon à Paris, et plus précisément au Musée Guimet. Des liens d’amitié profonds et durables vont dès lors unir les deux hommes (De Giorgio sera reçu à Blois chez Guénon et celui-ci, dans leur correspondance qui se poursuivra jusqu’à la mort de Guénon, l’appelle « Cher monsieur et ami »[1].

Vers la fin des années 20, De Giorgio collabore très occasionnellement aux revues Ur et Krur, dirigées par Julius Evola, sans pour autant appartenir au Groupe d'Ur. Selon le témoignage d’Evola lui-même, il sera « l’animateur invisible » de la revue La Torre (10 numéros parus de janvier à juin 1930). Plus tard, De Giorgio donnera des articles au Diorama filosofico, feuille spéciale, dirigée par Evola, du quotidien Il Regime Fascista. Rebelle à la vie citadine et désireux de mener une existence ascétique et relativement solitaire, De Giorgio se retire vers le milieu des années 30 dans un presbytère abandonné des Alpes piémontaises, qu’il transforme en une espèce d'ermitage.

C’est, semble-t-il, durant la Deuxième Guerre mondiale qu'il écrit son principal ouvrage, La Tradizione romana, parcouru d'un souffle peu commun et en qui certains ont vu un « extraordinaire essai d’apologétique contemporaine » (ce manuscrit, comme les autres manuscrits de De Giorgio — à l'exception de ceux restés totalement inédits ou perdus —, sera publié à titre posthume)[2].

En 1946, au lendemain de la défaite du fascisme, il compose un pamphlet contre le nouveau régime, La repubblica dei cialtroni (La république des goujats), qui ne trouvera pas d'éditeur. Enfin, en 1955, mettant à profit son expérience d’enseignant (De Giorgio avait été professeur de lettres), il publie une étude sur La Fonction de l’école dans une perspective traditionnelle[3]. Guido de Giorgio meurt en 1957 près de Mondovi, dans le Piémont.

Catholique assez singulier, qualifié par Piero Di Vona de « meilleur disciple italien de René Guénon », De Giorgio recourt souvent à une formulation typiquement soufie pour exprimer des vérités très chrétiennes. Il n’est sans doute pas exagéré de dire que c’est avec lui « que, par l’intermédiaire de Guénon (…) la vision islamique de l'absolu a fait sa première apparition en Italie » (Di Vona).

Son « fascisme sacré » largement utopique, appuyé sur une étude approfondie du symbolisme du faisceau et de la hache bipenne, doit mener au rétablissement de la Norme traditionnelle, « de l’équilibre hiérarchique entre la contemplation et l’action, l’intellect et la raison, l’esprit et le sentiment » (Di Vona)[4], sur la base de la primauté absolue de la contemplation et de la connaissance (De Giorgio étant, sur ce point précis, comme sur presque tous les autres, beaucoup plus proche de Guénon que d’Evola). Pour lui, les deux grandes déviations politiques sont le despotisme et le démocratisme, et il est évident que la simple comparaison de son « fascisme sacré » avec le fascisme mussolinien dévoile, par contraste, le caractère parodique de ce dernier. Selon De Giorgio, la seule chance de salut qui s’offre encore à l’Europe, c’est le retour conscient à l’universalité romaine, synthèse vivante de la tradition païenne et de la tradition chrétienne dont Dante a exprimé et transmis dans le poème sacré les valeurs et les significations initiatiques[5].

Publications

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  • La Tradizione romana, éd. par Franco Pintore, 1973; rééd. avec préf. Gianfranco De Turris, Edizioni Mediterranee, Rome, 1989, 328 p.
  • Dio e il Poeta, Archè, Milan, 1985, 176 p.
  • Ciò che mormora il vento del Gargano, Archè, Milan, 1999, 40 p.
  • Aforismi e poesie, Archè, Milan, 1999, 112 p.
  • Prospettive della Tradizione, Rome, Cinabro Edizioni, 2019, 170 p.
  • Studi su Dante - scritti inediti sulla Divina Commedia, Rome, Cinabro Edizioni, 2017, 240 p.
  • Tradizione e realizzazione spirituale - Raccolta di scritti con inediti, Rome, Cinabro Edizioni, 2018, 136 p.
  • Il problema della scuola, Cinabro Edizioni, Rome, 2019, 108 p.

Traductions françaises

  • L'instant et l'éternité, et autres textes sur la Tradition, trad. et préf. Philippe Baillet, Archè, Milan, 1987, 316 p.

Notes et références

  1. cf. à ce sujet les 23 lettres de Guénon adressées à De Giorgio entre 1925 et 1930, lettres publiées dans le recueil L’Instant et l’éternité.
  2. La composante romaine de l'âme européenne ne peut nous faire négliger les débats italiens dans lesquels s'inscrit cette œuvre. Contextualisons rapidement ceux-ci. L'intérêt pour la spiritualité des anciens a connu un regain avec le Risorgimento pour lequel l'idée d'Italie, réapparue avec Dante et Machiavel, doit s'incarner à nouveau dans une réalité politique. Le républicanisme italique s'articule sur deux plans, politique (nation italienne) et spirituel (religion des anciens), ce qui le distingue du républicanisme révolutionnaire français : la référence à la République romaine transcende la nature du régime et illustre l'idée d'Italie comme unité territoriale et sacrale. Remettre le pays sur une Voie romaine, c'est assurer la continuité de la Rome ancienne, en passant par la Renaissance et l'humanisme, jusqu'à l'époque présente. La distance critique observée avec l'Église romaine ne tient pas qu'au seul positivisme mais aussi à une méfiance envers elle en tant que puissance temporelle et frein à l'unité culturelle, territoriale et politique du pays. Cette disposition perdurera dans la maçonnerie italienne après l'unification italienne s'achevant en 1870, que ce soit dans sa variante athée ou dans celle spiritualiste, toutes deux clairement démarquées l'une de l'autre lors de la scission du Grand Orient d'Italie en 1908. C'est ce qui explique que l’œuvre de De Giorgio soit demeurée marginale en ces milieux, à l'instar de celle de Guénon resté incompris sur l'ésotérisme chrétien, amenant peu à peu ce quêteur d'absolu à devenir un “émigré de l'intérieur” perdu en ses montagnes. En effet, dans ses études rédigées dès le milieu des années 20, reprises et augmentées ultérieurement dans La Tradition romaine, clef de voûte de sa pensée spirituelle et métapolitique, il expose la thèse de la continuité entre tradition romaine et catholicisme, à travers la médiation de la fonction sacrée de Rome (le catholicisme perpétue Rome, via la notion “métaphysique” de la Ville). Ce n'est pas la matière qui prime mais la forme de culture, non son contenu mais sa transmission. De Giorgio reste particulier par cette difficile synthèse entre romanité et christianisme, jugés irréductibles l'un à l'autre par certains éléments radicaux du mouvement traditionaliste romain (par ex. le maçon mazziniste Arturo Reghini) espérant alors infléchir la ligne officielle imposée par Mussolini qui aboutit au compromis passé avec l’Église et sanctionné par les accords de Latran en 1929. Voir R. Del Ponte, Il movimento tradizionalista romano nel Novecento : Studio storico preliminare, Sear, Reggio Emilia, 1987, et P. Di Vona, Evola, Guénon, De Giorgio, Sear, Reggio Emilia, 1993, p. 219-272, qui donnent une première esquisse de l’histoire du mouvement traditionaliste romain.
  3. cf. le recueil L’Instant et l’éternité.
  4. Selon l’universitaire italien Piero Di Vona, Guido de Giorgio défendit une forme de « fascisme sacré », différente du fascisme politique profane, structurée sur le refus de la modernité : « La “fascification” du monde est conçue par De Giorgio comme le retour à l’esprit et à la norme traditionnels. C’est l’abolition de la séparation, et le rétablissement de l’équilibre hiérarchique, entre la contemplation et l’action, l’intellect et la raison, l’esprit et le sentiment, la prééminence absolue de la contemplation et de la connaissance étant sous-entendue […] Il faut se rappeler que sur le plan politique, les deux déviations fondamentales sont, pour lui, le despotisme et le démocratisme, tous deux contre-nature et aveugles, et qu’il voit dans le despotisme l’arbitraire d’un seul. Il faudra aussi réfléchir sur tout cela avant de prononcer des jugements injustes et avant de tirer des conclusions hâtives. En réalité, les propensions et les faiblesses personnelles comptent peu et ne signifient pas grand-chose ici. Une sérieuse analyse comparée des idées ne différencie pas seulement en profondeur le fascisme sacré de De Giorgio du fascisme profane du régime fasciste, mais, en raison d’un contraste trop évident, elle dévoile la nature parodique et impure de ce dernier » (Evola e Guénon - Tradizione e Civiltà, Naples, Società editrice Napolitana, 1985, p. 193, cité dans la note liminaire de l'éditeur, in : L’instant et l’éternité, p. 17). Cf. (en castillan) Aproximación al Fascismo Sacro en Guido de Giorgio et Les courants de la Tradition païenne romaine en Italie (R. Del Ponte, 1996)
  5. Philippe Baillet, «  Guido De Giorgio », Politica Hermetica, n°1, 1987.