Bad Reichenhall

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Plaques commémoratives près de la tombe commune. Les douze impacts représentés sur la plaque ne le sont pas qu'à titre décoratif.
Gerbes déposées par d'anciens combattants.
Bad Reichenhall est une petite ville de Haute-Bavière où le général Leclerc fait sommairement exécuter, le 8 mai 1945, douze prisonniers français livrés la veille par les Américains à un détachement de la 2ème Division blindée. Ils faisaient partie de la 33ème Waffen-Grenadier-Division-SS Charlemagne, combattant au sein de la Wehrmacht (armée régulière allemande) sous l'uniforme allemand.

Déroulement des faits

Le 29 avril 1945, après que les survivants de la 38ème SS Panzergrenadierdivision Nibelungen eurent tenté de bloquer le passage des ponts sur l'Amper et Isar aux forces armées américaines, près de Moosburg, une partie du bataillon de la division Charlemagne affecté à cette division fut dispersée et beaucoup se rendirent aux troupes américaines. Avec d'autres prisonniers allemands, 12 Français sont prisonniers dans une caserne de Bad Reichenhall. Le 6 mai 1945, la 2e Division blindée de Leclerc occupe la ville. Les W-SS français essayèrent alors de s’échapper par crainte de représailles, sachant parfaitement que leurs compatriotes allaient les considérer comme des traîtres. Ils sont finalement capturés dans une forêt voisine, encerclés par deux compagnies françaises, et seront fusillés. L'exécution eut lieu le 8 mai 1945 vers 17 heures, donc quelques heures avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu général, dans une petite clairière jouxtant le chemin de Kugelbach, sur le territoire de la commune de Karlstein, limitrophe de la petite ville de Bad Reichenhall, en Haute Bavière, non loin de l’Obersalzberg. Les polémiques sont encore vives de nos jours quant aux responsables de cette exécution.

Le père Gaume, un ancien missionnaire au Dahomey, fut témoin de l'exécution. Il fournit le témoignage suivant à la famille de l’une des victimes.

« Après que parvint de l'état-major de la division l'ordre de fusiller les prisonniers, le père Fouquet, aumônier de la division, me confia la mission de les assister dans leurs derniers moments.
Le jeune lieutenant qui commandait le peloton d'exécution n'appartenait pas à mon unité et je ne le connaissais pas. Très affecté par l'ordre reçu, il se demanda s'il ne devait refuser; tourmenté par sa conscience, il voulait faire son possible pour rendre aux hommes leur dernière heure moins pénible et partagea avec eux la communion avant l'exécution. Le peloton d'exécution fut constitué par une autre unité et les douze hommes furent conduits à Karlstein. L'un des prisonniers refusa l'assistance de l'Église, trois autres déclarèrent n'avoir pas de dernier message à transmettre à leur famille. Parmi les autres il y en eut au moins un qui demanda à sa famille de pardonner au peloton d’exécution.
L'exécution se fit en trois étapes de quatre hommes à chaque fois. Tous refusèrent de se laisser bander les yeux et moururent en criant "vive la France"; parmi les derniers se trouvaient le lieutenant Briffaut et le grenadier W-SS Pavras. Selon les ordres reçus, je laissai les cadavres sur le sol et me tournai vers des soldats américains allongés à proximité et leur ordonnai d'enterrer les morts, ce qu'ils firent quelques jours plus tard ».

Le témoignage suivant fut fait par le père Fouquet, l'ancien aumônier de la 2e DB :

« L'ordre de l'exécution fut donné à l'état-major de la division par un officier dont j'ignore le nom suite à un coup de téléphone avec le général Leclerc. Les membres de la "Charlemagne" ayant eu une attitude particulièrement arrogante envers un officier qui leur avait reproché d'avoir mis l'uniforme des "boches", ils lui répondirent que celui-ci se sentait lui aussi bien dans l'uniforme des Américains !
Selon le complément d'enquête se trouvaient parmi les douze prisonniers certains qui venaient de l'hôpital; une photo permet d'identifier la fiche d'évacuation qui selon l'usage dans la Wehrmacht était fixée à la boutonnière. Ils s'étaient rendus sans combattre aux Américains qui les enfermèrent avec d'autres prisonniers allemands dans la caserne des chasseurs alpins de Bad Reichenall.
Ayant appris que leurs gardiens devaient être remplacés par des troupes françaises, ils décidèrent de s'évader; ils réussirent en traversant la clôture de la caserne et à se réfugier dans un bois à proximité, mais leur évasion fut découverte et ils furent peu après encerclés par deux compagnies de la 2ème DB et ramenés sous bonne escorte l'après-midi. Le 8 mai ils furent transportés par camion à Karlstein, c'est-à-dire sur la route qui mène à Kugelbach. Quand ils surent qu'on s'apprêtait à leur tirer dans le dos, ils protestèrent énergiquement. Ils eurent le droit de se mettre debout et face au peloton d'exécution. Les cadavres restèrent effectivement sur place et ne furent enterrés que trois jours plus tard par des soldats américains. Un prêtre militaire américain était présent à cette occasion et bénit les morts. Aussitôt on planta sur les tombes des croix de bois avec les noms des fusillés. Ces noms disparurent par la suite ».

Des habitants d'une ferme se trouvant à proximité se souviennent encore bien des années plus tard de l'événement sans pouvoir citer de fait précis. Quand ils remarquèrent les préparatifs, ils se cachèrent par peur d'éventuelles représailles.

Suites de cette affaire

Plaque apposée sur la stèle funéraire, aujourd'hui détruite, en clairière de Kugelbach
Entre-temps, le 6 décembre 1948, sur la demande de la famille d'une des victimes, une nouvelle enquête fut lancée. Mais elle n'apporta pas de nouvelle lumière sur l'arrestation et l'interrogatoire des tués ni sur les circonstances de leur mort. Finalement on procéda le 2 juin 1949 à l'exhumation des cadavres dans la clairière de Karlstein. Onze furent inhumés dans le cimetière communal de St Zeno à Bad Reichenall et bénis par un prêtre catholique. La sépulture commune se trouve aujourd'hui encore là-bas dans le groupe 11, rangée 3, n°81 et 82.

Un récent ouvrage de J.-C. Notin (Leclerc, Perrin, 2005) relance la polémique en émettant l’hypothèse que Leclerc, suite à la très célèbre réplique lancée par un W-SS à qui il demandait s’il n’avait pas honte de porter un uniforme allemand "Et vous ! Vous portez bien un uniforme américain", aurait simplement demandé à ses officiers "Débarrassez-moi d’eux", voulant dire par là "évacuez-les vers l’arrière", et que son ordre aurait été mal interprété par un officier. Cette tentative de blanchiment de Leclerc semble peu probable [1] : un acte grave comme l’exécution de 12 prisonniers de guerre, sans jugement, ne peut être l’initiative d’un subalterne d’autant plus que la guerre était finie et que cet officier ne se trouvait donc pas dans une situation d’urgence sous le feu de l’ennemi. La 2e DB était une unité régulière de l’Armée Française, censée être structurée et disciplinée, et, pour exécuter un tel ordre, il fallait qu’il vienne du QG.

Leurs livrets individuels (Soldbücher) ayant vraisemblablement été retirés aux 12 hommes au moment de leur capture, ne furent dans un premier temps identifiés que quatre soldats (dont 3 officiers), puis 2 autres :

  • SS-Obersturmführer Serge Krotoff, né le 11.10.1911 en Russie et membre de la communauté « anti-bolchévique » des Russes Blancs exilés en France. Officier vétéran de la marine marchande française, il commandait la compagnie anti-char du Bataillon léger de la Charlemagne.
  • SS-Untersturmführer Paul Briffaut, né le 08.08.1918 à Nice, officier de la LVF, démobilisé de la Brigade Charlemagne en décembre 1944 suite à des blessures, après avoir commandé la compagnie de canon du W-Gren Rgt der SS 58.
  • SS-Untersturmführer Robert Doffat, 37 ans, autrefois vétéran du 3ème Bataillon de la LVF, qui avait été assigné à l’état-major du groupe d’artillerie divisionnaire.
  • SS-Grenadier Jean Robert, né le 01.02.1915 à Nantes, issu de la LVF.
  • SS-Grenadier Raymond Payras, 22 ans, de Touget (Gers).
  • SS-Mann Jacques Ponnau (grade exact inconnu), il fut identifié en 1979, à partir d'une photo des victimes de Karlstein prise avant leur assassinat.

Les six autres sont restés jusqu’à maintenant inconnus.

Stèle funéraire

La stèle funéraire avant le rasage du lieu
Idem
Un monument avait été érigé sur le lieu de l'exécution, dans la clairière du Kugelbach à Karlstein, à l'initiative d'une association anciens combattants allemands (HIAG). Ils avaient eu toutes les autorisations pour ce faire.

Tous les ans, au mois de mai, avait lieu une commémoration où beaucoup de vétérans français et allemands étaient présents. Même en dehors de cette période, ce lieu était souvent visité. Depuis quelques années, on constatait une diminution naturelle de vétérans et inversement une augmentation de la présence de jeunes (Français, Allemands, Autrichiens, Italiens...).

Dans son édition du 9 novembre 2007, Rivarol signale que le monument établi sur le lieu même de leur exécution a été détruit par les autorités bavaroises (autrement dit la CSU, parti chrétien et "de droite") au prétexte que les commémorations étaient devenues des "manifestations politiques d'extrême droite". Selon certaines sources, cependant, l'administration bavaroise aurait fait démonter proprement le monument et l'aurait remis aux vétérans en mai 2008. La plaque commémorative a été transférée près de la tombe commune.

Notes

  1. D'autre part, la biographie de M. Notin donne un éclairage non négligeable sur la personnalité du futur maréchal : homme rude, Leclerc va de l’avant sans trop se soucier de la casse. En septembre 1944, une formation de la 2e DB établit une tête de pont en déplorant 5 tués et 20 blessés. En revanche, les Allemands perdent 5 chars et... 200 hommes. L’auteur ne nous dit pas si ce chiffre comprend des prisonniers. De même, lors de l’attaque de Dompaire, les Allemands ont eu entre 300 et 400 tués pour seulement 44 tués français. Cette disproportion entre les pertes des attaquants et des défenseurs est peu crédible et peut susciter de légitimes interrogations. Des événements semblables auraient eu lieu au Bourget et, surtout, à Andelot. Il est dommage que l’auteur n’ait pas enquêté sur ces tragédies qui pourraient ternir la réputation de cette unité. À Strasbourg, Leclerc n’hésite pas à proclamer qu’il va fusiller des otages civils pour chaque soldat français tué! Heureusement, il est rappelé à l’ordre par le commandement américain qui lui enjoint de respecter le droit international. Mis sous les ordres du général de Lattre, il trépigne de colère et il propose à De Gaulle de se charger du maintien de l’ordre en France pour échapper à cette subordination! Il est envoyé en France et participe à la résorption des poches de l’Atlantique avant de repartir bride abattue en Allemagne pour se joindre à la ruée finale.


Bibliographie

Textes à l'appui

►8 mai 1945 : un crime de guerre impuni : Bad Reichenhall

Le général Leclerc, face à ses compatriotes revêtus de l'uniforme feldgrau. Dans quelques minutes, ils seront passés par les armes. Leclerc s'adressant à un des prisonniers demanda comment il avait pu endosser l'uniforme allemand. L'autre lui fit remarquer qu'il portait aussi un uniforme étranger (américain en l'occurence).
Les soldats français avant leur exécution
Le 8 mai 1945, la guerre est terminée en Europe. L’Allemagne à genoux est terrassée par les deux forces alliées. Contre les lois de la guerre, contre les lois de l’honneur, le général Leclerc fera fusiller ce jour douze volontaires français partis combattre le bolchevisme. Les douze hommes s’étaient rendus sans résistance. Ils seront assassinés sans jugement. Voici le récit de ce crime de guerre (appelé aussi massacre de Karlstein) par Jean Mabire.


Dans les premiers jours du mois de mai 1945, une douzaine de SS français se rendent sans combat aux troupes américaines. Certains appartiennent au régiment Hersche, comme l'Ostuf Krotoff. D'autres sortent des hôpitaux, comme en témoigne la fiche d'évacuation qu'ils portent sur leur uniforme. Le lieutenant Briffault, un ancien de la LVF, n'a pas servi dans la Waffen SS et s'est retiré avec l'état-major du PPF, sur les bords du lac de Constance.

Les Américains internent les Français avec des prisonniers allemands dans la caserne des chasseurs de montagne de Bad Reichenhall. Le 6 mai 1945, des éléments de la 2e division blindée du général Leclerc, poursuivant leur avance en Bavière, occupent la petite ville. En apprenant que leurs gardiens vont être relevés par des gaullistes, les SS français décident de s'évader. Ils réussissent à franchir la clôture de la caserne; et parviennent dans un petit bois qui se trouve à proximité. Mais leur fuite est rapidement découverte. Ils sont encerclés par deux compagnies de la 2e DB et placés sous surveillance. Contrairement à ce qui a été longtemps affirmé, le général Leclerc vint s'entretenir en personne avec eux, comme en témoignent les photographies prises par un correspondant de guerre.

Comme il leur reproche d'avoir revêtu l'uniforme allemand, les prisonniers rétorquent qu'il porte lui-même un uniforme américain. Le général Leclerc, devant cette « attitude insolente », décide de faire fusiller les douze SS français.

Il n'y aura aucun jugement d'un tribunal militaire, même improvisé. L'exécution ne doit laisser aucune trace et certains des fusillés seront même recherchés plus tard par les autorités judiciaires... Le général Leclerc accordera seulement aux condamnés l'assistance d'un prêtre catholique.

L'exécution aura lieu, par trois groupes de quatre hommes, le 8 mai 1945, le jour même de la fin de la guerre, alors que les combats ont partout cessé en Allemagne.

Dans l'après-midi, les douze prisonniers sont conduits en camion jusqu'à Karlstein, ou plus exactement au lieu-dit Ruglbach ou Kugelbach. L'une des victimes a soif mais on refuse de lui donner une goutte d'eau. Lorsqu'il est annoncé qu'on les fusillera en leur tirant dans le dos, les prisonniers protestent violemment et demandent le droit de se tenir en face.

Le père Maxime Gaume, ancien missionnaire au Dahomey et aumônier dans la division Leclerc, est le seul témoin actuellement connu de l'exécution. Son témoignage a été communiqué aux familles des victimes identifiées et reproduit dans le numéro spécial de la revue Historia consacré à la SS internationale :

« Après que la décision eut été prise à l'état-major de la division de fusiller les prisonniers sans jugement, le père Fouquet, aumônier divisionnaire, me donna l'ordre d'assister ceux-ci dans leurs derniers moments. Le jeune lieutenant qui reçut l'ordre de commander le peloton d'exécution n'appartenait d'ailleurs pas à mon unité et était complètement affolé d'avoir à exécuter un pareil ordre, se demandant même s'il n'allait pas refuser d'obéir. Il résolut alors de faire au moins tout ce qui était en son pouvoir pour adoucir les derniers instants des victimes - et communia même avec eux avant l'exécution. Un seul refusa les secours de la religion ; trois d'entre eux déclarèrent n'avoir aucun message à faire transmettre à leur famille. La fusillade se fit en trois fois : par groupe de quatre, de sorte que les derniers virent tomber leurs camarades sous leurs yeux. Tous refusèrent d'avoir les yeux bandés et tombèrent bravement aux cris de « Vive la France !». Conformément aux instructions reçues, je laissai les corps sur place. Les corps demeureront sur le terrain et seront enterrés seulement trois jours plus tard par des soldats américains. C'est alors que les noms des fusillés sont inscrits sur des croix de bois qui disparaîtront par la suite. »

Les habitants d'une ferme située à proximité se rappellent très bien de l'affaire mais ils ne pourront donner aucun renseignement précis : ils avaient bien compris ce qui se passait lorsqu'ils remarquèrent les préparatifs, mais ils se cachèrent ensuite, ne voulant pas être témoins d'une affaire dont ils redoutaient les suites désagréables.

Le 6 décembre 1948, une enquête est cependant entreprise, à la demande de la famille d'un des fusillés. Mais elle ne donne encore aucune précision en ce qui concerne la capture et l'attitude des victimes, ainsi que les circonstances de leur mort. Enfin, le 2 juin 1949, on exhumera les cadavres de la clairière de Karlstein. Ils seront alors placés dans le cimetière communal de Sankt Zeno, à Bad Reichenhall. La tombe commune se trouve encore là aujourd'hui, exactement dans « Gruppe 11, Reihe (rangée) 3, n° 81 et 82 ».



►Fusillés sans jugement

L'article de la revue Historia qui présenta pour la première fois au grand public cette affaire.
Douze SS français, faits prisonniers par la 2e DB, seront fusillés sans jugement, le 8 mai 1945, jour même de la capitulation allemande et de la fin des combats. Le général Leclerc a tenu à s'entretenir lui-même avec les hommes qu'il va faire exécuter quelques heures plus tard et dont il se plaindra de « l'attitude insolente ». Parmi ces douze fusillés, seuls trois officiers ont été identifiés : Obersturmführer Krotoff, ancien officier de marine marchande d'origine russe, chef de la compagnie PAK du bataillon lourd en Poméranie ; lieutenant Briffault, engagé à la LVF en 1943, blessé sur le front de l'Est et démobilisé à la fin de l'année 1944 sans avoir été muté à la Waffen SS ; Untersturmführer Daffas, ancien adjudant-chef du 3e bataillon de la LVF, et attaché ensuite à l'état major du régiment 58 de la Division Charlemagne.


Le 7 mai 1945, jour de la signature à Reims de la capitulation allemande, la 2e DB du général Leclerc prit à Bad Reichenhall et dans les bourgs environnant la relève d'unités américaines. Le lendemain, vers 17 heures, des feux de salves crépitèrent du côté de Karlstein. Exercice de tir ? Fuyards allemands tentant d'échapper à la capture ? Un rumeur se répandit et circula bientôt à Bad Reichenhall. Des Français portant l'uniforme allemand auraient été fusillés par des soldats de la 2e DB. Ces bruits se confirmèrent. Douze cadavres gisaient dans une clairière, près de Karlstein au lieu-dit Kugelbach. Ils y restèrent trois jours puis furent enterrés sur place par des Américains cantonnés dans les environs.

Exhumés le 2 juin 1949, ils furent transférés au cimetière municipal Saint-Zeno de Bad Reichenhall où ils reposent aujourd'hui dans la tombe 81-82, groupe 11, troisième rangée. On ne put identifier avec certitude que quatre victimes : le sous-lieutenant Briffault, né à Hanoï le 8 août 1918, domicilié à Nice. Il appartenait à la Wehrmacht. Le lieutenant Serge Krotoff, qui avait commandé une compagnie lourde de la Sturmbrigade Frankreich. L'adjudant-chef ou sous-lieutenant Doffat, du 58e régiment de la SS Charlemagne et le SS Grenadier Raymond Payras, passé du STO à la Charlemagne.

Ces douze hommes provenaient en majorité de la SS. D'après ce qu'on a pu savoir la plupart d'entre eux étaient des convalescents. Ils avaient tout récemment quitté l'hôpital et s'étaient rendus aux Américains. Enfermés à la caserne des chasseurs de montagne de Bad Reichenhall, ils semblent s'être évadés à l'annonce de la relève des Américains par des troupes gaullistes. Quelques heures après, deux compagnies de la 2e DB les retrouvèrent et les ramenèrent à Bad Reichenhall. C'est alors sans aucun doute qu'ils furent mis en présence du général Leclerc. Il communie avec les victimes avant de commander le feu.

Selon les déclarations embarrassées du père Fouquet, faites longtemps après à une des familles, les SS français se seraient montrés arrogants. À un officier qui leur reprochait d'avoir endossé l'uniforme "boche", l'un d'eux aurait rétorqué : « Vous portez bien l'uniforme américain ! »

La suite a été rapportée par le père Maxime Gaume, servant à la 2e DB, seul témoin oculaire connu de l'exécution. Il avait été désigné pour assister les condamnés. Neuf des victimes lui remirent avant de mourir des lettres pour leur famille. Le père Gaume put les transmettre en janvier et février 1946. Il donna en particulier à Mme Briffault deux petites photos où l'on voyait les douze Français sur les lieux de l'exécution. L'une des familles sollicite son témoignage dans le but de faire établir un acte de décès. Voici sa déclaration. Elle nous paraît digne de foi :

« Après que la décision eut été prise à l'état-major de la division de fusiller les prisonniers sans jugement, le père Fouquet, aumônier divisionnaire, me donna l'ordre d'assister ceux-ci dans leurs derniers moments. Le jeune lieutenant qui reçut l'ordre de commander le peloton d'exécution n'appartenait d'ailleurs pas à mon unité et était complètement affolé d'avoir à exécuter un pareil ordre, se demandant même s'il n'allait pas refuser d'obéir. Il résolut alors de faire au moins tout ce qui était en son pouvoir pour adoucir les derniers instants des victimes et communia même avec eux avant l'exécution. Les onze hommes avaient été amenés en camion de Bad Reichenhall où se trouvait l'état-major de la 2e DB, jusqu'à Karlstein. Un seul refusa les secours de la religion ; trois d'entre eux déclarèrent n'avoir aucun message à faire transmettre à leur famille. La fusillade se fit en trois fois : par groupe de quatre, de sorte que les derniers virent tomber leurs camarades sous leurs yeux. Tous refusèrent d'avoir les yeux bandés et tombèrent bravement aux cris de "Vive la France !". Parmi les quatre derniers se trouvaient le lieutenant Briffaut et, probablement le soldat Payras. Conformément aux instructions reçues, je laissai les corps sur place, mais je m'adressai à des soldats américains cantonnés dans les environs, leur recommandant d'enterrer les corps, ce qui fut fait quelques jours plus tard. »

Qui avait donné l'ordre ? Le père Fouquet aurait déclaré à une des familles que la décision semblait avoir été prise par un officier de l'état-major de la 2e DB à l'issue d'une conversation avec le général Leclerc.


  • Source : X.R., Historia HS n°32, 1973.

►Un témoignage

Concernant l’affaire de Bad-Reichenhall, j’aimerais apporter quelques éléments.

J’ai enquêté sur le sujet. Un membre de ma famille paternelle ayant fait partie des fusillés. Grâce à cela, j’ai pu avoir la confiance d’anciens de la Division Charlemagne ainsi que d’anciens de la 2e DB. J’ai donc obtenu directement ou indirectement des témoignages oraux et écrits d’un ancien chef de section, d’une sentinelle du PC du Gal Leclerc, d’un aumônier de la 2e DB, par exemple.

Les Français portant l’uniforme de la Waffen SS, et aussi l’un d’eux, de lieutenant de la Werhmacht, ont été fusillés le 8 mai 1945 alors que l’Armistice avait été signé le 7 à Reims. De plus, les Américains avaient donné l’ordre de cessez-le-feu le 4 mai suite à la capitulation du corps d’armée allemand de la région. La 2e DB avait été prévenue expressément de cela. (Archives US)

Contrairement à ce qui a été relaté, les 12 Français se sont livrés le matin du 8 mai à l’armée américaine, qui leur a demandé de se présenter au PC avancé du Gal Leclerc qui se tenait dans une villa à la sortie de Bad-Reichenhall. Il n’y a donc pas eu de course poursuite.

Une sentinelle du PC les a vus arriver. Il a cru qu’il s’agissait d’Allemands. Ils ont été présentés au Général Leclerc qui s’est entretenu avec eux. 5 photos ont été prises par le reporter de la 2e DB, Henri Malin. Ces clichés se trouvent à l’ECPAD au Fort d’Ivry. On peut voir sur ces photos que les volontaires de la « Charlemagne » se tiennent au garde-à-vous face à Leclerc. Ils se seraient bien tenus, contrairement à ce qui est dit sur leur attitude insolente. Confirmé par la même sentinelle citée ci-dessus.

À 17 h, ils sont amenés dans les bois proches, au lieu dit Kugelbach. Là, il leur est signifié par le chef de la 4e compagnie du I/RMT, le lieutenant Ferrano, qu’ils vont être fusillés. Les officiers du groupe de la « Charlemagne » (lieutenant Briffaut, Krotoff) protestent violemment, ils invoquent le droit de la guerre, le droit politique, le droit pénal… Un aumônier, le Père Gaume, écrira que l’un d’eux aura un instant de défaillance avant de tomber.

Ils seront fusillés par groupe de quatre par un peloton de 12 hommes de la 4e compagnie commandé successivement par un des quatre chefs de section de cette compagnie. L’un d’eux (futur colonel) est ébranlé, il témoignera par écrit après la guerre auprès d’un ancien de la Division Charlemagne qui a enquêté dans les années 70/80.

Les corps sont laissés sur place, sur ordre (de qui ?). La 2e DB évacue le soir même la région qui est zone d’occupation américaine. J.-C. Notin laisse entendre qu’ils ont été mis à la porte par les Américains.

Les identités des 12 n’ont pas été relevées. Il semble sûr que la Prévôté de la Division ne soit pas dans le coup. Plus tard, le Père Gaume, censé s’occuper des identités, d’après le chef de section, écrit qu’il ne sait pas.

Les corps seront enterrés 3 jours plus tard, sur place, dans les bois, dans une fosse commune, par les Américains avec la présence d’un « Chaplin ». Sur le fait que le Père Gaume n’a pas exigé du lieutenant Ferrano une inhumation, il répondra qu’il était d’abord un militaire avant d’être un aumônier.

Les corps seront exhumés en juin 1948 et transférés au cimetière municipal de Bad Reichenhall. Une tentative d’identification par les autorités n’aboutira qu’à 4 noms sûrs (confirmé plus tard par les photos du photographe H. Malin).

À ce jour, malgré des recherches et démarches tous azimuts, il n’a pas été possible de déterminer les noms des 8 autres hommes. De plus, à ma connaissance, au moins 1 des noms connus n’a toujours pas de notification de décès à l’État Civil. Il (ils sont) est considéré comme disparu.

Il n’a pas été possible de savoir qui a été le donneur d’ordre. Le père Gaume écrit que la décision a été prise par un conseil d’officiers, Leclerc aurait couvert ensuite. Ce qui est plausible aussi.