Néo-conservatisme

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Le néo-conservatisme est un courant politique et un ensemble de lobbies nord-américains. Il est caractérisé par un interventionnisme militaire, un soutien inconditionnel à l'Etat d'Israël et la promotion des valeurs libérales et multiculturalistes dans le monde. On le définit souvent comme un « néowilsonisme casqué-botté se fixant pour objectif d’apporter la démocratie à la Terre entière » et qui n'aurait de conservateur que le nom. Les véritables conservateurs, opposés à l'influence du néo-conservatisme, sont par antinomie surnommés « paléo-conservateurs ».

Les néoconservateurs sont un « groupe de pression qui a pris le contrôle du parti républicain à partir des années 70, en a expulsé les conservateurs classiques et qui ont imposé leurs visions économiques (libérales), géopolitiques (militariste) et sociales (multiculturelles) alors que le conservatisme américain originel est avant tout un anti-étatisme avec toutes les conséquences que cela implique (refus des grands travaux fédéraux, refus du multiculturalisme imposé par Washington et refus des aventures militaires) »[1].

Histoire

Pour comprendre le néo-conservatisme , il faut remonter jusqu'aux années 1960 , époque à laquelle on voit de jeunes intellectuels américains se rapprocher progressivement de la droite, alors représentée par la National Review, et de spécialistes des relations stratégiques comme Albert Wohlstetter. Venant souvent de la gauche, ils restent attachés au New Deal roooseveltien, mais critiquent le libéralisme de la "Grande Société ". Ce sont eux qui vont créer des revues comme The Public Interest ou The National Interest. Ils seront rejoints au cours de la décennie suivante par Norman Podhoretz , alors rédacteur en chef de la revue Commentary, qui fut fondée en 1945 par l'American Jewish Committee. Parmi eux, on trouve des essayistes qui ne vont pas tarder à se faire connaitre , comme Nathan Glazer , Irving Kristol, Daniel Patrick Moynihan , Martin Seymour Lipset, Daniel Bell, Michael Novak, James Q. Wilson ou Midge Decter.

Michael Harrington fut le premier à les traiter de "néoconservateurs ", terme à l'origine plutôt péjoratif qui s'imposera dans les années 1970. Le mouvement prend son essor autour de deux revues , The Public lnterest, fondé en 1965 par Irving Kristol et Daniel Bell, et Commentary. Alors que la première génération comprenait surtout des intellectuels new yorkais, la deuxième rassemble plutôt des universitaires ou des activistes politiques démocrates de Washington, qui se considèrent comme les gardiens du "centre vital" théorisé au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale par l'historien Arthur Schlesinger . Ce sont eux qui fondent en 1972 la Coalition for a Democratic Majority et que l'on retrouve en 1976 à la direction du Committee on the Present Danger, qui milite pour une forte augmentation des dépenses militaires . A la même époque , ils soutiennent la campagne présidentielle du sénateur démocrate Henry Scoop Jackson, qui est à La fois un partisan du New Deal et un "faucon" hostile à toute forme de détente vis-à-vis de L'URSS. C'est à cette deuxième génération , déjà particulièrement sensible aux questions internationales , qu'appartiennent des gens comme Richard Perle, Paul Wolfowitz, Elliott Abrams, Carl Gershman , etc . On Les appelle alors parfois les "Jackson Democrats ". Jackson , on le sait , sera finalement battu par Jimmy Carter.

Une nouvelle génération émerge dans les années 1980 , principalement représentée par Paul Kagan, Francis Fukuyama, Douglas Feith, William Kristol (fils d'lrving Kristol), Daniel Pipes , Jeane Kirkpatrick et quelques autres . Là aussi , ce sont les problèmes extérieurs qui retiennent le plus souvent leur attention . Ils contestent la légitimité de l'ONU, défendent inconditionnellement l'Etat d'Israël, et commencent à se rapprocher du camp républicain . Les néoconservateurs vont de fait être très présents autour de Ronald Reagan, lui-même ancien membre du Committee on the Present Danger, qui manifeste alors des sentiments d'hostilité absolue à l"'empire du Mal " soviétique. Richard Perle, Jeane Kirkpatrick, Eugene Rostow, Elliott Abrams, pour ne citer qu'eux, vont faire partie de l'administration Reagan. Un grand nombre de néoconservateurs deviennent alors républicains, quelques-uns d'entre eux, comme Richard Perle, conservant leur affiliation formelle au parti démocrate.

Après Reagan , les néoconservateurs connaissent une traversée du désert, d'autant que la fin de la guerre froide les prive d 'une partie de leurs arguments. Adepte d'une politique internationale plus "réaliste ", George Bush père les tient à l'écart. Mais la montée en puissance du "péril islamiste " ne va pas tarder à les remettre dans la course . A la fin des années 1990 , le néo-conservatisme entre encore dans une nouvelle période . Avec des têtes nouvelles comme Robert Kagan (fils de Paul Kagan), éditeur avec William Kristol de l'hebdomadaire The Weekly Standard, mais aussi Max Boat, Michael Ledeen, Lawrence Kaplan, Charles Krauthammer , on peut considérer qu 'il est désormais passé complètement à droite .

En 1996 , William Kristol et Robert Kagan publient dans la revue Foreign Affairs un essai intitulé "Vers une politique étrangère néoreaganienne ", où ils affirment que "les buts moraux et les intérêts nationaux fondamentaux[de l'Amérique] sont presque toujours en harmonie". L'année suivante voit la création du Project for a New American Century (PNAC), un think-tank étroitement lié à l'American Enterprise lnstitute de Washington, dont William Kristol prend La présidence. L'objectif est clairement affiché : il s'agit de faire du xxIème siècle un "nouveau siècle américain", de consolider Le Leadership des Etats-Unis en empêchant l'émergence dans le monde de toute puissance rivale, de créer un nouvel ordre mondial fondé sur Le consensus moral, de multiplier les interventions militaires en s'appuyant sur des coalitions de circonstance ( "la mission définit la coalition') et non sur les alliances classiques . Parmi les 25 signataires de La charte du PNAC se trouvent plusieurs futurs hauts dirigeants de l'administration Bush fils : Dick Cheney, Ronald Rumsfeld , Paul Wolfowitz, Peter Rodman , Elliott Abrams , Lewis "Scooter " Libby. Richard Perle, James Woolsey, ancien directeur de la CIA, John Bolton , font aussi partie du projet.

Dès l'élection de George W. Bush, en l'an 2000, les néoconservateurs se voient attribuer des postes-clés dans l'administration, où ils bénéficient tout particulièrement de la protection du vice-président, Dick Cheney . C'est ce qui va leur permettre de s'imposer par rapport aux représentants de la droite chrétienne , évangélique et morale, eux aussi très présents à La Maison-Blanche, mais aussi de l'aile "réaliste " du parti républicain, représentée par Colin Powell ou George Bush père. Leur credo est l'interventionnisme . Les Etats-Unis doivent, selon eux, être "reconnus comme la nation-phare des droits de l'homme ". S 'appuyant sur leur propre histoire, ils doivent "exporter la démocratie et la liberté" partout dans le monde par le moyen du "hard power ". L'idée que l'Amérique , devenue la seule grande puissance mondiale depuis l'effondrement du système soviétique, doit s'occuper de tous les grands problèmes de La planète , va très vite prendre des allures de doctrine officielle (ce qui aura pour effet marginal de déclencher dans Le monde une vague d'anti-américanisme sans précédent.

Pour résumer, on peut donc dire que le néo-conservatisme est de toute évidence une idéologie néo-impérialiste , mais avec des particularités propres qui interdisent de le confondre avec d'autres tendances du même genre . Il se distingue nettement, par exemple, de l'impérialisme de l'école "réaliste" qui , de Hans Morgenthau à Richard Kissinger , n'a jamais hésité à composer avec les dictatures , et même à en instaurer . Les néoconservateurs reprennent l'idéalisme moral du président Wilson, mais en y ajoutant une composante militaire accentuée , d'où 'expression de "wilsonisme botté" employée par Pierre Hassner . Ils se distinguent par ailleurs nettement des "paléoconservateurs" , volontiers isolationnistes, et aussi des libertariens, qui sont généralement hostiles aux aventures militaires (même s'il y a aussi des "faucons libertariens ", comme Tim Starr , Kevin Bjornson , Bob Hunt ou Randall Herrst)[2].

Bibliographie

  • Kevin B. MacDonald, Le Néoconservatisme: un mouvement juif, préface de Philippe Baillet, trad. Michel Courtois, Pierre Marteau éditeur, Milan, 2013,96 p.
  • Nicolas Kessler, Le Conservatisme américain, Presse universitaire de France, coll. Que sais-je?, Paris, 1998,
  • Justin Vaïsse, Histoire du néoconservatisme aux États-Unis. Le triomphe de l’idéologie, Odile Jacob, Paris, 2008.

Notes et références

  1. Entretien avec Paul Gottfried, Front populaire, 31 octobre 2020.
  2. Entretien avec Alain de Benoist, « Qu'est-ce que le néoconservatisme ?  », in: Réfléchir et agir, no 28, hiver 2008, p. 14-18.