La 317e Section (film)
La 317e Section est un film franco-espagnol réalisé par Pierre Schoendoerffer, sorti en 1965, adapté de son propre roman publié en 1963.
Synopsis
Commentaires
Le film vu par Alain de Benoist, qui signait alors Fabrice Laroche :
La guerre. La vraie. Les hommes de la 317e section seront morts au soir de leur retraite. On le sait. Dans le film de Schoendoerfer, pas d'apologie, pas d'apothéose. Des images. La mousson. Retraite. Radios étrangères grésillant dans la jungle. Une colonne dans la guerre d'Indochine, à demi-composée de supplétifs indigènes. La fin des combats quand les postes du Delta tombent les uns après les autres. Silence bruissant. Et la mort: moite, humide, spongieuse, étouffée. Dien-Bien-Phú est tombé. Ni actions ni bagarres exaltantes, dans « la 317e section » : ce serait une erreur de les y aller chercher.
Est-ce un documentaire ? Le seul engagement des armes détonne presque. Rien ici d'Hollywood. Finis les films américains. Ici, la caméra se fait oublier. On a des yeux, un fusil, des jumelles et c'est tout. C'est vrai, et pour cela c'est beau. La vérité. Vous voulez savoir ce que font des hommes qui se battent? Allez voir « la 317e section ». Rien de commun avec la guerre du Pacifique, façon Goldwyn-Mayer. Pas de bons aumôniers ni de vilains Japonais. La mer de Corail. Une fille dans chaque port. Cinémascope. Marines en chambrée, jungle en studio, la garde meurt mais ne se rend pas : zéro. Ni trompettes, ni renfort de dernière minute. Nulle concession au spectateur. Pas de mythes, des hommes. La guerre vraie, en face. La guerre, quoi !
Pierre Schoendoerffer a longtemps porté son film. C'est une guerre qu'il avait dans la peau depuis qu'il l'avait faite, comme une fièvre inguérissable. Il l'a tourné comme on forme un commando. Avec des vraies balles, des vrais combats, de vraies marches. Les acteurs devaient s'en sortir, et pas seulement à l'écran. Schoendoerffer a été hospitalisé un mois à Pnom-Penh. Pluie et mousson. Paludisme. Schoendoerfferer a revécu son aventure. Il lui a fallu 1O ans. Une date dans l'histoire du cinéma. Un Français a fait un film de guerre. Le genre était réservé jusqu'ici à MM Hawks, Fuller Maun & Cº, et ils remplissaient mal leur rôle. Les Français n'ont pas le sens du tragique. C'est ainsi. Le cinéma français manque de vraie puissance, de révolte et de colère. Je ne pense pas que la France fasse jamais « Potemkine » ou « Tchapaiev », Elle a autre chose à apporter. « La 317e section », par exemple. Schoendoerffer a prouvé qu'il y avait autre chose à faire dans notre pays que stéréotyper Fernandel, exporter Gabin, aligner les cocufiages gaulois qui concurrencent les vies édifiantes de la petite sœur Thérèse …
On a pu reprocher à Schoendoerffer de n'avoir pas été plus politique. Son film n'est pas plus politique, au sens étroit, qu'il n'est film d'action. Schoendoerffer reste au plan du comportement. Restons-y. Libre à nous, dans cette aventure de quelques hommes blancs du bout du monde, de trouver une signification politique beaucoup plus grave. La guerre abolit les idées périmées. Impose des valeurs. « La 317e section » montre deux hommes de guerre. Le sous-lieutenant Torrens sort de Coëtquidan. En quelques jours, il grandit moralement, se forge si l'on veut, autant qu'il diminue physiquement. Son caractère évolue, vieillit par à coups. L'adjudant Willsdorf est permanence. Il est né pour se battre et se bat bien. De la guerre de l'adversaire, il dit : « Ils la font bien, les fumiers ! ». Les Français comprennent-ils la guerre ? Willsdorf se sent étranger au milieu d'eux. Pour parler du pays des allocations familiales et du confort Léviatan, il a les mots de Drieu. « Tout chambarde dans le monde, mais ici rien ne bouge », écrivait-il, en examinant les faces veules et les silhouettes voûtées. Du front russe en Indochine, Willsdorf n'a connu que des défaites ; il mourra en Algérie. Voici renaître avec lui le guerrier. Drieu dit aussi : « Il vaut mieux ne pas faire la guerre, mais si on la fait, il faut la faire complètement », Bien, mal, perdent leur sens. La guerre ne souffre pas d'interprétations morales. On vit, donc on se bat[1].
Notes et références
- ↑ Europe-Action, no 29, mai 1965, p. 17.