Cellules communistes combattantes

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Les Cellules communistes combattantes (CCC) étaient une organisation terroriste d'extrême-gauche belge, active dans la première moitié des années 1980.

Elle se revendiquait du marxisme-léninisme, du maoïsme et de la « voie de la guérilla urbaine ».

Historique

Origines

En juin 1976, Pierre Carette fonde à Bruxelles un « Comité international pour la défense des droits des prisonniers politiques en Europe occidentale », qui est essentiellement un comité de soutien aux prisonniers de la Fraction armée rouge (RAF) allemande. Il rend plusieurs fois visite à certains des détenus de l'organisation allemande. Le comité publie une feuille d'information, ainsi que les communiqués et les textes de la RAF. Fin 1976, un ami de Carette, Marc de Laever, qui avait créé un autre comité de soutien à la RAF à Liège, rejoint le comité de Bruxelles. Le 9 décembre 1977, le comité dirigé par Carette annonce une manifestation de solidarité avec la RAF, qui est annulée au dernier moment. Le 16 mars 1978, sept membres du comité occupent l'ambassade des Pays Bas pour exprimer leur solidarité avec les détenus de la RAF. Le lendemain, la police lance une opération de grande envergure sur Carette et ses amis.

Le 25 juin 1979, une bombe explose au passage de la voiture du général américain Haig qui se rend à son bureau du SHAPE à Casteau. Le général est indemne mais l'engin fait deux blessés légers. L'attentat est revendiqué par un groupe inconnu, la « Brigade Julien Lahaut ». Marc de Laever disparaît. Carette, qui a pourtant été fiché, n'est ni inculpé ni même interrogé. Le 5 juillet, le même attentat est à nouveau revendiqué, cette fois par un « commando Andreas Baader ». Carette commence à correspondre et à rendre visite régulièrement à Frédéric Oriach (ancien maoïste, ancien des Noyaux armés pour l'autonomie populaire (NAPAP) et leader de la tendance radicale d’Action directe), alors détenu à la prison d'Évreux, puis à celle de La Santé.

La revue Subversion

Le 10 février 1982, la revue Subversion est fondée par Pierre Carette, Frédéric Oriach, ancien des NAPAP alors en prison, Bertrand Sassoye et d'autres militants belges, suisses et français. La revue ne publiera que deux numéros et début 1983 collectif disparaît.

Ligne Rouge

Frédéric Oriach propose à Carette de créer une structure de surface, afin de pouvoir diffuser au grand jour la théorie de la « guérilla urbaine » et de préparer le terrain de la « lutte armée ». Au mois de septembre 1983 Pierre Carette fonde à Bruxelles, dans cette idée, le collectif Ligne Rouge. Les membres du futur noyau des CCC en sont tous issus : outre Carette, on y trouve Didier Chevolet, Bertrand Sassoye, Pascale Vandegeerde et Christopher V.. Un an plus tard, ce collectif deviendra la couverture légale des Cellules communistes combattantes. Il publiera ponctuellement un organe d’information du même nom, de 1983 à 1985, qui prend la succession de Subversion. La nouvelle revue diffusera les textes des CCC et les communiqués revendiquant les attentats. Après les arrestations de décembre 1985, Ligne rouge disparaît.

Les CCC

Les CCC sont mises en place dans la clandestinité en juin 1983. Du 3 octobre 1984 au 16 décembre 1985, les CCC revendiquent vingt et un attentats à l'explosif ; ceux-ci se sont inscrits dans le cadre de trois « campagnes » politico-militaires, dites de « propagande armée », entrecoupées de périodes d'inactivité : « Campagne anti-impérialiste d'octobre », « Campagne Karl Marx », « Campagne  Pierre Akkerman ».

Elles ciblent ce qu'elles considèrent comme des symboles du « système capitaliste », de l'« impérialisme américain » et de l'État belge : des entreprises impliquées dans la production de matériel militaire, des sièges ou locaux de partis politiques gouvernementaux, des infrastructures de l'armée et de la gendarmerie belges, des locaux de l'OTAN, des sièges du patronat belge et des banques, des « ennemis politiques », dont notamment des pacifistes comme Pierre Galand. Le 11 décembre 1984, elles organisent une série d'attentats contre le secteur wallon du réseau d'oléoducs en Centre-Europe de l'OTAN.

Les attentats des CCC feront essentiellement des dégâts matériels. Mais ils entraînent aussi un blessé grave lors de l'attaque d'une caserne à Vielsalm (12 mai 1984) et la mort de deux pompiers lors de l'attentat à la voiture piégée contre le siège de la Fédération des entreprises de Belgique à Bruxelles (1er mai 1985).

Membres connus

Pierre Carette, Marc de Laever, Didier Chevolet, Bertrand Sassoye, Didier Sampieri, Pascale Vandergeerde. L'avocat Michel Graindorge, qui a été membre du comité fondé par Carette, a également été soupçonné d'appartenir à l'organisation.

Liens avec Action directe et la Fraction Armée rouge

Les CCC avaient des liens avec des membres de la Fraction armée rouge (RAF) allemande et le groupe français Action directe (AD). Des opérations communes ont été organisées, sur le territoire belge, par AD et les CCC : vol d'armes dans une caserne de l'armée belge (12 mai 1984), saisie d'un stock de 800 kg d'explosifs dans une carrière le mois suivant (juin 1984). Ces explosifs seront utilisés par les CCC en Belgique, AD en France et la RAF en Allemagne.

En janvier 1985, les CCC rompent avec AD et la RAF, sur la question de la stratégie révolutionnaire. Action directe apporte alors son soutien à la création en Belgique d'une nouvelle organisation clandestine de propagande armée, non pas marxiste-léniniste comme les CCC, mais d'essence libertaire : le Front révolutionnaire d'action prolétarienne (FRAP). Les 20 et 21 avril 1985, des attentats commis à Bruxelles sont revendiqués par le Front révolutionnaire d'action prolétarienne, proche d'Action directe. Les CCC annoncent rompre définitivement avec Action directe et la Fraction armée rouge.

Arrestations et condamnations

Le 19 octobre 1984, les services de police déclenchent une «opération mammouth», une série de 92 perquisitions dans les milieux d'extrême-gauche belges, avec pour but de rechercher des armes, des munitions, du matériel de reproduction, des documents «utiles à l'enquête». Mais elle ne permet pas d'apporter des éléments de preuves pouvant inculper des membres ou des sympathisants des CCC. Pourtant, au cours des 92 perquisitions, les enquêteurs rendent visite à Didier Chevolet et Pascale Vandegeerde, de même qu' à huit autres personnes qui seront inculpées en 1988 pour avoir apporté un soutien actif aux C.C.C.

Le 16 décembre 1985, Pierre Carette, Didier Chevolet, Bertrand Sassoye et Pascale Vandergeerde sont arrêtés dans l'après-midi à Namur. Marc de Laever, lui, parvient à disparaître.

Le 19 décembre, la police découvre à Charleroi un stock d'armes dans un appartement occupé par deux des membres des CCC arrêtés à Namur. En janvier et février 1986, la police découvrira encore trois «planques » des CCC à Bruxelles, Liège et Charleroi, contenant un important matériel militaire et des archives.

Le 22 janvier 1986, les quatre détenus déclarent, dans une lettre publiée par la presse, appartenir aux CCC et appellent à la «poursuite du combat », «une brèche s'étant ouverte dans l'impasse du désespoir et de l'impuissance ».

Le 9 mai 1986, les détenus des CCC entament une grève de la faim qui dure 43 jours.

Le 21 octobre 1988, la Cour d'assises du Brabant condamne aux travaux forcés à perpétuité les quatre membres des Cellules communistes combattantes détenus. Ils ont été reconnus coupables de 21 attentats commis sur le territoire belge, ayant fait deux morts et un blessé. Dès les débuts du procès, les accusés avaient entamé une grève de la faim pour obtenir une amélioration de leurs conditions de détention, si bien que, très affaiblis, trois d'entre eux seulement sont présents le jour du verdict au palais de justice de Bruxelles, transformé en camp retranché.

Pour soutenir les CCC et pour continuer à propager leurs thèses politiques, l’Association des parents et amis des prisonniers communistes (APAPC) est mise en place  quelques jours après leur arrestation[réf. nécessaire]. L'association organise plusieurs campagnes réclamant la libération des CCC. Ces actions prendront une  plus grande envergure[réf. nécessaire] après que les délais légaux d'emprisonnement eurent été dépassés.

Libération des condamnés et postérité

Pascale Vandegeerde sort la première de prison, le 4 février 2000, suivie le 9 février par Didier Chevolet, qui s'est dissocié du mouvement depuis 1995, par Bertrand Sassoye le 10 juillet de la même année, et enfin par Pierre Carette, le 25 février 2003. Ces deux derniers poursuivent depuis leur libération leur militantisme dans un cadre légal.

Le 5 juin 2008, aux côtés d'autres militants ou proches de l'association Secours rouge, Pierre Carette et Bertrand Sassoye sont à nouveau arrêtés, le premier pour non-respect des conditions de libération conditionnelle, le second pour « appartenance à une organisation terroriste » en raison de ses liens avec le Parti communiste politico-militaire, groupe italien issu des Brigades rouges.

Le 14 décembre 2017, Bertrand Sassoye donne, à l'Université de Genève, une conférence sur la création et l’histoire des CCC, à l'invitation du Secours Rouge Genève.

Idéologie des CCC

Les CCC se revendiquent comme étant une « organisation communiste combattante ». Elles se revendiquent du marxisme, du léninisme et du maoïsme.

Elles défendent la « ligne de la guérilla urbaine ». En 1991-1992, les prisonniers des CCC débattent par documents interposés avec les maoïstes français de l'Organisation communiste marxiste-léniniste – Voie prolétarienne (OCML-VP). La revue Partisan, organe de l'OCML-VP publie en mai 1991 une brochure intitulée « Situation en Europe et Lutte armée (Débat avec un lecteur) », qui prône un « maoïsme légal » en Europe et le refus de la « lutte armée ». Les CCC répondent en publiant en décembre 1992 le document Lutte armée et politique révolutionnaire.

À la fin de l'hiver 1993-1994, les prisonniers des CCC publient un long document, La Flèche et la Cible, qui expose les idées, l'histoire, les projets et les perspectives politiques du groupe. La Flèche et la Cible est présenté comme le premier volume d'une série Matériaux pour la Révolution. Il sera imprimé et diffusé par la revue Correspondances Révolutionnaires[1].

Controverses

Les CCC, au service de la République démocratique allemande?

La série d'actions de décembre 1985, c'est-à-dire l'attaque simultanée de cinq installations du Central Europe Pipeline System, attire l'attention des enquêteurs du contre-espionnage belge. La performance organisationnelle et la précision des attaques contre des emplacements classifiés leur suggèrent rapidement des contacts avec les services de renseignements de la République démocratique allemande. En effet, une enquête a établi que le plan du CEPS avait été copié par un collaborateur du ministère de la Défense ouest-allemand, un certain Lothar Lutze, puis transmis aux services est-allemands. Lutze a été condamné en 1979 pour espionnage[2].

Les CCC, un « Stay Behind » de l'OTAN ?

À la suite des actions de novembre et de décembre 1985, de nombreux journalistes, mais aussi des militaires, expriment leur inquiétude devant le caractère planifié et professionnel des attentats. L'éditorialiste du quotidien De Standaard, Manu Ruys, écrit que les actions des CCC ont lieu à une période où la Belgique se comporte comme un membre peu « docile » de l'OTAN. Pour Ruys, les CCC affaiblissent les mouvements pacifistes et servent objectivement « l'aile droite pro-atlantiste »[3].

On peut aussi relever que les CCC ne se contentent pas de critiquer verbalement ce qu'elles appellent le « pacifisme petit-bourgeois », mais qu'elles agressent concrètement les représentants politiques des mouvements pacifistes. Ainsi, en octobre 1985, au cours de la « Campagne Pierre Akkerman », la voiture de Pierre Galand, chef du Comité national d'action pour la paix et le développement est bombardée de cocktails Molotov[4].

Enfin, l'historien suisse Daniele Ganser affirme que les CCC n'auraient jamais été un groupe communiste, mais une « création de l'extrême-droite » et de l'OTAN, instrumentalisée dans le but de commettre des attentats sous fausse bannière. Ses membres auraient été des agents d'une structure de type Gladio. Ganser écrit encore que le « bras droit » de Pierre Carette, Marc de Laever, aurait par la suite rejoint un « mouvement d'extrême droite allemand », sans toutefois préciser de quelle organisation il se serait agi. Ganser appuie ses affirmations sur les travaux du journaliste d'extrême gauche belge Manuel Abramowicz et de l'avocat proche du Parti du Travail de Belgique Jos Vander Velpen[5].

Les CCC et le révisionnisme historique

Les CCC ont été accusées « révisionnisme historique » à plusieurs reprises. Ces accusations se basent principalement sur un texte anonyme, publié à l'origine dans la revue de tendance « bordiguiste » Programme communiste en 1960, « Auschwitz ou le grand alibi », et que Pierre Carette a choisi de republier dans le premier numéro de Ligne rouge.

Ce texte n'est évidemment pas un plaidoyer en faveur du national-socialisme, mais il accuse l'antifascisme de fournir des alibis au capitalisme. Ainsi, suivant les « bordiguistes », « les hor­reurs de la mort capitaliste doivent faire oublier au proléta­riat les horreurs de la vie capitaliste et le fait que les deux sont indissolublement liées ! Les expériences des médecins S.S. doivent faire oublier que le capitalisme expérimente en grand les produits cancérigènes, les effets de l'alcoolisme sur l'hérédité, la radio-activité des bombes « démocratiques ». Si on montre les abat-jour en peau d'homme, c'est pour faire oublier que le capitalisme a transformé l'homme vivant en abat-jour. Les montagnes de cheveux, les dents en or, le corps de l'homme mort devenu marchandise doivent faire oublier que le capitalisme a fait de l'homme vivant une mar­chandise. C'est le travail, la vie même de l'homme, que le capitalisme a transformé en marchandise. C'est cela la source de tous les maux. Utiliser les cadavres des victimes du capital pour essayer de cacher la vérité, faire servir ces cadavres à la protection du capital c'est bien la plus infâme façon de les exploiter jusqu'au bout »[6].

Liens avec le PCN

Au cours des années 1980, les CCC et le Parti communautaire national-européen de Luc Michel ont été soupçonnés d'entretenir des liens, dans l'idée d'une stratégie commune contre l'« impérialisme américain ».

Selon Manuel Abramowicz, le Parti communautaire national-européen aurait proposé une aide financière à Pierre Carette, qui l'aurait refusée[7].

Notes et références

  1. Correspondances Révolutionnaires est un bulletin publié par le « collectif de soutien aux prisonniers des CCC », l'APAPC (Association des parents et amis des prisonniers communistes). Il publie 14 numéros entre janvier 1989 et octobre 1996.
  2. Jacques Baud, Encyclopédie des terrorismes et violences politiques, Lavauzelle, Panazol, 2003, 752 p., p. 181-182.
  3. René Haquin et Pierre Stéphany, Les Grands Dossiers Criminels en Belgique, vol. 1, Éditions Racine, Bruxelles, 2005, 344 p., p. 264-275.
  4. Alain Bauer et François-Bernard Huygue, Les terroristes disent toujours ce qu'ils vont faire - terrorisme et révolution par les textes, PUF, Paris, 2010, 355 p., p. 183-187.
  5. Daniele Ganser, Les armées secrètes de l'OTAN - réseaux Stay Behind, opération Gladio et terrorisme en Europe de l'Ouest, Éditions Demi-lune, Paris, 2007, 400 p., p. 195.
  6. Ce texte, paru de son vivant dans un organe de son parti, et n'ayant jamais été critiqué par lui, a souvent été attribué au communiste dissident Amedeo Bordiga. Il est dû en réalité à Martin Axelrad (1926-2010). Il a été publié en français dans le n°11 de la revue Programme Communiste, puis réédité sous forme de brochure supplément au journal Le Prolétaire – parti communiste international (programme communiste) –, en novembre 1978, et enfin dans le premier numéro de Ligne rouge en 1983 : [1]
  7. Jean-Pierre Stroobants, « Manuel Abramowicz : sur l'extrême droite et ses rivalités internes », in : Le Soir, 19.5.1995..