Bataille d'Amioun

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La bataille d'Amioun est primordiale dans l’histoire du Liban puisqu’elle marque le début de 6 siècles d’autonomie des montagnes libanaises, dans ce qui sera connu comme l’État mardaïte, et qui est le vrai précurseur du Liban moderne.

Les faits

Les Arabes ont envahi la région et se sont arrêtés au Nord devant le plateau anatolien. Au Liban les régions côtières et la vallée de la Békaa sont rapidement tombées, mais les troupes du Calife ont contourné les montagnes de la chaîne du Mont-Liban, si bien que tous les chrétiens qui voulaient poursuivre la résistance se sont réfugiés là-bas. Ils réussiront plus tard à reprendre momentanément le territoire perdu sur la côte et la Békaa.

Les Maronites sont à l’époque un groupe de moines vivant dans la tradition de leur fondateur Saint-Maroun. Ils sont encore principalement présents dans la vallée de l’Oronte (actuellement en Syrie), prolongement au Nord de la vallée de la Békaa, mais commencent déjà à se replier sur le Mont-Liban (c’est à 630 que remonte la construction de la première église maronite dans la vallée de la Qadicha au Nord du Liban, à l’abri des montagnes).

C’est Jean Maroun (appelé Johanna Maron dans le texte ci-dessous), un moine du couvent de Saint-Maroun sur l’Oronte, qui prend la tête du mouvement maronite.

En effet au milieu de ce VIIème siècle, dans une première réaction face à l’invasion arabe, les empereurs byzantins vont tenter d’ériger les montagnes libanaises en bastion avancé de la chrétienté au sein du califat, (d’ailleurs un siècle plus tard un raid de la Résistance Chrétienne sera stoppé in extremis à Baalbeck dans la plaine de la Békaa, soit à moins de cinquante kilomètres de Damas la capitale Ommeyade !)

C’est pourquoi sur ces terres jusque là inhabitées ils encouragent, simultanément à la migration des Maronites, l’installation de peuplades guerrières qui petit à petit deviendront le bras armé de ce mouvement maronite. La plus importantes d’entre elles est constituée par les Mardaïtes, également appelés Jarajima. Il s’agit d’un peuple d’ethnie indo-aryenne originaire d’Iran et présent aussi sur le plateau anatolien, jusque dans les montagnes de l’Amanus au Nord-Ouest de la Syrie, dans la même zone qui vit naître Saint-Maroun. Ce sont donc environ 20 000 de ces soldats qui s’installent au Mont-Liban et y harcèlent les armées du Calife.

Cependant vers la fin de ce VIIème siècle arrive au pouvoir à Byzance un nouvel empereur qui prend le titre de Justinien II. Ce dernier se laisse convaincre par le Calife Ommayade de l’époque ‘Abd-el-Malik de désarmer les Mardaïtes en l’échange d’un lourd tribut annuel que lui verserait le Calife. Ayant conclu le marché alors qu’il n’avait que 16 ans, l’Empereur provoque à Byzance même la colère de son commandement militaire pour qui les montagnes libanaises constituaient le « mur d’airain » de l’Empire. Mais les années suivantes Justinien II se comporte comme un véritable tyran, allant jusqu’à faire assassiner les chefs guerriers des Mardaïtes, et persécute simultanément les Maronites qui refusent d'abandonner leur langue liturgique, le syriaque, dérivée de l’araméen, la langue du Christ, au profit du grec. Il ira même jusqu’à détruire le monastère de Saint Maroun de l’Oronte, qui d’ailleurs ne sera plus jamais reconstruit. Les Mardaïtes décident alors avec toute leur seigneurie guerrière de faire allégeance à Johanna Maron, si bien que ce dernier se retrouve à la tête d’une armée de plusieurs milliers d’hommes. Dans le même temps Johanna Maron va prêter allégeance au vicaire du Christ : le Pape, successeur de Saint-Pierre. Pour cela il transforme le mouvement maronite qui jusque là était de nature essentiellement monastique en véritable Église indépendante dont il devient le premier patriarche. L’Empereur ne peut tolérer cet affront supplémentaire et décide donc avec la bénédiction du Calife d’envoyer une troupe pour exterminer tous les Maronites. En face d’eux Johanna Maron se replie sur le Mont-Liban et y prépare la résistance, coordonnant les religieux maronites et autres chrétiens persécutés avec les guerriers mardaïtes, qui plus tard se fondront tous en un seul peuple : le peuple maronite.

Voilà tous les enjeux de cette bataille dont le récit est présenté ci-dessous : il vient d’un texte rédigé en syriaque par le patriarche Etienne Douaihi (fin du XVIIème siècle) qui a été traduit en latin par Simon-Joseph Essemani puis en arabe par Joseph Debs. L’extrait suivant a été traduit en français par Joseph Khoury dans son ouvrage : « le désordre libanais » paru en 1998 aux éditions l’Harmattan :

«  Justinien II décida d’envoyer son chef d’armée, le général Léonites, pour amener Johanna Maron les mains liées à Constantinople, mais celui-ci s’esquiva en expliquant que le Patriarche était protégé par son peuple et qu’il était impossible de le faire ramener ainsi sans une guerre féroce. Ce général aimait les Maronites qui l’avaient aidé dans sa guerre contre les Arabes. L’empereur destitua Léonites et le jeta en prison et ordonna à Maurice et Mauricien de marcher avec leurs armées jusqu’en Syrie, et annonça que celles-ci partaient en guerre contre les Arabes. Le Patriarche, avisé des intentions de l’empereur, fit appeler son neveu Abraham qui vint à son secours accompagné de douze mille combattants qui transportèrent le Patriarche du monastère de Saint Maron sur l’Oronte jusqu’à Smar Jbeil (montagne libanaise). A la fin du printemps de 694, les armées impériales parvinrent en Syrie. Les soldats attaquèrent d’abord le monastère de Saint-Maron et tuèrent cinq cents de ses moines, pillèrent les villages chalcédoniens sur leur route vers Tripoli, dans les abords de laquelle l’armée impériale installa son campement. Maurice et Mauricien envoyèrent un ultimatum aux Mardaïtes les sommant de se soumettre aux ordres de l’Empereur. La peur s’empara de la population catholique à l’approche de l’ennemi, et elle fut sauvée de leur angoisse par un message parvenu à Semaan le commandant maronite et au patriarche Johanna Maron depuis Constantinople, de la part de Léonites, qui lui annonçait la destitution de Justinien II et le recouvrement de son autorité et lui ordonnait de frapper l’armée envoyée en Syrie comme une armée ennemie. Cette nouvelle redonna aux combattants et aux populations leur ardeur. Ils décidèrent qu’il n’y avait aucun besoin d’attendre que l’ennemi leur tombât dessus et se précipitèrent alors depuis les hautes montagnes, comme les chutes d’eau, et engagèrent le combat contre l’armée de Justinien comme des lions, de sorte que la plupart des soldats ennemis s’enfuirent avant l’engagement, leur ordre de bataille mis en pièces, ils furent alors encerclés par les Maronites par l’arrière et les deux côtés, et subirent une écrasante défaite »

La bataille d’Amioun consacre l’indépendance de l’État mardaïte libanais. On peut même dire que c’est la bataille fondatrice de la Nation libanaise. Cet État au départ étendu sur à peu près tout le territoire du Liban actuel va petit à petit se limiter à la montagne libanaise à cause de l’installation de tribus musulmanes autour de la montagne. Voilà comment commence une période de six siècles où à l’abri de ses montagnes c’est tout un peuple qui résiste, les anciens guerriers mardaïtes constituant le fondement de la paysannerie armée, les anciens moines maronites le fondement du clergé, et les successeurs de Saint Jean Maroun les chefs incontestés.