Russell Kirk
Russell Kirk, né à Plymouth, Michigan, le 19 octobre 1918 et mort à Mecosta, Michigan, le 29 avril 1994, est un théoricien politique, écrivain, historien, moraliste et critique américain.
Homme de lettres, il est connu pour son influence majeure sur le conservatisme américain du xxe siècle. Son œuvre principale, The Conservative Mind: From Burke To Eliot (1953) façonna le mouvement conservateur américain d'après-guerre en parcourant le développement de la pensée conservatrice dans la tradition anglophone, en particulier les idées d'Edmund Burke. Cette œuvre est considérée comme l'un des plus importants textes de la pensée conservatrice du xxe siècle.
Russell Kirk est le premier à se positionner comme explicitement conservateur et à être reconnu comme tel par l’établissement « libéral ». En se référant à Edmund Burke, le critique de la révolution française de 1789, perçue comme rupture de la Tradition, Kirk met l’accent sur l’origine « conservatrice » de la révolution américaine. Dans ses écrits, Kirk citait, en les comparant à Thomas Jefferson, les pères fondateurs « conservateurs », tels John Adams et les auteurs des « Federalist Papers », se référait également aux critiques européens de la révolution comme Burke ou Tocqueville. Kirk se posait également comme un conservateur écologiste, pratiquant la critique de la culture dominante, ce qui fit de lui une exception parmi les conservateurs américains, optimistes et orientés vers le futur.
Sommaire
Biographie
Thèses
Une distinction fondamentale entre Révolution française et Révolution américaine
En 1953, Kirk fait paraître The Conservative Mind. From Burke to Eliot.Avec ce livre ambitieux, il entend retracer la généalogie d’un conservatisme spécifique, proprement anglo-américain, dont il faut à ses yeux refonder la légitimité. Il s’agit de faire remonter à la claire conscience de ceux qui en sont les porteurs la mentalité conservatrice, de dire en quoi elle consiste vraiment et ce qu’elle implique. Pour Kirk, la Révolution américaine est profondément différente de la Révolution française : quand la seconde est millénariste et idéologique, la première est fondatrice, sans rupture avec le passé, et traduit une forme d’attachement traditionaliste à la liberté, par opposition à la passion de l’égalité de la Révolution française. Selon Kirk, le conservatisme anglo-américain repose sur les six « canons » (le mot est de lui) ou piliers suivants : croyance en un ordre transcendant, fondé sur la tradition, la révélation divine ou la loi naturelle ; amour « de la variété luxuriante et du mystère de la vie traditionnelle », donc, par extension, du pluralisme social ; conviction qu’une société civilisée réclame des classes, ordres et distinctions, donc qu’elle suppose le sens de la hiérarchie ; conviction que propriété privée et liberté sont étroitement liées, la première étant vue comme un prolongement de la personne ; confiance dans les normes, coutumes et conventions éprouvées, ce qui va jusqu’à la défense de la valeur sociale des préjugés (comme pour Burke, Maistre et toute la pensée contre-révolutionnaire) ; enfin, reconnaissance du fait que le changement, nécessaire et indispensable, n’est pas la réforme, encore moins la révolution, ce qui entraîne le respect de la vertu politique de prudence[1].
Les six « canons » du conservatisme
Selon Kirk le conservatisme peut se définir suivant six principes :
1. La croyance en un ordre transcendant, que Kirk décrivit comme basé sur la tradition, la révélation divine ou la loi naturelle ;
2. Une inclination pour la « variété et le mystère » de l'existence humaine ;
3. La conviction que la société a besoin d'ordres et de classes qui prononcent les « distinctions naturelles » ;
4. La croyance que la propriété privée et la liberté sont étroitement liées ;
5. La foi dans les coutumes, les conventions et les prescriptions ;
6. La reconnaissance que l'innovation doit être liée aux traditions et coutumes existantes, ce qui entraîne le respect de la valeur politique de prudence.
Publications
Ouvrages politiques et essais de critique
- John Randolph of Roanoke: A Study in American Politics (1951)
- The Conservative Mind, originally subtitled "From Burke to Santayana" and later editions "From Burke to Eliot" (1953)
- A Program for Conservatives (1954)
- St. Andrews (1954)
- Academic Freedom: An Essay in Definition (1955)
- Beyond the Dreams of Avarice: Essays of a Social Critic (1956)
- The American Cause (1957)
- The Library of Conservative Thought 30 Vols. (edited, 1963–1993)
- Confessions of a Bohemian Tory (1963)
- The Political Principles of Robert A. Taft, avec James McClellan (1967)
- Edmund Burke: A Genius Reconsidered (1967)
- Enemies of the Permanent Things: Observations of Abnormity in Literature and Politics (1969)
- Eliot and His Age: T. S. Eliot’s Moral Imagination in the Twentieth Century|Eliot and His Age: T. S. Eliot's Moral Imagination in the Twentieth Century (1971)
- The Roots of American Order (1974)
- Decadence and Renewal in the Higher Learning (1978)
- Libertarians: the Chirping Sectaries (1981)
- The Portable Conservative Reader (1982)
- The Wise Men Know What Wicked Things Are Written on the Sky (1987)
- Economics: Work and Prosperity (1989)
- America's British Culture (1993)
- The Politics of Prudence (1993)
- The Sword of Imagination: Memoirs of a Half-Century of Literary Conflict (1995)
- Redeeming the Time (1996)
- Rights and Duties: Reflections on Our Conservative Constitution (1997)
- The Essential Russell Kirk (2007)
Oeuvres de fiction
Bibliographie
- Philippe Baillet, « Radicalisation du conservatisme et émergence de la droite “racialiste” aux États-Unis », in : Pour la contre-révolution blanche. Portraits fidèles et lectures sans entraves, Akribeia, Saint-Genis-Laval, 2010, p. 87-108.
Notes et références
- ↑ Philippe Baillet,« Le mouvement nationaliste blanc aux États-Unis — Première partie : Les origines (1945-1965) », in Écrits de Paris, n° 750, février 2012]