Louis-Ferdinand Céline

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Céline
Louis-Ferdinand Céline (1894-1961, de son vrai nom Louis-Ferdinand Destouches), ou tout court Céline, est un médecin et écrivain français.


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Biographie

Tout en occupant divers emplois durant l'adolescence, Louis-Ferdinand Destouches suit des études qui le mènent au baccalauréat en 1912, date à laquelle il signe un engagement de trois ans dans l'armée. Grièvement blessé à la tête pendant la Première Guerre mondiale (il est invalide à 75 %), il est muté en Angleterre puis envoyé au Cameroun avant de se rendre à Londres, qui précède son installation à Rennes où il poursuit, pendant six ans, de 1918 à 1924, des études de médecine qui le conduisent, médecin, à travailler pour la S.D.N. (qui apparaît transposée dans une pièce de théâtre, l'Église). Il entreprend alors plusieurs voyages en Afrique et en Amérique du Nord avant de rentrer en France où il exerce la médecine à partir de 1928. En 1932 paraît le Voyage au bout de la nuit (Prix Renaudot) qui connaît un énorme retentissement, et qui est suivi en 1936 de Mort à crédit. Un voyage en Russie en 1936 lui fait rejeter le modèle soviétique que son tempérament de révolté à l'état pur ne peut accepter. Il fait la connaissance d'une danseuse, Lucette Almanzor, qui va devenir sa compagne et sa femme et s'engage comme médecin à bord d'un paquebot, avant de revenir à Paris où il écrit des pamphlets : Bagatelles pour un massacre (1937), l'École des cadavres (1938) et les Beaux Draps (1940), qui, en pleine occupation allemande, peuvent apparaître comme une défense des nazis. Réfugié en 1944 à Berlin, il gagne le Danemark où il est emprisonné à Copenhague, pendant 14 mois, rejeté de tous côtés. Il est interné pour raison de santé début 1947 pour 5 mois, et en sort pour connaître une misère quasi-absolue. Condamné par les tribunaux français, il est amnistié et rentre en France en 1951. Il reprend son travail de médecin à Meudon où il passe les dernières années d'une vie tragique entre sa femme et son chat Bébert, écrivant sans relâche (Féerie pour une autre fois, 1952 ; Normance, 1954 ; D'un Château l'autre, 1957 ; Nord, 1960 et, au moment où il réapparaît sur le devant de la scène littéraire parisienne, Rigodon, qui paraît après sa mort).


Voyage au bout de la nuit

Vignette de Jacques Tardi pour l'édition illustrée du Voyage parue chez Futuropolis/Gallimard en 1988
Roman picaresque, roman d'initiation, Voyage au bout de la nuit, signé Louis-Ferdinand Céline, a été récompensé par le prix Renaudot en 1932. À la suite d'un défilé militaire, Ferdinand Bardamu s'engage dans un régiment. Plongé dans la Grande Guerre, il fait l'expérience de l'horreur et rencontre Robinson, qu'il retrouvera tout au long de ses aventures. Blessé, rapatrié, il vit le conflit depuis l'arrière, partagé entre les conquêtes féminines et les crises de folie. Réformé, il s'embarque pour l'Afrique, travaille dans une compagnie coloniale. Malade, il gagne les États-Unis, rencontre Molly, prostituée au grand cœur à Detroit tandis qu'il est ouvrier à la chaîne. De retour en France, médecin, installé dans un dispensaire de banlieue, il est confronté au tout-venant sordide de la misère, en même temps qu'il rencontre ici et là des êtres sublimes de générosité, de délicatesse infinie, « une gaieté pour l'univers »...

Épopée antimilitariste, anticolonialiste et anticapitaliste, somme de toutes les expériences de l'auteur, le Voyage est peuplé de pauvres hères brinquebalés dans un monde où l'horreur le dispute à l'absurde. Mais au bout de cette nuit, le voyage ne manque ni de drôlerie, ni de personnages fringants, de beautés féminines « en route pour l'infini ». Texte essentiel de la littérature du XXe siècle, il est émaillé d'aphorismes cinglants, dynamité par des expressions familières, argotiques, et un éclatement de la syntaxe qui a fait la réputation de Céline.

Certains ont analysé le Voyage de Céline comme reflet de la "petite bourgeoisie". On sait que cette dernière, si cocardière avant-guerre, voit sa fièvre patriotique redescendre rapidement après-guerre devant une inflation qui anéantit le peu qu'il restait de ses économies. Elle fait le deuil et pas que de ceux tombés dans cette hécatombe, le deuil de se croire au-dessus du panier, elle se sent flouée socialement : le fossé se creuse avec la grande bourgeoisie, les capitaux se concentrent au sein de quelques puissantes banques (on passe à un capitalisme d'actionnaires). La petite bourgeoisie se laisse donc charmer par les radicaux-socialistes (Briand, ...) promettant d'empêcher tout nouveau conflit européen et partage dorénavant avec le prolétariat le sentiment de l'insécurité de son sort. La perte de sa "divine sécurité", c'est le monde de Bardamu sans issue.

Au fond, cette classe sociale n'a pas d'idéologie propre, elle n'a été vraiment ni fasciste, ni marxiste, ni nationale-socialiste, elle n'a eu qu'un sens aigu de ses intérêts et de la nécessité de se défendre pour survivre en tant que petite bourgeoisie. Elle a oscillé entre droite et gauche selon ses craintes de ce qu'elle croyait être le danger immédiat. Quand Céline commencera à être honoré pour son Voyage par les gens de Lettres du Tout-Paris, ceux de gauche surtout, il se sent piégé, capté dans l'orbite de la culture des classes dirigeantes, domestiqué. Il a du remords à l'idée que Louis-Ferdinand Destouches a trahi. Il lance un pavé dans la mare avec un pamphlet antisoviétique, Mea culpa, qui choque seulement l'extrême-gauche; alors il surenchérit, par anticapitalisme, dans la veine boulangiste antisémite d'une certaine littérature populaire qu'il réinvente d'ailleurs, ce qui le coupe aussitôt d'une gauche unanimement antiraciste en ces temps d'ascension de Hitler. Ainsi se sentait-il libre de toute attache, hors jeu social.

Juger que Céline est de la petite bourgeoisie, c'est ne rien dire, ne rien comprendre à ce que veut dire la littérature comme intervention pratique sur le monde. Une œuvre véritable dépasse son auteur et a une vie propre. Le texte-hommage « Céline pilote » de Dubuffet (repris dans L'homme du commun à l'ouvrage) botte en touche toute réduction sociologisante de l'écrivain : celui-ci est révolutionnaire par la forme donnée au roman (« On ne répètera jamais assez que l’art est une affaire de forme et non pas de contenu »); il y réconcilie art et peuple séparés depuis la Renaissance, il n'y a là nulle rébellion affectée, avalisée par l'intelligentsia, se donnant beau jeu de critiquer sans remettre en cause véritablement le bien-fondé des institutions.


« Si vous voulez frapper au cœur la caste sévissante, frappez-la à ses subjonctifs, à son cérémonial de beau langage creux, à ses minauderies d'esthète. Celui qui désamorcera une bonne fois les saintes châsses qu'elle brandit comme des sorciers nègres leurs fétiches - ses grands auteurs, sa Joconde, ses chaises Louis XV, sa belle grammaire, sa langue morte stérilisée, tout son fatras de conserves d'ossements qu'elle fait passer pour art et culture - celui qui réussira à faire entrer dans la tête de la queue du train que le vrai art vivant, le seul, et la vraie création inventive est de son côté et pas du chienlit patronné par les ministères, celui-là sonnera le congé de la caste sévissante. Mais la caste sévissante, vous pouvez compter sur elle pour se défendre. » Jean Dubuffet, ibid.


En littérature comme en politique, la question n'est pas s'il y a quelque chose à sauver dans ce qui a été fait avant nous, ou dans quelle mesure se consacrer à des raccommodages ou des compromis honteux: la question posée est celle du destin, qui exige d'autres contenus, d'autres valeurs. C'est en ce sens que l'intempestivité célinienne, se rapprochant de celle de Nietzsche le philosophe-artiste, ne cesse de déranger. Elle nous apprend qu'art et vie ne sont un qu'au sein d'une "grande politique".

Guerre

Guerre de Céline article de Présent.png

Oeuvres

Romans

  • Voyage au bout de la nuit, Denoël & Steele, 1932.
  • Mort à crédit, Denoël & Steele, Paris, 1936.
  • Guignol's Band, Denoël, Paris, 1944.
  • Casse-pipe, éditions Chambriand, Paris, 1949.
  • Féerie pour une autre fois, Gallimard, Paris, 1952.
  • Normance : Féerie pour une autre fois II, Gallimard, Paris, 1954.
  • D'un château l'autre, Gallimard, Paris, 1957.
  • Nord, Gallimard, Paris, 1960
  • Le Pont de Londres / Guignol's Band II, Gallimard, Paris, 1964.
  • Rigodon, Gallimard, Paris, 1969.
  • Londres, Gallimard, Paris, 2022. (ISBN 9782072983375)
  • Guerre, Gallimard, Paris, 2022. (ISBN 978-2-0729-8322-1)

Pamphlets

  • Mea Culpa, Denoël et Steele, Paris, 1936.
  • Bagatelles pour un massacre, Denoël, Paris, 1937.
  • L'École des cadavres, Denoël, Paris, 1938.
  • Les Beaux Draps, Nouvelles Éditions françaises, Paris, 1941.

Bibliographie

  • Les manuscrits retrouvés. Iconographie commentée. Livret de l'exposition. Galerie Gallimard, Gallimard, Paris, 2022.
  • Pierre Lainé, Céline, coll. « Qui suis-je ? », Éditions Pardès, 2005, 127 p.

Revues

Cité dans :

  • DURAND Pascal et HABRAND Tanguy, Histoire de l’édition en Belgique. XVème - XXIème siècle, Postface d’Yves Winkin, Les impressions nouvelles, Bruxelles, 2018.

Avis sur l'écrivain

  • « Pour moi, le vingtième siècle ne compte jusqu'à présent qu'un novateur, c'est Ferdinand. Et je dirai même qu'un seul écrivain. J'espère que tu n'en seras pas froissé. Il est tellement au-dessus de nous. Qu'il soit torturé et persécuté est normal. C'est affreux d'écrire cela quand on pense que c'est un homme vivant, mais en même temps, à cause de sa grandeur, on ne peut s'empêcher de la considérer en dehors du temps et des contingences qui l'écrasent. Je crois profondément que plus un homme est grand, plus il s'expose à être blessé par tous. La tranquillité n'est que pour les médiocres, ceux dont la tête disparaît dans la foule. Céline voudrait revenir à Paris ou en France, et tu fais tout ce que tu peux pour l'aider, mais dis-toi bien ceci: où qu'il soit, il sera persécuté. Son désir de trouver la paix ailleurs qu'à l'endroit où il est, n'est qu'un rêve. Il ne trouvera la paix nulle part. Il sera persécuté jusqu'à la mort; où qu'il aille. Et il le sait bien. Et il n'y peut rien, ni nous non plus. Nous pouvons seulement proclamer, à chaque occasion, qu'il est le plus grand, et encore en faisant cela nous attirons sur lui les haines décuplées des petits, des médiocres, des châtrés, de tous ceux qui crèvent de haine jalouse dès qu'on leur relève la tête pour leur montrer les sommets. Ils sont la multitude. »
René Barjavel (cité par Céline dans Rigodon, p. 716-717).

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